Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...D...a demandé au Tribunal administratif de Melun, à titre principal, de condamner la commune de Roissy-en-Brie à lui verser la somme de 82 851,36 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'accident dont elle a été victime dans une école maternelle de la commune, ou, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat (ministre de l'éducation nationale) à lui verser la même somme en réparation de ces mêmes préjudices.
Par un jugement n° 1101908 en date du 10 juillet 2017, le Tribunal administratif de Melun, d'une part, a donné acte du désistement de MmeD..., d'autre part, a condamné la commune de Roissy-en-Brie à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne une somme de 61 262,16 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 avril 2014 et de la capitalisation de ces intérêts, ainsi qu'une somme de 1028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, et, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 17PA02982 le 1er septembre 2017, la commune de Roissy-en-Brie, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101908 du 10 juillet 2017 du Tribunal administratif de Melun en tant que, par ce jugement, celui-ci l'a condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 61 262,16 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 avril 2014 et de la capitalisation de ces intérêts, ainsi que la somme de 1028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
2°) de rejeter la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne présentée devant le Tribunal administratif de Melun ;
3°) d'appeler en la cause le lycée Thibaut de Champagne de Provins, le ministre de l'éducation nationale et Mme D...afin qu'il soit fait un partage de responsabilité l'exonérant de sa responsabilité si cette dernière devait être retenue ;
4°) de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne et de toute partie perdante le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
S'agissant de la régularité du jugement attaqué :
- les premiers juges ont omis de statuer sur les conclusions tendant à la désignation d'un expert ;
- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce qu'un partage de responsabilité devait être opéré entre l'Etat, la victime et elle-même si sa responsabilité devait être retenue ;
- les premiers juges ont statué ultra petita en assortissant la somme qu'elle a été condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne de la capitalisation des intérêts, alors que cette dernière n'avait présenté aucune demande en ce sens ;
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors que les premiers juges n'ont pas précisé le fondement juridique sur lequel ils se sont fondés pour retenir sa responsabilité ; ils n'ont pas justifié le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion qu'ils ont retenu ;
- elle n'a pas pu faire valoir ses observations sur l'éventuelle application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
- la minute du jugement n'est pas signée par l'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau ;
S'agissant du bien-fondé du jugement attaqué :
- sa responsabilité ne peut être engagée ; aucune présomption de mauvais entretien d'un bien meuble non scellé à l'ouvrage public ne saurait être appliquée à la personne publique et il appartient à MmeD..., qui est un tiers à l'ouvrage public, de démontrer qu'elle a commis une faute dans l'entretien du mobilier ; les premiers juges ont inversé la charge de la preuve ; la vétusté de la chaise en cause n'est pas démontrée ; la victime ne produit aucun élément en ce sens et ses déclarations sur les circonstances de l'accident ont varié ;
- si sa responsabilité est retenue, un partage de responsabilité doit être opéré ; la responsabilité du lycée Thibaut de Champagne en sa qualité d'employeur de Mme D...qui a été admise par le juge judiciaire doit conduire à une exonération totale de sa responsabilité ; l'Etat a également commis une faute de nature à l'exonérer totalement de sa responsabilité ; il est en effet responsable de la négligence du directeur d'école qui a conduit Mme D...à détourner l'usage de la chaise destinée aux enfants ; il n'a pas informé la commune de la vétusté de la chaise ; la faute commise par MmeD..., qui a détourné l'usage d'une chaise destinée à des enfants de moins de six ans en montant dessus pour attraper un objet, l'exonère totalement de sa responsabilité ;
- le tribunal ne pouvait la condamner à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 61 262,16 euros correspondant aux prestations que cette dernière a engagées pour le compte de MmeD... ; lorsque la responsabilité d'un accident du travail est partagée entre l'employeur et un ou plusieurs tiers, la caisse primaire d'assurance maladie n'est admise à demander aux tiers le remboursement de prestations que pour une somme correspondant à la différence entre le montant total des prestations dues à l'assuré et le montant de la part d'indemnité qu'aurait supportée l'employeur selon les règles du droit commun ; la somme correspondant à cette différence ne peut elle-même être imputée que sur la part de l'indemnité mise à la charge des tiers responsables réparant l'atteinte à l'intégralité physique de la part de la victime ;
