Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société en nom collectif (SNC) Filao 914 a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de lui rembourser la somme de 1 170 923 francs CFP au titre de son crédit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour le troisième trimestre de l'année 2015, assortie des intérêts de retard à compter du 11 juillet 2011.
Par un jugement n° 1600060 du 27 septembre 2016, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 novembre 2016, rectifiée par un mémoire enregistré le 16 décembre 2016 sous le n° 16PA03454, la SNC Filao 914, représentée par la SARL Domigestion, représentée par MeG..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer le remboursement de la somme de 1 170 923 francs CFP au titre du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait à l'expiration du troisième trimestre 2015 ;
3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement d'une somme de 230 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SNC Filao 914 soutient que les factures émises ne sont pas fictives et que la réalité de l'opération commerciale n'est pas sérieusement contestée ni contestable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2017, la Polynésie française, représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SNC Filao 914 le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La Polynésie française soutient que les moyens soulevés par la SNC Filao 914 ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
- le code des impôts de la Polynésie française ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Heers, président rapporteur,
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah rapporteur public.
1. Considérant que, dans le cadre d'une opération de défiscalisation des investissements outre-mer, la société Nippon Automoto a établi, le 27 février 2009, pour la vente d'un véhicule de marque " Toyota ", de modèle " double cabine boite manuelle, KUN26LPRMSYM " portant le numéro de châssis MR0FZ29GX01721157, une facture n° 13 132 libellée à l'attention de la SNC Filao 914, mentionnant un montant hors taxes de 3 486 810 francs CFP et une taxe sur la valeur ajoutée de 554 290 francs CFP ; que par un contrat de location, signé le 27 mars 2009, la SNC Filao 914 a mis un véhicule à la disposition de M. A... B...I...pour une durée de cinq ans ;
2. Considérant que par ailleurs, le 25 février 2009, la société Tahiti Automobiles a établi, pour la vente d'un véhicule de marque " Ford ", de modèle " Ranger 3,0L TDCI double CAB XLT ", une facture libellée à l'attention de la SNC Filao 914, mentionnant un montant hors taxes de 2 927 653 francs CFP et une taxe sur la valeur ajoutée de 468 425 francs CFP ; que par un contrat de location signé le 27 février 2008, la SNC Filao 914 a mis un véhicule désigné comme étant " un véhicule Double Cabine Ford Ranger " à la disposition de M. D... E... pour une durée de cinq ans ;
3. Considérant en outre que la société American Motors a établi, le 23 février 2009, pour la vente d'un véhicule de marque " Chevrolet ", de modèle " Colorado crew cab 2008 ", une facture libellée à l'attention de la SNC Filao 914, mentionnant un montant hors taxes de 3 805 474 francs CFP et une taxe sur la valeur ajoutée de 608 876 francs CFP ; que par un contrat de location, signé le 25 février 2008, la SNC Filao 914 a mis un véhicule à la disposition de l'entreprise Tikahau, dont le représentant légal est M. C... D..., pour une durée de cinq ans ; qu'en raison de difficultés financières de l'entreprise Tikahau, celle-ci a sollicité de la SNC l'autorisation de procéder au transfert des contrats de location et de financement la liant à cette dernière ; que la cession de contrat est intervenue le
25 février 2009, au bénéfice de MmeH..., la nouvelle cessionnaire ;
4. Considérant que la SNC Filao 914, conformément à l'article 345-20-1 du code des impôts de la Polynésie française, a notamment déduit la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat des véhicules identifiés aux points 1 à 3 ; que le 12 octobre 2015, la
SARL Domigestion Pacifique, représentant fiscal de la SNC Filao 914 sur le territoire de la Polynésie française, a, sur le fondement de l'article 345-22 du même code, demandé le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 1 170 923 francs CFP, dont elle disposait, selon elle, à l'expiration du troisième trimestre 2015 ; que cette demande a fait l'objet d'une admission partielle et qu'un remboursement de 7 757 francs CFP a été accordé à la SNC Filao 914 ; que pour le surplus, l'administration fiscale, qui a estimé que les factures mentionnées aux points 1 à 3 présentaient un caractère fictif, a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de ces matériels et, le 23 décembre 2015, a informé le représentant fiscal de la SNC Filao 914 du rejet de la demande de remboursement de crédit de TVA d'un montant de 1 163 166 francs CFP ; que la SNC Filao 914 relève appel du jugement du 27 septembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande de remboursement de ce crédit de TVA ;
