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31/05/2018 | FRANCE | N°17PA03628

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 mai 2018, 17PA03628


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1610409 du 26 octobre 2017, le tribunal administratif de Melun a re

jeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 nov...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1610409 du 26 octobre 2017, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 novembre 2017, Mme E..., représentée par Me Fellous, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1610409 du 26 octobre 2017 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer sous astreinte une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou à défaut, " salariée ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnait les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai ;

- et les observations de Me Fellous, avocat de Mme E....

1. Considérant que MmeB..., ressortissante marocaine née le 18 avril 1980 et entrée en France selon ses déclarations en janvier 2014, a sollicité le 4 juillet 2016 son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 7 décembre 2016, le préfet du Val-de-Marne a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays à destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans ; que Mme E...relève régulièrement appel du jugement du 26 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration qui s'est substitué à compter du 1er janvier 2016 aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979 invoquée par la requérante : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant qu'après avoir visé les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 313-11 (7°), L. 313-14 et L. 511-1 (3° du I, III) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application, le préfet indique que Mme E...est célibataire, sans enfant, entrée en France à l'âge de trente-quatre ans et ne justifie pas de liens privés et familiaux inscrits dans la durée et la stabilité sur le territoire français ; qu'il en conclut que l'intéressée ne remplit pas les conditions pour obtenir la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il relève par ailleurs que si Mme E...produit une promesse d'embauche en qualité de secrétaire, le caractère récent de son entrée en France ainsi que les documents produits ne sont pas de nature à justifier une ancienneté dans l'emploi pouvant conduire à la régularisation de sa situation par le travail ; qu'il constate que Mme E...ne fait pas état de motifs exceptionnels ou de circonstances humanitaires justifiant l'attribution d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué du 7 décembre 2016 comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

5. Considérant que si Mme E... fait valoir qu'elle s'est mariée le 18 février 2017 avec M. D..., ressortissant français, cette circonstance est postérieure à l'arrêté attaqué et donc sans incidence sur la légalité de celui-ci ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces produites que l'intéressée, domiciliée... ; qu'elle ne se prévaut à cette date d'aucune autre attache privée ou familiale en France, ni d'une insertion sociale ou professionnelle ; que s'il n'est pas contesté que l'intéressée justifie de son entrée en France le 14 janvier 2014 à l'âge de 33 ans et produit de nombreuses pièces médicales couvrant les années 2015, 2016 et 2017, elle ne peut se prévaloir que d'une durée de séjour inférieure à trois ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, dès lors, le préfet du Val-de-Marne a pu, le 7 décembre 2016, refuser de délivrer un titre de séjour à Mme E...sans porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés ;

6. Considérant, en troisième lieu, que Mme E...ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance d'un titre de séjour salarié, dès lors d'une part, qu'elle n'a pas sollicité de titre de séjour sur le fondement de ce texte et que, d'autre part, ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants marocains dont la situation au regard de l'emploi est exclusivement régie par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ; qu'en tout état de cause, il n'est pas contesté que Mme E...ne disposait pas, à la date des décisions attaquées, d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que si elle soutient que sa régularisation au titre du travail aurait dû lui être accordée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, celui-ci n'est pas plus applicable aux ressortissants marocains pour la délivrance du titre de séjour " salarié " ; qu'enfin la circulaire du

28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur se borne à énoncer des orientations générales qui ne peuvent être utilement invoquées pour contester un refus d'admission exceptionnelle au séjour ; qu'au surplus, le contrat à durée indéterminée dont Mme E... se prévaut a été conclu le

5 octobre 2017 seulement, près de dix mois après la décision litigieuse ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que sa requête d'appel, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...HOMAN, et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mai 2018.

Le rapporteur,

A. LEGEAILa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. CALMONLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03628


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03628
Date de la décision : 31/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : FELLOUS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-05-31;17pa03628 ?
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