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25/01/2018 | FRANCE | N°16PA03558

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 25 janvier 2018, 16PA03558


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. N...-F...B..., Mme G...C...épouseB..., M. I...B..., Mme J... K...épouseB..., tous deux agissant également au nom de leur fils mineur, M. A...B..., ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 30 juin 2015, confirmée le 7 octobre 2015 sur leur recours gracieux, par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé d'autoriser leur changement de nom de " B... " en " B...-M... ".

Par un jugement n° 1520047 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Paris

a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. N...-F...B..., Mme G...C...épouseB..., M. I...B..., Mme J... K...épouseB..., tous deux agissant également au nom de leur fils mineur, M. A...B..., ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 30 juin 2015, confirmée le 7 octobre 2015 sur leur recours gracieux, par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé d'autoriser leur changement de nom de " B... " en " B...-M... ".

Par un jugement n° 1520047 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2016, les consortsB..., représentés par Me Degrange, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1520047 du 13 octobre 2016 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions du 30 juin 2015 et du 7 octobre 2015 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé d'autoriser leur changement de nom de " B... " en " B...-M... " ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le patronyme de " B...-M... " est menacé d'extinction définitive ;

- la décision du ministre est entachée d'une erreur de fait lorsqu'il soutient que le nom de " B...-M... " n'apparaît pas sur les actes d'état-civil produits à l'appui de leur demande ;

- contrairement à ce que soutient le ministre dans la décision litigieuse, l'usage constant et ininterrompu du nom de " B...-M... " est établi depuis 1824 ;

- leur demande de changement de nom est légitime puisqu'ils sont connus par les anciens de Grésy-sur-Isère comme portant le nom de " B...-M... " ;

- les discordances de nom entre " B... " et " B...-M... " sont de nature à nuire à leurs intérêts notamment en termes de droits à l'assurance sociale.

La requête a été communiquée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui n'a pas présenté d'observations en défense.

Les consorts B...ont maintenu leur requête par un courrier enregistré le 24 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- les observations de Me Degrange, avocat des consortsB....

1. Considérant que, par une requête publiée au Journal officiel du 4 mai 2012, M. N... -F...B..., né en 1948, M. I...B..., son fils, né en 1978, lequel agissait également au nom de son enfant mineur, M. A...B..., né en 2011, ont sollicité le changement de leur nom en celui de " B...-M... " ; que cette requête a été rejetée par des décisions du garde des sceaux, ministre de la justice, en date du 30 juin 2015 ; que le recours gracieux de M. N...-F... B...à l'encontre de la décision prise à son endroit a fait l'objet d'une décision explicite de rejet en date du 7 octobre 2015 ; que M. N...-F...B..., M. I... B..., leurs épouses respectives et M. A...B...ayant demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de ces décisions de refus, ce tribunal a rejeté leur demande par un jugement du 13 octobre 2016 dont ils relèvent appel devant la Cour ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. / Le changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré. Le changement de nom est autorisé par décret " ;

3. Considérant, en premier lieu, que, dans les décisions contestées, le garde des sceaux, ministre de la justice, a opposé un refus à la demande des requérants fondée sur le relèvement du nom " B...-M... " au motif que, malgré la généalogie jointe à leurs dossiers, constituée des copies de livrets de famille, le nom sollicité de " B...-M... " n'apparaissait pas sur les actes d'état-civil produits ;

