Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société en nom collectif (SNC) Alistro 802 a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française, d'une part, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 2010 et 2011 ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, de lui accorder le remboursement d'une somme de
303 050 francs CFP au titre du crédit de taxe dont elle disposait à l'expiration du
1er trimestre 2012.
Par un jugement n° 1500061 du 15 octobre 2015, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2015, la SNC Alistro 802, représentée par MeH..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 2010 et 2011 ainsi que des pénalités correspondantes et de lui accorder le remboursement d'une somme de 303 050 francs CFP au titre du crédit de taxe dont elle disposait à l'expiration du 1er trimestre 2012 ;
3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement d'une somme de
230 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SNC Alistro 802 soutient que :
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la demande tendant à la restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 303 050 francs CFP était recevable ;
- les factures émises par la société Sopadep et la société Comptoir industriel tahitien ne sont pas fictives ;
- le service, en procédant aux rappels de taxe litigieux au lieu d'opérer une régularisation de la taxe initialement déduite pour une opération fictive au titre de l'année au cours de laquelle le manquement a été constaté, a méconnu les dispositions combinées des articles 345-15 et
345-19 du code des impôts de la Polynésie française.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 juillet 2016 et 28 juillet 2017, la Polynésie française, représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SNC Alistro 802 le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La Polynésie française soutient que les moyens soulevés par la SNC Alistro 802 ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
- l'ordonnance n° 98-581 du 8 juillet 1998 portant actualisation et adaptation des règles relatives aux garanties de recouvrement et à la procédure contentieuse en matière d'impôts en Polynésie française ;
- le code des impôts de la Polynésie française ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Boissy, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.
1. Considérant que, dans le cadre d'une opération de défiscalisation des investissements outre-mer, la société Sopadep a établi, le 31 juillet 2008, une facture, libellée à l'attention de M. D... E...et la SNC Alistro 802, d'un montant de 3 590 000 francs CFP dont 426 897 francs CFP de taxe sur la valeur ajoutée, pour la vente d'un véhicule désigné " Mitsubishi L200 D/CAB GL 4x4 2,8 L " ; que, par un contrat de location signé le
18 juillet 2008, la SNC Alistro 802 a mis à la disposition de M. E...ce véhicule pour une durée de cinq ans ;
2. Considérant que, le 16 juin 2008, la société Comptoir industriel tahitien a établi une facture, libellée à l'attention de la SNC Alistro 802, d'un montant de 3 571 818 francs CFP dont 446 666 francs CFP de taxe sur la valeur ajoutée, pour la vente d'un véhicule désigné " Isuzu
S-Max High 4x4 diesel " ; que, par un contrat de location signé le 18 janvier 2008, la
SNC Alistro 802 a mis à la disposition de la société B...entreprise ce véhicule pour une durée de cinq ans ;
3. Considérant que la SNC Alistro 802, conformément à l'article 345-20-1 du code des impôts de la Polynésie française, a notamment déduit la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de ces véhicules au titre des années 2010 à 2012 ; que, le 11 avril 2012, la SARL Domigestion Pacifique, représentant fiscal de la SNC Alistro 802 sur le territoire de la Polynésie française, a, sur le fondement de l'article 345-22 du même code, demandé le remboursement d'un crédit de taxe d'un montant de 303 050 francs CFP dont la SNC disposait, selon elle, à l'expiration du 1er trimestre 2012 ; que l'administration fiscale, qui a estimé que les factures établies par les sociétés Sopadep et Comptoir industriel tahitien présentaient un caractère fictif, a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de ces véhicules et, le 17 juillet 2013 puis le 1er octobre 2013, a notifié au représentant fiscal de la SNC Alistro 802 des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2010 et 2011, assortis des intérêts de retard, pour un montant total de 234 461 francs CFP, qui ont été mis en recouvrement le 4 décembre 2013 ; que la réclamation présentée le 9 juillet 2014 sur les rappels de taxe a été rejetée le 4 février 2015 ; que la SNC Alistro 802 relève appel du jugement du 15 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge de ces rappels de taxe et, d'autre part, au remboursement du crédit de taxe de 303 050 francs CFP au titre du 1er trimestre 2012 ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation, de décharge et de remboursement :