- le tribunal n'a pas pris en considération la circonstance que la victime a déjà été indemnisée de l'intégralité de ses préjudices ;
- le juge judiciaire a considéré que le lycée Thibaut de Champagne en sa qualité d'employeur de Mme D...était le seul responsable du dommage que celle-ci avait subi et la commune n'ayant donc jamais été condamnée à indemniser MmeD..., le tribunal ne pouvait pas la condamner à indemniser la caisse primaire d'assurance maladie ;
- le montant total de l'indemnité allouée à Mme D...par la Cour d'appel de Paris est de 57 853,36 euros ; elle ne peut être dès lors condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie une somme supérieure à ce montant ; cette dernière ne pourrait exiger que la somme correspondant à la différence entre le montant des prestations versées à la victime et celui des indemnités mises à la charge de l'employeur soit mis à sa charge ;
- c'est à tort que le tribunal a mis à sa charge la somme de 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; l'arrêté du 10 novembre 2010 prévoit en effet que le montant maximum de l'indemnité forfaitaire est fixé à 980 euros à compter du 1er janvier 2011 ; la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne n'a pas invoqué l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Par un mémoire, enregistré le 8 janvier 2018, Mme B...D..., représentée par MeG..., conclut au rejet de la requête de la commune de Roissy-en-Brie et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge solidaire des parties perdantes sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- elle s'est désistée de sa demande devant le Tribunal administratif de Melun ;
- les conclusions de la commune de Roissy-en-Brie dirigées à son encontre méconnaissent l'autorité de la chose jugée par la Cour d'appel de Paris ;
- subsidiairement, elle n'a commis aucune faute de nature à réduire son indemnisation ; en tout état de cause, seule une faute inexcusable de la victime serait de nature à exonérer l'employeur de sa responsabilité ; elle n'est pas montée sur la chaise contrairement à ce que soutient la commune.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et demande à la Cour, par la voie de l'appel incident :
- de réformer le jugement du 10 juillet 2017 du Tribunal administratif de Melun et de porter la somme due par la commune de Roissy-en-Brie à la somme de 73 949,36 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 avril 2014 sur la somme de 61 262,16 euros puis à compter du 22 juin 2015 sur la somme de 73 949,36 euros ainsi que de la capitalisation des intérêts à la date du 3 avril 2015, puis à chaque échéance annuelle ;
- de condamner la commune de Roissy-en-Brie à lui verser la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
- de mettre à la charge de la commune de Roissy-en-Brie la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement quant aux motifs pour lesquels ils ont retenu un montant inférieur à celui de sa créance actualisée ;
- c'est à juste titre que le tribunal a estimé, d'une part, que la responsabilité de la commune de Roissy-en-Brie devait être engagée, le matériel de l'école maternelle étant défectueux et, d'autre part, que celle-ci devait être condamnée à l'indemniser en l'absence de tout partage de responsabilité ;
- le tribunal aurait dû tenir compte de l'actualisation de sa créance et condamner la commune de Roissy-en-Brie à lui verser la somme de 73 949,36 euros ;
- le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion était fixé, au 1er janvier 2018, à 1 066 euros.
Par un mémoire, enregistré le 30 mars 2018, la commune de Roissy-en-Brie conclut aux mêmes fins que sa requête et, en outre, au rejet de l'appel incident de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne.
Elle soutient, en outre, que :
- les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, par la voie de l'appel incident, sont irrecevables dès lors que cette dernière a présenté les mêmes conclusions dans sa requête d'appel enregistrée sous le n° 17PA03074 ;
- elle n'avait aucun moyen de connaître la vétusté de la chaise, le directeur de l'école ne l'en ayant pas informée.
Par un mémoire, enregistré le 9 avril 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne persiste dans ses conclusions et ses moyens.
Elle soutient, en outre, que :
- la Cour d'appel de Paris ayant définitivement reconnu l'absence de responsabilité de la victime dans la survenance de l'accident, ce point ne peut plus être remis en cause ;
- l'employeur déclaré responsable en droit de la sécurité sociale conserve un recours en droit commun contre le tiers à l'origine de l'accident ; en toute hypothèse, la faute de l'employeur en droit de la sécurité sociale n'exonère pas la commune de sa responsabilité pour avoir fourni un matériel défaillant à l'origine de la chute de MmeD... ;
- la seule cause de la chute de la victime étant le mauvais état de la chaise mise à sa disposition par la commune, il n'y a pas lieu de procéder à un partage de responsabilité ; seule, la responsabilité de la commune doit être retenue.