4. Considérant qu'il ressort des généalogies produites que M. N... -F...B..., père de Xavier B...et grand-père de HugoB..., est le fils de M. L... B..., le petit-fils de M. H...B..., né en 1894 et décédé en 1966, l'arrière petit-fils de M. D... B..., né en 1865 et décédé en 1950, et l'arrière-arrière-petit-fils de M. F... B..., né en 1828 et décédé en 1915 ; que M. F...B...était ainsi l'ascendant au quatrième degré de M. N...-F... B...et ne portait pas le patronyme de " B...-M... " ; que si les requérants soutiennent qu'ils descendent de Jean " B...ditM... ", né en 1757, et que c'est à la suite d'une erreur de l'état civil que seul le nom de " B... " a été attribué à son fils Balthazar, né en 1795, qui est leur ancêtre, alors qu'un autre fils a porté, et à sa suite ses descendants, le nom de " B...-M... ", ni ces affirmations ni les pièces d'état civil jointes à la requête d'appel ne sont de nature à démontrer qu'un ascendant ou un collatéral jusqu'au quatrième degré de l'un des demandeurs aurait porté à l'état civil le nom de " B...-M... " ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à solliciter, sur le fondement du deuxième alinéa de l'article 61 du code civil, le relèvement du nom " B...-M... " ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la possession d'état résulte du caractère ancien et constant de l'usage d'un nom sur plusieurs dizaines d'années ; que, pour apprécier la possession d'état revendiquée, le ministre doit prendre en compte les documents produits à l'appui de la demande tendant à établir la réalité de cet usage s'agissant des requérants eux-mêmes, puis prendre en compte la ou, le cas échéant, les générations antérieures notamment lorsque cette revendication concerne des enfants ;

6. Considérant qu'à l'appui de leur requête, MM. B...soutiennent que, contrairement à ce que fait valoir le garde des sceaux, les documents produits au soutien de leurs demandes de changement de nom caractérisent suffisamment un usage constant et ininterrompu du patronyme " B...-M... " ; que, toutefois, la réalité de cet usage ininterrompu s'agissant des requérants eux-mêmes ne ressort aucunement de la liste des documents produits à l'appui de leurs demandes ni des pièces jointes à leurs requêtes ; que ces pièces, qui consistent notamment en des actes authentiques et des documents administratifs, concernent l'utilisation de ce nom entre 1824 et 2000 par les ancêtres des requérants, et plus particulièrement par M. L...B..., père, aïeul et bisaïeul des requérants ; qu'ils ne suffisent donc pas à établir en ce qui les concerne une possession d'état ininterrompue qui constituerait un motif de nature à justifier le changement de nom sollicité ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'une personne dont la demande de changement de nom a été rejetée ne peut utilement invoquer devant le juge, à l'appui de son recours, un motif différent de celui qu'elle avait initialement invoqué devant l'administration ; que, si les requérants font valoir le caractère illustre du nom de " B...-M... " dans la vallée d'Albertville, il ressort tant de leurs demandes initiales que du recours gracieux de M. N...-F...B..., que ce motif est évoqué, pour la première fois, dans la demande présentée au tribunal administratif ; que les requérants ne peuvent ainsi se prévaloir utilement de ce motif ; qu'en tout état de cause, les pièces du dossier n'établissent pas le caractère illustre du nom que souhaitent porter les intéressés ;

8. Considérant, en dernier lieu, que, si les requérants font valoir que les discordances de noms entre " B... " et " B...-M... " sont de nature à nuire à leurs intérêts, ce moyen est dépourvu de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'en tout état de cause, la seule circonstance que les parents de M. N...-F... B...étaient connus par les administrations fiscales et sociales sous le nom de " B...-M... " ne suffit pas à caractériser un risque de confusion préjudiciable aux requérants ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation que le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé d'autoriser les requérants à substituer à leur nom patronymique celui de " B...-M... " ; que, par suite, les requérants se sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation des décisions ministérielles en litige ; que leur requête ne peut donc qu'être rejetée, en ce comprises leurs conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dès lors que l'État n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des consorts B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. N...-F...B..., premier dénommé, pour l'ensemble des requérants et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Legeai, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 25 janvier 2018.

Le rapporteur,

S. DIÉMERTLa présidente,

S. PELLISSIERLe greffier,

M. E...

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA03558


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03558
Date de la décision : 25/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-01-03 Droits civils et individuels. État des personnes. Changement de nom patronymique.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : DEGRANGE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-01-25;16pa03558 ?
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