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21/12/2017 | FRANCE | N°15PA02495

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 21 décembre 2017, 15PA02495


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) FB Café a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1403090 du 9 juin 2015, le Tribunal a

dministratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) FB Café a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1403090 du 9 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 juin 2015, 7 novembre 2016 et 9 juin 2017, la société FB Café, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403090 du 9 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de surseoir à statuer jusqu'à ce que le Conseil d'Etat ait rendu sa décision sur le recours qu'elle a présenté à l'encontre de l'ordonnance n° 16PA00794 du juge des référés de la Cour administrative d'appel de Paris ;

3°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ou, à titre subsidiaire, de réduire le montant de ces impositions conformément aux bases découlant de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires qu'elle propose et de prononcer la décharge des pénalités ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a méconnu le caractère contradictoire de la procédure dès lors qu'elle a reçu le mémoire en réplique de l'administration, enregistré le 21 mai 2015, après l'audience du 26 mai 2015 ; sa demande de réouverture des débats adressée au tribunal a été implicitement rejetée ; le mémoire du 12 mars 2015 présenté par l'administration dans l'instance n° 1403090 ne lui a pas été communiqué ; le tribunal s'est néanmoins fondé sur des éléments nouveaux contenus dans ce mémoire ;

- le jugement est insuffisamment motivé quant à la réponse apportée au moyen tiré de l'absence de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

- il est entaché d'une contradiction de motifs ;

- la procédure d'imposition est irrégulière en l'absence de débat oral et contradictoire avec le vérificateur dans le cadre de la vérification de comptabilité ;

- les impositions ont été établies en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

-les impositions ont été mises en recouvrement en méconnaissance de la nouvelle méthode de reconstitution du chiffre d'affaires pourtant retenue par l'administration lors de la réunion du 12 juillet 2012 ;

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires utilisée par le service est excessivement sommaire ; la reconstitution des bases imposables doit être opérée selon plusieurs méthodes de reconstitution, conformément notamment à l'instruction fiscale référencée 4 G 3342 n° 4 du 25 juin 1998 ; le service a refusé de tenir compte de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires utilisée lors d'un précédent contrôle qui avait pourtant abouti à des résultats plus conformes à la réalité de la situation de l'entreprise ; elle propose une méthode de reconstitution aussi précise que celle retenue par l'administration et qui, dès lors, doit être privilégiée ; l'administration a méconnu l'accord du 12 juillet 2012 qui reconnaissait cette méthode ;

- le manquement délibéré n'est pas établi.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er février 2016 et 26 juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

1. Considérant que l'EURL FB Café, qui exploite un fonds de commerce de bar-brasserie sous l'enseigne " Sous Bock Café ", a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2008 et en 2009, ainsi qu'à des droits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période couvrant ces exercices, assortis des pénalités pour manquement délibéré prévues à l'article 1729 du code général des impôts ; que ces impositions et rappels procèdent notamment de la reconstitution des résultats et chiffres d'affaires à laquelle s'est livré le service vérificateur, après avoir écarté la comptabilité qui lui avait été présentée au motif qu'elle était entachée de graves irrégularités de nature à la priver de valeur probante ; que la société FB Café relève appel du jugement en date du 9 juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que la société requérante soutient que le tribunal ne lui a pas communiqué le mémoire de l'administration fiscale enregistré au greffe du tribunal le 12 mars 2015 et qu'elle n'a reçu le mémoire enregistré le 21 mai 2015 qu'après l'audience du 26 mai 2015, alors que les premiers juges se sont fondés sur des éléments contenus dans ces mémoires pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales qu'elle avait soulevé à l'appui de sa demande tendant à la décharge des impositions mises à sa charge ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier de première instance transmis par le tribunal à la Cour que les éléments sur lesquels se sont fondés les premiers juges pour estimer que " les seuls éléments retenus par le vérificateur pour asseoir les rappels et suppléments contestés ont été obtenus au cours des opérations de contrôle sur place et à partir de documents présentés au service par la contribuable vérifiée elle-même, tels, notamment, les factures émises par ses fournisseurs " Tafanel " et " UBA " et ainsi écarter ce moyen, étaient contenus dans le premier mémoire en réplique de l'administration fiscale enregistré au greffe du tribunal le 29 janvier 2015 et communiqué à la société FB Café le même jour ; qu'il s'ensuit que la société FB Café n'est pas fondée à soutenir que le tribunal a, pour les raisons ci-dessus rappelées, méconnu le principe du contradictoire et entaché son jugement d'irrégularité ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

