Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 23 mai 2013 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a fixé au 22 octobre 2012 la date de guérison des séquelles de l'accident reconnu imputable au service dont elle a été victime le 27 avril 2010.
Par un jugement n° 1404025 du 25 octobre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés les 26 mars 2017 et 24 avril 2017, MmeB..., représentée par MeG..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1404025 du 25 octobre 2016 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 23 mai 2013 du directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à Me G...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision du 23 mai 2013 a été signée par une personne incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- les motifs sur lesquels elle est fondée manquent en fait ;
- elle méconnaît les dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 ; l'administration a commis une erreur dans l'appréciation de sa situation ou, à tout le moins, une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation ; les douleurs chroniques invalidantes dont elle souffre résultent directement de l'accident du 27 avril 2010 et non d'une pathologie antérieure ; elle ne peut être considérée comme guérie au 22 octobre 2012 ;
- la décision contestée porte également une atteinte manifestement disproportionnée à sa situation personnelle ;
- ses conditions de travail ont aggravé son état, dès lors notamment que les préconisations du médecin de prévention quant à l'aménagement de son poste de travail n'ont pas été respectées en méconnaissance de l'article 26 du décret n° 82-453 du 24 mai 1982.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens de légalité externe soulevés pour la première fois en appel sont irrecevables ; en tout état de cause, ils ne sont pas fondés ;
- les moyens de légalité interne soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 13 mai 2018, Mme B...maintient ses conclusions et ses moyens. Elle demande, en outre, à la Cour, à titre subsidiaire, une remise gracieuse de ses dettes et la levée de l'hypothèque sur son bien immobilier compte tenu de son état d'impécuniosité dû à la maladie.
Elle soutient, en outre, qu'en l'absence de débat contradictoire instauré avec ses médecins, l'expertise judiciaire n'a pas été réalisée dans des conditions garantissant l'impartialité et la neutralité des débats.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 27 janvier 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2009-208 du 20 février 2009 ;
- le décret n° 2010-986 du 26 août 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
1. Considérant que Mme B..., agent administratif principal des finances publiques, a été victime, le 27 avril 2010, d'un accident qui a été reconnu imputable au service le 12 mai suivant ; qu'à la suite de l'expertise médicale du 16 janvier 2013 réalisée par le Dr. Cottias, la commission de réforme départementale a, le 16 avril 2013, rendu un avis estimant que la guérison des séquelles de cet accident de service était intervenue le 22 octobre 2012 ; que, par une décision du 26 avril 2013, le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a retenu cette date de guérison et, par voie de conséquence, a estimé que les actes médicaux et les soins prescrits après le 22 octobre 2012 seraient pris en charge " au titre de la maladie ordinaire " ; que cette décision a été confirmée par une décision de la même autorité du 23 mai 2013 ; que Mme B...fait appel du jugement du 25 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 mai 2013 ;
Sur la régularité des opérations d'expertise :
2. Considérant que si l'expert, désigné par le juge des référés du Tribunal administratif de Melun le 11 octobre 2013, n'a pas convoqué les médecins prenant en charge Mme B...aux opérations d'expertise, il disposait toutefois de l'ensemble du dossier médical de l'intéressée ; que les parties n'ont pas été privées de la possibilité de faire des observations et de produire tous documents qu'ils jugeaient utiles de porter à la connaissance de l'expert ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci a manqué à son obligation d'accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité ; qu'ainsi, Mme B...n'est pas fondée à soutenir, en tout état de cause, que l'expertise du Dr. Lance serait entachée d'irrégularités ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 20 février 2009 relatif au statut particulier des administrateurs des finances publiques : " Les administrateurs des finances publiques sont placés à la tête des directions régionales, départementales ou locales des finances publiques. Ils dirigent des services à compétence nationale, des directions spécialisées ou des structures de services déconcentrés relevant de la direction générale des finances publiques. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de ce même décret : " Les administrateurs des finances publiques chargés de la direction de l'une des structures mentionnées aux deux premiers alinéas de l'article 2 disposent du pouvoir hiérarchique sur les personnels de tous grades placés sous leur autorité. (...) Ils sont investis d'attributions et d'un pouvoir de décision propres, notamment en matière contentieuse et gracieuse. (...). Ils peuvent, en matière de gestion des personnels, dans les domaines relevant de leur compétence, déléguer leur signature à des agents de catégorie A placés sous leur autorité. " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 26 août 2010 portant statut particulier des personnels de catégorie A de la direction générale des finances publiques : " Les fonctionnaires de la catégorie A mentionnés à l'article 1er sont répartis dans les grades ci-après : 1° Administrateur des finances publiques adjoint : 6 échelons ; (...) " ;