Sur la demande de remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 345-4 du code des impôts de la Polynésie française " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. Pour ouvrir droit à déduction, la dépense engagée doit être nécessaire à l'exploitation et affectée exclusivement aux besoins de l'exploitation (...) " ; qu'aux termes de l'article 345-10 du même code : " la taxe dont les assujettis peuvent opérer la déduction est (...) celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ceux-ci étaient eux-mêmes autorisés à faire figurer la taxe sur la valeur ajoutée sur ces factures " ; qu'aux termes de l'article 345-15 de ce code : " La déduction initialement opérée fait l'objet d'une régularisation, par imputation ou remboursement, lorsque la déduction s'avère supérieure ou inférieure à celle que l'assujetti était en droit d'opérer ou lorsque des modifications des éléments ayant servi à déterminer le montant des déductions sont intervenues postérieurement à la déclaration, notamment : / (...) lorsqu'une facture ou le document en tenant lieu ne correspond pas effectivement à la livraison d'un bien ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur (...) " ; qu'aux termes de l'article 345-20-1 du même code : " Le droit à déduction de la taxe qui a grevé l'acquisition, la construction ou la création en Polynésie française de biens mobiliers ou immobiliers ouvrant droit à défiscalisation métropolitaine ne peut s'exercer que par cinquième au cours de la période de 60 mois durant laquelle les investisseurs métropolitains sont tenus de maintenir l'investissement correspondant dans le territoire. / Le montant de la déduction opérée annuellement est à ajuster au prorata temporis de la date de début d'exploitation " ; qu'aux termes de l'article 345-22 de ce code : " Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut intervenir sur demande de l'assujetti ou de son représentant fiscal dûment accrédité. La demande peut porter sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de l'année civile précédente, sous réserve d'atteindre un montant minimal de 20 000 F CFP. Sous peine de forclusion, la demande doit être déposée au plus tard le 31 janvier pour les entreprises placées sous le régime réel d'imposition et au plus tard le 31 mars pour les entreprises placées sous le régime simplifié d'imposition " ; qu'aux termes de l'article 345-24 du même code : " Les demandes de remboursement sont formulées sur un imprimé dont le modèle est fixé par arrêté pris en conseil des ministres. / S'il s'agit de la première demande en restitution et en tout état de cause à toute réquisition de la direction des impôts et des contributions publiques, le demandeur est tenu de produire le relevé des documents d'importation et des factures d'achat justifiant de la taxe déductible " ;
6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;
En ce qui concerne le bien figurant sur la facture du 27 février 2009 :
7. Considérant que, pour refuser à la SNC Filao 914 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture identifiée au point 1 émise par la société Nippon Automoto, régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, et refuser le remboursement du crédit correspondant, l'administration fait notamment valoir que le numéro d'immatriculation était déjà connu dès l'établissement de la facture, ce qui constitue une anomalie ; que la SNC Filao 914 produit le certificat d'immatriculation du véhicule donné en location à M. A... B..., qui fait apparaître que le numéro d'immatriculation 198 686 P inscrit sur ce document est le même que celui figurant sur la facture alors que la procédure d'immatriculation d'un véhicule en Polynésie française contraint le propriétaire du véhicule à obtenir un certificat de vente avant l'envoi d'un formulaire rempli à la direction des transports ; que, par ailleurs, il n'est pas établi que le véhicule mentionné sur la facture est celui figurant tant sur le contrat de financement que sur le contrat de location datés du 27 mars 2009 ; qu'il résulte des préambules des contrats fournis que le bien est désigné comme " le matériel " et qu'un renvoi aux annexes est opéré pour sa désignation précise, lesquelles annexes n'ont pas été produites ; que, par conséquent, il n'est pas établi qu'il s'agit du même véhicule que celui inscrit sur la facture ; qu'en outre, la réalité de la réception du véhicule par M. A... B... n'est pas établie ; que la société requérante ne transmet aucun procès-verbal de livraison permettant de justifier la livraison du véhicule ; qu'il résulte de tout ce qui précède que l'administration fiscale apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;
