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05/04/2018 | FRANCE | N°15PA02754

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 05 avril 2018, 15PA02754


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ode Formation a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 4 septembre 2014 par laquelle le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, lui a fait obligation de verser au Trésor public la somme de 213 051 euros au titre des dépenses non réalisées et/ou non rattachables à l'activité de formation professionnelle continue et la somme de 204 460 euros au titre des formations tenues pour non réalisées pour lesquelles elle a reçu paiement, et pour

ne pas avoir procédé au remboursement des financeurs dans le délai imparti, e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ode Formation a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 4 septembre 2014 par laquelle le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, lui a fait obligation de verser au Trésor public la somme de 213 051 euros au titre des dépenses non réalisées et/ou non rattachables à l'activité de formation professionnelle continue et la somme de 204 460 euros au titre des formations tenues pour non réalisées pour lesquelles elle a reçu paiement, et pour ne pas avoir procédé au remboursement des financeurs dans le délai imparti, et, par un mémoire distinct, de transmettre au Conseil d'Etat les questions prioritaires de constitutionnalité relatives à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 6362-5, L. 6362-7 et L. 6362-7-1 du code du travail.

Par un jugement n° 1426485 en date du 27 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a refusé, dans son article 1er, de transmettre les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par la société Ode Formation, et dans son article 2, a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 juillet 2015 et 11 janvier 2018, la société Ode Formation, représentée par Me Chelly Szulman, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1426485 du 27 mai 2015 du Tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 septembre 2014 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 4 septembre 2014 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris ;

3°) à titre subsidiaire, de limiter à 89 824,52 euros le montant de la somme réclamée au titre des formations tenues pour non réalisées pour lesquelles elle a reçu paiement et pour ne pas avoir procédé au remboursement des financeurs dans le délai imparti ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas bénéficié des garanties prévues en matière de contrôle fiscal par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ; aucun avis de vérification précisant les années contrôlées ne lui a été adressé préalablement au contrôle mené par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France ; elle n'a pas été informée de son droit d'être assistée par un conseil lors du contrôle ;

- en outre, l'administration a méconnu les dispositions de l'article R. 6352-2 du code du travail, dès lors que la période d'instruction s'est étendue sur une période supérieure à trois mois ;

- les formations en cause ont été exécutées, comme en attestent les pièces versées au dossier ;

- en tout état de cause, certaines formations n'ayant pas été financées à partir de fonds publics, elle ne peut être redevable d'un reversement au Trésor public d'une somme supérieure à 89 824,52 euros ;

- les dépenses en cause sont réelles et ont été engagées dans l'intérêt de son activité.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 janvier 2016 et 15 février 2018, le ministre du travail conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Ode Formation ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,

- et les observations de Me Chelly Szulman, avocat de la société Ode Formation.

1. Considérant que la société Ode Formation, organisme dispensateur de formation professionnelle dans le domaine du bâtiment, des diagnostics, du transport et de la vente de matériel, a fait l'objet d'un contrôle de son activité de formation professionnelle continue portant sur ses exercices comptables 2010, 2011 et 2012 par les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France en application de l'article L. 6361-2 du code du travail ; que, par une décision du 4 septembre 2014, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a mis à sa charge le versement au Trésor public, d'une part, de la somme de 213 051 euros au titre des dépenses non réalisées et/ou non rattachables à l'activité de formation professionnelle continue et la somme de 204 460 euros au titre des formations tenues pour non réalisées pour lesquelles elle a reçu paiement et pour ne pas avoir procédé au remboursement des financeurs dans le délai imparti ; que la société Ode Formation fait appel du jugement du 27 mai 2015 du Tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 septembre 2014 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6361-2 du code du travail : " L'Etat exerce un contrôle administratif et financier sur : 1° Les activités en matière de formation professionnelle continue conduites par : (...) c) Les organismes de formation et leurs sous-traitants " ; qu'aux termes de l'article L. 6361-3 du même code : " Le contrôle administratif et financier des dépenses et activités de formation porte sur l'ensemble des moyens financiers, techniques et pédagogiques, à l'exclusion des qualités pédagogiques, mis en oeuvre pour la formation professionnelle continue. Ce contrôle peut porter sur tout ou partie de l'activité, des actions de formation ou des dépenses de l'organisme. (...) " ;