4. Considérant qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, ont répondu de façon suffisamment précise au moyen tiré de l'absence de débat oral et contradictoire avec le vérificateur dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la société FB Café a fait l'objet ainsi qu'aux critiques portant sur la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires ;

5. Considérant, en troisième et dernier lieu, que, si la société FB Café soutient que le jugement du tribunal administratif est entaché d'une contradiction de motifs, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur sa régularité ; que ce jugement ne comporte, par ailleurs, aucune contradiction entre ses motifs et son dispositif ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait, pour les motifs susévoqués, irrégulier ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. (...) " ; que dans le cas où la vérification de comptabilité d'une entreprise a été effectuée dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de la société FB Café a eu lieu dans ses locaux à compter du 6 janvier 2011, date de la première intervention ; que le gérant et l'expert-comptable de la société ont rencontré le vérificateur les 27 janvier 2011, 24 février 2011, 10 et 24 mars 2011 ; que la réunion de synthèse clôturant les opérations de vérification a eu lieu le 19 mai 2011 en présence du gérant, de l'expert-comptable et du conseil de la société FB Café ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, postérieurement à la réunion de synthèse, le vérificateur aurait sollicité ou emporté des pièces nouvelles, ni qu'il aurait poursuivi les opérations de vérification de comptabilité de la société en procédant à un examen critique des pièces comptables ; que le service n'était pas tenu d'informer la société des redressements qu'il envisageait avant de lui adresser la proposition de rectification du 11 juillet 2011 ; que, dans ces conditions, la société requérante n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu'elle aurait été privée de la garantie tenant à l'existence d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ; que, par suite, la société FB Café n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition serait sur ce point irrégulière ;

9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; que l'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée ; que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales instituent ainsi une garantie au profit de l'intéressé ; que, toutefois, la méconnaissance de ces dispositions par l'administration demeure sans conséquence sur le bien-fondé de l'imposition s'il est établi qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu du contribuable, celui-ci n'a pas été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, de cette garantie ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de la vérification de comptabilité de la société FB Café, l'administration fiscale a fait usage de son droit de communication auprès de deux des fournisseurs de l'entreprise, la société Uba et la société Tafanel, qui lui ont remis les copies des factures d'achats qu'elles avaient délivrées à la société FB Café au cours de la période vérifiée ; que, si l'administration fait valoir que le vérificateur a procédé à la reconstitution des recettes de ventes de bières de la société à partir du dépouillement des seules factures d'achat transmises par la contribuable lors des opérations de contrôle, il ressort des écritures du ministre que le service a comparé les documents obtenus auprès des fournisseurs de la société aux factures produites par celle-ci afin de vérifier leur concordance et l'exacte comptabilisation des factures ; qu'il appartenait, en conséquence, à l'administration de mentionner, dans la proposition de rectification adressée à la société FB Café, l'origine et la teneur des copies des factures des fournisseurs de la société qu'elle avait ainsi utilisées pour établir les rectifications litigieuses ; que, si la contribuable n'a pas été informée de l'origine de ces renseignements, les éléments contenus dans les copies des factures remises au service par ses fournisseurs, et qu'elle a elle-même présentées au vérificateur lors des opérations de vérification, étaient nécessairement connus de celle-ci ; que, dans ces conditions, la société FB Café n'a pas été privée, du seul fait de l'absence de cette information, de la garantie prévue par les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

11. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) " ;

