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21/12/2017 | FRANCE | N°15PA02497

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 21 décembre 2017, 15PA02497


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1403289 du 9 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 juin 2015, 7 novembre 2016, 9 juin 2017 e

t 30 novembre 2017, M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1403289 du 9 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 juin 2015, 7 novembre 2016, 9 juin 2017 et 30 novembre 2017, M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403289 du 9 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de surseoir à statuer jusqu'à ce que le Conseil d'Etat ait rendu sa décision sur le recours de la société FB Café contre l'ordonnance n° 16PA00794 du juge des référés de la Cour administrative d'appel de Paris ;

3°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ou, à titre subsidiaire, de réduire le montant de ces impositions conformément aux bases découlant de la méthode de reconstitution des résultats de la société FB Café qu'il propose et de prononcer la décharge des pénalités ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a méconnu le caractère contradictoire de la procédure dès lors qu'il a reçu le mémoire en réplique de l'administration enregistré le 21 mai 2015 après l'audience du 26 mai 2015 ; sa demande de réouverture des débats adressée au tribunal a été implicitement rejetée ; le tribunal s'est néanmoins fondé sur des éléments nouveaux contenus dans ce mémoire ;

- le jugement est insuffisamment motivé quant à la réponse apportée au moyen tiré de l'absence de débat oral et contradictoire avec le vérificateur dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la société FB Café a fait l'objet ;

- la vérification de comptabilité de la société FB Café, dont résultent les impositions litigieuses mises à sa charge, est entachée d'irrégularité pour absence de tout débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

- la proposition de rectification qui lui a été adressée est insuffisamment motivée, le vérificateur se contentant d'invoquer les rectifications notifiées à la société FB Café pour estimer que l'existence de revenus distribués à son profit est établie ; elle ne comporte aucune motivation quant à l'existence et au montant des revenus distribués ; en tout état de cause, la simple référence à la proposition de rectification adressée à la société FB Café ne saurait être regardée comme une motivation suffisante de la proposition de rectification qui lui a été adressée, dès lors que le document adressé à la société est lui-même insuffisamment motivé ;

- en ne l'informant pas, ainsi que la société FB Café, de la teneur et de l'origine des documents obtenus des fournisseurs de la société, dans l'exercice de son droit de communication, l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- les impositions ont été mises en recouvrement en méconnaissance de la nouvelle méthode de reconstitution du chiffre d'affaires pourtant retenue par l'administration lors de la réunion du 12 juillet 2012 ;

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires utilisée par le service est excessivement sommaire ; la reconstitution des bases imposables doit être opérée selon plusieurs méthodes de reconstitution, conformément notamment à l'instruction fiscale référencée 4 G 3342 n° 4 du 25 juin 1998 ; le service a refusé de tenir compte de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires utilisée lors d'un précédent contrôle qui avait pourtant abouti à des résultats plus conformes à la réalité de la situation de l'entreprise ; elle propose une méthode de reconstitution aussi précise que celle retenue par l'administration et qui, dès lors, doit être privilégiée ; l'administration a méconnu l'accord du 12 juillet 2012 qui reconnaissait cette méthode ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de l'existence et du montant des revenus distribués ; de la lettre du 8 septembre 2011 par laquelle il aurait été désigné comme bénéficiaire des revenus distribués découle uniquement une présomption de distribution ;

- le manquement délibéré n'est pas établi ;

- l'administration ne pouvait faire application de la majoration de 25 % prévue au 7 de l'article 158 du code général des impôts pour déterminer la base imposable des contributions sociales auxquelles il était assujetti en raison de la réserve d'interprétation portant sur l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale émise par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2016-610 QPC du 10 février 2017.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er février 2016 et 23 juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son préambule ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