Par un mémoire, enregistré le 3 mai 2018, la commune de Roissy-en-Brie conclut aux mêmes fins que sa requête et, en outre, demande à être garantie par le lycée Thibaut de Champagne de Provins, l'Etat (ministre de l'éducation nationale) et Mme D...des condamnations qui seront prononcées à son encontre.
Elle soutient que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne n'étant pas l'employeur de MmeD..., elle n'est pas fondée à exercer un recours contre un tiers en ne procédant à aucune démonstration et en s'émancipant des dispositions des articles L. 452-5 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ; n'ayant pas été condamnée à verser à Mme D...une indemnité réparant l'atteinte à son intégrité physique, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne ne peut obtenir le remboursement des prestations restées à sa charge.
Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions d'appel en garantie présentées par la commune de Roissy-en-Brie, ces conclusions présentées pour la première fois en appel étant constitutives d'une demande nouvelle.
Par un mémoire, enregistré le 7 mai 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne persiste dans ses conclusions et dans ses moyens.
Elle soutient, en outre, que :
- le désistement de la victime lui est propre et ne la prive pas de l'exercice de son recours subrogatoire ;
- l'absence de recours du lycée contre la commune n'emporte pas de conséquence juridique qui lui serait opposable ;
- la demande en garantie formée en appel par la commune est irrecevable.
Par un mémoire, enregistré le 9 mai 2018, la commune de Roissy-en-Brie persiste dans ses conclusions et dans ses moyens.
Par un mémoire, enregistré le 11 mai 2018, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête de la commune de Roissy-en-Brie.
Il soutient que :
- les conclusions d'appel en garantie présentées par la commune de Roissy-en-Brie sont irrecevables ;
- en l'absence de tout signalement et devant le caractère non apparent de l'usure qui affecterait la chaise, aucune faute ne peut être imputée aux enseignants ou au directeur d'école ;
- en tout état de cause, il n'appartient pas au directeur d'école de prescrire aux membres de l'équipe éducative de faire un usage normal du mobilier scolaire ni de vérifier la solidité de chaque objet en dehors des désordres apparents ;
- la victime a concouru à la réalisation du dommage.
II. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 17PA03074 les 12 septembre 2017 et 9 avril 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, représentée par MeE..., demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du 10 juillet 2017 du Tribunal administratif de Melun et de porter la somme due par la commune de Roissy-en-Brie à la somme de 73 949,36 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 avril 2014 sur la somme de 61 262, 16 euros puis à compter du 22 juin 2015 sur la somme de 73 949,36 euros ainsi que de la capitalisation des intérêts à la date du 3 avril 2015, puis à chaque échéance annuelle ;
2°) de condamner la commune de Roissy-en-Brie à lui verser la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Roissy-en-Brie la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- il y a lieu de joindre les instances nos 17PA02982 et 17PA03074 ;
- c'est à juste titre que le tribunal a estimé, d'une part, que la responsabilité de la commune de Roissy-en-Brie devait être engagée, le matériel de l'école maternelle étant défectueux et, d'autre part, qu'elle devait être condamnée à l'indemniser en l'absence de tout partage de responsabilité ; en effet, la Cour d'appel de Paris ayant définitivement reconnu l'absence de responsabilité de la victime dans la survenance de l'accident, ce point ne peut plus être remis en cause ; en outre, l'employeur déclaré responsable en droit de la sécurité sociale conserve un recours en droit commun contre le tiers à l'origine de l'accident ; en toute hypothèse, la faute de l'employeur en droit de la sécurité sociale n'exonère pas la commune de sa responsabilité pour avoir fourni un matériel défaillant à l'origine de la chute de Mme D... ;
- la seule cause de la chute de la victime étant le mauvais état de la chaise mise à sa disposition par la commune, il n'y a pas lieu de procéder à un partage de responsabilité ; seule, la responsabilité de la commune doit être retenue.