8. Considérant que si la SNC Filao 914 produit une télécopie datée du 6 avril 2009 ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 8 364,87 euros (soit 998 195 francs CFP) du compte " Domigestion central 2009 " vers le compte de " Nippon Automoto " ayant pour motif " Filao 914 - Ly B...Claude ", elle n'apporte toutefois pas la preuve que ce virement a bien été effectué en se bornant à produire un extrait de compte bancaire détenu par " Domigestion 2009 " auprès de BNP Paribas mentionnant un " Virement faveur tiers " d'un montant de 225 733,55 euros effectué le 7 avril 2009 ; qu'en tout état de cause, si cette somme de 8 364,87 euros, soit 998 195 francs CFP, correspond au montant non couvert par le contrat de financement qui aurait été conclu entre la SNC Filao 914 et M. A... B..., le 27 mars 2009, la société requérante n'apporte toutefois pas d'éléments de nature à établir que la somme de 3 399 805 francs CFP (soit 28 490,36 euros), correspondant au montant qui aurait dû être directement réglé par le locataire, conformément au document intitulé " Attestation de l'exploitant des biens d'équipement ", du 27 mars 2009, a été effectivement réglée à la société Nippon Automoto ; que la société requérante fournit un récapitulatif de virement faisant état de la somme globale de 225 733,55 euros, dans laquelle serait comprise la somme de 8 364,87 euros ; que toutefois ce document, qui n'est pas daté, ne peut être regardé comme ayant valeur probante, dans la mesure où l'émetteur n'en est pas identifiable ; que si la société requérante a versé au dossier différents documents signés par M. A... B..., et notamment un contrat de location du matériel et un contrat de financement, ces documents ne permettent pas à eux seuls, compte tenu de ce qui vient d'être dit, d'établir la réalité de l'opération ; qu'ainsi, la SNC Filao 914 n'apporte pas de justifications suffisantes concernant la réalité de l'opération figurant sur la facture en litige ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que l'administration était par suite fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture établie par la société Nippon Automoto ;
En ce qui concerne le bien figurant sur la facture du 25 février 2009 :
9. Considérant que, pour refuser à la SNC Filao 914 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture identifiée au point 2, émise par la société Tahiti Automobiles, régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, et refuser le remboursement du crédit correspondant, l'administration fait notamment valoir que la facture ne respecte pas les mentions obligatoires prévues à l'article 344-5 du code des impôts ; que sur cette facture, qui n'est pas numérotée, l'adresse de la SNC Filao 914 est incomplète, tandis que la quantité de biens vendus n'y est pas indiquée ; que l'administration fiscale fait également valoir que la facture comporte une désignation sommaire du bien, dès lors que n'y figurent pas les numéros de série et du moteur ; qu'en outre, il n'est pas établi que le bien mentionné sur la facture est celui figurant sur le contrat de financement et sur le contrat de location; qu'il résulte des documents produits que le bien est désigné comme " le matériel " dans le préambule et qu'un renvoi est opéré aux annexes des contrats susmentionnés ; que celles-ci désignent le bien comme étant un " Véhicule Double cabine Ford Ranger, acheté à la société Tahiti Automobiles " ; qu'alors même que le fournisseur correspond à celui indiqué sur la facture, aucune indication précise n'est donnée sur le véhicule, notamment sur son numéro de série ; que le contrat de location produit fait apparaître une signature le 27 février 2008 alors que la facture est supposée avoir été éditée le 25 février 2009 ; que, par ailleurs, aucun élément ne permet de constater la réalité de la réception du véhicule par M. E... dès lors, notamment, que la SNC ne transmet aucun procès-verbal de livraison permettant de justifier la livraison du véhicule ; qu'au surplus, le certificat d'immatriculation produit ne peut attester du caractère neuf du bien au moment de son acquisition ; qu'il résulte de tout ce qui précède l'administration fiscale apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;