Sur la régularité de la procédure :

3. Considérant que l'article L. 6362-10 du code du travail dispose que : " Les décisions de rejet de dépenses et de versement mentionnées au présent livre prises par l'autorité administrative ne peuvent intervenir, après la notification des résultats du contrôle, que si une procédure contradictoire a été respectée. " ;

4. Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire, ni même aucun principe n'impose à l'administration en charge du contrôle administratif et financier des organismes de formation professionnelle en application de l'article L. 6361-2 du code du travail d'adresser à ces organismes, préalablement à ce contrôle, l'avis de vérification prévu par les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales dans le cadre d'une vérification de comptabilité par l'administration fiscale et de les informer de la faculté d'être assistés par un conseil lors du contrôle ; que la société requérante n'est pas fondée à invoquer les dispositions des articles L. 6362-12 et R. 6362-5 du code du travail qui concernent le recouvrement des versements exigibles au titre du contrôle administratif et financier prévu par l'article L. 6361-2 du code du travail ;

5. Considérant que l'article L. 6362-9 du code du travail dispose que : " Les résultats du contrôle sont notifiés à l'intéressé. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 6362-1 du même code : " Les personnes et organismes mentionnés aux articles L. 6361-1 et L. 6361-2, 1°, qui ont fait l'objet d'un contrôle sur place, sont informés de la fin de la période d'instruction par lettre recommandée avec avis de réception. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 6362-2 de ce code : " La notification des résultats du contrôle prévue à l'article L. 6362-9 intervient dans un délai ne pouvant dépasser trois mois à compter de la fin de la période d'instruction avec l'indication des procédures dont l'organisme contrôlé dispose pour faire valoir ses observations. Les résultats du contrôle peuvent comporter des observations adressées à l'organisme contrôlé. (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le contrôle par les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France de l'activité de formation professionnelle continue de la société Ode Formation au titre des exercices comptables 2010, 2011 et 2012 a débuté le 27 février 2013 ; que par un courrier en date du 11 octobre 2013, l'administration a clôturé l'instruction en notifiant à la société un avis de fin d'instruction ; que l'administration lui a également notifié le rapport de contrôle le 23 octobre 2013 ; qu'ainsi, le délai de trois mois courant à compter de la notification de l'avis de fin d'instruction et imparti à l'administration pour notifier à l'organisme de formation les résultats du contrôle, en application des dispositions précitées de l'article R. 6362-2 du code du travail, a été respecté ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, il ne résulte pas des dispositions précitées que la période d'instruction serait enfermée dans un délai de trois mois ;

Sur le bien-fondé du versement au Trésor public de la somme de 204 460 euros au titre des actions de formation tenues pour non réalisées et du non remboursement des cocontractants :

7. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 6362-5 du code du travail : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 : 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités. A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10 " ; qu'aux termes de l'article R. 6332-26 de ce code dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les employeurs ou les prestataires de formation adressent aux organismes collecteurs qui en font la demande une copie des feuilles d'émargement à partir desquelles sont établies les attestations de présence. Ces feuilles d'émargement font partie des documents que les organismes collecteurs sont tenus de produire aux agents chargés du contrôle prévu aux articles L. 6362-5 à L. 6362-7. " ;

8. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 6362-6 du code du travail : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 présentent tous documents et pièces établissant la réalité de ces actions. A défaut, celles-ci sont réputées ne pas avoir été exécutées et donnent lieu à remboursement au cocontractant des sommes perçues conformément à l'article L. 6354-1. " ; qu'aux termes de l'article L. 6354-1 du même code : " En cas d'inexécution totale ou partielle d'une prestation de formation, l'organisme prestataire rembourse au cocontractant les sommes indûment perçues de ce fait. " ; qu'aux termes de l'article L. 6362-7-1 du même code : " En cas de contrôle, les remboursements mentionnés aux articles L. 6362-4 et L. 6362-6 interviennent dans le délai fixé à l'intéressé pour faire valoir ses observations. / A défaut, l'intéressé verse au Trésor public, par décision de l'autorité administrative, une somme équivalente aux remboursements non effectués. " ;

