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21/03/2018 | FRANCE | N°17PA00952

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 21 mars 2018, 17PA00952


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...et la SARL United Kitchen ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 août 2015 par lequel le préfet de police de Paris a décidé de la fermeture, pour une durée de quinze jours, de l'établissement dénommé "Best of India" situé au 170 rue du Faubourg Saint-Denis à Paris.

Par un jugement n°1517572 du 24 janvier 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mars

2017, M. B...et la société United Kitchen, représentés par MeA..., demandent à la Cour :

1°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...et la SARL United Kitchen ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 août 2015 par lequel le préfet de police de Paris a décidé de la fermeture, pour une durée de quinze jours, de l'établissement dénommé "Best of India" situé au 170 rue du Faubourg Saint-Denis à Paris.

Par un jugement n°1517572 du 24 janvier 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mars 2017, M. B...et la société United Kitchen, représentés par MeA..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 24 janvier 2017 ;

2°) de faire droit à leurs conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- M. B...n'a pas été en mesure d'identifier les rapports établis par les services administratifs présents lors du contrôle ; ces rapports ne lui ont, en outre, pas été communiqués avant septembre 2015 ;

- l'arrêté contesté méconnait l'article L. 3332-15 du code de la santé publique et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'aucun désordre lié au fonctionnement du restaurant ne justifiait sa fermeture administrative ;

- le tribunal de grande instance de Paris a prononcé la relaxe du gérant de la société lors d'une audience du 14 octobre 2015 ; la décision attaquée méconnaît l'autorité de chose jugée ;

- de nombreuses incohérences sont apparues dans les actes de procédure établis par les services de police et ceux de l'URSSAF ;

- la décision contestée est entachée d'erreurs de fait ; M. C...n'étant pas salarié de la société, il ne participait pas aux activités du restaurant mais était venu pour un contrat de prestations de services informatiques en tant que représentant de la société Goal Seo ;

- M. C...bénéficiait d'une autorisation provisoire de séjour lui permettant de résider régulièrement sur le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la décision contestée est suffisamment motivée ;

- la fermeture administrative d'un établissement est une mesure de police à caractère préventif ; elle n'a pas pour seul objectif de faire cesser une infraction, elle a aussi et surtout pour finalité d'en prévenir le renouvellement ;

- la décision de relaxe est intervenue postérieurement à la notification de l'arrêté, alors que cette mesure de fermeture temporaire avait déjà produit tous ses effets ;

- le procès verbal des agents de contrôle fait foi jusqu'à preuve du contraire ; une attestation établie par un individu se déclarant " habitué de ce restaurant " ne peut être considérée comme impartiale ;

- les faits reprochés étaient établis ; M. C...exerçait une activité professionnelle non déclarée au moment du contrôle ; son autorisation provisoire de séjour ne l'autorisait pas à travailler ; le préfet de police aurait pu prononcer la même mesure de fermeture administrative en ne retenant que le délit d'emploi non déclaré ;

- l'arrêté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; la durée de la fermeture prononcée en l'espèce est proportionnée à la nature des faits.

Vu :

- les autres pièces du dossier,

- le code pénal,

- le code de la santé publique,

- le code du travail,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pena ;

- et les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public.

