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28/11/2017 | FRANCE | N°16PA03620-16PA03879-16PA03953

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 28 novembre 2017, 16PA03620-16PA03879-16PA03953


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, l'Union des sociétés mutualistes de Nouvelle-Calédonie, la pharmacie de la Conception et la pharmacie de Robinson ont demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, par des requêtes distinctes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2015 par lequel le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a autorisé le transfert de l'officine ayant fait l'objet de la licence n°39 du quartier de Yahoué à celui du Pont-des-Français au Mont-D

ore, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2016 par lequel le gouver...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, l'Union des sociétés mutualistes de Nouvelle-Calédonie, la pharmacie de la Conception et la pharmacie de Robinson ont demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, par des requêtes distinctes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2015 par lequel le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a autorisé le transfert de l'officine ayant fait l'objet de la licence n°39 du quartier de Yahoué à celui du Pont-des-Français au Mont-Dore, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2016 par lequel le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a enregistré la déclaration d'exploitation commune de l'officine de pharmacie ayant fait l'objet de la licence n° 39 sous la forme d'une Selarl dénommée 'Pharmacie de Yahoué' et a autorisé le transfert de cette officine du quartier de Yahoué à celui du Pont-des-Français au Mont-Dore.

Par un jugement nos 1500401, 1500405, 1600084, 1600094, 1600095 et 1600097 du

30 septembre 2016, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leurs requêtes après les avoir jointes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 160A03620 les 5 décembre 2016 et 3 novembre 2017, la pharmacie de Robinson, représentée par MeH..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du

30 septembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 12 janvier 2016 ;

3°) de mettre à la charge du gouvernement de Nouvelle-Calédonie la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière en ce qu'il n'a pas été précédé d'une nouvelle instruction et en ce que la licence a été demandée par des personnes qui n'en avaient pas le droit ;

- cette décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'autorisation de transfert en litige qui a été accordée n'est pas justifiée par les besoins en médicaments de la population ;

- elle est également entachée de détournement de pouvoir dès lors que ce sont des considérations d'intérêt public qui ont conduit le gouvernement à ne pas suivre l'avis des services instructeurs et du Conseil de l'ordre des pharmaciens.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2017, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la pharmacie de Robinson au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les avis rendus par le Conseil de l'ordre des pharmaciens et par le pharmacien inspecteur n'étant pas des avis conformes, il n'est donc pas obligé de les suivre ;

- Mme D...ayant intenté un recours dans les délais requis à l'encontre de la décision implicite survenue le 4 février 2015, elle n'est pas devenue définitive ;

- l'arrêté du 12 janvier 2016 tel que modifié par celui du 22 juin 2016 ne fait plus état d'un changement de structure juridique et vient satisfaire la seule demande d'autorisation de transfert présentée par MmeD... ; il est de surcroît parfaitement possible pour un pharmacien d'être titulaire d'une officine en pharmacie et associé dans une SELARL qui gère une autre pharmacie ;

- il appartient à l'autorité compétente d'apprécier l'opportunité d'un transfert d'officine sous la seule réserve que cela ne soit pas contraire aux intérêts publics ; cette appréciation doit se faire concrètement et non pas en fonction de principes strictement arithmétiques ;

- le transfert de la pharmacie de Yahoué poursuit incontestablement un but de santé publique ;

- les habitants du quartier d'origine peuvent se rendre au nouvel emplacement de l'officine transférée distant de 1 300 mètres uniquement et situé dans le quartier voisin, l'axe de transfert étant urbanisé ;

- le nouvel emplacement comporte des avantages tant pour les habitants du quartier d'origine que pour celui d'accueil qui ne disposaient pas d'officine ; le local est plus spacieux, plus fonctionnel, mieux desservi et dispose d'emplacements réservés aux handicapés ;

- les allégations relatives au détournement de pouvoir sont totalement infondées.