9. Considérant qu'il appartient ainsi à l'administration d'apprécier, au regard des pièces produites par l'organisme de formation sur lequel pèse la charge de la preuve, et sous le contrôle du juge, la réalité des activités conduites en matière de formation professionnelle continue au regard des dispositions précitées du code du travail ;

10. Considérant que, pour mettre à la charge de la société Ode Formation le reversement au Trésor public de la somme totale de 204 460 euros, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a, sur la base du rapport de contrôle notifié le 23 octobre 2013, retenu que, faute de justificatifs présentés par la société, les sessions de formation " diagnostic immobilier " en 2011 étaient réputées ne pas avoir été exécutées pour un montant total de 185 590 euros, et qu'il en était de même pour les actions de formation sur l'amiante pour un montant total de 11 970 euros en 2011 et de 6 900 euros en 2012 ; que la société requérante n'ayant pas procédé au remboursement de ces sommes auprès de ses cocontractants avant l'expiration du délai de 30 jours prévu à l'article L. 6362-7-1 du code du travail, le préfet a ordonné le versement au Trésor public d'une somme d'un montant équivalent aux sommes indûment perçues par la société ;

En ce qui concerne les formations de diagnostiqueurs immobiliers :

11. Considérant qu'il ressort des termes de la décision du 4 septembre 2014, que le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a estimé que la société Ode Formation n'établissait pas, au titre des sessions de 2011, avoir délivré l'ensemble des formations de diagnostiqueurs immobiliers pour lesquelles elle avait perçu la somme totale de 257 576 euros, les formations n'étant justifiées que pour la somme de 71 986 euros ;

12. Considérant que, pour attester de la réalisation des formations de diagnostiqueurs immobiliers remises en cause par le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, la société Ode Formation a produit pour la première fois devant le tribunal des feuilles d'émargement ; qu'il ressort des mentions et des signatures apposées sur ces feuilles d'émargement que doivent être regardées comme effectuées les formations délivrées aux stagiaires M.V..., M. T... Z...et M. G...Z...pour une durée de 28 journées, aux stagiaires M. J..., M.O..., M.R..., M. H...pour une durée de 27 journées, aux stagiaires M. AB..., M. X...pour une durée de 26 journées, au stagiaire M. W...pour une durée de 25 journées, au stagiaire M. E...pour une durée de 24 journées et au stagiaire M. AA... pour une durée de 23 journées ; qu'en outre, si le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a estimé que la société Ode Formation avait dispensé 21 heures de formation auprès, d'une part, des stagiaires M.N..., M.P..., M.B..., et, d'autre part, des stagiaires M. Y...et M.Q..., il ressort des feuilles d'émargement présentées par la société requérante qu'elle a réalisé pour ces stagiaires respectivement 28 et 27 journées de formation ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a estimé que ces actions de formation de " diagnostic immobilier " n'avaient pas été exécutées et lui a ordonné de rembourser les sommes qu'elle a reçues à ce titre ; qu'il y a lieu dans cette mesure d'annuler la décision du 4 septembre 2014 et de renvoyer la société Ode Formation devant l'administration afin que celle-ci détermine le montant exact des sommes perçues à juste titre par la société pour ces actions de formation effectivement réalisées et dont le versement au Trésor public a été ordonné à tort ;

13. Considérant, en revanche, que pour les autres formations de diagnostiqueurs immobiliers dont l'administration a estimé qu'elles n'avaient pas été réalisées, la société Ode Formation reconnaît ne pas être en mesure de présenter les feuilles d'émargement ; qu'elle produit néanmoins des " attestations de stage " signées par son " responsable formation " et mentionnant le contenu des formations ; que, toutefois, ces attestations ne sont contresignées ni par le formateur, ni par les stagiaires et ne mentionnent la présence de ces derniers que pour la durée globale des formations en cause ; que, dans ces conditions, ces documents ne permettent pas d'attester de la réalité des formations dispensées par la société requérante ; que, de même, les bulletins d'inscription signés par certains stagiaires, les attestations de suivi de formation remplies et signées par plusieurs stagiaires, les devis pour des formations, les certificats et les " feuilles de présence " émanant du bureau Veritas, organisme de vérification et de certification, les accords de prise en charge émanant du président du conseil général de Seine-Saint-Denis, les courriers de Pôle Emploi, les factures des 11 janvier 2011, 1er février 2011, 8 février 2011, 24 mai 2011 et 6 juillet 2011 portant effectivement sur les actions de formation en cause, les " examens blancs ", qui pour la plupart ne sont pas datés, les cahiers d'exercices et les " préparations à la certification ", les conventions conclues avec les organismes paritaires collecteurs agréés ayant reversé des fonds à la société requérante, qui au demeurant sont postérieures à la période contrôlée par l'administration, sont insuffisants en l'absence de feuille d'émargement, de justificatif d'évaluation ou d'attestation de fin de formation concernant les formations contestées, pour attester de la réalité des prestations qu'elle aurait assurées ;

