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29/12/2017 | FRANCE | N°17PA00881

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 29 décembre 2017, 17PA00881


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de son obligation de payer la somme de 19 461 119,66 euros résultant du commandement de payer valant saisie émis à son encontre le 11 mai 2015 par le responsable du service des impôts des particuliers du 16ème arrondissement de Paris.

Par une ordonnance n° 1519197 du 12 janvier 2017, le président de la 2ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par u

ne requête, enregistrée le 13 mars 2017, M. B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de son obligation de payer la somme de 19 461 119,66 euros résultant du commandement de payer valant saisie émis à son encontre le 11 mai 2015 par le responsable du service des impôts des particuliers du 16ème arrondissement de Paris.

Par une ordonnance n° 1519197 du 12 janvier 2017, le président de la 2ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mars 2017, M. B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de prononcer la décharge de son obligation de payer la somme de 19 461 119,66 euros résultant du commandement de payer valant saisie du 11 mai 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient :

- que l'ordonnance attaquée est irrégulière dès lors que le premier juge ne lui a pas transmis le mémoire en défense enregistré le 22 février 2016 ;

- qu'ayant présenté une opposition à poursuites le 30 juin 2015 dans le délai de deux mois suivant la notification du commandement de payer et réitéré cette opposition le 1er octobre 2015, sa demande n'était pas tardive ;

- que, compte tenu de l'action judiciaire qu'il a engagée devant la Cour d'appel de Paris contre le " consortium de réalisation ", ce dernier sera condamné à lui verser une somme de 40 461 120,48 euros, de sorte que la reprise des poursuites est injustifiée, contraire " à l'esprit et aux stipulations " du plan de règlement adopté avec l'administration et risque de lui causer un préjudice considérable si sa maison est saisie.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 avril, 28 juin et 10 novembre 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que :

- la demande présentée devant le tribunal administratif était irrecevable dès lors que, contrairement aux dispositions combinées des articles R. 281-1 et R. 281-3-1 du livre des procédures fiscales, il n'a pas formé une opposition à poursuite dans le délai de deux mois suivant la notification du commandement de payer et que le commandement de payer comportait la mention exigée par les dispositions de l'article R. 321-3 du code des procédures civiles d'exécution ;

- les autres moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

Par un courrier du 24 octobre 2017, les parties ont été informées de ce qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la décision était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de procédure civile ;

- le code des procédures civiles d'exécution ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Boissy,

- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.

1. Considérant que M. B... a été assujetti, au titre des années 1991, 1992, 1993 et 1995, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et aux pénalités correspondantes qui ont respectivement été mises en recouvrement les 31 juillet 1997, 30 septembre 1997 et 30 avril 2000 ; que, par un arrêt n° 08PA00865 du 7 avril 2010, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par l'intéressé contre les jugements nos 0116394, 0500039, 0500043 et 0500044 rendus le 28 décembre 2007 par le tribunal administratif de Paris tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ; que, par une décision n° 340265 du 8 juillet 2011, le Conseil d'Etat n'a pas admis le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt du 7 avril 2010 ; que, par un commandement de payer valant saisie émis le 11 mai 2015, le responsable du service des impôts des particuliers du 16ème arrondissement de Paris a mis en demeure M. B... de lui régler, dans un délai de huit jours, la somme de 19 461 119,66 euros, correspondant au montant des impositions supplémentaires et aux frais de poursuite restant à recouvrer, sous peine, à l'expiration de ce délai, de poursuivre la procédure de saisie de ses biens et droits immobiliers ; que, par une ordonnance du 12 janvier 2017, le président de la 2ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de son obligation de payer cette somme de 19 461 119,66 euros résultant de ce commandement de payer ; que M. B... relève appel de cette ordonnance ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation et de décharge :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 281-1 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement prévues par l'article L. 281 peuvent être formulées par le redevable lui-même ou la personne solidaire. Elles font l'objet d'une demande qui doit être adressée, appuyée de toutes les justifications utiles, en premier lieu, au chef du service du département ou de la région dans lesquels est effectuée la poursuite (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 281-3-1 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " La demande prévue à l'article R. 281-1 doit, sous peine d'irrecevabilité, être présentée, selon le cas, au directeur départemental des finances publiques, au responsable du service à compétence nationale ou au directeur régional des douanes et droits indirects dans un délai de deux mois à partir de la notification : / a) De l'acte de poursuite dont la régularité en la forme est contestée ; / b) De tout acte de poursuite si le motif invoqué porte sur l'obligation de payer ou le montant de la dette ; / c) Du premier acte de poursuite permettant d'invoquer tout autre motif " ; qu'aux termes de l'article R. 281-4 de ce livre : " Le chef de service se prononce dans un délai de deux mois à partir du dépôt de la demande, dont il doit accuser réception. / Si aucune décision n'a été prise dans ce délai ou si la décision rendue ne lui donne pas satisfaction, le redevable doit, à peine de forclusion, porter l'affaire devant le juge compétent tel qu'il est défini à l'article L. 281. Il dispose pour cela de deux mois à partir : / a) soit de la notification de la décision du chef de service ; / b) soit de l'expiration du délai de deux mois accordé au chef de service pour prendre sa décision. / La procédure ne peut, à peine d'irrecevabilité, être engagée avant ces dates. Elle doit être dirigée contre le comptable chargé du recouvrement " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ; que, lorsqu'un recours administratif préalable conditionne la possibilité de saisir le juge, cet article s'applique non seulement à la décision susceptible de lui être déférée, mais aussi, nécessairement, à l'acte à l'encontre duquel ce recours administratif doit être préalablement formé ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'absence de mention sur l'acte de poursuite que l'administration adresse au contribuable de l'existence et du caractère obligatoire, à peine d'irrecevabilité d'un éventuel recours juridictionnel, de la demande préalable prévue à l'article R. 281-1 du livre des procédures fiscales, ainsi que des délais prévus par les articles R. 281-3-1 et R. 281-4 du même livre dans lesquels le contribuable doit présenter cette demande ou porter l'affaire devant le juge compétent, fait obstacle à ce que ces délais soient opposables au contribuable ;

5. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le commandement de payer litigieux notifié le 11 mai 2015, ou un document annexé à ce commandement de payer, comportait la mention des voies et délais de recours prévus aux articles R. 281-3-1 et R. 281-4 du livre des procédures fiscales ; que la circonstance que ce commandement comportait la mention exigée par les dispositions de l'article R. 321-3 du code des procédures civiles d'exécution reste sans incidence sur le caractère obligatoire des mentions des voies et délais de recours qui a été rappelé au point 4 ; que, par suite, M. B... est fondé à soutenir que le premier juge, en rejetant sa demande, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, au motif que la contestation prévue par l'article R. 281-1 du livre des procédures fiscales avait été présentée après l'expiration du délai de deux mois prévu par l'article R. 281-3-1 du même livre, a entaché l'ordonnance attaquée d'une irrégularité et à en demander l'annulation pour ce motif ;

6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. B... ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le consortium de réalisation serait le redevable légal de la dette fiscale mise à la charge de M. B... ; qu'il n'est par ailleurs pas établi ni même allégué que ce consortium serait solidairement responsable du paiement de cette dette ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le requérant, l'action judiciaire que M. B... a engagée devant la Cour d'appel de Paris contre le consortium de réalisation n'a pas interrompu le cours de la prescription et n'a donc pas été de nature à empêcher l'administration d'en poursuivre le recouvrement ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que lorsque le contribuable et le comptable sont convenus d'un plan de règlement échelonné de la dette fiscale, le délai de prescription du recouvrement, interrompu par la conclusion du plan, ne court pas pendant l'exécution de

celui-ci ; qu'en cas d'interruption par le contribuable des versements prévus, un nouveau délai court à compter de la date à laquelle le premier des versements non effectués aurait dû intervenir ;

9. Considérant que si le requérant soutient que la reprise des poursuites est injustifiée et contraire " à l'esprit et aux stipulations " d'un plan de règlement de sa dette fiscale qui aurait été adopté avec l'administration, le ministre soutient, sans être contesté, qu'un tel plan de règlement échelonné n'existe pas ;

10. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que la mise en oeuvre du commandement de payer en litige risquerait de causer à M. B... " un préjudice considérable ", au motif que ses biens immobiliers sont susceptibles d'être saisis, reste par

elle-même sans incidence sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette fiscale ou l'exigibilité de la somme réclamée ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. B... tendant à la décharge de son obligation de payer la somme de 19 461 119,66 euros résultant du commandement de payer valant saisie émis à son encontre le 11 mai 2015 doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que demande M. B... au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1519197 du président de la 2ème section du tribunal administratif de Paris en date du 12 janvier 2017 est annulée.

Article 2 : La demande de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (Pôle fiscal parisien 1).

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Heers, président de chambre,

M. Auvray, président assesseur,

M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 29 décembre 2017.

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

M. HEERSLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA00881 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00881
Date de la décision : 29/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : SELARL LetA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-29;17pa00881 ?
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