12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, les recettes de la société FB Café étaient comptabilisées globalement en fin de mois sans que la société ait pu justifier de leur détail par la production des pièces justificatives correspondantes ; que, le service pouvait, dès lors, comme il l'a fait, écarter comme non probante la comptabilité de la société FB Café et reconstituer ses recettes et résultats imposables à l'aide d'une méthode extra comptable ; que, d'autre part, les impositions en litige ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 2 février 2012 ; qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la société requérante ne peut, par suite, obtenir la décharge ou la réduction des impositions qu'elle conteste qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases retenues par l'administration ; qu'à cette fin, elle peut soit critiquer la méthode de reconstitution des recettes à laquelle le service a recouru, en vue de démontrer en quoi elle aboutit à des résultats exagérés, soit soumettre à l'appréciation du juge de l'impôt une nouvelle méthode de reconstitution aboutissant à des résultats plus satisfaisants ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que pour reconstituer les résultats et chiffres d'affaires réalisés par la société FB Café au titre des exercices vérifiés, le vérificateur a recouru à la méthode dite des liquides ; qu'à partir des notes clients et des tickets présentés pour la seule période de 34 jours allant du 6 au 15 septembre 2009 et du 19 septembre 2009 au 12 octobre 2009 pendant laquelle la caisse enregistreuse de l'établissement a fonctionné, il a déterminé le rapport existant entre le chiffre d'affaires des bières pressions et en bouteille et le chiffre d'affaires total, soit un coefficient de 2,59, ainsi que le prix de vente moyen pondéré d'une pinte de bière par catégorie de bière et par année d'imposition ; qu'après avoir dépouillé l'intégralité des factures d'achats des bières pression par catégorie et quantités achetées, le vérificateur a évalué le chiffre d'affaires des bières pressions en appliquant le prix moyen pondéré de la pinte par catégorie précédemment obtenue et en retenant un pourcentage de pertes de 10% ainsi qu'en extournant les quantités de bières utilisées pour les " monaco " et les panachés ; que le chiffre d'affaires des bières bouteilles a été évalué, après dépouillement des factures d'achat des bières par marque et la détermination du nombre de bouteilles vendues à stocks constants, par application à chaque marque de bières en bouteille du prix de vente mentionné sur la carte du bar pour l'année 2008 et sur l'échantillon pour l'année 2009, après soustraction d'un pourcentage de pertes fixé à 2% ; qu'enfin, le vérificateur a appliqué au chiffre d'affaires total des bières, le coefficient de 2,59 pour déterminer le chiffre d'affaires total ;

14. Considérant, d'une part, que comme il vient d'être dit, le vérificateur a utilisé la méthode des liquides afin de reconstituer les résultats et chiffres d'affaires de la société FB Café et a opté pour la bière comme produit de référence, qui, contrairement à ce que soutient la société requérante, est suffisamment représentatif de son activité de bar-brasserie ; que le vérificateur n'a pu prendre en compte que les stocks de bières en bouteilles, les stocks de bières en fût n'étant pas suffisamment détaillés pour être exploités ; que, toutefois, il a retenu un taux de pertes de 10 % sur la quantité de bière achetée en fûts et a déduit les quantités de bière utilisées pour les " monaco " et les panachés ; que la circonstance, à la supposer établie, que le vérificateur n'aurait pas distingué entre les prix d'achat hors taxe, toutes taxes comprises ou avec un prix de consigne est sans incidence sur le bien-fondé de la méthode de reconstitution mise en oeuvre par le service qui ne tient compte que des prix de vente des bières par la société FB Café ;

15. Considérant que la société requérante soutient que la période de référence de 34 jours prise en compte par le vérificateur n'est pas représentative de l'ensemble de la période contrôlée dès lors que, pendant cette période, les températures extérieures étaient supérieures aux moyennes saisonnières constatées, entraînant ainsi une augmentation de la fréquentation de la terrasse du bar, que les événements sportifs retransmis au sein de l'établissement étaient plus nombreux, alors qu'en revanche, son exploitation avait été perturbée par le changement du mobilier de la terrasse en juillet 2008 et par la réalisation de travaux au cours du mois de janvier 2009 ; qu'elle invoque également le contexte économique difficile pour les métiers de la restauration et du bar dont les recettes auraient baissé de 10,20 % ; que, toutefois, la société FB Café n'établit pas qu'il y aurait eu des modifications dans les conditions d'exploitation de l'établissement alors qu'au surplus, les montants des chiffres d'affaires qu'elle a déclarés au cours des mois de septembre et octobre 2009 correspondent à la moyenne du chiffre d'affaires mensuel déclaré tout au long de l'année ; qu'enfin, la société FB Café ne peut utilement soutenir que sa situation financière et celle de son gérant ne leur permettaient pas de dissimuler des recettes ;

