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22/03/2018 | FRANCE | N°17PA00960

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 22 mars 2018, 17PA00960


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 7 février 2017 par lequel le préfet de police a décidé son transfert vers les autorités italiennes

Par une ordonnance n° 1703076/8 du 28 février 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mars 2017, M. D..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler

l'ordonnance n° 1703076/8 du 28 février 2017 du magistrat désigné du Tribunal administratif de Paris ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 7 février 2017 par lequel le préfet de police a décidé son transfert vers les autorités italiennes

Par une ordonnance n° 1703076/8 du 28 février 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mars 2017, M. D..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1703076/8 du 28 février 2017 du magistrat désigné du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 7 février 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour comme demandeur d'asile dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat, Me E..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête n'était pas irrecevable car introduite dans le délai de recours ; l'ordonnance attaquée est ainsi entachée d'un défaut de motivation et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision attaquée est entachée d'une incompétence de l'auteur de l'acte ;

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 mai 2017 bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le règlement (UE) 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

M. Luben a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant ivoirien né le 5 septembre 1986, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile. Par une décision du 7 février 2017, le préfet de police, après avoir relevé que l'examen de cette demande relevait des autorités italiennes et que ces dernières avaient, le 18 janvier 2017, accepté implicitement de reprendre M. D...en charge, a, sur le fondement des stipulations de l'article 18 (1b) du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé, décidé qu'il serait remis aux autorités italiennes. M. D...relève appel de l'ordonnance du 28 février 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête comme tardive.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. " ; aux termes de l'article L. 742-4 du même code :

" I. - L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif (...)". Aux termes de l'article 38 du décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991 : " Lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter : a) De la notification de la décision d'admission provisoire ; b) De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ; c) De la date à laquelle le demandeur à l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 56 et de l'article 160 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ; d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la décision du 7 février 2017, qui comportait l'indication des voies et délais de recours ouverts, a été notifiée le même jour à M.D.... En introduisant une demande d'aide juridictionnelle le 21 février 2017, dans le délai de recours des quinze jours de contestation d'une décision de transfert, le délai de recours pour déposer une requête en annulation de la décision attaquée doit être regardé comme ayant été prorogé. Par suite, en introduisant sa requête d'annulation, enregistrée le 22 février 2017 auprès du greffe du Tribunal administratif de Paris, M. D...n'était pas tardif ; c'est ainsi à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a, par l'ordonnance contestée, rejeté sa requête.

4. Par suite, il y a lieu d'annuler l'ordonnance du 28 février 2017 et de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

5. En premier lieu, il résulte de l'arrêté n° 2014-00248 relatif aux missions et à l'organisation de la direction de la police générale régulièrement publié au bulletin officiel de la Ville de Paris du 28 mars 2018, que la sous-direction de l'administration des étrangers de la préfecture de police de Paris est composée des 6ème, 7ème, 9ème et 10ème bureaux chargés de l'application de la réglementation relative au séjour des étrangers selon une répartition par nature de titre de séjour ou par nationalité arrêtée par le directeur. Par arrêté n° 2016-01252 du

19 octobre 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 75-2016-257 du 21 octobre 2016, le préfet de police a donné délégation à M. François Lematre, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, chef du 10ème bureau de la direction de la police générale, pour signer tous actes, arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions en cas d'absence ou d'empêchement de l'autorité administrative supérieure. Par suite, M. François Lematre, signataire de l'arrêté contesté, était autorisé à signer les décisions relatives au transfert vers les autorités responsable de l'examen des demandes d'asile. Il s'en suit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté doit être écarté comme manquant en fait.

6. En deuxième lieu, les exigences de la loi du 11 juillet 1979 s'agissant de la motivation des décisions individuelle ont été reprises par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration entré en vigueur au 1er janvier 2016. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

7. Il ressort de l'arrêté contesté qu'il vise notamment l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 et précise que M. D... a sollicité un titre de séjour en qualité de demandeur d'asile. Il indique que les autorités italiennes responsables ont été saisies en application de l'article 18 (1b) du règlement (UE) n° 604/2013 et ont accepté implicitement de reprendre M.D.... L'arrêté mentionne également que M. D...ne peut se prévaloir d'une vie privée et familiale stable en France, qu'il établit ni être dans l'impossibilité de retourner en Italie ni l'existence de risque personnel constituant une atteinte grave au droit d'asile en cas de remise aux autorités italiennes responsables de sa demande d'asile. Ainsi, l'arrêté contesté comporte l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui fondent la décision de transfert aux autorités italiennes. Cette motivation, qui n'est pas stéréotypée contrairement à ce que soutient le requérant, satisfait aux exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ladite décision doit être écarté comme manquant en fait.

8. En troisième lieu, M. D...soutient que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant de ses conséquences sur sa situation familiale et personnelle. Toutefois, le requérant ne développe aucun argument à l'appui de son moyen et ne verse aucun élément au dossier permettant à la cour d'apprécier en quoi la décision litigieuse porterait atteinte à sa situation. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 7 février 2017. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. D...sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

10. Le préfet de police n'étant pas la partie perdante dans cette instance, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. D...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 28 février 2017 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La requête à fin d'annulation de l'arrêté du 7 février 2017 de M. D... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président,

- Mme B..., première conseillère,

- Mme A..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 22 mars 2018.

Le président rapporteur,

I. LUBEN La première conseillère la plus ancienne,

M. B...

La greffière,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLOLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA00960


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00960
Date de la décision : 22/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : GATEAU LEBLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-22;17pa00960 ?
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