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15/11/2017 | FRANCE | N°16PA00024

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 15 novembre 2017, 16PA00024


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Azara 803 a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française, d'une part, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 2009 et 2010 ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, de lui accorder le remboursement d'une somme de

507 207 francs CFP au titre du crédit de taxe dont elle disposait à l'expiration du

1er trimestre 2011.

Par un jugement n° 1500092

du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Azara 803 a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française, d'une part, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 2009 et 2010 ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, de lui accorder le remboursement d'une somme de

507 207 francs CFP au titre du crédit de taxe dont elle disposait à l'expiration du

1er trimestre 2011.

Par un jugement n° 1500092 du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er janvier 2016, la SNC Azara 803, représentée par

Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 2009 et 2010 ainsi que des pénalités correspondantes et de lui accorder le remboursement d'une somme de 507 207 francs CFP au titre du crédit de taxe dont elle disposait à l'expiration du 1er trimestre 2011 ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement d'une somme de

230 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SNC Azara 803 soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la demande tendant à la restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 507 207 francs CFP était recevable ;

- les factures émises la société Nippon Automoto, la société Tahitienne d'Automobiles et la société Nautisport Boatcity ne sont pas fictives ;

- le service, en procédant aux rappels de taxe litigieux au lieu d'opérer une régularisation de la taxe initialement déduite pour une opération fictive au titre de l'année au cours de laquelle le manquement a été constaté, a méconnu les dispositions combinées des articles 345-15 et

345-19 du code des impôts de la Polynésie française.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 août 2016 et 2 octobre 2017, la Polynésie française, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SNC Azara 803 le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La Polynésie française soutient que les moyens soulevés par la SNC Azara 803 ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

- l'ordonnance n° 98-581 du 8 juillet 1998 portant actualisation et adaptation des règles relatives aux garanties de recouvrement et à la procédure contentieuse en matière d'impôts en Polynésie française ;

- le code des impôts de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.

1. Considérant que, dans le cadre d'une opération de défiscalisation des investissements outre-mer, la société Nippon Automoto a établi, le 7 novembre 2008, une facture, libellée à l'attention de la SNC Azara 803, d'un montant de 5 033 000 francs CFP dont

633 766 francs CFP de taxe sur la valeur ajoutée, pour la vente d'un " véhicule Toyota modèle Land cruiser boîte manuelle " ; que, le même jour, M. A...a émis une facture d'un même montant et désignant " un Toyota Land Cruiser simple cabine " libellée à l'attention de la SNC Azara 803 ; que, par un contrat de location signé le 7 novembre 2008, la SNC Azara 803 a mis à la disposition de M. A...ce véhicule pour une durée de cinq ans ;

2. Considérant que la société Tahitienne d'Automobiles a établi, le 14 novembre 2008, une facture, libellée à l'attention de la SNC Azara 803, d'un montant de 3 295 000 francs CFP dont 420 194 francs CFP de taxe sur la valeur ajoutée, pour la vente d'un véhicule " Kia motors sportage 4X2 ess Manuelle " ; que, par un contrat de location signé le même jour, la

SNC Azara 803 a mis à la disposition de M. C...ce véhicule pour une durée de cinq ans ;

3. Considérant que la société Nippon Automoto a établi, le 18 novembre 2008, une facture, libellée à l'attention de la SNC Azara 803, d'un montant de 3 991 100 francs CFP dont 504 000 francs CFP de taxe sur la valeur ajoutée, pour la vente d'un " véhicule Toyota modèle double cabine boîte manuelle " ; que, par un contrat de location signé le même jour, la SNC Azara 803 a mis à la disposition de Mme B...ce véhicule pour une durée de cinq ans ;

4. Considérant que la société Nautisport Boatcity a établi, le 1er décembre 2008, une facture, libellée à l'attention de la SARL Marquises Essor, d'un montant de 2 150 000 francs CFP dont 296 552 francs CFP de taxe sur la valeur ajoutée, pour la vente d'un " moteur Suzuki 150 CV 4T XL " et divers matériels ; que, le 28 novembre 2008, la SARL Marquises Essor a émis une facture d'un même montant et désignant " un moteur HB Suzuki + matériel " libellée à l'attention de la SNC Azara 803 ; que, par un contrat de location signé le 28 novembre 2008, la SNC Azara 803 a mis à la disposition de la SARL Marquises Essor ces biens pour une durée de cinq ans ;

5. Considérant que la SNC Azara 803, conformément à l'article 345-20-1 du code des impôts de la Polynésie française, a notamment déduit la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat des biens mentionnés aux points 1 à 4 au titre des années 2009 à 2011 ; que, le