Par un mémoire, enregistré le 24 octobre 2017, MmeD..., représentée par la SELARL DetS Legal conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucune des trois requêtes n'est recevable dès lors qu'elles ne contiennent pas de moyen dirigé contre le jugement entrepris et qu'elles se bornent à reformuler les moyens déjà exposés en première instance ;

- faute d'habilitation régulière de la part du Conseil de l'ordre des pharmaciens, son président n'avait pas qualité pour ester en justice ;

- les pharmacies de Robinson et de la Conception n'ont pas intérêt à agir contre l'arrêté contesté eu égard à la distance qui les sépare du local d'accueil ;

- le transfert contesté constitue un rééquilibrage au sein du quartier de Yahoué-Pont des français et n'a ni pour objet ni pour effet de conduire à un abandon de la population d'origine ;

- la décision implicite de rejet ayant fait l'objet d'un recours pouvait valablement être retirée par le gouvernement qui a décidé de statuer à nouveau ;

- la décision contestée n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir.

II. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 160A03879 les 16 décembre 2016 et 3 novembre 2017, la pharmacie de la Conception, représentée par MeH..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du

30 septembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 12 janvier 2016 ;

3°) de mettre à la charge du gouvernement de Nouvelle-Calédonie la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière en ce qu'il n'a pas été précédé d'une nouvelle instruction et en ce que la licence a été demandée par des personnes qui n'en avaient pas le droit ;

- cette décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'autorisation de transfert en litige qui a été accordée n'est pas justifiée par les besoins en médicaments de la population ;

- elle est également entachée de détournement de pouvoir dès lors que ce sont des considérations d'intérêt public qui ont conduit le gouvernement à ne pas suivre l'avis des services instructeurs et du Conseil de l'ordre des pharmaciens.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2017, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la pharmacie de la Conception au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les avis rendus par le Conseil de l'ordre des pharmaciens et par le pharmacien inspecteur n'étant pas des avis conformes, il n'est donc pas obligé de les suivre ;

- Mme D...ayant intenté un recours dans les délais requis à l'encontre de la décision implicite survenue le 4 février 2015, elle n'est pas devenue définitive ;

- l'arrêté du 12 janvier 2016 tel que modifié par celui du 22 juin 2016 ne fait plus état d'un changement de structure juridique et vient satisfaire la seule demande d'autorisation de transfert présentée par MmeD... ; il est de surcroît parfaitement possible pour un pharmacien d'être titulaire d'une officine en pharmacie et associé dans une SELARL qui gère une autre pharmacie ;

- il appartient à l'autorité compétente d'apprécier l'opportunité d'un transfert d'officine sous la seule réserve que cela ne soit pas contraire aux intérêts publics ; cette appréciation doit se faire concrètement et non pas en fonction de principes strictement arithmétiques ;

- le transfert de la pharmacie de Yahoué poursuit incontestablement un but de santé publique ;

- les habitants du quartier d'origine peuvent se rendre au nouvel emplacement de l'officine transférée distant de 1 300 mètres uniquement et situé dans le quartier voisin, l'axe de transfert étant urbanisé ;

- le nouvel emplacement comporte des avantages tant pour les habitants du quartier d'origine que pour celui d'accueil qui ne disposaient pas d'officine ; le local est plus spacieux, plus fonctionnel, mieux desservi et dispose d'emplacements réservés aux handicapés ;

- les allégations relatives au détournement de pouvoir sont totalement infondées.

Par un mémoire, enregistré le 24 octobre 2017, MmeD..., représentée par la SELARL DetS Legal conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucune des trois requêtes n'est recevable dès lors qu'elles ne contiennent pas de moyen dirigé contre le jugement entrepris et qu'elles se bornent à reformuler les moyens déjà exposés en première instance ;

- faute d'habilitation régulière de la part du Conseil de l'ordre des pharmaciens, son président n'avait pas qualité pour ester en justice ;

- les pharmacies de Robinson et de la Conception n'ont pas intérêt à agir contre l'arrêté contesté eu égard à la distance qui les sépare du local d'accueil ;

- le transfert contesté constitue un rééquilibrage au sein du quartier de Yahoué-Pont des français et n'a ni pour objet ni pour effet de conduire à un abandon de la population d'origine ;

- la décision implicite de rejet ayant fait l'objet d'un recours pouvait valablement être retirée par le gouvernement qui a décidé de statuer à nouveau ;

- la décision contestée n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir.

III. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 160A03953 les 30 décembre 2016 et 3 novembre 2017, le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, représenté par Me A...puis par MeH..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du

30 septembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 12 janvier 2016 ainsi que celui du 28 juillet 2015 qui a été rapporté ;

3°) de mettre à la charge du gouvernement de Nouvelle-Calédonie la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le changement de constitution de capital entre la SARL d'origine et la SELARL, s'il est avéré, conduit à ce que l'officine soit illégalement exploitée par MmeD... ; il est à cet égard demandé la production du RIDET actuel de la société ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 571 du code de la santé publique dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation alors que plus d'1,5 km séparent les diverses officines au sein de la même commune et non plus de 500 mètres comme indiqué à tort dans le jugement contesté ;

- la pharmacie voisine située à 500 mètres de celle exploitée par Mme D...route de Yahoué au Mont-Doré n'est pas située sur la même commune mais à Dumbéa et qu'elle n'est pas aisément accessible par les voitures ou les piétons ;

- les résultats du recensement montrent bien un abandon de population au seul avantage de l'équilibre économique de la pharmacie de Yahoué ;

- le déplacement de la pharmacie de Yahoué vers un centre commercial à Pont-des-français ne s'est pas fait dans un but de santé publique ;

- Mme D...a par ailleurs contourné la réglementation applicable en changeant de lieu et de capital au bout de deux années seulement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2017, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge du Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le grief tiré d'une prétendue absence de consultation du Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie sur une modification du capital social de l'officine est inopérant dès lors que l'arrêté du 28 juillet 2015, tout comme celui du 14 juin 2016 tel que modifié par celui du 12 janvier 2016 autorisent uniquement un transfert de l'officine ; en tout état de cause, le conseil de l'ordre a bien été consulté sur la transformation de la SARL en SELARL ;

- c'est bien la population du Mont-Doré qui a été prise en compte pour apprécier si le transfert de l'officine était ou non conforme aux intérêts de la santé publique ; les habitants de Yahoué n'éprouveront pas de difficultés à se rendre au nouvel emplacement situé dans le quartier de Pont-des-français sur le territoire de la même commune ; le fait que ces habitants disposent d'une autre pharmacie encore plus proche ne saurait leur préjudicier ;

- l'allégation relative au contournement de la réglementation en matière d'association relève du procès d'intention au demeurant inopérante ;

- selon un principe général, il appartient à l'autorité compétente d'apprécier l'opportunité d'un transfert d'officine sous la seule réserve que cela ne soit pas contraire aux intérêts publics ; cette appréciation doit se faire concrètement et non pas en fonction de principes strictement arithmétiques ;

- le transfert de la pharmacie de Yahoué poursuit incontestablement un but de santé publique ;

- les habitants du quartier d'origine peuvent se rendre au nouvel emplacement de l'officine transférée distant de 1 300 mètres uniquement et situé dans le quartier voisin, l'axe de transfert étant urbanisé ;

- le nouvel emplacement comporte des avantages tant pour les habitants du quartier d'origine que pour celui d'accueil qui ne disposaient pas d'officine ; le local est plus spacieux, plus fonctionnel, mieux desservi et dispose d'emplacements réservés aux handicapés ;

- les allégations relatives à la circonstance que le transfert ne serait fondé que sur un motif d'équilibre financier sont totalement infondées.

Par un mémoire, enregistré le 24 octobre 2017, MmeD..., représentée par la SELARL DetS Legal conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucune des trois requêtes n'est recevable dès lors qu'elles ne contiennent pas de moyen dirigé contre le jugement entrepris et qu'elles se bornent à reformuler les moyens déjà exposés en première instance ;

- faute d'habilitation régulière de la part du Conseil de l'ordre des pharmaciens, son président n'avait pas qualité pour ester en justice ;

- les pharmacies de Robinson et de la Conception n'ont pas intérêt à agir contre l'arrêté contesté eu égard à la distance qui les sépare du local d'accueil ;

- le transfert contesté constitue un rééquilibrage au sein du quartier de Yahoué-Pont des français et n'a ni pour objet ni pour effet de conduire à un abandon de la population d'origine ;

- la décision implicite de rejet ayant fait l'objet d'un recours pouvait valablement être retirée par le gouvernement qui a décidé de statuer à nouveau ;

- la décision contestée n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de la santé publique dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie ;

- la loi n° 54-418 du 15 avril 1954 étendant aux territoires d'outre-mer, au Togo et au Cameroun certaines dispositions du code de la santé publique relatives à l'exercice de la pharmacie, ensemble le décret n° 55-1122 du 16 août 1955 fixant les modalités d'application de ladite loi ;

- le décret n° 53-1001 du 5 octobre 1953 portant codification des textes législatifs concernant la santé publique, tel que modifié par le décret n° 55-685 du 20 mai 1955 ;

- l'arrêté gubernatorial n° 1940 du 23 décembre 1955 fixant le nombre et la répartition des officines en Nouvelle-Calédonie, modifié par l'arrêté n° 74-196/CG du 22 avril 1974 ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pena, rapporteur,

- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant MmeD....

