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15/02/2018 | FRANCE | N°17PA03023

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 15 février 2018, 17PA03023


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 26 avril 2016 par lequel le préfet de police a ordonné son expulsion du territoire français.

Par un jugement n° 1608026/4-2 du 7 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif enregistrés le 6 septembre 2017, M. B..., représenté par Me Meurou, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1

608026/4-2 du 7 juillet 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 26 avril 2016 par lequel le préfet de police a ordonné son expulsion du territoire français.

Par un jugement n° 1608026/4-2 du 7 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif enregistrés le 6 septembre 2017, M. B..., représenté par Me Meurou, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1608026/4-2 du 7 juillet 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 26 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision d'expulsion est entachée d'un défaut de base légale ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle méconnaît les articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu des conséquences d'une exceptionnelle gravité qu'elle emporte sur la situation de M.B... ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lapouzade,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., substituant Me Meurou, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet de police a, par un arrêté du 26 avril 2016, prononcé l'expulsion du territoire français de M.B..., ressortissant camerounais. M. B...relève appel du jugement en date du 7 juillet 2017 par lequel le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. L'arrêté contesté vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il mentionne les faits pour lesquels M. B...a été condamné et précise qu'en raison de l'ensemble de son comportement et de l'absence d'atteinte manifestement disproportionnée à sa vie privée et familiale, la présence de cet étranger sur le territoire français constitue une menace grave pour l'ordre public. L'arrêté contesté comporte ainsi l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui fondent la décision et doit être regardé comme suffisamment motivé, alors même que toutes les indications relatives à la situation privée et familiale de M. B... n'y sont pas mentionnées. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté comme manquant en fait.

4. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public " et aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle : / (...) 2° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ".

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B...a épousé une ressortissante française le 27 septembre 2013. Ainsi, à la date de la décision attaquée, le 26 avril 2016, il était marié depuis moins de trois ans. Par suite, M. B...n'est pas fondé soutenir qu'il entre dans le champ d'application de l'article L. 521-2 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que le préfet a entaché sa décision d'un défaut de base légale doit, en conséquence, être écarté.

6. En troisième lieu, il ressort des termes de la décision attaquée que, pour caractériser la menace grave pour l'ordre public que constitue le comportement du requérant, le préfet de police a précisé que M. B...a été condamné pour agression sexuelle et vol avec violence ayant entrainé une incapacité de travail n'excédant pas huit jours à une peine de deux ans d'emprisonnement, dont six mois avec sursis par le tribunal correctionnel de Paris le 27 octobre 2015. Eu égard à la gravité de ces faits et à leur caractère récent, le préfet de police a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, considérer que la présence de M. B... sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public.

7. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. En quatrième lieu, d'une part, M. B... fait valoir qu'il est entré de manière régulière sur le territoire français en 2010 où il réside depuis lors et où résident également sa mère, ses oncles, tantes et neveux et que depuis 2013 il est marié à une ressortissante française. D'autre part, il soutient que son épouse a de graves problèmes de santé et également, sans toutefois l'établir du fait du caractère peu circonstancié et probant des certificats médicaux qu'il produit, que l'état de cette dernière nécessite sa présence auprès d'elle. Enfin, M. B...soutient qu'il est bien intégré sur le territoire français où, dans le cadre d'une association, il se livre à des activités d'aide aux personnes âgées, qu'il indemnise sa victime, a participé au programme de prévention de la récidive relatif aux auteurs d'agression sexuelle sur une femme majeure hors du cadre familial. Compte-tenu de l'ensemble de ces circonstances, et également du fait que M. B...n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Cameroun où réside son fils né en 2008, eu égard à la menace grave que représente son comportement pour l'ordre public, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué a porté à son droit à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux objectifs en vue desquels il a été pris. Le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.

9. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision ordonnant son expulsion du territoire serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

10. En sixième lieu, aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

11. M. B... soutient que son retour au Cameroun l'exposerait à des traitements contraires au texte susvisé et qu'il a obtenu la qualité de réfugié au Mexique en raison de ces risques. Toutefois, d'une part, si M. B...se prévaut, ainsi qu'il a été dit, de l'obtention du statut de réfugié politique auprès des autorités mexicaines, pour soutenir que son renvoi vers le Cameroun l'exposerait à subir des traitements contraires à l'article 3 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'établit pas l'obtention d'un tel statut en se bornant à produire un document, non traduit, délivré par les autorités mexicaines faisant état de sa qualité de " no inmigrante refugiado ", ni a fortiori qu'il bénéficiait à la date de l'arrêté de ce statut, ce que l'intéressé n'allègue au demeurant pas. D'autre part, si M. B...fait état de son appartenance au parti " mouvement des jeunes " dont il était le secrétaire, lequel s'est livré en 2008 au Cameroun à des manifestations durement réprimées, il n'établit pas faire l'objet à la date de l'arrêté attaqué de menaces en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le préfet de police, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait eu connaissance des faits allégués par M. B..., n'a pas entaché son arrêté d'illégalité en ce que cet arrêté prévoit pour sa mise en oeuvre le renvoi de M. B...à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il est légalement admissible. En conséquence, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- MmeE..., première conseillère,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 février 2018.

Le président rapporteur,

J. LAPOUZADE

L'assesseure la plus ancienne,

M. E...

Le greffier,

Y. HERBER La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03023


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03023
Date de la décision : 15/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jacques LAPOUZADE
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : MEUROU

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-02-15;17pa03023 ?
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