1. Considérant que l'EURL FB Café, qui exploite un fonds de commerce de bar-brasserie sous l'enseigne " Sous Bock Café ", a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2008 et en 2009, ainsi qu'à des droits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période couvrant ces exercices, assortis des pénalités pour manquement délibéré prévues à l'article 1729 du code général des impôts ; que ces impositions et rappels procèdent notamment de la reconstitution des résultats et chiffres d'affaires à laquelle s'est livré le service vérificateur, après avoir écarté la comptabilité qui lui avait été présentée au motif qu'elle était entachée de graves irrégularités de nature à la priver de valeur probante ; qu'en réponse à une demande de l'administration fiscale présentée sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts, M.A..., associé-gérant de la société FB Café, a été désigné comme l'unique bénéficiaire des distributions correspondant aux rehaussements résultant de cette reconstitution de chiffre d'affaires ; que, par une proposition de rectification du 19 septembre 2011, l'administration fiscale a notifié à M. A...les rehaussements correspondant à ces revenus distribués, imposés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts au titre des années 2008 et 2009 ; que M. A...fait appel du jugement du 9 juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par une décision du 29 juin 2017, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a prononcé le dégrèvement, en droits et en pénalités, des contributions sociales auxquelles M. A...a été assujetti à concurrence des sommes de 11 962 euros au titre de l'année 2008 et de 14 607 euros au titre de l'année 2009 ; que les conclusions de la requête de M. A...sont, dans cette mesure, devenues sans objet et qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence " ; qu'aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance transmis par le Tribunal administratif de Paris à la Cour que pour écarter le moyen soulevé devant eux par M. A... tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, les premiers juges se sont fondés sur les éléments nouveaux figurant dans le mémoire de l'administration fiscale enregistré au greffe du Tribunal le 21 mai 2015 ; que ce mémoire a été communiqué le même jour, soit la veille de la clôture de l'instruction, par voie postale au conseil de M. A...qui l'a reçu le 26 mai 2015, après l'audience au cours de laquelle l'affaire a été appellée ; que le conseil de M. A...a sollicité en vain, par un courriel du 26 mai 2015, le renvoi de l'affaire afin de prendre connaissance de ce mémoire et de présenter ses observations ; que M. A...est ainsi fondé à soutenir que les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire ; qu'en conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête relatifs à la régularité du jugement attaqué, ce jugement doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

6. Considérant, en premier lieu, que les moyens contestant la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont inopérants au regard des impositions personnelles mises à la charge de l'un de ses associés ; qu'il est constant que la société FB Café a opté pour l'imposition de ses bénéfices au régime de l'impôt sur les sociétés ; que les circonstances, à les supposer établies, que la société n'aurait pas bénéficié de la garantie attachée à l'existence d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur dans le cadre de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet et qu'elle n'aurait pas été informée de la teneur et de l'origine des documents obtenus des sociétés Uba et Tafanel par l'administration dans l'exercice de son droit de communication, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, sont sans incidence sur la régularité de la procédure suivie à l'encontre de M.A..., associé unique et gérant de la société FB Café ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 de ce livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