11 avril 2011, la SARL Domigestion Pacifique, représentant fiscal de la SNC Azara 803 sur le territoire de la Polynésie française, a, sur le fondement de l'article 345-22 du même code, demandé le remboursement d'un crédit de taxe d'un montant de 507 207 francs CFP dont la SNC disposait, selon elle, à l'expiration du 1er trimestre 2011 ; que l'administration fiscale, qui a estimé que les factures établies par la société Nippon Automoto, la société Tahitienne d'Automobiles et la société Nautisport Boatcity présentaient un caractère fictif, a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de ces biens et, le

26 novembre 2012, a notifié au représentant fiscal de la SNC Azara 803 des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2009 et 2010, assortis des intérêts de retard, pour un montant total de 856 744 francs CFP, qui ont été mis en recouvrement le 17 juin 2013 ; que la réclamation présentée le 11 juillet 2014 sur les rappels de taxe a été rejetée le 4 février 2015 ; que la SNC Azara 803 relève appel du jugement du 13 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge de ces rappels de taxe et, d'autre part, au remboursement du crédit de taxe de 507 207 francs CFP au titre du 1er trimestre 2011 ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation, de décharge et de remboursement :

En ce qui concerne la partie du jugement statuant sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 345-4 du code des impôts de la Polynésie française : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / Pour ouvrir droit à déduction, la dépense engagée doit être nécessaire à l'exploitation et affectée exclusivement aux besoins de l'exploitation (...) " ; qu'aux termes de l'article 345-10 du même code : " La taxe dont les assujettis peuvent opérer la déduction est : / (...) celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ceux-ci étaient eux-mêmes autorisés à faire figurer la taxe sur la valeur ajoutée sur ces factures " ; qu'aux termes de l'article 345-15 de ce code : " La déduction initialement opérée fait l'objet d'une régularisation, par imputation ou remboursement, lorsque la déduction s'avère supérieure ou inférieure à celle que l'assujetti était en droit d'opérer ou lorsque des modifications des éléments ayant servi à déterminer le montant des déductions sont intervenues postérieurement à la déclaration, notamment : / (...) lorsqu'une facture ou le document en tenant lieu ne correspond pas effectivement à la livraison d'un bien ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur (...) " ; qu'aux termes de l'article 345-19 de ce code : " Pour les entreprises placées sous le régime réel d'imposition, l'obligation de régularisation prévue aux articles 345-15 à 345-18 doit être accomplie sur la déclaration déposée au titre de la période au cours de laquelle l'événement qui la motive est intervenu. Les régularisations de déduction auxquelles les assujettis procèdent sont mentionnées distinctement sur les déclarations de chiffres d'affaires ou de recettes. Pour les entreprises placées sous le régime simplifié d'imposition, l'obligation de régularisation doit être accomplie sur la déclaration récapitulative déposée au plus tard le 31 mars de l'année suivante " ; qu'aux termes de l'article 345-20-1 du même code : " Le droit à déduction de la taxe qui a grevé l'acquisition, la construction ou la création en Polynésie française de biens mobiliers ou immobiliers ouvrant droit à défiscalisation métropolitaine ne peut s'exercer que par cinquième au cours de la période de 60 mois durant laquelle les investisseurs métropolitains sont tenus de maintenir l'investissement correspondant dans le territoire. / Le montant de la déduction opérée annuellement est à ajuster au prorata temporis de la date de début d'exploitation " ; qu'aux termes de l'article 345-22 de ce code : " Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut intervenir sur demande de l'assujetti ou de son représentant fiscal dûment accrédité. La demande peut porter sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de l'année civile précédente, sous réserve d'atteindre un montant minimal de 20 000 F CFP. Sous peine de forclusion, la demande doit être déposée au plus tard le 31 janvier pour les entreprises placées sous le régime réel d'imposition et au plus tard le 31 mars pour les entreprises placées sous le régime simplifié d'imposition " ; qu'aux termes de l'article 345-24 du même code : " Les demandes de remboursement sont formulées sur un imprimé dont le modèle est fixé par arrêté pris en conseil des ministres. / S'il s'agit de la première demande en restitution et en tout état de cause à toute réquisition de la direction des impôts et des contributions publiques, le demandeur est tenu de produire le relevé des documents d'importation et des factures d'achat justifiant de la taxe déductible " ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de service ; que, dans le cas où l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agit d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

S'agissant de la facture mentionnée au point 1 :