10. Considérant que si la SNC Filao 914 fournit un document intitulé " Attestation de l'exploitant des biens d'équipement " daté du 27 février 2009, signé par M. E..., dans lequel il atteste que la facture a été réglée, en partie, par un apport " Girardin " d'un montant de 1 043 154 francs CFP, elle n'apporte aucune preuve du versement de la somme ; que le contrat de financement et le document intitulé " Attestation de l'exploitant des biens d'équipement ", signé par M. E... fournissent des informations contraires sur le montant de la subvention Girardin due par la SNC Filao 914 ; que le contrat de financement prévoit un apport de 30 % de la valeur hors taxes du matériel, alors que l'attestation du locataire exploitant certifie que la facture a été réglée, en partie, avec un taux de subvention égal à 26 % du montant hors taxes du matériel ; que par conséquent, le montant de l'apport dû par la SNC Filao 914 n'est pas clairement établi ; que la société requérante n'apporte pas davantage d'éléments de nature à établir que la somme de 2 946 846 francs CFP, qui aurait dû être directement réglée par le locataire, a été effectivement réglée à la société Tahiti Automobiles ; que si la société requérante a versé au dossier différents documents signés par M. E..., et notamment un contrat de financement du 25 février 2009, et un contrat de location daté du 27 février 2008, ces documents ne permettent pas, à eux-seuls, d'établir la réalité de l'opération ; que le contrat de location produit fait apparaître une signature le 27 février 2008 alors que la facture est supposée avoir été éditée le 25 février 2009 ; qu'ainsi, la SNC Filao 914 n'apporte pas de justifications suffisantes concernant la réalité de l'opération figurant sur la facture en litige ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration fiscale était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture établie par la société Tahiti Automobiles ;
En ce qui concerne le bien figurant sur la facture du 23 février 2009 :
11. Considérant que, pour refuser à la SNC Filao 914 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture identifiée au point 3, émise par la société American Motors, régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, et refuser le remboursement du crédit correspondant, l'administration fait notamment valoir que la facture ne respecte pas les mentions obligatoires prévues à l'article 344-5 du code des impôts ; que n'y figurent ni l'adresse de la SNC Filao 914 ni la quantité de biens vendus ; que l'administration fiscale fait également valoir que la facture comporte une désignation sommaire du bien ; qu'il résulte de l'examen de ce document que n'y figurent pas davantage les numéros de série et du moteur ; qu'en outre, l'administration fiscale fait valoir qu'il est impossible de s'assurer que le bien mentionné sur la facture est celui figurant sur le contrat de financement, le contrat de location et la cession de contrats ; que le contrat de financement conclu entre l'entreprise Tikahau et la SNC Filao 914, désigne le bien comme " le matériel ", dans son préambule et renvoie pour sa désignation à l'annexe I du contrat ; que cette annexe désigne le matériel comme " un véhicule Double cabine GM, acheté à la société American Motors " sans aucune indication précise sur le véhicule, notamment sur le numéro de série ; que le contrat de location, conclu entre l'entreprise Tikahau et la SNC Filao 914, désigne le bien d'équipement neuf comme " le matériel ", dans son préambule et renvoie pour sa désignation à l'annexe I du contrat, qui n'a pas été produite, de sorte qu'il n'est pas établi qu'il s'agit du même véhicule que celui inscrit sur la facture ; que la cession de contrat, conclue entre l'entreprise Tikahau, Mme H...et la SNC Filao 914 désigne dans son préambule le bien dont s'est portée acquéreur la SNC Filao par la mention " vehicule Double Cabine GM, immatriculé sous le n° 198045 P " ; que la désignation du bien sur la facture litigieuse n'est pas identique ; que par conséquent, il n'est pas établi qu'il s'agit du même bien ; que, par ailleurs, aucun élément ne permet de constater la réalité de la réception du véhicule par M. C..., pour le compte de son entreprise ; que la société requérante ne transmet aucun procès-verbal de livraison permettant de justifier la livraison du véhicule ; que sur la facture litigieuse est prévue une date approximative de livraison le 30 janvier 2009, antérieure à la date d'établissement de la facture ; que l'administration