1. Considérant que les requêtes susvisées présentées par la pharmacie de Robinson, la pharmacie de la Conception et le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;

2. Considérant que MmeD..., exploitante de l'officine de pharmacie faisant l'objet de la licence n° 39 dans le quartier de Yahoué de la commune du Mont-Dore a demandé, le

4 décembre 2014, l'autorisation de transférer cette officine sise 10 route de Yahoué, quartier Yahoué au Mont-Dore au lot 99 de la section mission du quartier du Pont-des-Français ; qu'une décision implicite de rejet est née le 4 février 2015 du fait du silence gardé par l'administration ; que, par un arrêté du 28 juillet 2015, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a finalement fait droit à cette demande ; que, par un arrêté du 12 janvier 2016, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a retiré l'arrêté du 28 juillet 2015 portant autorisation de transfert, enregistré la déclaration d'exploitation commune de l'officine de pharmacie ayant fait l'objet de la licence

n° 39 sous la forme d'une Selarl dénommée " Pharmacie de Yahoué " et, de nouveau, autorisé le transfert de cet officine du 10 route de Yahoué, quartier Yahoué au Mont-Dore au lot 99 de la section mission du quartier du Pont-des-Français au Mont-Dore ; que, par un arrêté du 14 juin 2016, l'arrêté du 12 janvier 2016 a été modifié ; qu'il n'enregistre plus de déclaration d'exploitation commune et a pour unique objet d'autoriser le transfert de l'officine objet de la licence n° 39 exploitée par Mme D...du 10 route de Yahoué, quartier Yahoué au Mont-Dore au lot 99 de la section mission du quartier du Pont-des-Français au Mont-Dore ; que, par six requêtes distinctes, le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, l'Union des sociétés mutualistes de Nouvelle-Calédonie, la pharmacie de la Conception et la pharmacie de Robinson ont demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2015, d'autre part, celui du 12 janvier 2016 précités ; que les pharmacies de Robinson et de la Conception ainsi que le conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie relèvent appel du jugement du 30 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif, après les avoir jointes, a rejeté leurs requêtes ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par MmeD... :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. Considérant qu'aux termes des dispositions de la loi du 15 avril 1954 susvisée, les dispositions du code de la santé publique alors en vigueur concernant l'ouverture des pharmacies sont applicables en Nouvelle Calédonie ; qu'aux termes de l'article L. 570 du CSP dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie : " Toute ouverture d'une nouvelle officine, tout transfert d'une officine d'un lieu dans un autre sont subordonnés à l'octroi d'une licence délivrée par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie après avis du conseil régional de l'Ordre des pharmaciens. Cette licence fixe l'emplacement où l'officine sera exploitée. L'officine dont la création a été autorisée doit être ouverte au public au plus tard à l'issue d'un délai fixé à un an à partir du jour où la licence a été délivrée sauf prorogation en cas de force majeure. (...) sauf le cas de force majeure constaté par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie (...), une officine ne peut être cédée avant l'expiration d'un délai de cinq ans qui court à partir du jour de son ouverture " ;

4. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que la décision expresse d'autorisation contestée a été prise par l'autorité compétente après que le silence gardé dans un premier temps par l'administration sur la demande d'autorisation de transfert avait fait naître une décision implicite de rejet n'est pas de nature à l'entacher d'un vice de procédure ; qu'il n'était à ce titre pas nécessaire de procéder à une nouvelle instruction ; que cette décision implicite n'a en outre pu devenir définitive en raison de l'introduction dans le délai de recours contentieux de conclusions tendant à son annulation devant le tribunal administratif ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la décision en litige est intervenue à la suite de deux avis défavorables rendus par le conseil de l'ordre des pharmaciens d'une part, par le directeur de la DASS d'autre part, n'est pas davantage de nature à l'entacher d'illégalité dès lors qu'il ne s'agit pas d'avis conformes ;