8. Considérant que, pour refuser à la SNC Azara 803 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture émise le 7 novembre 2008 par la société Nippon Automoto, dont il est constant qu'elle est régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fait valoir que cette facture comporte des anomalies ; qu'elle justifie également avoir procédé, sur le fondement de l'article 411-1 du code des impôts de la Polynésie française, à une demande de renseignements auprès de M.A..., le 8 novembre 2011, tendant à obtenir des justificatifs de l'achat, de la revente et de l'utilisation du bien figurant dans l'opération réalisée avec la SNC Azara 803 ainsi que des justificatifs du paiement effectif de ce bien ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment de la notification de redressements du 26 novembre 2012, de la réponse de la SNC Azara 803 du 8 février 2013 et de la réponse aux observations du contribuable du 18 mars 2013, que M. A...n'a pas justifié de l'acquisition et du financement de ce bien ; que l'administration apporte ainsi des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;

9. Considérant que la preuve que le bien figurant sur la facture litigieuse a bien été payé conformément aux stipulations figurant dans les documents contractuels établis entre la société requérante et l'exploitant constitue un élément déterminant afin de s'assurer de la réalité de l'opération dès lors que, compte tenu des clauses figurant dans le contrat de vente et le contrat de location signés entre les parties, aucun flux financier n'était contractuellement prévu, au cours de la période de location du matériel, entre le propriétaire de ce bien, la société requérante, et son locataire ; qu'en l'espèce, la société requérante n'apporte pas d'élément probant de nature à établir que, conformément aux mentions figurant dans le contrat de vente qu'elle a pourtant signé avec M. A...le 7 novembre 2008 et dans les documents " attestations et engagements " et " procès-verbal de livraison ", datés du même jour, elle se serait acquittée d'une somme de 11 043,84 euros, soit 1 317 880 francs CFP, auprès de la société Nippon Automoto tandis que M. A... aurait pour sa part réglé la somme de 31 132,70 euros, soit 3 715 120 francs CFP ; qu'en effet, elle se borne à produire une télécopie datée du 29 décembre 2008, ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 11 043,84 euros du compte de " Domigestion central 2008 " vers le compte de " Nippon Automoto SARL ", et sur laquelle est mentionné le motif " Azara 803 - A... Jean-Pierre ", un extrait du compte bancaire détenu par " Domigestion central 2008 " mentionnant un virement d'une somme de 54 782,09 euros effectué le 29 décembre 2008 ayant pour nature " virement faveur tiers remise " et une reconnaissance de dettes établie de manière manuscrite le 6 janvier 2013 par M. A...laquelle, n'ayant pas date certaine, est dénuée de valeur probante, sans produire aucun autre élément de nature à établir que le fournisseur a été payé ; que si la société requérante a versé au dossier différents documents signés par M. A..., et notamment un contrat de location et une promesse d'achat, ces documents ne permettent pas, compte tenu de ce qui vient d'être dit et en l'absence de preuve du paiement, d'établir la réalité de l'opération ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui est mentionnée sur la facture en litige ;

S'agissant de la facture mentionnée au point 2 :

10. Considérant que, pour refuser à la SNC Azara 803 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture émise le 14 novembre 2008 par la société Tahitienne d'Automobiles, dont il est constant qu'elle est régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fait valoir que cette facture comporte des anomalies ; qu'elle justifie également avoir procédé, sur le fondement de l'article 411-1 du code des impôts de la Polynésie française, à une demande de renseignements auprès de M.C..., le 8 novembre 2011, tendant à obtenir des justificatifs de l'achat, de la revente et de l'utilisation du bien figurant dans l'opération réalisée avec la SNC Azara 803 ainsi que des justificatifs du paiement effectif de ce bien ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment de la notification de redressements du 26 novembre 2012, de la réponse de la SNC Azara 803 du 8 février 2013 et de la réponse aux observations du contribuable du 18 mars 2013, que M. C...n'a pas justifié du financement de ce bien ; que l'administration apporte ainsi des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;

11. Considérant que la société requérante n'apporte pas d'élément probant de nature à établir que, conformément aux mentions figurant dans le contrat de financement qu'elle a pourtant signé avec M. C...le 14 novembre 2008 et dans les documents " attestations et engagements " et " procès-verbal de livraison ", datés du même jour, elle se serait acquittée d'une somme de 5 490 euros, soit 655 131 francs CFP, auprès de la société Tahitienne d'Automobiles tandis que M. C... aurait pour sa part réglé la somme 22 122,10 euros, soit 2 269 869 francs CFP ; qu'en effet, elle se borne à produire une télécopie datée du

