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22/03/2018 | FRANCE | N°17PA02679

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 22 mars 2018, 17PA02679


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 février 2016 par lequel le préfet de police lui a retiré, pour une durée de trente jours fermes, sa carte professionnelle n° 814630 de conducteur de taxi.

Par un jugement n° 1608579/6-3 du 8 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2017, M. D..., représenté par Me Swennen, demande à la Cour :

1°)

d'annuler le jugement n° 1608579/6-3 du 8 juin 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) à titre s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 février 2016 par lequel le préfet de police lui a retiré, pour une durée de trente jours fermes, sa carte professionnelle n° 814630 de conducteur de taxi.

Par un jugement n° 1608579/6-3 du 8 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2017, M. D..., représenté par Me Swennen, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1608579/6-3 du 8 juin 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une enquête sur les faits dont la constatation apparaît utile à l'instruction de l'affaire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- la décision contestée du 5 février 2016 doit être regardée comme ayant été prise par une autorité incompétente, qui ne justifie pas d'une délégation de signature régulière et publiée ;

- la convocation devant la commission de la discipline des conducteurs de taxi de la préfecture de police du 22 décembre 2015 ne mentionnait pas les faits qui lui étaient reprochés, en méconnaissance des dispositions de l'article 4 alinéa 2 de l'arrêté du préfet de police n° 2014-00408 du 21 mai 2014, entachant ainsi la décision litigieuse d'un vice de procédure ;

- alors que, contrairement à ce qu'affirme le préfet de police, il s'est présenté à la séance de la commission de discipline, il n'a pas eu la possibilité de faire des observations orales ou des déclarations afin de contester la teneur de la plainte du client, en méconnaissance des dispositions de l'article 9 de l'arrêté du préfet de police n° 2014-00408 du 21 mai 2014, entachant ainsi la décision litigieuse d'un vice de procédure ;

- le procès-verbal relatant la séance de la commission de discipline n'a été soumis à la signature ni du plaignant, ni de l'intéressé ; en outre, la signature du plaignant ne figurait pas sur la plainte ; ainsi, la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas matériellement établis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des transports,

- l'arrêté interpréfectoral n° 01-16385 du 31 juillet 2001 relatif aux exploitants et aux conducteurs de taxi dans la zone parisienne modifié,

- l'arrêté préfectoral n° 2014-00408 du 21 mai 2014 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de la commission de discipline des conducteurs de taxi,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Luben,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de Me Swennen, avocat de M.D....

Considérant ce qui suit :

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

1. Par l'arrêté contesté du 5 février 2016, le préfet de police a décidé de retirer la carte professionnelle de conducteur de taxi de M. D...pour une durée de trente jours fermes, au double motif " que le 18 août 2015, lors d'une course au départ de l'aéroport d'Orly Ouest à destination de Paris 12ème, le chauffeur de taxi D...Benoit n'a pas emprunté l'itinéraire le plus direct pour conduire ses clients, en infraction à l'article 24.10° de l'arrêté inter-préfectoral susvisé ; que dans ces circonstances, le chauffeur de taxi susnommé s'est montré agressif envers ses clients qui lui demandaient une note de course, en infraction à l'article 23.13° [lire 25.13] de l'arrêté inter-préfectoral susvisé ; ".

2. Aux termes de l'article L. 3121-10 du code des transports : " L'exercice de l'activité de conducteur de taxi est subordonné à la délivrance d'une carte professionnelle par l'autorité administrative " ; aux termes de l'article L. 3124-2 du même code : " En cas de violation par un conducteur de taxi de la réglementation applicable à la profession, l'autorité administrative peut lui donner un avertissement ou procéder au retrait temporaire ou définitif de sa carte professionnelle. " ; aux termes de l'article 20 de l'arrêté inter-préfectoral du 31 juillet 2001 susvisé : " La carte professionnelle de conducteur de taxi peut être retirée à titre temporaire ou définitif, par le préfet de police, après avis de la commission de discipline des conducteurs de taxi, en cas de violation par le conducteur de la réglementation applicable à la profession (...) ".