14. Considérant qu'en l'absence de toute convention de sous-traitance de la société Ode Architecture au profit de la société requérante en matière de prestations de formation, et alors que les factures versées au dossier sont établies au nom de la société Ode Architecture, la société Ode Formation n'établit pas que l'organisme de vérification et de certification Veritas aurait assuré des heures de formation qui aurait dû être intégrées dans la comptabilisation des actions de formation ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6362-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce : " L'administration fiscale, les organismes de sécurité sociale, les organismes collecteurs paritaires agréés, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, les collectivités territoriales, les employeurs, les organismes prestataires de formation et les administrations qui financent des actions de formation communiquent aux agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 les renseignements nécessaires à l'accomplissement de leur mission. " ;

16. Considérant, contrairement à ce que soutient la société requérante sur laquelle repose la charge de la preuve de la réalisation des actions de formation professionnelle continue en vertu de l'article L. 6362-6 du code du travail, que les dispositions précitées n'imposent pas à l'administration en charge du contrôle prévu à l'article L. 6361-2 du code du travail d'exercer un droit de communication à l'égard des organismes paritaires collecteurs agréés afin que ces derniers lui transmettent les feuilles d'émargement manquantes qui leur auraient été adressées par la société Ode Formation ; que la société Ode Formation ne saurait se prévaloir utilement des énonciations de la circulaire n° 2011-26 du 15 novembre 2011, laquelle est dépourvue de valeur réglementaire, et qui en tout état de cause énonce que " l'obligation de justifier incombe à la structure contrôlée et l'exercice du droit de communication ne peut donc être invoqué par cette structure pour pallier sa défaillance éventuelle survenue lors du contrôle. " ;

17. Considérant que la société requérante soutient, à titre subsidiaire, que les heures de formation retenues par le préfet ont été sous-évaluées ; que comme il a été dit au point 12 du présent arrêt, la société Ode Formation a justifié, en produisant les feuilles d'émargement correspondantes, avoir dispensé les actions de formations pour les stagiaires M.N..., M. P..., M. B...à hauteur de 28 journées de formation et pour les stagiaires M. Y...et M. Q...à hauteur de 27 journées de formation ; qu'en l'absence d'éléments justificatifs probants, la société requérante n'établit pas qu'elle a effectué un nombre d'heures de formation supérieur à celui correspondant à ces journées de formations ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a pu regarder ces actions de formation de " diagnostic immobilier ", pour lesquelles la société Ode Formation a reçu des financements de ces cocontractants, comme n'ayant pas été exécutées et lui ordonner de rembourser les sommes qu'elle a reçues à ce titre ;

En ce qui concerne les formations à la prévention des risques à l'amiante :

19. Considérant que le préfet d'Ile-de-France, préfet de Paris, a estimé, dans sa décision du 4 septembre 2014, que la société Ode Formation ne justifiait pas avoir réalisé en 2011 et 2012 quatre formations relatives à la prévention des risques liés à l'amiante concernant 22 stagiaires et portant sur un montant total de 18 870 euros et a ordonné, faute pour la société d'avoir remboursé ses cocontractants dans le délai de trente jours, le versement au Trésor public d'une somme d'un montant équivalent ;