- le tribunal aurait dû tenir compte de l'actualisation de sa créance et condamner la commune de Roissy-en-Brie à lui verser la somme de 73 949,36 euros ;
- le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion était fixé, au 1er janvier 2018, à 1 066 euros.
Par un mémoire, enregistré le 8 janvier 2018, Mme B...D..., représentée par Me G..., demande à la Cour de confirmer le jugement du 10 juillet 2017 en ce que le Tribunal administratif de Melun a donné acte de son désistement et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge solidairement des parties perdantes, ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- elle s'est désistée de sa demande devant le Tribunal administratif de Melun ;
- les conclusions de la commune de Roissy-en Brie dirigées à son encontre méconnaissent l'autorité de la chose jugée par la Cour d'appel de Paris ;
- subsidiairement, elle n'a commis aucune faute de nature à réduire son indemnisation ; en tout état de cause, seule une faute inexcusable de la victime serait de nature à exonérer l'employeur de sa responsabilité ; elle n'est pas montée sur la chaise contrairement à ce que soutient la commune ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 avril 2018, la commune de Roissy-en-Brie, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne.
Elle soutient que :
- les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne tendant à la capitalisation des intérêts à compter du 3 avril 2015 sont irrecevables dès lors que la caisse n'avait formulé à cette date aucune demande ;
- dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il y a lieu de joindre les instances nos 17PA02982 et 17PA03074 ;
- le tribunal ne pouvait pas la condamner à rembourser les débours de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne alors que la victime a confirmé qu'elle avait été intégralement indemnisée de ses préjudices en exécution des arrêts de la Cour d'appel de Paris qui a retenu la responsabilité de son employeur, le lycée Thibaut de Champagne ; elle n'a pas été reconnue responsable de l'accident de MmeD... ;
- elle renvoie à ses écritures produites dans le cadre de l'instance n° 17PA02982.
Par un mémoire, enregistré le 3 mai 2018, la commune de Roissy-en-Brie conclut aux mêmes fins que sa requête et, en outre, demande à la Cour à être garantie par le lycée Thibaut de Champagne de Provins, l'Etat (ministre de l'éducation nationale) et Mme D... des condamnations qui seront prononcées à son encontre.
Elle soutient que :
- la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne n'étant pas l'employeur de MmeD..., elle n'est pas fondée à exercer un recours contre un tiers en ne procédant à aucune démonstration et en s'émancipant des dispositions des articles L. 452-5 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ; n'ayant pas été condamnée à verser à Mme D... une indemnité réparant l'atteinte à son intégrité physique, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne ne peut obtenir le remboursement des prestations à sa charge.
Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions d'appel en garantie présentées par la commune de Roissy-en-Brie, ces conclusions présentées pour la première fois en appel étant constitutives d'une demande nouvelle.
Par un mémoire, enregistré le 7 mai 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne persiste dans ses conclusions et ses moyens.
Elle soutient, en outre, que :
- le désistement de la victime lui est propre et ne la prive pas de l'exercice de son recours subrogatoire ;
- l'absence de recours du lycée contre la commune n'emporte pas de conséquence juridique qui lui serait opposable ;
- la demande en garantie formée en appel par la commune est irrecevable.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,
- les observations de MeC..., pour la commune de Roissy-en-Brie,
- et les observations de MeF..., pour MmeD....
