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12/12/2017 | FRANCE | N°16PA00957

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 12 décembre 2017, 16PA00957


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société " Le Service A Votre Porte " a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 12 mai 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a refusé de lui délivrer une autorisation de travail au profit de MmeA....

Par un jugement n° 1505575 du 10 février 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enr

egistrés les 14 mars 2016 et 22 juin 2017, la société " Le Service A Votre Porte ", représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société " Le Service A Votre Porte " a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 12 mai 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a refusé de lui délivrer une autorisation de travail au profit de MmeA....

Par un jugement n° 1505575 du 10 février 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 mars 2016 et 22 juin 2017, la société " Le Service A Votre Porte ", représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1505575 du 10 février 2016 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision en date du 12 mai 2015 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi) de délivrer l'autorisation de travail sollicitée au profit de MmeA... ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée a été signée par une personne incompétente ; il appartenait au préfet de Seine-et-Marne de produire le jour de l'audience l'arrêté portant délégation de signature ;

- elle a déposé des offres d'emploi auprès de Pôle emploi qui sont restées sans réponse ; elle a rencontré de réelles difficultés pour recruter du personnel, alors que Mme A... justifiait d'une qualification et d'une expérience professionnelles, d'une grande motivation et des qualités humaines pour occuper l'emploi d'assistante de vie ; elle l'a ainsi recrutée sur un poste à pourvoir immédiatement sous peine de perdre des clients ;

- les services de la préfecture de Seine-et-Marne n'ont pas répondu à sa demande portant sur la possibilité pour MmeA..., qui bénéficiait d'un titre de séjour délivré par les autorités italiennes, d'être recrutée ;

- le salaire de Mme A...est basé sur le SMIC et correspond à un emploi à temps partiel ; aucune loi ni aucun règlement ne contraint un employeur à recruter un salarié étranger uniquement à temps complet, sauf à méconnaître le principe d'égalité de traitement des salariés ;

- Mme A...s'est installée avec sa famille en France.

La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,

- et les observations de MmeA....

1. Considérant que la société " Le Service A Votre Porte " a sollicité une autorisation de travail au profit de Mme A...pour un emploi d'assistante de vie ; que, par une décision en date du 12 mai 2015, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a rejeté cette demande ; que la société " Le service A Votre Porte " fait appel du jugement du 10 février 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée a été signée par M. Jean Luc Catanas, secrétaire général de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de l'unité territoriale de Seine-et-Marne, qui disposait d'une délégation à l'effet de signer les autorisations de travail prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail, en cas d'absence ou d'empêchement de M. C..., directeur régional adjoint, responsable de l'unité territoriale de Seine-et-Marne, en vertu des arrêtés du préfet de Seine-et-Marne n° 14/PCAD/126 du 1er septembre 2014 et du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France n° 2015-040 du 16 mars 2015, régulièrement publiés aux recueils des actes administratifs n° 36 ter du 2 septembre 2014 et n° 25 du 19 mars 2015 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur régional adjoint, responsable de l'unité territoriale de Seine-et-Marne, n'aurait pas été absent ou empêché lors de la signature de la décision refusant de délivrer à la société " Le Service A Votre Porte " l'autorisation de travail sollicitée ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le préfet de Seine-et-Marne, qui n'y était pas tenu, a produit devant le tribunal les arrêtés portant délégation de signature susmentionnés qui lui ont été communiqués le 28 septembre 2015 ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; (...) 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; (...) 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 ; (...) " ; que l'article L. 8251-1 du même code dispose que : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort de la décision du 12 mai 2015 que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a refusé l'autorisation de travail sollicitée au profit de MmeA..., au motif que la société " Le Service A Votre Porte " ne justifiait pas avoir déposé des offres d'emploi auprès des services de Pôle emploi, alors que le métier d'assistante de vie n'était pas caractérisé par de fortes tensions sur le marché du travail en Ile-de-France, 21 754 demandeurs d'emplois étant inscrits pour 8 927 offres d'emploi proposées au dernier trimestre de l'année 2014, que Mme A...était employée depuis le 29 septembre 2014 sans autorisation de travail et que le salaire mensuel brut proposé à la salariée était de 991,12 euros ;

5. Considérant que si la société " Le Service A Votre Porte " soutient qu'elle avait interrogé par courriel le 7 octobre 2014 les services de la préfecture de Seine-et-Marne sur la possibilité pour MmeA..., qui bénéficiait d'un titre de séjour délivré par les autorités italiennes, d'être recrutée et qu'elle n'avait obtenu aucune réponse, il est constant que Mme A... ne disposait pas d'un titre de séjour l'autorisant à travailler sur le territoire français lorsqu'elle a été embauchée par la société requérante le 24 septembre 2014 ; que, dès lors, c'est à bon droit que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a estimé que la société " Le Service A Votre Porte " ne remplissait pas la condition posée par les dispositions du 3° de l'article R. 5221-20 et de l'article L. 8251-1 du code du travail ;

6. Considérant qu'il est constant que le salaire brut mensuel de Mme A...s'élevait à 991,12 euros pour une quotité mensuelle de travail de 104 heures ; qu'ainsi, l'emploi de MmeA..., à temps partiel, ne lui garantissait pas le salaire minimum interprofessionnel de croissance mensuel mentionné à l'article L. 3232-1 du code du travail et qui s'établissait à 1457,52 euros au 1er janvier 2015 ; que la société requérante soutient que les dispositions du 6° de l'article R. 5221-20 du code du travail ont pour conséquence de favoriser les salariés étrangers en obligeant les employeurs à les recruter sur un emploi à temps plein et méconnaissent ainsi le principe d'égalité de traitement entre les salariés ; que, toutefois, les travailleurs étrangers sollicitant une autorisation de travail afin d'exercer une profession salariée sur le territoire français ne sont pas placés dans la même situation que les travailleurs nationaux pour accéder au marché du travail ; que, par suite, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a pu à bon droit opposer à la société " Le Service A Votre Porte " l'insuffisante rémunération du salarié étranger pour refuser l'autorisation de travail sollicitée ;

7. Considérant que pour les seuls motifs énoncés aux points 5 et 6 du présent arrêt, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi pouvait légalement rejeter la demande d'autorisation de travail sollicitée par la société " Le Service A Votre Porte ", même si Mme A...donnait entièrement satisfaction dans l'exercice de ses fonctions et qu'elle était bien intégrée à la société française ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société " Le Service A Votre Porte " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société " Le Service A Votre Porte " est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société " Le Service A Votre Porte " et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à Mme D...A...et au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Poupineau, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2017.

Le rapporteur,

V. LARSONNIER Le président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 16PA00957 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00957
Date de la décision : 12/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : DAKHLI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-12;16pa00957 ?
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