6. Considérant, en troisième lieu, que les appelants persistent à soutenir que l'arrêté du 12 janvier 2016 doit également être annulé en tant qu'il enregistre l'exploitation de l'officine ayant fait l'objet de la licence n° 39 par la Selarl " Pharmacie de Yahoué " motif pris que les nouveaux associés de Mme D..., soit Mme E...et M.I..., sont déjà propriétaires d'officine de pharmacie et ne pouvaient dès lors devenir propriétaire ou copropriétaire d'une nouvelle officine ; qu'ils font ainsi valoir que, pour cette raison également, l'arrêté contesté aurait dû faire l'objet d'une nouvelle procédure d'instruction préalablement à l'enregistrement du changement de statut juridique de l'exploitant de l'officine ; que toutefois, et ainsi que n'ont pas manqué de le relever les premiers juges, l'arrêté du 12 janvier 2016 tel que modifié par l'arrêté du 22 juin 2016 précité ne fait plus état d'un changement de structure juridique et vient satisfaire la seule demande d'autorisation de transfert présentée par Mme D...le 4 décembre 2014, demande sur laquelle le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie a bien été consulté ; que ce moyen ne peut pas suite qu'être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

7. Considérant que l'arrêté contesté autorise le transfert d'une officine pharmaceutique du quartier de Yahoué à celui de Pont-des-français, tous deux situés sur le territoire de la commune du Mont-Dore ; qu'il n'est pas contesté qu'au vu des données démographiques disponibles, à savoir une population en augmentation constante depuis plusieurs années dans le quartier de Yahoué et une constante diminution de celle-ci à Pont-des-Français, tant le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie que le directeur des affaires sanitaires et sociales se sont prononcés défavorablement sur la demande d'autorisation de transfert pour ce motif ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que les habitants du quartier d'origine de l'officine de Mme D...disposent à proximité de deux autres pharmacies, sans que la circonstance que l'une d'elles se situe sur la commune voisine de Dumbéa soit un obstacle à ce que les habitants de Yahoué puissent s'y rendre, alors qu'elle ne se trouve qu'à 500 mètres de distance et que le secteur est urbanisé ; qu'il n'est ainsi pas établi que son accès y serait particulièrement compliqué en raison notamment de la présence sur le parcours d'une rocade et d'un feu giratoire ; que s'agissant du secteur d'accueil de l'officine, si des pharmacies y sont déjà implantées, celle située à 500 mètres du lieu de transfert est une pharmacie mutualiste à laquelle une partie seulement de la population a accès et qui n'est en outre pas astreinte aux services de garde ; que les deux autres pharmacies les plus proches, au demeurant requérantes à l'instance, celle de la Conception et celle de Robinson, sont respectivement situées à plus d'un et deux kilomètres du lieu d'implantation de celle de MmeD... ; que, par suite, compte tenu de la localisation de l'emplacement initial de l'officine et de l'emplacement nouveau, en autorisant par l'arrêté contesté, le transfert de la pharmacie exploitée par Mme D...du secteur de yahoué vers celui de Pont-des-français, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie n'a pas méconnu les intérêts de la santé publique et notamment pas les besoins en médicaments de la population ;

8. Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, la pharmacie de Robinson et la pharmacie de la Conception ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que les appelants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche , dans les circonstances de l'espèce, de mettre à ce titre à la charge solidaire du Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, de la pharmacie de Robinson et de la pharmacie de la Conception le versement d'une somme de 2 000 euros au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et de la même somme à Mme D...;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes du Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, de la pharmacie de Robinson et de la pharmacie de la Conception, sont rejetées.

Article 2 : Le Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, la pharmacie de Robinson et la pharmacie de la Conception verseront solidairement au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et à Mme D...les sommes de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Conseil de l'ordre des pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, à la pharmacie de Robinson, à la pharmacie de la Conception, au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, à Mme B...D..., gérante de la pharmacie de Yahoué, à Mme G...E..., à M. C...I...et à l'Union des sociétés mutualistes de Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 novembre 2017.

Le rapporteur,

E. PENALe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

A. DUCHER

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 16PA03620, 16PA03879, 16PA03953


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03620-16PA03879-16PA03953
Date de la décision : 28/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Eléonore PENA
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : SELARL D'AVOCATS ROYANEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-11-28;16pa03620.16pa03879.16pa03953 ?
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