En ce qui concerne la partie du jugement statuant sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 345-4 du code des impôts de la Polynésie française : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / Pour ouvrir droit à déduction, la dépense engagée doit être nécessaire à l'exploitation et affectée exclusivement aux besoins de l'exploitation (...) " ; qu'aux termes de l'article 345-10 du même code : " La taxe dont les assujettis peuvent opérer la déduction est : / (...) celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ceux-ci étaient eux-mêmes autorisés à faire figurer la taxe sur la valeur ajoutée sur ces factures " ; qu'aux termes de l'article 345-15 de ce code : " La déduction initialement opérée fait l'objet d'une régularisation, par imputation ou remboursement, lorsque la déduction s'avère supérieure ou inférieure à celle que l'assujetti était en droit d'opérer ou lorsque des modifications des éléments ayant servi à déterminer le montant des déductions sont intervenues postérieurement à la déclaration, notamment : / (...) lorsqu'une facture ou le document en tenant lieu ne correspond pas effectivement à la livraison d'un bien ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur (...) " ; qu'aux termes de l'article 345-19 de ce code : " Pour les entreprises placées sous le régime réel d'imposition, l'obligation de régularisation prévue aux articles 345-15 à 345-18 doit être accomplie sur la déclaration déposée au titre de la période au cours de laquelle l'événement qui la motive est intervenu. Les régularisations de déduction auxquelles les assujettis procèdent sont mentionnées distinctement sur les déclarations de chiffres d'affaires ou de recettes. Pour les entreprises placées sous le régime simplifié d'imposition, l'obligation de régularisation doit être accomplie sur la déclaration récapitulative déposée au plus tard le 31 mars de l'année suivante " ; qu'aux termes de l'article 345-20-1 du même code : " Le droit à déduction de la taxe qui a grevé l'acquisition, la construction ou la création en Polynésie française de biens mobiliers ou immobiliers ouvrant droit à défiscalisation métropolitaine ne peut s'exercer que par cinquième au cours de la période de 60 mois durant laquelle les investisseurs métropolitains sont tenus de maintenir l'investissement correspondant dans le territoire. / Le montant de la déduction opérée annuellement est à ajuster au prorata temporis de la date de début d'exploitation " ; qu'aux termes de l'article 345-22 de ce code : " Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut intervenir sur demande de l'assujetti ou de son représentant fiscal dûment accrédité. La demande peut porter sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de l'année civile précédente, sous réserve d'atteindre un montant minimal de 20 000 F CFP. Sous peine de forclusion, la demande doit être déposée au plus tard le 31 janvier pour les entreprises placées sous le régime réel d'imposition et au plus tard le 31 mars pour les entreprises placées sous le régime simplifié d'imposition " ; qu'aux termes de l'article 345-24 du même code : " Les demandes de remboursement sont formulées sur un imprimé dont le modèle est fixé par arrêté pris en conseil des ministres. / S'il s'agit de la première demande en restitution et en tout état de cause à toute réquisition de la direction des impôts et des contributions publiques, le demandeur est tenu de produire le relevé des documents d'importation et des factures d'achat justifiant de la taxe déductible " ;
5. Considérant, en premier lieu, qu'un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de service ; que, dans le cas où l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agit d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;
S'agissant de la facture émise le 31 juillet 2008 par la société Sopadep :
6. Considérant que, pour refuser à la SNC Alistro 802 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture émise le 31 juillet 2008 par la société Sopadep, dont il est constant qu'elle est régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fait valoir que cette facture comporte des anomalies dès lors, notamment, qu'elle ne procède qu'à une désignation sommaire du véhicule ; qu'elle justifie également avoir procédé, sur le fondement de l'article 411-1 du code des impôts de la Polynésie française, à une demande de renseignements auprès de M.E..., le 24 janvier 2013, tendant à obtenir des justificatifs de l'achat, de la revente et de l'utilisation du véhicule figurant dans l'opération réalisée avec la SNC Alistro 802 ainsi que des justificatifs du paiement effectif de ce véhicule ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment de notification de redressements du 17 juillet 2013, de la réponse de la SNC Alistro 802 du 25 septembre 2013 et de la réponse aux observations du contribuable du 1er octobre 2013, que M. E... n'a pas justifié de manière probante de l'acquisition et du financement de ce véhicule ; que l'administration apporte ainsi des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;
7. Considérant, il est vrai, que la SNC Alistro 802, par la production d'une télécopie datée du 6 octobre 2008 ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 7 408,77 euros du compte de " Domigestion central 2008 " vers le compte de la " Sopadep", et sur lequel est mentionné le motif " AG-Alistro 802- E...Augustin " et d'un extrait du compte bancaire détenu par " Domigestion compte central 2008 " auprès de Fortis mentionnant un " virement émis Sopadep AG Alistro 802-E... " d'un même montant effectué le 7 octobre 2008, est réputée apporter la preuve que cette somme de 7 408,77 euros, soit
884 101 francs CFP, a été versée à la société Sopadep et que cette somme correspond au montant de la partie du bien qui n'a pas fait l'objet du contrat de financement conclu entre la SNC Alistro 802 et M. E... le 18 juillet 2008 ;