20. Considérant, s'agissant de la session " opérateur formation initiale " du 27 au 29 juin 2011, que la société Ode Formation verse au dossier les évaluations sous forme de questionnaires à choix multiples des stagiaires M. F...C..., M. D...et M.S... ; que, dès lors, et même si elle ne produit pas les feuilles d'émargement de ces stagiaires, la société requérante doit être regardée comme démontrant qu'elle a réalisé les actions de formation en cause d'un montant de 2 670 euros et financées par la société BTB Elec ; que, par suite, la société Ode Formation est fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet d'Ile-de-France, préfet de Paris, a écarté ces actions de formation comme n'ayant pas été réalisées et lui a ordonné de verser la somme de 2 670 euros au Trésor public ; qu'il y a lieu d'annuler la décision en litige dans cette mesure ;

21. Considérant, en revanche, s'agissant des actions de formation qui auraient été organisées du 11 avril au 22 avril 2011 et du 6 juin au 10 juin 2011, les " attestations de capacité " ou " de compétences " présentées par la société requérante sont insuffisantes pour établir la réalité de ces formation, en l'absence de feuilles d'émargement ou de feuilles d'examen ; que, de même, un courriel du 18 juillet 2012 adressé à la société Européenne de décontamination, la convocation du même jour pour une formation " d'opérateur recyclage " destinée à dix participants, un bulletin d'inscription et les attestations de compétence sont insuffisants pour établir que la société Ode Formation a délivré cette formation du 20 au 21 juillet 2012 ; que, dans ces conditions, l'administration a pu légalement estimer que ces formations n'avaient pas été dispensées et ordonner le versement au Trésor public d'une somme correspondant à la somme perçue par la société Ode Formation au titre de ces formations ;

En ce qui concerne les conclusions présentées à titre subsidiaire et tendant à limiter à 89 824,52 euros le montant de la somme réclamée au titre des formations tenues pour non réalisées pour lesquelles la société Ode Formation a reçu paiement et pour ne pas avoir procédé au remboursement des financeurs dans le délai imparti :

22. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 6354-1, L. 6362-6, L. 6362-7-1 du code du travail, citées au point 8 du présent arrêt, que le législateur n'a pas entendu limiter l'obligation pour les organismes de formation de verser au Trésor public une somme dont le montant correspond à celui des sommes perçues par cet organisme pour des formations qui n'ont finalement pas été réalisées aux seules formations financées à partir de fonds publics ; que, par suite, les conclusions sus-analysées ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur le bien-fondé du versement au Trésor public de la somme de 213 051 euros au titre des dépenses non fondées ou non rattachables aux actions de formation :

23. Considérant que, comme il a déjà été dit, en application de l'article L. 6362-5 du code du travail, les organismes de formation doivent justifier le rattachement et le bien-fondé des dépenses réputées avoir été exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; qu'à défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10 ; que lorsqu'une telle décision de rejet est prononcée par l'administration à l'encontre d'un organisme prestataire d'actions de formation, celui-ci doit verser au Trésor public, en application de l'article L. 6362-7 du même code, une somme égale au montant des dépenses ayant fait l'objet de la décision de rejet ;

24. Considérant que pour mettre à la charge de la société Ode Formation la somme totale de 213 051 euros, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a, sur la base du rapport de contrôle notifié le 23 octobre 2013, estimé que, faute pour celle-ci d'apporter des éléments justificatifs probants, certaines dépenses engagées ne pouvaient être regardées comme rattachables à l'activité de formation professionnelle ou comme bien fondées, au sens de l'article L. 6362-5 du code du travail et devaient, par suite, faire l'objet d'un reversement au Trésor public en application de l'article L. 6362-7 du même code ;

En ce qui concerne les dépenses du compte 622100 " commissions " au titre des exercices 2010 à 2012 :

25. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le préfet a estimé que n'étaient pas en lien avec l'activité de formation professionnelle continue de la société Ode Formation et n'avaient pas de caractère professionnel, d'une part, les dépenses qualifiées de " commissions " versées par la société à l'un de ses associés, M. A... K..., en contrepartie de ses activités de " gestion et d'apporteur d'affaires " exercées en sa qualité d'agent commercial, pour des montants de 9 800 euros en 2010 et 21 500 euros en 2011, et, d'autre part, les dépenses engagées pour des montants de 24 800 euros en 2011 et 48 160 euros en 2012 au profit de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Vogfi dont M. A...K...était le gérant ;