16. Considérant qu'il résulte des points 13 à 14 que la société requérante n'établit pas le caractère radicalement vicié dans son principe ou excessivement sommaire de la méthode suivie par le vérificateur, lequel n'était par ailleurs tenu par aucune disposition législative ou réglementaire d'utiliser la méthode de reconstitution appliquée lors d'un précédent contrôle, ni de recourir à plusieurs méthodes de reconstitution de chiffre d'affaires ;

17. Considérant, d'autre part, que la méthode de reconstitution proposée par la société requérante consiste à extrapoler le chiffre d'affaires de la période de référence de 34 jours retenue par le vérificateur et pendant laquelle les bandes de caisse enregistreuse étaient disponibles, soit la période allant du 6 au 15 septembre 2009 et du 19 septembre 2009 au 12 octobre 2009, à l'ensemble de la période contrôlée ; que cette méthode, qui ne repose sur aucune pièce justificative à l'exception des bandes de caisse enregistreuse, est plus imprécise que celle utilisée par le vérificateur ; que, dans ces conditions, la méthode que la requérante propose au titre des années 2008 et 2009 n'apparaît pas de nature à aboutir à une évaluation plus précise ou réaliste de son chiffre d'affaires que la méthode dite des liquides mise en oeuvre par le service ;

18. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la demande de la société FB café, un entretien a eu lieu le 12 juillet 2012 avec la responsable adjointe du pôle Gestion fiscale Centre et services spécialisés de la direction générale des finances publiques de Paris ; que le courrier du 22 juin 2012 du conseil de la société sollicitant cet entretien et celui du 13 février 2014 par lequel la société a contesté la décision de l'administration rejetant sa réclamation contentieuse et sollicité un nouvel entretien, ne permettent pas d'établir l'existence d'un accord avec l'administration portant sur l'application de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires proposée par la société ;

19. Considérant, enfin, que le tribunal n'a pas entaché son jugement d'une contrariété de motifs en estimant que le vérificateur pouvait se fonder sur les éléments résultant des bandes de la caisse enregistreuse pour la période pendant laquelle elle était en fonctionnement afin de déterminer le " coefficient reliant les achats de bière aux recettes perçues dans le cadre de l'exploitation du bar " à partir duquel a été reconstitué le chiffre d'affaires de la société mais que la simple reconstitution en année pleine du chiffre d'affaires ressortant des bandes susmentionnées ne constituait pas une méthode plus précise que la méthode susmentionnée, le caractère probant et sincère de ces bandes qui aurait permis de déduire directement le chiffre d'affaires annuel de la société n'étant pas démontré ;

S'agissant de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

20. Considérant que, si l'instruction fiscale référencée 4 G 3342 n° 4 du 25 juin 1998 indique que les reconstitutions de recettes devraient être opérées selon plusieurs méthodes et être effectuées à partir des conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise, elle ne peut, en tout état de cause, être utilement invoquée par la société requérante, s'agissant de simples recommandations qui ne sont pas opposables à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne les pénalités :

21. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;

22. Considérant que, pour justifier l'application des pénalités pour manquement délibéré aux cotisations d'impôt sur les sociétés et aux droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société FB Café, l'administration a notamment relevé que la contribuable ne pouvait ignorer ni l'irrégularité de sa comptabilité, alors qu'elle n'avait présenté aucune pièce justificative concernant les recettes déclarées et que la caisse enregistreuse acquise à la suite d'un précédent contrôle n'était presque pas utilisée, ni l'importance des minorations de recettes constatées s'élevant à plus d'un tiers du chiffre d'affaires ; qu'en se fondant sur ces éléments, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère délibéré des manquements commis par la société FB Café et, par suite, le bien-fondé de la pénalité en litige ;

23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du Conseil d'Etat sur l'ordonnance n° 16PA00794 du juge des référés de la Cour, que la société FB Café n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses et des pénalités y afférentes ; que sa demande tendant, à titre subsidiaire, à la réduction de ces impositions doit également être rejetée ; que, par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société FB Café est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL FB Café et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle de gestion fiscale Parisien 1).

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Poupineau, président,

-Mme Lescaut, premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 21 décembre 2017.

Le rapporteur,

V. LARSONNIER

Le président,

V. POUPINEAU

Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA02495


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02495
Date de la décision : 21/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Personnes et opérations taxables.


Composition du Tribunal
Président : Mme COIFFET
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : KETCHEDJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-21;15pa02495 ?
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