8. Considérant, toutefois, que la société requérante n'apporte pas d'élément probant de nature à établir que M. E...a réglé à la société Sodapep la somme de 2 705 899 francs CFP, qui est la somme dont il aurait dû s'acquitter auprès de cette société conformément au contrat de financement, qu'elle a pourtant signé, et au document " attestation de facture acquittée et attestation de prix net " du 31 juillet 2008 ; qu'en effet, la société requérante produit un contrat de prêt non daté conclu entre la banque Socredo Mme G...E...d'un montant de 2 850 000 francs CFP et d'un cliché informatique matérialisant un virement bancaire daté du 22 août 2008 pour le " règlement d'une voiture Mitsubishi L200 " d'un même montant ; que, dans le document " attestation de facture acquittée et attestation de prix net " daté du
31 juillet 2008, la société Sopadep a certifié que sa facture de 3 590 000 francs CFP avait, à cette date, déjà été intégralement réglée par M. E... personnellement ; que ces éléments sont totalement incohérents avec les indications figurant dans les documents établis par la banque Socredo et les éléments figurant aux point 6 ; que la société requérante n'apporte aucun autre élément financier attestant de la réalité de cette acquisition, alors que le financement du véhicule figurant sur la facture, par M.E..., constitue un élément déterminant pour s'assurer de la réalité de l'opération dès lors que, compte tenu des clauses figurant dans le contrat de financement et le contrat de location, aucun flux financier n'était contractuellement prévu entre la SNC Alistro 802 et M. E...au cours de la période de location du matériel ; que la date à laquelle a été établie les contrats de financement et de location, le 18 juillet 2008, sont également incohérents avec la date figurant sur la facture émise par la société Sopadep, le 31 juillet 2008 ; qu'enfin, aucun document sur la livraison effective du véhicule n'a été produit ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui est mentionnée sur la facture en litige ;
S'agissant de la facture émise le 16 juin 2008 par la société Comptoir industriel tahitien :
9. Considérant que, pour refuser à la SNC Alistro 802 le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture émise le 16 juin 2008 par la société Comptoir industriel tahitien, dont il est constant qu'elle est régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fait valoir que cette facture comporte des anomalies dès lors, notamment, qu'elle ne procède qu'à une désignation sommaire du véhicule ; qu'elle justifie également avoir procédé, sur le fondement de l'article 411-1 du code des impôts de la Polynésie française, à une demande de renseignements auprès de la société B...entreprise, le 24 janvier 2013, tendant à obtenir des justificatifs de l'achat, de la revente et de l'utilisation du véhicule figurant dans l'opération réalisée avec la SNC Alistro 802 ainsi que des justificatifs du paiement effectif de ce véhicule ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment de la notification de redressements du 17 juillet 2013, de la réponse de la SNC Alistro 802 du 25 septembre 2013 et de la réponse aux observations du contribuable du 1er octobre 2013, que la société B...entreprise n'a pas justifié de manière probante de l'acquisition et du financement de ce véhicule ; que l'administration apporte ainsi des éléments suffisants permettant de penser que la facture litigieuse ne correspond pas à une opération réelle ;
10. Considérant, il est vrai, que la SNC Alistro 802, par la production, d'une part, d'une télécopie datée du 19 juin 2008 ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme de 6 626,36 euros du compte de " Domigestion central 2008 " vers le compte " CIT", et sur lequel est mentionné le motif " AG-Alistro 802- Yon YueA... " et d'un extrait du compte bancaire détenu par " Domigestion compte central 2008 " auprès de Fortis mentionnant un " virement émis CIT AG Alistro 802- Yon YueA... " d'un même montant effectué le 23 juin 2008 et, d'autre part, d'une télécopie datée du 25 août 2008 ayant pour objet une demande de virement bancaire d'une somme 695,94 euros du compte de " Domigestion central 2008 " vers le compte " M. C...A...B... ", et sur lequel est mentionné le motif
" AG-Alistro 802- Yon YueA... " et d'un extrait du compte bancaire détenu par " Domigestion compte central 2008 " auprès de Fortis mentionnant un " virement émis Yon Yue A...AG Alistro 802 - Yon YueA... " d'un même montant effectué le 25 août 2008, est réputée apporter la preuve que la somme de 7 322,30 euros, soit 873 783 francs CFP, a été versée, pour partie, à la société Comptoir industriel tahitien et à M. C... A...que cette somme correspond au montant de la partie du bien qui n'a pas fait l'objet du contrat de financement conclu entre la SNC Alistro 802 et la société B...Entreprise le 18 janvier 2008 ;
11. Considérant, toutefois, que la société requérante n'apporte pas d'élément probant de nature à établir que M. C... A...a réglé à la société Comptoir industriel tahitien la somme de 2 698 035 francs CFP, qui est la somme dont il aurait dû s'acquitter auprès de cette société conformément au contrat de financement qu'elle a pourtant signé ; que, dans le document " attestation de facture acquittée et attestation de prix net " daté du 18 janvier 2008, la société Comptoir industriel tahitien a certifié que sa facture de 2 781 083 francs CFP HT avait, à cette date, déjà été intégralement réglée par M. C...A...personnellement ; que ces éléments sont totalement incohérents avec les éléments figurant aux point 6 ; que la somme figurant sur cette attestation ne correspond à aucune des composantes du prix de la facture du 16 juin 2008 ; que la société requérante