26. Considérant que la société Ode Formation soutient que M. A... K...était en charge de la gestion du personnel et des contrats de sous-traitance, de la logistique, du suivi comptable et du recouvrement, qu'il représentait la société auprès des banques et du cabinet d'expertise comptable et qu'il a exercé ses activités d'abord en qualité d'agent commercial " individuel " puis par l'intermédiaire de la société Vogfi ; que, toutefois, les courriels versés au dossier, dont certains ne précisent pas le prénom des trois associés K...de la société Ode Formation, concernent de simples demandes de documents et une invitation à un salon ; que si plusieurs factures font état de " prestations de service et de gestion courante de l'entreprise, relations avec les tiers, négociations et présentations de projets, gestion du personnel ", celles-ci sont établies par la société Vogfi dont le gérant, comme il a déjà été dit, est M. A...K...; qu'en outre, si la société requérante produit la convention de prestation de services conclue avec la société Vogfi le 3 janvier 2011, qui confie notamment au prestataire la gestion courante de l'entreprise, le classement et l'archivage des pièces comptables, le suivi des comptes bancaires, la négociation et la présentation des projets, la gestion du personnel et son recrutement, elle n'établit pas que ces tâches se rattachaient à l'activité de formation professionnelle en application de l'article L. 6362-5 du code du travail, alors qu'il est constant que la société Vogfi est inscrite au répertoire des entreprises et des établissements en tant qu'agence immobilière ; que la société Ode Formation a conclu des contrats avec la société CFG Conseils au titre de 2010, la société A2F au titre de 2011 et 2012 et la société Mesure et Diagnostic, dont le nom commercial est Ode Architecture et dont le gérant est M. L...K..., portant sur des prestations similaires à celles qui auraient été confiées à la société Vogfi ; qu'enfin, les attestations rédigées par certains salariés de la société Ode Formation en 2013, soit postérieurement à l'engagement des dépenses en litige, ne revêtent pas un caractère suffisamment probant pour établir un tel rattachement, compte tenu notamment du lien de subordination des salariés à l'égard de leur employeur ; que, par suite, le préfet a pu valablement rejeter les dépenses en litige ;

En ce qui concerne les dépenses du compte 641100 " primes de stagiaires " au titre de l'exercice 2010 :

27. Considérant qu'il résulte de l'instruction que sous le compte 641100, la société Ode Formation a enregistré six versements pour un montant total de 2 200 euros qui ont été qualifiés de primes destinées à quatre " stagiaires " ; que les pièces versées au dossier consistant en une convention de stage conclue le 27 mai 2010 pour un stage se déroulant du 5 avril 2010 au 25 juin 2010 ayant pour objet la " création identité visuelle et interventions sur un site web existant " et pour lequel il était prévu une " gratification " de 417,09 euros par mois, ainsi qu'une fiche de proposition de stage non signée et concernant un autre stagiaire ne permettent pas d'établir le rattachement de ces dépenses à l'activité de formation professionnelle continue de la société Ode Formation ; que cette dernière ne saurait faire état de caractère modique de la somme en litige pour s'exonérer de la charge de la preuve qui lui incombe en matière de justification des dépenses de formation professionnelle ; que, dans ces conditions, le préfet a pu légalement rejeter ces dépenses ;

En ce qui concerne les dépenses du compte 625700 " déplacement missions réception " au titre de l'exercice 2010 :

28. Considérant que la société requérante ne produit aucun élément justificatif relatif à la dépense d'un montant 1 650 euros qui aurait été engagée pour couvrir les frais d'hôtel d'un stagiaire, la seule circonstance que l'établissement hôtelier en cause serait situé à côté de ses locaux étant insuffisante ; qu'en tout état de cause, les dépenses personnelles des stagiaires n'ont pas à être prises en charge par l'organisme de formation professionnelle ;

En ce qui concerne les dépenses du compte 611040 " Ode Architecture " au titre des exercices 2011 et 2012 :

29. Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors du contrôle, la société Ode Formation a déclaré employer trois à six salariés et un seul formateur, M. M..., et qu'elle avait également recours aux salariés de la SARL Mesure et Diagnostic ainsi qu'à des prestataires sous-traitants pour conduire les actions en désamiantage et celles relatives au métier de diagnostiqueur immobilier ;