4 décembre 2008, ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 5 490 euros du compte de " Domigestion central 2008 " vers le compte de " STA ", et sur laquelle est mentionné le motif " Azara 803-C... Tetpu " et un extrait du compte bancaire détenu par " Domigestion central 2008 " mentionnant un virement d'une somme de 126 754,06 euros effectué le 8 décembre 2008 ayant pour nature " virement faveur tiers remise " sans produire aucun autre élément de nature à établir que le fournisseur a été payé ; que si la société requérante a versé au dossier différents documents signés par M.C..., et notamment un contrat de location et une promesse d'achat, ces documents ne permettent pas, compte tenu de ce qui vient d'être dit et en l'absence de preuve du paiement, d'établir la réalité de l'opération ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui est mentionnée sur la facture en litige ;

S'agissant de la facture mentionnée au point 3 :

12. Considérant que, pour refuser à la SNC Azara 803 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture émise le 18 novembre 2008 par la société Nippon Automoto, dont il est constant qu'elle est régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fait valoir que cette facture comporte des anomalies ; qu'elle justifie également avoir procédé, sur le fondement de l'article 411-1 du code des impôts de la Polynésie française, à une demande de renseignements auprès de MmeB..., le 8 novembre 2011, tendant à obtenir des justificatifs de l'achat, de la revente et de l'utilisation du bien figurant dans l'opération réalisée avec la SNC Azara 803 ainsi que des justificatifs du paiement effectif de ce bien ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment de la notification de redressements du 26 novembre 2012, de la réponse de la SNC Azara 803 du 8 février 2013 et de la réponse aux observations du contribuable du 18 mars 2013, que Mme B...n'a pas justifié de l'acquisition et du financement de ce bien ; que l'administration apporte ainsi des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;

13. Considérant que la société requérante n'apporte pas d'élément probant de nature à établir que, conformément aux mentions figurant dans le contrat de financement qu'elle a pourtant signé avec Mme B...le 18 novembre 2008 et dans les documents " attestations et engagements " et " procès-verbal de livraison ", datés du même jour, elle se serait acquittée d'une somme de 8 757,52 euros, soit 1 4045 050 francs CFP, auprès de la société Nippon Automoto tandis que Mme B...aurait pour sa part réglé la somme de 24 687,90 euros, soit 2 946 050 francs CFP ; qu'en effet, elle se borne à produire une télécopie datée du

21 janvier 2009, ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 8 757,52 euros du compte de " Domigestion central 2008 " vers le compte de " Nippon Automoto ", et sur laquelle est mentionné le motif " Azara 803 - B... Rosina ", un extrait du compte bancaire détenu par " Domigestion central 2008 " mentionnant un virement d'une somme de 2 600 000 euros effectué le 30 décembre 2008 ayant pour nature " virement faveur tiers Domigestion " et une reconnaissance de dettes établie de manière manuscrite le 13 décembre 2012 par Mme B...laquelle, n'ayant pas date certaine, est dénuée de valeur probante et qui se borne, au demeurant, à mentionner une dette de 845 000 francs CFP, sans produire aucun autre élément de nature à établir que le fournisseur a été payé ; que si la société requérante a versé au dossier différents documents signés par Mme B...et notamment un contrat de location du matériel et une promesse d'achat, ces documents ne permettent pas, compte tenu de ce qui vient d'être dit et en l'absence de preuve du paiement, d'établir la réalité de l'opération ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui est mentionnée sur la facture en litige ;

S'agissant de la facture mentionnée au point 4 :

14. Considérant que, pour refuser à la SNC Azara 803 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture émise le 1er décembre 2008 par la société Nautisport Boatcity, dont il est constant qu'elle est régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fait valoir que cette facture comporte des anomalies ; qu'elle justifie également avoir procédé, sur le fondement de l'article 411-1 du code des impôts de la Polynésie française, à une demande de renseignements auprès de la société Marquises Essor, le 8 novembre 2011, tendant à obtenir des justificatifs de l'achat, de la revente et de l'utilisation du bien figurant dans l'opération réalisée avec la SNC Azara 803 ainsi que des justificatifs du paiement effectif de ce bien ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment de la notification de redressements du

26 novembre 2012, de la réponse de la SNC Azara 803 du 8 février 2013 et de la réponse aux observations du contribuable du 18 mars 2013, que la société Marquises Essor n'a pas justifié de l'acquisition et du financement de ce bien ; que l'administration apporte ainsi des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;