4. Considérant que, par un arrêté du 3 septembre 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Seine-et-Marne n° 38 du 18 septembre 2012, M. D... C..., administrateur général des finances publiques, directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne, nommé en cette qualité par un décret du 20 avril 2011, a donné à M. E...A..., administrateur des finances publiques adjoint, responsable de la division des ressources humaines et de la formation professionnelle et signataire de la décision contestée, délégation à l'effet de signer notamment tout document relatif aux attributions de sa division ; que cette délégation n'est pas subordonnée à l'absence ou l'empêchement du directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait et doit être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que, devant le Tribunal administratif de Melun, Mme B...n'a soulevé que des moyens de légalité interne tirés de la méconnaissance des dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'erreur commise par l'administration dans l'appréciation de sa situation ; que le moyen de légalité externe nouveau en appel et tiré de l'insuffisante motivation de la décision du 23 mai 2013, qui n'est pas d'ordre public et se rattache à une cause juridique distincte de celle évoquée en première instance, est ainsi irrecevable ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'accident de trajet survenu le 27 avril 2010 et reconnu imputable au service, Mme B...a présenté un écrasement de la main droite sans lésion osseuse et un étirement du bras ; que pour fixer la date de guérison des lésions de cet accident au 22 octobre 2012, l'administration s'est fondée, comme il a déjà été dit, sur les conclusions du compte rendu d'expertise médicale établi le 16 janvier 2013 par le Dr. Cottias, chirurgien des hôpitaux et spécialiste agréé en orthopédie et traumatologie, ainsi que sur l'avis émis le 16 avril 2013 par la commission de réforme départementale ; qu'il ressort du rapport d'expertise établi le 15 février 2014 par l'expert désigné par le Tribunal administratif de Melun, le Dr. Lance, chirurgien orthopédiste et traumatologue, que celui-ci a également fixé à la date du 22 octobre 2012 la guérison des séquelles de l'accident de service de Mme B...après avoir constaté, notamment, que " l'examen clinique, au jour de l'expertise, ne retrouve aucune anomalie particulière " et que " les divers électromyogrammes effectués après l'accident du 27 avril 2010 se sont toujours révélés normaux, en particulier celui réalisé le 12 juillet 2010, soit trois mois après l'accident " ;
8. Considérant que Mme B...conteste la date retenue du 22 octobre 2012 comme date de guérison des lésions de l'accident du 27 avril 2010 en soutenant notamment qu'elle souffre toujours de douleurs chroniques invalidantes au bras droit ; que, toutefois, les pièces médicales établies antérieurement au 22 octobre 2012, date de guérison retenue par les experts, et notamment le certificat médical en date du 4 juin 2012 établi dans le cadre d'une consultation de la douleur par le Dr. d'Ornano de la clinique médico-chirurgicale de l'Ermitage de Dammarie-les-Lys, ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions des experts, dès lors qu'il est constant que Mme B...présentait, antérieurement au 22 octobre 2012, des lésions dues à l'accident du 27 avril 2010 ; qu'en outre, s'il ressort du certificat médical en date du 22 avril 2013 émanant du Dr. d'Ornano que Mme B...souffre de paresthésies et de douleurs au niveau de la main, que " l'EMG récent a mis en évidence une compression très modérée du nerf médian droit nécessitant un traitement médical " et que " les troubles musculo-squelettiques ne feront que s'aggraver si la patiente ne bénéficie pas d'un poste adapté à son handicap ", ces mentions ne permettent pas d'établir que les douleurs de l'intéressée résultent de l'accident survenu le 27 avril 2010 ; que, de même, les pièces médicales versées au dossier de première instance, consistant en un compte rendu d'examen médical établi le 28 décembre 2012 par le Dr. d'Ornano, un compte rendu d'électromyogramme réalisé le 19 avril 2013 par le Dr. Domec, neurologue, douze certificats médicaux établis entre octobre 2012 et août 2013 par le médecin traitant de l'intéressée, le Dr. Witkowski, un compte rendu d'électromyogramme réalisé par le Dr. Domec le 7 octobre 2015, ne sont pas de nature à remettre en cause la date de guérison retenue par les experts, ni à établir que les troubles dont souffre la requérante auraient un lien direct et certain avec l'accident survenu le 27 avril 2010 ; qu'ainsi, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que les motifs retenus par le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne dans sa décision du 23 mai 2013 manquent en fait ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne n'avait pas méconnu les dispositions précitées de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, ni commis d'erreur d'appréciation, en fixant au 22 octobre 2012 la date de guérison de MmeB... ;
9. Considérant, enfin, que Mme B...ne peut utilement invoquer, dans le cadre de la présente instance qui porte sur la seule légalité de la décision du 23 mai 2013 fixant la date de guérison des lésions de l'accident survenu le 27 avril 2010, les circonstances que les préconisations du médecin de prévention quant à l'aménagement de son poste de travail n'ont pas été respectées, que ses conditions de travail ont aggravé ses douleurs et qu'elle perçoit désormais l'allocation aux adultes handicapés ;
10. Considérant qu'il découle de ce qui a été dit précédemment que les conclusions présentées à titre subsidiaire par Mme B...et tendant à une remise gracieuse de ses dettes et à la levée de l'hypothèque sur son bien immobilier ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
C. RENÉ-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01026