Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...F...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 2 février 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un tel titre et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation.
Par un jugement n° 1703742/5-2 du 8 juin 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 29 juin 2017 et le 3 janvier 2018, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1703742 du 8 juin 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 2 février 2017 et, à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation sous la même astreinte ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé pour se borner à reprendre les termes des arrêtés des 16 octobre 2012 et 27 mai 2015 alors que sa situation a évolué ;
- cet arrêté méconnaît tant les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité par voie d'exception d'illégalité de la décision lui refusant l'admission au séjour.
Un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2017, a été produit par le préfet de police, qui conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen d'appel n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties on été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Auvray.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante sénégalaise née à Dakar le 11 septembre 1993, avait sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11, de l'article L. 313-14 et du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en exécution du jugement n° 1516235/2-3 du 11 février 2016 du Tribunal administratif de Paris, le préfet de police a procédé au réexamen de la situation de Mme C...et que, par l'arrêté contesté du 2 février 2017, il a refusé de délivrer à l'intéressée une carte de séjour temporaire, lui a fait obligation de quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée ; que Mme C...relève régulièrement appel du jugement du 8 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; que, pour l'application de ces dispositions, le ressortissant étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;
3. Considérant que MmeC..., entrée en France selon ses déclarations le 10 mai 2011 sous couvert d'un visa de court séjour, s'est installée chez sa mère, Mme B...D..., née le 15 septembre 1954 à Bamako (alors Soudan français) ; qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante a, le 2 novembre 2011, donné naissance à B...Jaara Ouza C...à Paris, où cette enfant est scolarisée depuis 2016, que la mère de l'intéressée a été réintégrée dans la nationalité française par décret du 14 août 2013, qu'elle a obtenu, par jugement du Tribunal de grande instance de Paris en date du 13 juin 2014, que l'autorité parentale sur la jeuneB..., sans filiation paternelle établie, lui soit déléguée et que, selon une attestation en date du 15 juin 2017 de l'agent comptable de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, elle perçoit une pension mensuelle de 1 151,58 euros ; qu'en outre, la requérante établit que l'un de ses frères, né le 18 février 1980 à Dakar, est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 12 mai 2024 et que l'une de ses soeurs, née le 6 mai 1988, est titulaire d'une carte de séjour " étudiant " valable jusqu'au 3 janvier 2019 ; que si le préfet de police relève que le père de l'intéressée vit au Sénégal, cette dernière fait valoir qu'elle n'entretient pas de relation avec lui et produit un jugement du 25 août 2010 du Tribunal départemental de Guediawaye faisant droit à la demande de son père de déléguer à sa mère, Mme B...D..., la puissance paternelle ainsi que les charges relatives à l'entretien de sa fille ; que, dans ces conditions, Mme C...est fondée à soutenir que l'arrêté préfectoral contesté du 2 février 2017 a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cet arrêté a été édicté ; que la requérante est, par suite et pour ce seul motif, fondée à en demander l'annulation dans toutes ses dispositions ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au moyen d'annulation qu'il retient, le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme C...tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme C...d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par cette dernière à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1703742 du 8 juin 2017 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 2 février 2017, par lequel le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme C..., l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme C...une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...F...C..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Heers, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
M. Boissy, premier conseiller,
Lu en audience publique le 2 février 2018.
Le rapporteur,
B. AUVRAY
Le président,
M. HEERS
Le greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02186