3. En premier lieu, le moyen, soulevé en première instance, tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été pris par une autorité incompétente, repris en appel par le requérant qui n'apporte aucune argumentation nouvelle à son soutien, doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 alinéa 2 de l'arrêté préfectoral susvisé du 21 mai 2014 : " La convocation doit indiquer au titulaire de l'autorisation de stationnement qu'il a le droit d'obtenir communication des pièces à l'origine de la procédure engagée (procédure judiciaire, rapport de police, mise en demeure restée sans réponse, plainte...) et des faits qui lui sont reprochés, ainsi que la possibilité de se faire assister d'un défenseur de son choix. ".

5. D'une part, les dispositions réglementaires précitées ne font pas obligation à l'autorité préfectorale de porter à la connaissance de l'intéressé les faits reprochés, et moins encore, a fortiori, comme le soutient le requérant, d'indiquer précisément la qualification juridique des faits qui lui sont reprochés. D'autre part, au surplus, il ressort des pièces du dossier que la lettre recommandée datée du 22 décembre 2015 de convocation de M. D...devant la commission de discipline des conducteurs de taxi du jeudi 14 janvier 2016 indiquait qu'il devrait y répondre des infractions à l'arrêté inter préfectoral n° 01-16385 du 31 juillet 2001 modifié relatif aux exploitants et aux conducteurs de taxis dans la zone parisienne, rapportées dans une plainte du 24 août 2015 relatant des faits du 18 août 2015, dont il trouverait copie jointe à ce courrier de convocation. Par suite, les faits reprochés à M.D..., dans leur exacte formulation par le plaignant, ont été communiqués à l'intéressé préalablement à la séance de la commission de discipline des conducteurs de taxi à laquelle il avait été convoqué.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 9 de l'arrêté préfectoral susvisé du 21 mai 2014 : " Le titulaire de l'autorisation et, le cas échéant, son défenseur peuvent, à tout moment de la séance, demander au président l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales. Ils doivent être invités à présenter d'ultimes observations avant que la commission ne commence à délibérer. ".

7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de la commission de discipline des conducteurs de taxi du jeudi 14 janvier 2016, malgré une rédaction maladroite, que M. D... était absent lors de cette séance à laquelle, comme il a été dit, il avait été régulièrement convoqué. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas eu la possibilité de faire des observations orales ou des déclarations devant la commission de discipline afin de contester la teneur de la plainte du client, en méconnaissance des dispositions réglementaires précitées.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de l'arrêté préfectoral susvisé du 21 mai 2014 : " À la demande d'un membre de la commission, du titulaire de l'autorisation ou de son défenseur, le président peut décider de procéder à une confrontation des témoins ou à une nouvelle audition d'un témoin déjà entendu. ".

9. Il résulte des dispositions réglementaires précitées que la commission de discipline n'est pas tenue d'organiser une telle confrontation, celle-ci pouvant simplement être organisée à la demande d'un membre de la commission, du titulaire de l'autorisation ou de son défenseur ; or il n'est ni établi, ni même allégué que M. D...aurait demandé l'organisation d'une telle confrontation. Par suite, les dispositions réglementaires précitées n'ont pas été méconnues par l'arrêté contesté.

10. En cinquième lieu, d'une part, la plainte datée du 24 août 2015, transmise, comme il a été dit, à l'intéressé jointe à la lettre recommandée datée du 22 décembre 2015 de convocation devant la commission de discipline des conducteurs de taxi du 14 janvier 2016, a été anonymisée, tant en ce qui concerne les noms, prénoms, adresse et coordonnées électroniques que la signature du plaignant. Par suite, M. D...ne saurait soutenir que le défaut de signature, par le plaignant, de cette plainte constituerait un vice de procédure. D'autre part, aucun article de l'arrêté préfectoral susvisé du 21 mai 2014, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'impose que le procès-verbal de la séance de la commission de discipline, qui porte la signature des six représentants de l'administration et des cinq représentants de la profession présents présents lors de cette séance, soit contresigné par le plaignant et/ou l'intéressé.

11. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêté litigieux du 5 février 2016 n'est pas entaché d'un vice de procédure.