15. Considérant que la société requérante n'apporte pas d'élément probant de nature à établir que, conformément aux mentions figurant dans le contrat de vente qu'elle a pourtant signé avec société Marquises Essor le 28 novembre 2008 et dans les documents " attestations et engagements " et " procès-verbal de livraison ", datés du même jour, elle se serait acquittée d'une somme de 4 659,57 euros, soit 556 034 francs CFP, auprès de la société Nautisport Boatcity tandis que la société Marquises Essor aurait pour sa part réglé la somme de 13 357,43 euros, soit 1 593 965 francs CFP ; qu'en effet, elle se borne à produire une télécopie datée du 5 décembre 2008, ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 4 659,57 euros du compte de " Domigestion central 2008 " vers le compte de " Tahiti sports ", et sur laquelle est mentionné le motif " Azara 803 - Marquises Essor " et un extrait du compte bancaire détenu par " Domigestion central 2008 " mentionnant un virement d'une somme de 121 780,10 euros effectué le 8 décembre 2008 ayant pour nature " virement faveur tiers remise ", sans produire aucun autre élément de nature à établir que le fournisseur a été payé ; que si la société requérante a versé au dossier différents documents signés par la société Marquises Essor et notamment un contrat de location et une promesse d'achat, ces documents ne permettent pas, compte tenu de ce qui vient d'être dit et en l'absence de preuve du paiement, d'établir la réalité de l'opération ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui est mentionnée sur la facture en litige ;

16. Considérant, en second lieu, que si, en application des dispositions des articles 345-15 à Lp. 345-21 du code des impôts de la Polynésie française, les contribuables assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ont l'obligation, dans certaines situations et dans un délai déterminé, de régulariser des déductions de taxe précédemment opérées lorsque les déclarations qu'ils ont antérieurement souscrites comportent une déduction de taxe erronée, ces dispositions ne font par elles-mêmes pas obstacle à ce que l'administration fiscale polynésienne exerce le pouvoir de contrôle défini au titre Ier de la deuxième partie du même code et procède, le cas échéant, à des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée procédant de taxe déduite à tort par des contribuables n'ayant pas, antérieurement à ce contrôle, spontanément régularisé leurs déclarations antérieures ; qu'il ne résulte pas davantage de ces dispositions que l'administration fiscale serait tenue de demander au contribuable de procéder à une régularisation avant de procéder à des rappels de taxe qui aurait été déduite à tort ;

17. Considérant, dès lors, que la société requérante ne peut pas utilement soutenir que l'administration, en procédant aux rappels de taxe litigieux au lieu d'opérer une régularisation de la taxe initialement déduite pour une opération fictive au titre de l'année au cours de laquelle le manquement a été constaté, aurait méconnu les dispositions combinées des articles 345-15 et 345-19 du code des impôts de la Polynésie française ;

18. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SNC Azara 803 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe en litige ;

En ce qui concerne la partie du jugement statuant sur la demande de remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 507 207 francs CFP :

19. Considérant que la demande de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée présentée sur le fondement des dispositions des articles 345-22 et suivants du code des impôts de la Polynésie française constitue une réclamation au sens de l'article 5 de l'ordonnance n° 98-581 du 8 juillet 1998 ; que, dès lors, en application de l'article 9 de la même ordonnance et de l'article 611-8, alors applicable, du code des impôts de la Polynésie française, la décision prise sur une telle demande doit être contestée directement devant le tribunal administratif de la Polynésie française dans un délai de trois mois à compter du jour de sa réception ; que, toutefois, le contribuable peut saisir ce tribunal dès l'expiration d'un délai de six mois après la présentation de sa demande lorsqu'il n'a reçu aucune décision ;

20. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 11 avril 2011, le représentant fiscal de la SNC Azara 803, la SARL Domigestion Pacifique, a déposé une déclaration de taxe sur la valeur ajoutée au titre du 1er trimestre de l'année 2011 et a demandé le remboursement d'un crédit de taxe de 507 207 francs CFP ; que, par une décision du 17 juin 2013, qui a été notifiée le 25 juin suivant, le président de la Polynésie française a statué sur cette réclamation en admettant partiellement le remboursement de ce crédit de taxe à hauteur de 139 001 francs CFP ; que cette décision comportait l'indication des voies et délais de recours ; que, dès lors, la SNC Azara 803 pouvait contester cette décision jusqu'au 26 septembre 2013 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier de première instance que la demande tendant au remboursement du crédit de taxe n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 25 juin 2015 ; que cette demande était tardive et par suite irrecevable ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté comme irrecevable sa demande tendant au remboursement du crédit de taxe en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SNC Azara 803 au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SNC Azara 803 le versement de la somme demandée par la Polynésie française au titre de ces mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SNC Azara 803 est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Polynésie française en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société en nom collectif Azara 803 et à la Polynésie française.

Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- M. Auvray, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 novembre 2017.

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

M. HEERSLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 16PA00024 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00024
Date de la décision : 15/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : CERES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-11-15;16pa00024 ?
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