1. Considérant que l'établissement dénommé " Best of India ", situé dans le 10ème arrondissement de Paris, est exploité par la société United Kitchen, dont M. B...est le gérant ; qu'à la suite d'un contrôle effectué le 12 mai 2015 par les services de police et par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), le préfet de police, par un arrêté du 21 août 2015, a fermé cet établissement pendant une durée de 15 jours ; que la société United Kitchen et M. B...font appel du jugement du 24 janvier 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 21 août 2015 du préfet de police vise les textes applicables et notamment l'article L. 3332-15-3 du code de la santé publique ; qu'il mentionne le contrôle effectué le 12 mai 2015 par les services de police et de l'URSSAF et le fait qu'il a été constaté qu'une personne de nationalité étrangère, séjournant irrégulièrement sur le territoire national, exerçait dans les locaux de ce restaurant une activité professionnelle non déclarée ; que si les appelants font valoir que l'arrêté contesté ne permettrait pas de connaître l'identité de la " personne de nationalité étrangère " ni la qualification exacte des infractions délictuelles qui lui sont reprochées, de tels éléments ne sont pas de nature à remettre en cause sa légalité, dès lors que M. B...avait été interrogé à la suite du contrôle sur les faits qui lui étaient reprochés et qu'il avait reçu, en juillet 2015, une convocation du tribunal de grande instance lui indiquant à nouveau les infractions et l'identité de la personne étrangère non munie d'un titre de travail qu'il avait employée ; que, dès lors, l'arrêté attaqué est suffisamment motivé, tant en droit qu'en fait, et répond ainsi aux exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que les textes applicables n'imposaient pas à l'administration de communiquer à la société l'ensemble des pièces de la procédure, notamment les rapports des services de police et de l'URSSAF suite au contrôle effectué, au demeurant couverts par le secret de l'instruction ; qu'en outre, M. B...n'allègue pas en avoir demandé la communication ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure contradictoire doit être écarté ;

4. Considérant, en troisième lieu, que les appelants font valoir que le juge pénal, dans un jugement du 14 octobre 2015, a prononcé une relaxe qui s'imposerait au juge administratif ; qu'ils ne sauraient toutefois se prévaloir d'un jugement dépourvu de toute motivation, alors que les procès-verbaux rédigés suite au contrôle, lesquels font foi jusqu'à preuve du contraire, font notamment état de ce que M.C..., ressortissant sri-lankais, versait de la sauce dans les assiettes, laissant ainsi fortement présumer une relation professionnelle entre ce dernier et la société United Kitchen ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : " 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. / Cette fermeture doit être précédée d'un avertissement qui peut, le cas échéant, s'y substituer, lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d'une défaillance exceptionnelle de l'exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier. / (...) 3. Lorsque la fermeture est motivée par des actes criminels ou délictueux prévus par les dispositions pénales en vigueur, à l'exception des infractions visées au 1, la fermeture peut être prononcée pour six mois. Dans ce cas, la fermeture entraîne l'annulation du permis d'exploitation visé à l'article L. 3332-1-1. / 4. Les crimes et délits ou les atteintes à l'ordre public pouvant justifier les fermetures prévues au 2 et au 3 doivent être en relation avec la fréquentation de l'établissement ou ses conditions d'exploitation / (...) " ;

6. Considérant que lorsqu'elle est ordonnée, conformément aux dispositions précitées combinées des 3 et 4 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, en cas de commission d'un crime ou d'un délit en relation avec l'exploitation d'un débit de boissons, la fermeture qui peut en être ordonnée doit être regardée non comme une sanction, mais comme une mesure de police qui a pour objet de prévenir la continuation ou le retour de désordres liés au fonctionnement de l'établissement, indépendamment de toute responsabilité de l'exploitant ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la mesure de fermeture de l'établissement " Best of India " décidée par le préfet de police le 21 août 2015 est fondée sur les actes délictueux constitués par la dissimulation de salarié et l'emploi d'étranger sans titre de travail qui ont été constatés au cours d'un contrôle effectué le 12 juin précédent ; que si les appelants invoquent le fait qu'à la date de l'arrêté contesté, les faits reprochés ne se poursuivaient pas, et qu'ils se prévalent en outre de leur caractère isolé et ponctuel ayant déjà donné lieu à des mesures de redressement prises en application du code du travail par les services de l'Urssaf, ces circonstances ne sont pas de nature à établir que le préfet de police aurait fait une inexacte application des dispositions susmentionnées aux faits de l'espèce en décidant de la fermeture de l'établissement pour une durée de quinze jours, alors que les dispositions dont il est fait application autorisent une durée maximale de fermeture de six mois ;

8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que la décision de fermeture contestée n'est pas, pour les raisons sus énoncées, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...et la SARL United Kitchen ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2015 ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...et de la société United Kitchen est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, à la SARL United Kitchen et à M. D...B....

Copie sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 6 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 21 mars 2018.

Le rapporteur,

E. PENALe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 17PA00952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00952
Date de la décision : 21/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Eléonore PENA
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : SCP BOLLING DURAND et LALLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-21;17pa00952 ?
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