Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 à 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1502641/3 du 20 avril 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 juin et 23 novembre 2017, M. et
MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 20 avril 2017 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses.
Ils soutiennent que :
- la procédure de désignation des bénéficiaires des revenus considérés comme distribués n'a pas été respectée ;
- la demande orale de désignation des bénéficiaires n'est pas établie et prive en tout état de cause les contribuables de garanties liées à l'assistance d'un conseil et au délai pour y répondre ;
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;
- la procédure utilisée avait comme seul objectif d'éviter la prescription ;
- l'administration n'apporte pas la preuve que M. B...aurait déclaré être seul maître de l'affaire ni qu'il se serait désigné comme bénéficiaire des revenus distribués ;
- à supposer qu'il ait été seul maître de l'affaire, il n'y a pas identité entre le fait d'être le seul maître de l'affaire et le fait d'être seul bénéficiaire des revenus distribués ;
- l'administration n'est fondée à désigner elle-même les bénéficiaires des revenus distribués, sans recourir à la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts, que lorsqu'elle est en mesure de prouver qui sont ces bénéficiaires, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
- les taxations portent essentiellement sur des sommes dont la qualification de distribution est impossible, ou qui ont été encaissées par d'autres personnes que les épouxB... ;
- les charges admises en déduction ou les passifs injustifiés infondés ne peuvent être à l'origine d'aucun profit distribué ;
- les produits non comptabilisés ont été régularisés au titre de l'exercice suivant ;
- ils ont été encaissés par la société DSG et non par les épouxB... ;
- les affaires annulées n'ont donné lieu à aucune distribution ; la preuve de l'annulation a été apportée par la production d'une note d'avoir ;
- les factures réglées à des sociétés tierces n'ont donné lieu à aucun versement au profit de M.B... ;
- les factures écartées pour des motifs de forme ont été payées dans l'intérêt de l'entreprise ;
- la société ayant mouvementé deux comptes de bilan pour la somme identique de
29 521 euros, au crédit et au débit, l'actif net n'a pas été affecté et le rehaussement au titre du passif non justifié est sans fondement ;
- la réintégration d'une charge au titre de 2007 et d'un passif injustifié au titre de 2008 font double emploi ;
- l'administration a imposé ces distributions sans tenir compte du fait que l'exercice de la société DSG commence le 1er avril et se termine le 30 mars alors que l'impôt sur le revenu est établi par année civile ;
- les rehaussements de taxe concernant les charges admises du bénéfice imposable ne donnent pas lieu à un profit sur le trésor.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 octobre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 23 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au
14 décembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant M. et MmeB....
1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la SARL DSG dont
M. B...est le gérant et associé à 50 %, et d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal personnel de M. et MmeB..., l'administration a imposé, entre les mains de ces derniers, des revenus d'activité non déclarés et des revenus considérés comme distribués au titre des années 2006 à 2008 ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 20 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande en décharge des impositions établies en conséquence ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que, par une décision du 7 novembre 2017, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a prononcé le dégrèvement à hauteur de 5 978 euros, en droits et pénalités, du supplément de contributions sociales mis à la charge de M. et Mme B...au titre des années 2006 à 2008 ; que, par suite, les conclusions de la requête afférentes auxdites impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité de la procédure :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification en date du 21 décembre 2009 adressée à M. et Mme B...indiquait les motifs pour lesquels M. B...devait être regardé comme maître de l'affaire de la société DSG et par conséquent comme bénéficiaire des revenus distribués par cette société, ainsi que les modalités de calcul de ces revenus ; que cette proposition de rectification se référait expressément à la proposition de rectification en date du 18 décembre 2009 adressée à la société, laquelle était jointe en annexe et détaillait les modalités de détermination des rehaussements des résultats sociaux ; qu'ainsi, les contribuables doivent être regardés comme ayant été informés des motifs de droit et de fait fondant la rectification de manière suffisante pour leur permettre de présenter utilement leurs observations ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification ne peut qu'être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à
l'article 1759. " ; qu'aux termes de l'article 1759 du même code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à
100 % des sommes versées ou distribuées. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de l'amende est ramené à
75 %. " ;
6. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 117 du code général des impôts que, si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir cette personne morale à la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts, mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques que l'administration estime pouvoir considérer, compte tenu des renseignements dont elle dispose, comme bénéficiaires des distributions ; que, par suite, M. et Mme B...ne peuvent se prévaloir de ce que l'administration, qui n'était pas tenue de le faire, n'a pas, aux fins d'éviter la prescription de l'année 2006, mis en oeuvre la procédure prévue par les dispositions de l'article 117 du code général des impôts ; que la circonstance que le service aurait, dans la proposition de rectification adressée le 18 décembre 2009 à la société DSG, fait état de la qualité de maitre de l'affaire de M.B..., et de ce qu'au cours de la dernière intervention sur place, cette qualité aurait été reconnue par l'intéressé ne révèle, en tout état de cause, aucune mise en oeuvre irrégulière de la procédure prévue par les dispositions susmentionnées ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales :
" Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. " ; que M. et MmeB..., qui n'ont pas répondu dans le délai d'un mois à la proposition de rectification qui leur a été adressée et qui doivent en conséquence être regardés comme ayant tacitement accepté les rehaussements en cause, supportent la charge de la preuve de l'exagération des impositions qu'ils contestent ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) " ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. (...) " ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) " ; que le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle ;
9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la vérification de la comptabilité de la SARL DSG, celle-ci s'est vu notifier des rehaussements de ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008 correspondant à une remise en cause de charges, à une minoration de chiffre d'affaires, à des produits non comptabilisés et à un passif injustifié ; que ces sommes sont considérées comme des revenus distribués au sens des dispositions précitées ; qu'en faisant valoir, sans que cela soit contesté, que M. B...était, au cours des années en cause, gérant de droit et décisionnaire des actes engageant la société, tant du point de vue économique que financier, le second associé à
50 %, qui résidait en Egypte, ne participant pas à la vie économique de la société, et en produisant la copie de chèques établis au nom de la société sur lesquels apparaît la signature de M.B..., l'administration établit que l'intéressé était le seul maître d'affaires de la SARL DSG ; qu'ainsi, en sa qualité de maître d'affaires de la SARL DSG, M. B...est réputé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société placée sous son contrôle ;
10. Considérant, en deuxième lieu, que le rehaussement relatif à la distribution du profit sur le trésor afférent aux factures de sous-traitance dont le montant a été admis en charge déductible du résultat de la société DSG mais qui ont donné lieu à un rehaussement au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible a été abandonné avant l'introduction de l'instance devant les premiers juges ; que le moyen dirigé contre ce rehaussement est par suite dépourvu d'objet ;
11. Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce qui est soutenu, M. B...doit être regardé comme ayant appréhendé le montant des distributions correspondant à la prise en charge, par la société DSG, des factures libellées au nom de son gérant et qui constituent, s'agissant de dépenses de téléphone, de fournitures diverses, notamment de bricolage, et de frais de déplacements, et en l'absence de preuve contraire, des dépenses personnelles ;
12. Considérant, en quatrième lieu, qu'en se bornant à faire valoir, sans d'ailleurs l'établir, que les produits non comptabilisés ont fait l'objet d'écritures de régularisation au titre de l'exercice suivant, M. et Mme B...ne contestent pas utilement les rehaussements qui leur été notifiés à raison desdits produits au titre de l'exercice clos en 2006 ; que la circonstance que les sommes en cause auraient été, dans un premier temps, encaissées par la société DSG, ne fait pas obstacle à ce qu'elles soient regardés comme ayant été, par la suite, désinvesties au profit du maître de l'affaire ;
13. Considérant, en cinquième lieu, que, s'agissant des produits ayant fait l'objet d'écritures d'annulation, M. et Mme B...n'établissent pas la réalité de telles écritures en se prévalant d'une note d'avoir produite dans un dossier distinct, relatif aux impositions mises à la charge de la société DSG, et qui, d'ailleurs, ne fait pas référence à la facture initiale et n'est accompagnée d'aucun document permettant de lui donner date certaine ; qu'en l'absence de preuve du bien fondé des écritures d'annulation invoquées, le moyen tiré de ce que les produits annulés n'ont été encaissés par personne ne peut qu'être écarté ;
14. Considérant, en sixième lieu, que la société DSG n'ayant pas justifié de la réalité de la dette comptabilisée à l'égard de fournisseurs pour un montant de 29 521,39 euros, l'administration a remis en cause l'écriture de passif correspondante à la clôture de l'exercice 2008 ; qu'aucun document n'a été produit permettant de justifier de la réalité de la dette en cause ; que le moyen tiré de ce que ladite écriture de passif aurait pour contrepartie une écriture à l'actif du bilan n'est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé du rehaussement dès lors que les requérants n'établissent pas la réalité de cette écriture d'actif et ne fournissent aucun élément permettant de rapprocher ces deux écritures et d'en déduire que l'absence de justification de la première impliquerait l'annulation de la seconde ; qu'enfin, en l'absence de tout élément permettant de justifier de la nature des dettes comptabilisées au passif du bilan de l'exercice 2008, le moyen, dépourvu de toute précision, tiré de ce que le rehaussement correspondant ferait double emploi avec le rehaussement notifié au titre des charges déduites à tort au cours de l'exercice 2007 ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;
15. Considérant, en septième lieu, que s'agissant des montants déduits par la société DSG en l'absence de factures, M. et Mme B...ne contestent pas valablement l'appréhension des montants correspondants en se bornant à affirmer, sans plus de précisions, que les factures réglées à des sociétés tierces n'ont donné lieu à aucun versement au profit de M.B... ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les charges de sous-traitance déduites sur présentation de factures irrégulières et ayant donné lieu à un rehaussement en matière de taxe sur la valeur ajoutée aient été intégrées dans les revenus distribués au profit de M.B... ;
16. Considérant, enfin, que, pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 précité du code général des impôts, les bénéfices sociaux visés par cette disposition sont présumés distribués à la clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si la société ou l'administration apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, soit postérieure, soit antérieure à cette date ; que les requérants, qui n'apportent aucun élément permettant de retenir une autre date de distribution, ne sont dès lors pas fondés à reprocher à l'administration d'avoir retenu, comme date de distribution, la date de clôture des exercices 2006, 2007 et 2008 et d'avoir, en conséquence, imposé entre leurs mains comme revenus distribués l'intégralité des sommes en cause au titre des années 2006 à 2008 ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun, qui a régulièrement statué sur le moyen relatif à l'identification des bénéficiaires des distributions, a rejeté leur demande en ce qui concerne les impositions maintenues à leur charge ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme B...à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance.
Article 2: Le surplus de la requête de M. et Mme B...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 7 février 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique le 21 février 2018.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02031