30. Considérant, en premier lieu, que la société Ode Formation justifiant de la réalité de certaines actions de formation de diagnostiqueurs immobiliers et de la session " opérateur formation initiale " à la prévention des risques à l'amiante du 27 au 29 juin 2011, comme il a été dit aux points 12 et 20 du présent arrêt, les rémunérations des formateurs dispensant ces formations doivent être admises au titre des dépenses engagées par la société Ode Formation en 2011 ;

31. Considérant, en second lieu, que la société requérante n'a produit aucun contrat conclu avec la SARL Mesure et Diagnostic ou avec les prestataires sous-traitants pour justifier la mise à disposition de formateurs ; qu'elle ne justifie pas non plus, en produisant seulement des bulletins de paie au nom de M. U...émanant de la SARL Mesure et Diagnostic, des activités dans le cadre des formations pratiques de deux formateurs, M. U...et M.I..., dont elle admet qu'ils n'apparaissent sur aucun des plannings ; que si elle soutient que les dépenses des " formations pratiques " de mise en situation auraient dû être prises en compte par l'administration, les éléments versés au dossier consistant en des courriers électroniques, pour la plupart datés de 2010, soit au titre d'une année non concernée par les dépenses contestées, ou des exercices et questionnaires à choix multiples, ne permettent pas d'apprécier le volume horaire correspondant spécifiquement à des formations pratiques distinctes de la formation théorique ; que si la société remet en cause le temps de préparation des cours et de suivi retenu par l'administration sur la base des stipulations de la convention collective des organismes de formation du 10 juin 1998, elle ne justifie pas appliquer des mesures plus favorables, en vertu de l'article L. 2254-1 du code du travail susceptibles de déterminer un coefficient horaire plus élevé pour le temps de préparation et les activités connexes ; qu'enfin, si la société Ode Formation conteste également le taux horaire appliqué par l'administration pour déterminer la rémunération justifiée des formateurs mis à disposition et l'absence de prise en compte des congés payés dans le calcul à hauteur de 10% de la rémunération mensuelle brute, il résulte de l'instruction que celui-ci a été effectué individuellement pour chaque formateur à partir des éléments transmis par la société requérante lors du contrôle, notamment les bulletins de paie des salariés de la SARL Mesure et Diagnostic ;

32. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Ode Formation est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de sa demande tendant à ce que soient admises les journées de formation de diagnostic immobilier pour les stagiaires mentionnés au point 12 du présent arrêt et les deux journées de la formation initiale opérateur du 27 au 29 juin 2011 d'un montant de 2 670 euros, ainsi que les dépenses correspondantes aux rémunérations de formateurs ayant dispensé ces formations ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

33. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais que la société Ode Formation a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 4 septembre 2014 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris est annulée en tant que n'ont pas été admises au titre de l'exercice comptable 2011 la " formation initiale opérateur " de prévention des risques à l'amiante du 27 au 29 juin 2011 d'un montant de 2 670 euros, la formation de diagnostic immobilier pour les stagiaires M.V..., M. T...Z...et M. G...Z...à hauteur de 28 journées, M.J..., M.O..., M. R..., M. H...à hauteur de 27 journées, M.AB..., M. X...à hauteur de 26 journées, M. W...à hauteur de 25 journées, M. E...à hauteur de 24 journées, M. AA... à hauteur de 23 journées, M.N..., M.P..., M. B...à hauteur de 28 journées et M. Y...et M. Q...à hauteur de 27 journées ainsi que les dépenses correspondantes aux rémunérations des formateurs ayant dispensé ces formations.

Article 2 : La société Ode Formation est renvoyée devant le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, pour qu'il soit procédé au calcul des sommes qui doivent être admises au titre des formations effectuées et des dépenses réellement engagées conformément à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement n° 1426485 du 27 mai 2015 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à la société Ode Formation la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Ode Formation est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ode Formation, au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, et au ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Poupineau, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 avril 2018.

Le rapporteur,

V. LARSONNIERLe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA02754


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02754
Date de la décision : 05/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-09 Travail et emploi. Formation professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : CHELLY SZULMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-04-05;15pa02754 ?
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