n'apporte aucun autre élément financier attestant de la réalité de cette acquisition, alors que le financement du véhicule figurant sur la facture, par M. C... A..., constitue un élément déterminant pour s'assurer de la réalité de l'opération dès lors que, compte tenu des clauses figurant dans le contrat de financement et le contrat de location, aucun flux financier n'était contractuellement prévu entre la SNC Alistro 802 et M. C...A...au cours de la période de location du matériel ; que, par ailleurs, la date à laquelle ont été établis les contrats de financement et de location, le 18 janvier 2008, sont également incohérents avec la date figurant sur la facture émise par la société Comptoir industriel tahitien, le 16 juin 2008 ; que, dès lors, la SNC Alistro 802 n'apporte pas de justifications suffisantes concernant la réalité de l'opération figurant sur la facture établie par la société Comptoir industriel tahitien et l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif, que la société ne pouvait ignorer compte tenu du dispositif contractuel évoqué ci-dessus, de l'opération commerciale en cause ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui est mentionnée sur la facture en litige ;
12. Considérant, en second lieu, que si, en application des dispositions des articles 345-15 à Lp. 345-21 du code des impôts de la Polynésie française, les contribuables assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ont l'obligation, dans certaines situations et dans un délai déterminé, de régulariser des déductions de taxe précédemment opérées lorsque les déclarations qu'ils ont antérieurement souscrites comportent une déduction de taxe erronée, ces dispositions ne font par elles-mêmes pas obstacle à ce que l'administration fiscale polynésienne exerce le pouvoir de contrôle défini au titre Ier de la deuxième partie du même code et procède, le cas échéant, à des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée procédant de taxe déduite à tort par des contribuables n'ayant pas, antérieurement à ce contrôle, spontanément régularisé leurs déclarations antérieures ; qu'il ne résulte pas davantage de ces dispositions que l'administration fiscale serait tenue de demander au contribuable de procéder à une régularisation avant de procéder à des rappels de taxe qui aurait été déduite à tort ;
13. Considérant, dès lors, que la société requérante ne peut pas utilement soutenir que l'administration, en procédant aux rappels de taxe litigieux au lieu d'opérer une régularisation de la taxe initialement déduite pour une opération fictive au titre de l'année au cours de laquelle le manquement a été constaté, aurait méconnu les dispositions combinées des articles 345-15 et 345-19 du code des impôts de la Polynésie française ;
14. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SNC Alistro 802 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe en litige ;
En ce qui concerne la partie du jugement statuant sur la demande de remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 303 050 francs CFP :
15. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 11 avril 2012, le représentant fiscal de la SNC Alistro 802, la SARL Domigestion Pacifique, a déposé une déclaration de taxe sur la valeur ajoutée au titre du 1er trimestre de l'année 2012 et a demandé le remboursement d'un crédit de taxe de 303 050 francs CFP ; que si l'administration, le 17 juillet 2013, lui a notifié des redressements en matière de taxe sur la valeur ajoutée en lui indiquant notamment que le montant du crédit de taxe dont elle disposait au titre du 1er trimestre de l'année 2012 était seulement de 287 448 francs CFP, elle a ensuite rectifié ce montant dans sa réponse aux observations du contribuable du 1er octobre 2013, à la suite des observations du contribuable présentées le 25 septembre 2013, en indiquant que le montant du crédit de taxe était de
562 454 francs CFP ; que, dans ses dernière écritures, la Polynésie française fait valoir, sans être contestée, que, par un bordereau de transmission n° 30181 et par liquidation n° 5028836, elle a procédé, le 13 janvier 2014, au remboursement du crédit de taxe au titre du 1er trimestre de l'année 2012, à hauteur de 303 050 francs CFP, conformément à la demande initiale de la SNC Alistro 802 ; que, dès lors, la demande tendant au remboursement du crédit de taxe présentée par la SNC Alistro 802 était, avant même l'introduction de sa demande devant les premiers juges, dépourvue d'objet ;
16. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit au point 15 que la société requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté comme irrecevable sa demande tendant au remboursement du crédit de taxe en litige ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SNC Alistro 802 au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SNC Alistro 802 le versement de la somme demandée par la Polynésie française au titre de ces mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SNC Alistro 802 est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la Polynésie française tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société en nom collectif Alistro 802 et à la Polynésie française.
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 23 octobre 2017 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- M. Auvray, président assesseur,
- M. Boissy, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 novembre 2017.
Le rapporteur,
L. BOISSYLe président,
M. HEERSLe greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 15PA04784 2