1. Considérant que Mme D...a été recrutée, le 23 août 2006, en qualité d'employée de vie scolaire par le lycée Thibaut de Champagne de Provins dans le cadre d'un contrat d'avenir pour aider au suivi d'élèves handicapés et a été placée auprès de l'école maternelle Pommier-Picard de la commune de Roissy-en-Brie ; que le 5 décembre 2006, dans la salle de classe de cette école, elle a été victime d'une chute ; que l'intéressée a saisi la juridiction des affaires de sécurité sociale sur le fondement de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ; que, par un arrêt du 21 mai 2015, la Cour d'appel de Paris s'est déclarée incompétente pour se prononcer sur la responsabilité de la commune de Roissy-en-Brie et a considéré que le lycée Thibaut de Champagne avait commis une faute inexcusable à l'égard de sa salariée, au sens des dispositions susmentionnées du code de la sécurité sociale, en estimant notamment que la circonstance que le mobilier était fourni et entretenu par la commune ne dispensait pas le lycée de vérifier que l'enseignement dont il avait la responsabilité pouvait se dérouler en toute sécurité ; que, toutefois, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne ayant manqué à son obligation d'information de l'employeur lors de l'instruction du dossier de l'accident de travail de MmeD..., la Cour d'appel de Paris a appliqué le principe de " l'inopposabilité " de la prise en charge de l'accident qui fait obstacle à ce que le lycée Thibaut de Champagne rembourse à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne les sommes que celle-ci devait verser à la victime en réparation de ses préjudices ; que, par un arrêt du 18 mai 2017, rendu après le dépôt du rapport de l'expert judiciaire, la Cour d'appel de Paris a évalué les préjudices de Mme D...à la somme totale de 57 853,36 euros ; qu'il est constant que cette somme a été versée à la victime par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne ;
2. Considérant que, parallèlement à la procédure suivie devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun puis devant la Cour d'appel de Paris, Mme D...a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Roissy-en-Brie, ou à titre subsidiaire de l'Etat, à lui verser une somme de 70 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de sa chute dans l'école maternelle le 5 décembre 2006 ; que, par un jugement du 10 juillet 2017, le Tribunal administratif de Melun, après avoir donné acte du désistement de MmeD..., a condamné la commune de Roissy-en-Brie à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 61 262,16 euros, augmentée des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, ainsi que la somme de 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, et a rejeté le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne ; que la commune de Roissy-en-Brie fait appel de ce jugement en tant qu'il lui est défavorable ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne relève également appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande ;
3. Considérant que les requêtes de la commune de Roissy-en-Brie et de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, enregistrées respectivement sous les nos 17PA02982 et 17PA03074, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance adressé par le Tribunal administratif de Melun à la Cour que la commune de Roissy-en-Brie soutenait, à titre subsidiaire, à l'appui de ses conclusions tendant au rejet de la demande de MmeD..., que les fautes commises par la victime et par l'Etat l'exonéraient de sa responsabilité ; qu'en engageant la responsabilité de la commune sans répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué, que ce jugement, excepté en tant qu'il prend acte du désistement de MmeD..., doit être annulé ; qu'il y a lieu, dans cette mesure, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par la commune de Roissy-en-Brie, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne et le ministre de l'éducation nationale ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5134-41 du code du travail, alors en vigueur : " Le contrat d'avenir est un contrat de travail de droit privé à durée déterminée conclu en application de l'article L. 1242-3 avec l'un des employeurs mentionnés au 3° de l'article L. 5134-38. (...) " ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale : " Lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants. " ; qu'aux termes de l'article L. 454-1 du même code : " Si la lésion dont est atteint l'assuré social est imputable à une personne autre que l'employeur ou ses préposés, la victime ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles de droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. Les caisses primaires d'assurance maladie sont tenues de servir à la victime ou à ses ayants droit les prestations et indemnités prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident, dans les conditions ci-après ; (...) Si la responsabilité du tiers auteur de l'accident est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément. (...) Si la responsabilité du tiers est partagée avec l'employeur, la caisse ne peut poursuivre un remboursement que dans la mesure où les indemnités dues par elle en vertu du présent livre dépassent celles qui auraient été mises à la charge de l'employeur en vertu du droit commun. (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit du fonds national des accidents du travail de l'organisme national d'assurance maladie. (...) " ;
