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22/03/2018 | FRANCE | N°17PA02479

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 22 mars 2018, 17PA02479


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...E...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 15 février 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " passeport talent ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des é

trangers et du droit d'asile dans un délai d'un mois à compter de la notificati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...E...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 15 février 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " passeport talent ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1704843/6-3 du 22 juin 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2017, Mme E..., représentée par

Me D...puis par Me B...A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1704843/6-3 du 22 juin 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 15 février 2017 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux est entaché d'erreur de droit dès lors qu'elle aurait dû, à l'expiration de son premier titre de séjour, bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " et non "salarié en mission " et aurait ainsi obtenu le maintien de son droit au séjour à l'issue de la rupture de son contrat de travail ;

- la rupture conventionnelle du contrat de travail due à un syndrome d'épuisement professionnelle doit être regardée comme involontaire ;

- l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de ce que le refus de délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " passeport talent " méconnaît les dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 29 septembre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 octobre 2017.

Un mémoire a été produit pour Mme E...le 12 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Notarianni a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme E..., ressortissante américaine née le 18 décembre 1982 à Duluth aux Etats-Unis, est entrée en France le 9 décembre 2010 sous couvert d'un visa multi-entrées de long séjour type D pour occuper un poste de directrice de département dans la société " Abercrombie et Fitch " dans le cadre d'une mobilité intra-groupe et a été munie le jour même de la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle portant la mention " salarié en mission " alors prévue au 5° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable jusqu'au 8 décembre 2013 ; que cette carte a été renouvelée par décision du 9 décembre 2013 jusqu'au 8 décembre 2016 ; que le contrat de travail de Mme E..., qui avait conclu en avril 2013 un nouveau contrat de travail en tant que représentante des ressources humaines avec le même employeur, a pris fin dans le cadre d'une rupture conventionnelle signée en juin 2016 avec effet au 29 décembre 2016 ; que Mme E...a sollicité le 13 janvier 2017 la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " passeport talent " sur le fondement du 3° de l'article L. 313-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 15 février 2017, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé son pays de destination ; que Mme E... relève appel du jugement du 22 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant notamment à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour pluriannuelle portant la mention "passeport talent ", d'une durée maximale de quatre ans, est délivrée, dès sa première admission au séjour : (...) 3° A l'étranger qui vient en France dans le cadre d'une mission entre établissements d'une même entreprise ou entre entreprises d'un même groupe et qui justifie, outre d'une ancienneté professionnelle d'au moins trois mois dans le groupe ou l'entreprise établi hors de France, d'un contrat de travail conclu avec l'entreprise établie en France (...)Lorsqu'un étranger bénéficiaire de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention " passeport talent " et exerçant une activité salariée prévue aux 1°, 2° et 4° du présent article se trouve involontairement privé d'emploi à la date du renouvellement de sa carte, celle-ci est renouvelée pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail" ; qu'en vertu de l'article L. 313-22 de ce code : " L'étranger titulaire d'un document de séjour délivré sur un autre fondement que celui de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20 et L. 313-21 bénéficie de la délivrance de cette carte lorsqu'il en fait la demande et en remplit les conditions " ; qu'aux termes de l'article R. 313-51 de ce code : " Pour l'application du 3° de l'article L. 313-20, l'étranger présente en outre à l'appui de sa demande : 1° Un contrat de travail d'une durée supérieure à trois mois avec un employeur établi en France et justifiant d'une rémunération brute au moins égale à 1,8 fois le salaire minimum de croissance annuel (...)" ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E..., employée par la société " Abercrombie et Fitch " en qualité de représentante des ressources humaines sur la base d'un contrat à durée indéterminée conclu le 1er avril 2013, a signé le 17 juin 2016 une convention de rupture de son contrat de travail qui a pris effet le 31 août 2016 ; qu'ainsi, elle ne justifiait pas, à la date de l'arrêté litigieux, ni même à la date de sa demande, du contrat de travail prévu par les dispositions susmentionnées de l'article L. 313-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, le préfet était fondé à refuser la délivrance du titre de séjour " passeport talent " sollicité ;

4. Considérant, d'autre part, que si la requérante soutient que le préfet de police aurait commis une erreur de droit en procédant en 2013 au renouvellement de son titre de séjour de trois ans " salarié en mission " au lieu de lui délivrer un titre " salarié " plus protecteur en cas de privation involontaire d'emploi, ce moyen est, comme l'ont relevé les premiers juges, inopérant pour contester la légalité de la décision de refus de titre de séjour en litige ; que, dans ces conditions, elle ne soutient pas utilement qu'elle remplissait en 2013 l'ensemble des conditions de délivrance du titre salarié prévu au 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce dont au demeurant elle ne justifie pas ; qu'au surplus, et en tout état de cause, la requérante, qui n'avait pas mentionné la nature du titre sollicité dans la fiche de salle remplie en 2013 en vue du renouvellement de son titre de séjour où elle s'était bornée à indiquer séjourner en France sous le statut de " salarié en mission ", n'établit pas avoir demandé à bénéficier de la délivrance d'un titre salarié ni même avoir mis le préfet en mesure de le lui délivrer et n'a au demeurant pas contesté le renouvellement en 2013 de son titre de séjour en tant que " salarié en mission " ;

5. Considérant, en deuxième lieu que Mme E...soutient que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation par le préfet de police de la gravité des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle en ce que la fin de son contrat de travail est intervenue dans le cadre d'un syndrome d'épuisement professionnel très violent imputable à son employeur et pour lequel elle suit un traitement psychologique et médicamenteux, que le refus de titre l'a privée du bénéfice des indemnités journalières et qu'il lui est enjoint dans de telles circonstances de quitter la France alors qu'elle y réside depuis près de sept ans ; que, toutefois, le fait que le refus d'un titre de séjour dont elle ne remplissait pas les conditions d'octroi l'aurait privée du bénéfice des indemnités journalières de l'allocation de retour à l'emploi ne peut être regardé comme entachant cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation du préfet de police sur les conséquences de sa décision ; que, par ailleurs si elle justifie suivre depuis le 2 février 2016 un traitement médicamenteux et une psychothérapie en raison du syndrome d'épuisement professionnel dont elle se prévaut, elle n'établit, ni même ne soutient, que ce traitement ne pourrait pas être poursuivi en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'enfin, la requérante, divorcée et sans enfant, ne justifie ni de l'existence ni de l'intensité de relations privées, familiales ou professionnelle qu'elle aurait en France, ni même n'assortit son moyen d'erreur manifeste d'appréciation d'aucune précision à cet égard autre que la durée de près de sept années de son séjour en France, alors qu'il est constant qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans dans son pays d'origine et qu'y résident ses parents et ses soeur et frère ; que, dans ce conditions, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2017 du préfet de police ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 mars 2018.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNILe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 17PA02479


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02479
Date de la décision : 22/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-06-02-01 Étrangers. Emploi des étrangers. Mesures individuelles. Titre de travail.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. PLATILLERO
Avocat(s) : D. SULTAN

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-22;17pa02479 ?
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