12. En sixième lieu, aux termes de l'article 24 de l'arrêté interpréfectoral du 31 juillet 2001 susvisé : " Le conducteur de taxi lorsqu'il est en service, doit (...) 10° Conduire les clients à l'adresse indiquée (...) par le chemin le plus direct, sauf si ceux-ci en indiquent un autre. " ; aux termes de l'article 25 du même arrêté : " Il est interdit au conducteur de taxi en service (...) 13° de se montrer impoli, grossier ou brutal envers quiconque et notamment envers la clientèle ".

13. D'une part, M. D...ne conteste pas être entré dans Paris, venant de l'aérogare d'Orly Ouest, le 18 août 2015, entre 18 heures 17 à 18 heures 44, par la porte d'Ivry, ce qui ne constituait pas le chemin le plus direct pour rejoindre le domicile du plaignant, qui se trouvait au 111, rue de Reuilly. Si M. D...fait valoir qu'il a choisi cet itinéraire " en raison de la présence, à cette hauteur, d'un éboulement sur le périphérique ", il n'établit pas la réalité de cet " éboulement ", alors que le plaignant indique que deux applications Internet qu'il avait consultées indiquaient que les conditions de circulation étaient alors excellentes. Par suite, la matérialité du premier motif de la sanction prononcée par l'arrêté contesté est établie, le requérant ne pouvant utilement soutenir à cet égard que le trajet a été accompli en vingt-sept minutes, ce qui n'aurait rien d'excessif eu égard à la distance et à l'heure de pointe, que le client n'a pas souhaité qu'un autre itinéraire, plus rapide, soit suivi et que le prix payé de la course de trente euros n'était pas excessif. D'autre part, le client, dans sa plainte du 24 août 2015, a indiqué qu'à son arrivée à son domicile, il a demandé une note au conducteur du taxi, et que ce dernier s'est alors montré très agressif en haussant le ton, se mettant même à hurler lorsque le client lui a indiqué qu'il lui manquait de respect et qu'il allait porter plainte contre lui. Si la relation de ces faits contenue dans la plainte n'est corroborée par aucun autre élément, M.D..., pour sa part, n'apporte aucun commencement de preuve de nature à contredire valablement la réalité de ces faits. Par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la matérialité du second motif de la sanction prononcée par l'arrêté contesté ne serait pas établie. En outre, la circonstance que, lors de la séance de la commission de discipline du 14 janvier 2016, le client, présent, n'a repris par oral, après que sa plainte a été lue, que certains de ses griefs, qu'il a synthétisés, ne saurait être regardée comme constituant une discordance entre la plainte du 24 août 2015 et ces déclarations du 14 janvier 2016. Enfin, M. D...ne peut utilement soutenir ni qu'il n'a pas changé de tarif au cours de la course, contrairement à ce que prétend le client, ce grief contenu dans la plainte n'ayant pas été repris au nombre des motifs de la décision de sanction contestée, ni que le client était accompagné, lors de la course litigieuse, d'une personne qui n'a pas présenté de plainte ni établi d'attestation au soutien des allégations de son compagnon de voyage, cette circonstance étant sans incidence sur la matérialité des faits reprochés, qui est établie.

Sur les conclusions subsidiaires tendant à ce que soit diligentée une enquête sur les faits dont la constatation paraît utile à l'instruction de l'affaire :

14. Il résulte de ce qui vient d'être dit que les conclusions susvisées tendant à ce que soit diligentée une enquête sur les faits en cause, qui n'aurait pas d'utilité pour la solution du litige, doivent être rejetées.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 8 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2016 par lequel le préfet de police lui a retiré pour une durée trente jours fermes sa carte professionnelle de conducteur de taxi. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président,

- MmeC..., première conseillère,

- MmeB..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 22 mars 2018.

Le président-rapporteur,

I. LUBENLa première conseillère la plus ancienne,

M. C...La greffière,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLOLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA02679


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02679
Date de la décision : 22/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-03-02 Police. Police générale. Circulation et stationnement. Réglementation de certaines activités dans l'intérêt de la circulation. Taxis (voir : Commerce et industrie).


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : SWENNEN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-22;17pa02679 ?
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