Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun, dans une première requête, d'annuler les décisions du 12 décembre 2016 par lesquelles le préfet de Seine-et-Marne a décidé de sa remise aux autorités italiennes et a ordonné son assignation à résidence, et dans une seconde requête, d'annuler les décisions du 24 mars 2017 par lesquelles le préfet de Seine-et-Marne a, de nouveau, décidé de sa remise aux autorités italiennes et ordonné son assignation à résidence.
Par un jugement n° 1610809 du 25 janvier 2017 et un jugement n°1702416 du 10 avril 2017, le Tribunal administratif de Melun a fait droit aux deux demandes de M. C...en annulant les décisions du préfet de Seine-et-Marne du 12 décembre 2016 et du 24 mars 2017 décidant sa remise aux autorités italiennes et l'assignant à résidence.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 17PA01075 le 29 mars 2017, le préfet de Seine-et-Marne demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1610809 du 25 janvier 2017 du Tribunal administratif de Melun.
Il soutient que les décisions attaquées n'ont pas été prises au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il produit en appel la copie de l'accusé de réception d'un courrier électronique constituant la réponse automatique à une demande de réadmission formulée au moyen de l'application "Dublinet" dans le cadre du règlement Dublin III.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2017, M. B...C..., représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le préfet ne justifie pas de l'accord des autorités italiennes en produisant un accusé de réception Dublinet en date du 21 novembre 2016 ;
- en produisant cet accusé de réception il justifie d'une saisine des autorités italiennes mais que celle-ci qui ne satisfait pas aux exigences des textes et notamment de l'article 21 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ;
- la procédure suivie demeure par conséquent irrégulière.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 17PA1871 le 1er juin 2017, le préfet de Seine-et-Marne demande à la Cour d'annuler le jugement n°1702416 du 10 avril 2017 du Tribunal administratif de Melun.
Il soutient que les décisions attaquées n'ont pas été prises au terme d'une procédure irrégulière puisqu'il produit en appel la copie de l'accusé de réception d'un courrier électronique constituant la réponse automatique à une demande de réadmission formulée au moyen de l'application "Dublinet" dans le cadre du règlement Dublin III.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;
- la directive 2013/33/UE du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement (CE)
n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Pena a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que les requêtes susvisées du préfet de Seine-et-Marne présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que M.C..., ressortissant soudanais né le 1er janvier 1990, est entré irrégulièrement en France le 16 juin 2016 selon ses déclarations ; qu'il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 18 août 2016 ; que la consultation du fichier Eurodac le 18 août 2016 ayant fait apparaître que ses empreintes digitales avaient déjà été enregistrées en Italie, le préfet de Seine-et-Marne déclare avoir adressé une demande de réadmission aux autorités italiennes le 20 septembre 2016 qui aurait été implicitement acceptée le 21 novembre 2016 ; que, par des décisions en date du 12 décembre 2016 puis du 24 mars 2017, le préfet de Seine-et-Marne a ordonné la remise de l'intéressé aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence dans le département de Seine-et-Marne avec obligation de se présenter aux services de police tous les lundis et vendredis, sauf les jours fériés ; que, par deux jugements en date du 25 janvier 2017 et du 10 avril 2017, le Tribunal administratif de Melun a annulé ces décisions au motif qu'en se bornant à produire une simple télécopie, non datée, qui aurait été transmise à " Italie " et valant constat d'accord implicite des autorités italiennes, le préfet de Seine-et-Marne n'établissait qu'il avait transmis aux autorités italiennes une demande de réadmission le 20 septembre 2016 et que les décisions avaient par suite été prises à l'issue d'une procédure irrégulière ; que, le préfet de Seine-et-Marne relève appel de ces jugements des 25 janvier 2017 et 10 avril 2017 ;
Sur la requête n°17PA01075 :
3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la fin de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend " ;
4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 21 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " L'Etat membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre Etat membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date d'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre Etat membre aux fins de prise en charge du demandeur. Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif (" hit ") Eurodac (...), la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif (...). Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéa, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'Etat membre auprès duquel la demande a été introduite. (...) " ;
5. Considérant que pour établir avoir saisi les autorités italiennes d'une demande de prise en charge de M.C..., le préfet de Seine-et-Marne a produit, en appel, un accusé de réception électronique du 21 novembre 2016 délivré par l'application informatique " Dublinet " qui mentionne en son intitulé la référence FRDUB17703115833770 ; que, cette référence correspond effectivement au numéro de dossier de M. C...sur les autres pièces du dossier ; que, toutefois, aux termes de l'article 21 précité, le préfet de Seine-et-Marne aurait dû saisir les autorités italiennes dans un délai de deux mois à compter de la réception des résultats positifs Eurodac, soit au plus tard le 18 octobre 2016 ; qu'il suit de là que les décisions en date du
12 décembre 2016, par lesquelles le préfet de Seine-et-Marne a ordonné la remise de l'intéressé aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence dans le département de Seine-et-Marne ont été prises à l'issue d'une procédure irrégulière ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de Seine-et-Marne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé ses décisions notifiées le 12 décembre 2016 décidant de la remise de M. B...C...aux autorités italiennes et de son assignation à résidence ;
Sur la requête n°17PA01871 :
7. Considérant que, pour établir avoir saisi les autorités italiennes d'une demande de prise en charge de M.C..., le préfet de Seine-et-Marne a produit, en appel, un accusé de réception électronique du 6 avril 2017 délivré par l'application informatique " Dublinet " qui mentionne en son intitulé la référence FRDUB17703115833770 ; que, cette référence correspond effectivement au numéro de dossier de M. C...sur les autres pièces du dossier ; que, toutefois, aux termes de l'article 21 précité, le préfet de Seine-et-Marne aurait dû saisir les autorités italiennes dans un délai de deux mois à compter de la réception des résultats positifs Eurodac, soit au plus tard le 18 octobre 2016 ; qu'en tout état de cause, une saisine des autorités italiennes le 6 avril 2017 pour une décision en date du 24 mars 2017, est incohérent ; qu'il suit de là que les décisions en date du 24 mars 2017, par lesquelles le préfet de Seine-et-Marne a ordonné la remise de l'intéressé aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence dans le département de Seine-et-Marne ont été prises à l'issue d'une procédure irrégulière ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de Seine-et-Marne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé ses décisions notifiées le 24 mars 2017 décidant de la remise de M. B...C...aux autorités italiennes et de son assignation à résidence ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes du préfet de Seine-et-Marne sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Bernier, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 décembre 2017.
Le rapporteur,
E. PENALe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 10PA03855
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Nos 17PA01075, 17PA01871