8. Considérant qu'il est constant que la proposition de rectification en date du 19 septembre 2011 adressée à M. A...indiquait le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils étaient opérés, ainsi que les années d'imposition concernées ; que le service y a également exposé les motifs des rehaussements opérés en relevant en particulier qu'à la suite du contrôle fiscal de la société FB Café, des rectifications afférentes à des insuffisances de recettes et des dépenses non admises en déduction du résultat fiscal avaient été notifiées à la société et qu'à la demande du service de désigner, conformément aux dispositions de l'article 117 du code général des impôts, le bénéficiaire des revenus considérés comme distribués, M.A..., gérant de la société, avait été désigné par une lettre de la société du 8 septembre 2011 ; qu'il a également précisé les montants des distributions occultes s'élevant à 271 760 euros au titre de l'année 2008 et à 339 716 euros au titre de l'année 2009 ; qu'il a joint à la proposition de rectification adressée à M. A...la proposition de rectification en date du 11 juillet 2011 notifiée à la société FB Café ; qu'il ressort des termes de ce dernier document que le service y avait indiqué les impôts concernés, les exercices en cause ainsi que les nouvelles bases d'imposition assignées à la société ; qu'il avait également précisé les motifs pour lesquels il avait estimé que la comptabilité présentée n'était pas probante avant d'exposer de manière suffisamment explicite la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la société au titre des exercices clos en 2008 et 2009 ; que la proposition de rectification adressée à la société FB Café, à laquelle renvoie expressément la proposition de rectification dont a été personnellement destinataire M.A..., est ainsi suffisamment motivée ; que M. A..., disposant ainsi de l'ensemble des informations nécessaires pour contester utilement les motifs des rehaussements de ses revenus imposables, n'est pas fondé à soutenir que le service a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; que l'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée ; que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales instituent ainsi une garantie au profit de l'intéressé ; que, toutefois, la méconnaissance de ces dispositions par l'administration demeure sans conséquence sur le bien-fondé de l'imposition s'il est établi qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu du contribuable, celui-ci n'a pas été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, de cette garantie ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de la vérification de comptabilité de la société FB Café, l'administration fiscale a fait usage de son droit de communication auprès de deux des fournisseurs de l'entreprise, les sociétés Uba et Tafanel, qui lui ont remis les copies des factures d'achats qu'elles avaient délivrées à la société FB Café au cours de la période vérifiée ; que, si l'administration fait valoir que le vérificateur a procédé à la reconstitution des recettes de ventes de bières de la société à partir du dépouillement des seules factures d'achats transmises par celle-ci lors des opérations de contrôle, il ressort des écritures du ministre que le service a comparé les documents obtenus auprès des fournisseurs de la société aux factures produites par celle-ci afin de vérifier leur concordance et l'exacte comptabilisation des factures ; qu'il appartenait, en conséquence, à l'administration de mentionner, dans la proposition de rectification adressée à M.A..., l'origine et la teneur des copies des factures des fournisseurs de la société qu'elle avait ainsi utilisées pour établir l'existence et le montant des bénéfices de la société FB Café regardés comme distribués à M. A...à la clôture des exercices 2008 et 2009 ; que, si le contribuable n'a pas été informé de l'origine de ces renseignements, les éléments contenus dans les copies des factures des fournisseurs de la société FB Café étaient nécessairement connus de M. A... qui en était le gérant et l'unique associé ; que, dans ces conditions, le requérant n'a pas été privé, du seul fait de l'absence de cette information, de la garantie prévue par les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

11. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que M. A...soutient que, si le vérificateur n'a pas utilisé les copies des factures des sociétés Uba et Tafanel obtenues par l'administration dans le cadre de son droit de communication pour fonder les rectifications en litige, il a, dès lors, nécessairement emporté avec lui dans les locaux de l'administration, sans l'autorisation de la société FB Café, les factures présentées par cette dernière lors des opérations de contrôle sur place ;

12. Considérant que, eu égard aux exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'administration fiscale ne saurait se prévaloir, pour établir une imposition, de pièces ou documents obtenus par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge ;

13. Considérant que si, ainsi qu'il a été dit au point 10, le service vérificateur s'est fondé, pour établir l'existence et le montant des bénéfices de la société FB Café regardés comme distribués à M. A..., sur des factures communiquées par les fournisseurs de cette société, il ne résulte pas de l'instruction qu'il se serait également fondé, ne serait-ce que pour conforter la rectification litigieuse, sur des documents comptables originaux présentés par la société FB Café au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet et qui auraient été emportés par le service dans des conditions irrégulières ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

14. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) " ; que M. A...ayant présenté des observations en réponse aux rectifications qui lui ont été notifiées par la proposition de rectification du 19 septembre 2011, la charge de la preuve de la réalité et du montant des distributions incombe à l'administration fiscale ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) " ;

16. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour reconstituer les résultats et chiffres d'affaires réalisés par la société FB Café au titre des exercices clos en 2008 et 2009, le vérificateur a recouru à la méthode dite des liquides ; qu'à partir des notes clients et des tickets présentés pour la seule période de 34 jours allant du 6 au 15 septembre 2009 et du 19 septembre 2009 au 12 octobre 2009 pendant laquelle la caisse enregistreuse de l'établissement a fonctionné, il a déterminé le rapport existant entre le chiffre d'affaires des bières pressions et en bouteille et le chiffre d'affaires total, soit un coefficient de 2,59, ainsi que le prix de vente moyen pondéré d'une pinte de bière par catégorie de bière et par année d'imposition ; qu'après avoir dépouillé l'intégralité des factures d'achats des bières pression par catégorie et quantités achetées, le vérificateur a évalué le chiffre d'affaires des bières pressions en appliquant le prix moyen pondéré de la pinte par catégorie précédemment obtenue et en retenant un pourcentage de pertes de 10% ainsi qu'en extournant les quantités de bières utilisées pour les " monaco " et les panachés ; que le chiffre d'affaires des bières bouteilles a été évalué, après dépouillement des factures d'achat des bières par marque et la détermination du nombre de bouteilles vendues à stocks constants, par application à chaque marque de bières en bouteille du prix de vente mentionné sur la carte du bar pour l'année 2008 et sur l'échantillon pour l'année 2009, après soustraction d'un pourcentage de pertes fixé à 2% ; qu'enfin, le vérificateur a appliqué au chiffre d'affaires total des bières, le coefficient de 2,59 pour déterminer le chiffre d'affaires total ;

17. Considérant, d'une part, que comme il vient d'être dit, le vérificateur a utilisé la méthode des liquides afin de reconstituer les résultats et chiffres d'affaires de la société FB Café et a opté pour la bière comme produit de référence, qui, contrairement à ce que soutient M.A..., est suffisamment représentatif de son activité de bar-brasserie ; que le vérificateur n'a pu prendre en compte que les stocks de bières en bouteilles, les stocks de bières en fût n'étant pas suffisamment détaillés pour être exploités ; que, toutefois, comme il a retenu un taux de pertes de 10% sur la quantité de bière achetée en fûts et a déduit les quantités de bières utilisées pour les " monaco " et les panachés ; que la circonstance, à la supposer établie, que le vérificateur n'aurait pas distingué entre les prix d'achat hors taxe, toutes taxes comprises ou avec un prix de consigne des bières est sans incidence sur le bien-fondé de la méthode de reconstitution mise en oeuvre par le service qui ne tient compte que des prix de vente des bières par la société FB Café ;

18. Considérant que le requérant soutient que la période de référence de 34 jours prise en compte par le vérificateur n'est pas représentative de l'ensemble de la période contrôlée dès lors que, pendant cette période, les températures extérieures étaient supérieures aux moyennes saisonnières constatées, entraînant ainsi une augmentation de la fréquentation de la terrasse du bar, que les événements sportifs retransmis au sein de l'établissement étaient plus nombreux, alors qu'en revanche, l'exploitation de la brasserie avait été perturbée par le changement du mobilier de la terrasse en juillet 2008 et par la réalisation de travaux au cours du mois de janvier 2009 ; qu'il invoque également le contexte économique difficile pour les métiers de la restauration et du bar dont les recettes auraient baissé de 10,20% ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que les conditions d'exploitation de l'établissement auraient été différentes pendant la période vérifiée alors qu'au surplus, les montants des chiffres d'affaires que la société FB Café a déclarés au cours des mois de septembre et octobre 2009 correspondent à la moyenne du chiffre d'affaires mensuel déclaré tout au long de l'année ; qu'enfin, M. A...ne peut utilement soutenir que sa situation financière et celle de la société FB Café ne leur permettaient pas de dissimuler des recettes ;

19. Considérant, d'autre part, que la méthode de reconstitution proposée par M. A... consiste à extrapoler le chiffre d'affaires de la période de référence de 34 jours retenue par le vérificateur et pendant laquelle les bandes de caisse enregistreuse étaient disponibles, soit la période allant du 6 au 15 septembre 2009 et du 19 septembre 2009 au 12 octobre 2009, à l'ensemble de la période contrôlée ; que cette méthode, qui ne repose sur aucune pièce justificative à l'exception des bandes de caisse enregistreuse, est plus imprécise que celle utilisée par le vérificateur ; que, dans ces conditions, la méthode que le requérant propose au titre des années 2008 et 2009 n'apparaît pas de nature à aboutir à une évaluation plus précise ou réaliste des résultats et chiffres d'affaires de la société FB Café que la méthode dite des liquides mise en oeuvre par le service ;