8. Considérant que, comme il a déjà été dit, Mme D...a été recrutée, le 23 août 2006, en qualité d'employée de vie scolaire par le lycée Thibaut de Champagne de Provins dans le cadre d'un contrat d'avenir pour aider au suivi d'élèves handicapés et a été placée auprès de l'école maternelle Pommier-Picard de la commune de Roissy-en-Brie ; qu'il ressort des dispositions précitées du code du travail que le contrat d'avenir est un contrat de droit privé et que, par voie de conséquence, le juge judiciaire est compétent pour connaître du litige né entre l'employeur et le salarié dans le cadre de l'exécution de ce contrat, comme l'a d'ailleurs jugé la Cour d'appel de Paris qui a retenu, sur le fondement de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale la responsabilité du lycée Thibaut de Champagne de Provins au motif qu'il avait commis une faute inexcusable ; que l'engagement de la responsabilité de son employeur et la circonstance que son accident a été pris en charge au titre d'un accident du travail n'exclut pas la possibilité pour Mme D...d'engager la responsabilité de tiers qui ont pu concourir à la réalisation du dommage ; que la commune de Roissy-en-Brie et l'Etat (ministre de l'éducation nationale), personnes publiques, ayant la qualité de tiers au contrat d'avenir conclu entre le lycée Thibaut de Champagne de Provins et MmeD..., cette dernière pouvait rechercher leur responsabilité pour faute, respectivement pour avoir maintenu du matériel défectueux dans la salle de classe de l'école maternelle et pour ne pas avoir signalé le caractère défectueux de ce matériel, devant le juge administratif compétent pour trancher un tel litige ; que, par suite, l'exception d'incompétence de la juridiction administrative opposée par la commune de Roissy-en-Brie et le ministre de l'éducation nationale doit être écartée ;
Sur la responsabilité de la commune de Roissy-en-Brie :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 212-4 du code de l'éducation : " La commune a la charge des écoles publiques. Elle est propriétaire des locaux et en assure la construction, la reconstruction, l'extension, les grosses réparations, l'équipement et le fonctionnement, à l'exception des droits dus en contrepartie de la reproduction par reprographie à usage pédagogique d'oeuvres protégées. " ;
10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que dans l'exercice de ses fonctions d'aide au suivi individuel d'élève handicapé, Mme D...a été victime, le 5 décembre 2006, dans la salle de classe de l'école maternelle de la commune de Roissy-en-Brie, d'une chute survenue au moment où elle se rasseyait sur une chaise d'enfant, après s'être levée pour attraper un pot de crayons ; que si la victime, qui a été gravement blessée dans cet accident, impute sa chute à la défectuosité de la chaise qu'elle utilisait, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette chaise d'enfant, conçue pour accueillir un enfant âgé de 3 à 6 ans et supporter une charge inférieure à 30 kg, aurait été défectueuse ou vétuste avant son utilisation anormale par MmeD... ; que si celle-ci soutient que ses fonctions impliquaient qu'elle soit installée à hauteur de l'enfant qu'elle aidait et qu'il n'y avait pas de siège adapté à la taille et au poids d'un adulte dans la salle de classe, il appartenait à son employeur, le lycée Thibaut de Champagne de Provins, comme l'a d'ailleurs jugé la Cour d'appel de Paris dans son arrêt du 21 mai 2015, de veiller à ce que le matériel mis à la disposition de Mme D...pour l'exercice de ses fonctions réponde à ses besoins et ne l'expose pas à un risque pour sa santé, en particulier en interdisant l'utilisation de chaises d'enfants et en veillant à l'utilisation de sièges adaptés aux adultes ; que, dans ces conditions, la commune de Roissy en Brie n'a pas manqué à ses obligations découlant des dispositions de l'article L. 212-4 du code de l'éducation ; que, par suite, sa responsabilité pour faute ne saurait être engagée ;
Sur la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Roissy-en-Brie, que la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne tendant à ce que la commune de Roissy-en-Brie lui verse, sur le fondement de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale, la somme de 73 949,36 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts, ainsi que la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion doit être rejetée ;
Sur la demande d'expertise :
12. Considérant que la responsabilité de la commune de Roissy-en-Brie n'étant pas engagée, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande tendant à ce que la Cour prescrive une nouvelle mesure d'expertise médicale ;
Sur les conclusions en appel en garantie présentées par la commune de Roissy-en-Brie :
13. Considérant que pour le même motif que celui-ci énoncé au point précédent, les conclusions de la commune de Roissy-en-Brie tendant à la condamnation du lycée Thibaut de Champagne, de l'Etat (ministre de l'éducation nationale) et de Mme D...à la garantir de la condamnation pouvant être prononcée à son encontre doivent être, en tout état de cause, rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1101908 du 10 juillet 2017 du Tribunal administratif de Melun, excepté en tant qu'il prend acte du désistement de MmeD..., est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne devant le Tribunal administratif de Melun, la requête n° 17PA03074 de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne et ses conclusions présentées par la voie de l'appel incident dans l'instance n° 17PA02982 sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Roissy-en-Brie, à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, au ministre de l'éducation nationale, à Mme D... et au lycée Thibaut de Champagne.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
C. RENÉ-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 17PA02982, 17PA03074