fiscale fait valoir que le certificat d'immatriculation ne peut suffire à justifier l'identité des biens figurant sur la facture, laquelle ne fait état que d'une seule donnée, le modèle du véhicule ; que par ailleurs, le contrat de location est daté du 25 février 2008 alors que la facture est supposée avoir été établie le 23 février 2009 ; que la cession de contrat communiquée par la SNC Filao 914 comporte également des anomalies quant à sa date de conclusion ; que l'intitulé du document fait état d'une cession de contrat intervenue le 25 février 2009, alors que la date de signature est celle du 11 juin 2012 ; qu'enfin, la cession de contrat prévoit que les charges et obligations s'appliquent à M. C..., représentant légal de l'entreprise Tikahau, à la date du 3 avril 2012 alors que la signature du contrat est intervenue le 11 juin 2012 ; qu'il résulte de tout ce qui précède que l'administration fiscale apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;
12. Considérant que si la SNC Filao 914 produit une télécopie datée du 30 mars 2009 ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 9 311,05 euros du compte de " Domigestion central 2009 " ayant pour motif " Filao 914 - Tikahau ", le bénéficiaire du virement bancaire est la société Prestige Auto Service ; que selon le contrat de financement, le contrat de location et l'attestation de M. C..., représentant fiscal de la société Tikahau fournis par la société requérante, le versement de la subvention devait être adressé à la société fournisseur, la société American Motors ; que la société n'apporte pas la preuve que ce virement a bien été effectué en se bornant à produire un extrait de compte bancaire détenu par " Domigestion 2009 " auprès de BNP Paribas mentionnant un " Virement faveur tiers remise " d'un montant de 78 118,32 euros effectué le 31 mars 2009 ; qu'en tout état de cause, si cette somme de 9 311,05 euros, soit 1 111 103 francs CFP correspond au montant non couvert par le contrat de financement qui aurait été conclu entre la société Tikahau et la SNC Filao 914 le 25 février 2009, la société requérante n'apporte toutefois pas d'éléments de nature à établir que la somme de 3 778 897 francs CFP correspondant au montant qui aurait dû être directement réglé par le locataire, conformément au document intitulé " Attestation de l'exploitant des biens d'équipement " du 25 février 2009, a été effectivement réglée à la société American Motors ; que la société requérante fournit un récapitulatif de virement faisant état d'une somme globale de 78 118,32 euros dans laquelle serait comprise la somme de 9 311,05 euros ; que ce document non daté n'a pas de valeur probante, dans la mesure où l'émetteur n'en pas identifiable ; que si la société requérante a versé au dossier différents documents signés par M. C..., représentant légal de la société Tikahau, et notamment un contrat de location et un contrat de financement, ces documents ne permettent pas, à eux seuls, compte tenu de ce qui vient d'être dit, d'établir la réalité de l'opération ; que l'administration fait valoir que l'apport de la subvention serait intervenu plus d'un mois après l'établissement de la facture ; que l'ordre de virement fourni, d'ailleurs incorrect, est daté du 30 mars 2009 alors que la facture est datée du 23 février 2009, ce qui_ impliquerait que le concessionnaire ait procèdé à la livraison du bien avoir d'en avoir obtenu paiement total; qu'ainsi, la SNC Filao 914 n'apporte pas de justifications suffisantes concernant la réalité de l'opération figurant sur la facture en litige ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration fiscale était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur cette facture ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SNC Filao 914 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SNC Filao 914 demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la Polynésie française sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SNC Filao 914 est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la Polynésie française présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société en nom collectif Filao 914 et à la Polynésie française. Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 23 octobre 2017 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- M. Auvray, président-assesseur,
- M. Boissy, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 novembre 2017.
Le président-rapporteur,
M. HEERSL'assesseur le plus ancien,
B. AUVRAY
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la Réplique en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 16PA03454