Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 juin 2016 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande tendant au renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.
Par un jugement n° 1611041 du 16 mars 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 avril 2017, et des mémoires enregistrés les 31 août 2017 et 23 novembre 2017, M. A..., représenté par Me de Metz, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1611041 du 16 mars 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 juin 2016 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans le même délai et sous la même astreinte, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
M. A...soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 dès lors que le préfet de police n'a pas mentionné s'il pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le traitement contre son diabète n'est pas disponible dans son pays d'origine, de même que les techniques permettant de soigner son hypertension artérielle et sa rétinopathie et qu'il ne dispose pas des ressources nécessaires pour se les procurer ; il a entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisqu'il réside en France de manière habituelle depuis plus de dix-huit ans, qu'il a une fille en France avec laquelle il désire restaurer le lien familial ;
- le préfet de police a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie de plus de dix-huit années de présence en France lesquelles constituent des considérations humanitaires ouvrant droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 précité ;
- à titre subsidiaire, il demande l'annulation de la décision fixant le pays de destination, dès lors qu'il ne pourra avoir un accès effectif à un traitement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 9 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poupineau,
- et les observations de Me de Metz, avocat de M.A....
1. Considérant que M. A..., ressortissant pakistanais, qui est entré en France au cours de l'année 1998, a bénéficié de plusieurs titres de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en raison de son état de santé, dont le dernier expirait le 26 août 2013 ; que le préfet de police lui a ensuite délivré des récépissés de demande de titre de séjour, qui ont couvert la période allant du 14 août 2013 au 23 janvier 2015 ; que M. A...a sollicité, le 3 décembre 2015, le renouvellement du titre de séjour qu'il avait obtenu en qualité d'étranger malade et a également demandé, le 16 mars 2016, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 27 juin 2016, le préfet de police a rejeté ses demandes, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ; que M. A...fait appel du jugement en date du 16 mars 2017, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;
3. Considérant que M.A..., qui était âgé de 71 ans à la date de l'arrêté contesté, fait valoir qu'il souffre d'un diabète insulinodépendant depuis 2001 compliqué d'hypertension artérielle, d'une rétinopathie sévère et d'insuffisance rénale ; que, dans son avis du 5 janvier 2016, le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a considéré que, si l'état de santé de M. A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier et notamment des différents certificats médicaux que le requérant a produits, dont celui daté du 23 septembre 2015 établi par le Professeur Marre, chef du service de diabétologie-endocrinologie-nutrition de l'hôpital Bichat, que le traitement de son diabète suppose deux injections quotidiennes d'insuline et que la rétinopathie sévère dont il est également atteint nécessite un suivi ophtalmologique régulier plusieurs fois par an ; que M. A...a joint à sa requête d'appel un rapport de l'Organisation mondiale de la santé rédigé au cours de l'année 2016, qui dresse un état des lieux de la prise en charge des personnes atteintes de diabète au Pakistan ; que ce rapport mentionne notamment que l'insuline n'est pas disponible dans les établissements de soins de santé primaires du Pakistan, de même que le test HbA1c ou la photocoagulation rétinienne, différentes techniques et technologies requises par l'état de santé de M. A...en raison de sa rétinopathie et de sa néphropathie diabétique ; que le préfet de police n'établit pas que M. A...pourrait bénéficier des traitements et soins qui lui ont été prescrits en se bornant à faire valoir que des solutions d'insuline ainsi que des médicaments soignant l'hypertension figurent sur la liste des médicaments essentiels du Pakistan établie en 2007, soit près de 9 ans avant la décision contestée ; que M. A... est, dès lors, fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer, pour le motif ci-dessus rappelé, le titre de séjour qu'il sollicitait, le préfet de police a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à demander l'annulation de cette décision, ainsi que, par voie de conséquence, des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2016 du préfet de police ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté contesté, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de délivrer à M. A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me de Metz, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me de Metz de la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1611041 du Tribunal administratif de Paris en date du 16 mars 2017 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de police en date du 27 juin 2016 est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'État versera à Me de Metz, avocat de M.A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me de Metz renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 décembre 2017.
Le rapporteur,
V. POUPINEAULe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
C. RENE MINELa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01143