20. Considérant qu'il résulte des points 14 à 16 que l'administration fiscale, qui n'était par ailleurs tenue par aucune disposition législative ou réglementaire d'utiliser la méthode de reconstitution retenue lors d'un précédent contrôle de la société FB Café, ni de recourir à plusieurs méthodes de reconstitution de chiffre d'affaires, doit être regardée comme établissant l'existence et le montant des revenus distribués par celle-ci à M.A... ;

21. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la demande de M.A..., un entretien a eu lieu le 12 juillet 2012 avec la responsable adjointe du pôle Gestion fiscale Centre et services spécialisés de la direction générale des finances publiques de Paris ; que le courrier du 22 juin 2012 du conseil de M. A...et de la société FB Café sollicitant cet entretien et celui du 13 février 2014 par lequel il a contesté la décision de l'administration rejetant sa réclamation contentieuse et sollicité un nouvel entretien ne permettent pas d'établir l'existence d'un accord avec l'administration portant sur l'application de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires proposée par le contribuable ;

22. Considérant, enfin, que le tribunal n'a pas entaché son jugement d'une contrariété de motifs en estimant que le vérificateur pouvait se fonder sur les éléments résultant des bandes de la caisse enregistreuse pour la période pendant laquelle elle était en fonctionnement afin de déterminer le " coefficient reliant les achats de bière aux recettes perçues dans le cadre de l'exploitation du bar " à partir duquel a été reconstitué les chiffres d'affaires de la société FB Café mais que la simple reconstitution en année pleine du chiffre d'affaires ressortant des bandes susmentionnées ne constituait pas une méthode plus précise que la méthode susmentionnée, le caractère probant et sincère de ces bandes qui aurait permis de déduire directement le chiffre d'affaires annuel de la société n'étant pas démontré ;

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

23. Considérant que, si l'instruction fiscale référencée 4 G 3342 n° 4 du 25 juin 1998 indique que les reconstitutions de recettes devraient être opérées selon plusieurs méthodes et être effectuées à partir des conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise, elle ne peut, en tout état de cause, être utilement invoquée par le requérant, s'agissant de simples recommandations qui ne sont pas opposables à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur les pénalités :

24. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;

25. Considérant que, pour justifier l'application des pénalités pour manquement délibéré aux cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à la charge de M. A..., l'administration a notamment relevé que le contribuable ne pouvait ignorer, en sa qualité de gérant et d'associé unique de la société FB Café, ni l'irrégularité de la comptabilité de la société, alors que celle-ci n'avait présenté aucune pièce justificative concernant les recettes déclarées et que la caisse enregistreuse acquise à la suite d'un précédent contrôle n'était presque pas utilisée, ni l'importance des minorations de recettes constatées s'élevant à plus d'un tiers du chiffre d'affaires ; qu'en se fondant sur ces éléments, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère délibéré des manquements commis par M. A... et, par suite, le bien-fondé de la pénalité en litige ;

26. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du Conseil d'Etat sur l'ordonnance n° 16PA00794 du juge des référés de la Cour, que la demande de M. A...tendant à la décharge des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, et des pénalités correspondantes, restant en litige doit être rejetée ; que sa demande tendant, à titre subsidiaire, à la réduction de ces impositions doit également être rejetée ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

27. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme sollicitée par M. A...au titre des frais qu'il a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête à concurrence des montants dégrevés en cours d'instance.

Article 2 : Le jugement n° 1403289 du 9 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 3 : La demande de M. A...présentée devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle de gestion fiscale Paris Centre et services spécialisés).

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Poupineau, président,

- Mme Lescaut, premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 21 décembre 2017.

Le rapporteur,

V. LARSONNIERLe président,

V. POUPINEAU

Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 15PA02497

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02497
Date de la décision : 21/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-01-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Questions communes.


Composition du Tribunal
Président : Mme COIFFET
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : KETCHEDJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-21;15pa02497 ?
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