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15/11/2017 | FRANCE | N°15PA04198

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 15 novembre 2017, 15PA04198


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme Technogram a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer, d'une part, l'" annulation " de l'avis à tiers détenteur décerné à son encontre par le comptable du service des impôts des particuliers de Paris 15ème pour avoir paiement d'une somme de 134 892,39 euros représentant, en droits et majorations, le montant restant dû en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1997 et en 1998, d'autre part, la " mainlevée des mesures de recouvrement et de s

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme Technogram a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer, d'une part, l'" annulation " de l'avis à tiers détenteur décerné à son encontre par le comptable du service des impôts des particuliers de Paris 15ème pour avoir paiement d'une somme de 134 892,39 euros représentant, en droits et majorations, le montant restant dû en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1997 et en 1998, d'autre part, la " mainlevée des mesures de recouvrement et de séquestre engagées le 8 août 2011 " ainsi que la restitution de la somme de 134 892,39 euros.

La société anonyme Technogram a également demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la " mainlevée et l'annulation " de la mise en demeure valant commandement de payer émise le 9 juillet 2014 à son encontre pour avoir paiement d'une somme de 134 892,39 euros représentant, en droits et majorations, le montant restant dû en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1997 et en 1998.

Par un jugement n° 1429428/1-1 et 1429447/1-1 du 30 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Technogram de l'obligation de payer la somme de 134 892,39 euros dont procèdent la mise en demeure et l'avis à tiers détenteur décernés le 9 juillet 2014 à son encontre et rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par un recours et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 20 novembre 2015 et le 5 avril 2017, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 1429428/1-1 et 1429447/1-1 du 30 septembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge de l'obligation de payer la somme de 134 892,39 euros dont procèdent la mise en demeure et l'avis à tiers détenteur décernés le 9 juillet 2014 à la société anonyme Technogram ;

2°) de remettre à la charge de la société Technogram l'obligation de payer la somme de 134 892,39 euros dont procèdent les actes de poursuite susmentionnés émis le 9 juillet 2014.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'action en recouvrement du comptable public n'était pas prescrite lorsque ce dernier a, le 9 juillet 2014, émis les deux actes de poursuite litigieux dès lors que le cours de la prescription avait été suspendu à raison de l'introduction par le redevable de trois réclamations assorties d'une demande de sursis de paiement formulées les 30 décembre 2008, 31 décembre 2009 et 29 décembre 2011, de sorte que le cours de l'action en recouvrement, suspendu durant 2 ans 5 mois et 24 jours, a repris le 17 juin 2014, lendemain de la date du jugement du tribunal statuant sur la dernière réclamation, portant ainsi au 23 janvier 2016 le terme de l'action en recouvrement ;

- le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'avis à tiers détenteur du 9 juillet 2014 ne peut être utilement invoqué devant le juge administratif en vertu de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales et, en toute hypothèse, manque en fait ;

- les moyens tirés de ce que l'avis à tiers détenteur litigieux ne détaille pas la dette fiscale, mentionne un montant d'acomptes erroné et fait état, à tort, que ces acomptes n'ont pas été imputés sur les majorations, manquent en fait.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2016 et régularisé le 14 septembre 2016, la société Technogram, représentée par MeA..., conclut au rejet du recours et à ce que la Cour mette à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun moyen d'appel n'est fondé et reprend ses moyens de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auvray,

- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

1. Considérant que le comptable du service des impôt des particuliers de Paris 15ème - Javel a, le 9 juillet 2014, émis à l'encontre de la société anonyme Technogram un avis à tiers détenteur ainsi qu'une mise en demeure valant commandement de payer pour avoir paiement de la somme de 134 892,39 euros correspondant au solde restant dû en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1997 et en 1998 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations financières qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 277 du même livre : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. / L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent (...) " ;

3. Considérant qu'il est constant que les impositions en cause ont été mises en recouvrement le 31 octobre 2001 et que, pour en avoir paiement, le comptable public a, le 7 juillet 2003, décerné à la société Technogram un avis à tiers détenteur, qu'elle a reçu le 15 juillet suivant, de sorte que le comptable public disposait d'un nouveau délai de quatre ans expirant le 15 juillet 2007 et que le comptable a, le 5 octobre 2006, émis un commandement de payer à l'encontre de l'intéressée, qui en a accusé réception le 22 octobre suivant, de sorte qu'un nouveau délai de quatre ans a commencé à courir, expirant le 22 octobre 2010 ; qu'en outre, la société Technogram a, le 30 décembre 2008, présenté une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement dont l'effet suspensif a pris fin le 15 septembre 2009, lendemain de la date de lecture du jugement par lequel le tribunal a statué sur cette réclamation ; que la société Technogram a, le 31 décembre 2009, présenté une autre réclamation également assortie d'une demande de sursis de paiement dont l'effet suspensif s'est achevé au plus tôt deux mois après le 12 avril 2012, date à laquelle la décision de rejet en date du 19 mars 2012 a été notifiée à l'intéressée ;

4. Considérant que, pour prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 134 892,39 euros dont procèdent la mise en demeure et l'avis à tiers détenteur litigieux, datés du 9 juillet 2014, le tribunal, après avoir relevé que la réclamation du 31 décembre 2009 avait été rejetée par l'administration le 19 mars 2012 et qu'aucun acte interruptif de prescription n'était intervenu ultérieurement, en a déduit que l'action en recouvrement du comptable public était prescrite lorsque les deux actes de poursuite litigieux ont été notifiés à la société Technogram ;

5. Considérant qu'en cause d'appel, le ministre des finances et des comptes publics fait valoir que la société Technogram a présenté, le 29 décembre 2011, une nouvelle réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement, sur les mérites de laquelle le Tribunal administratif de Paris s'est prononcé par jugement du 16 juin 2014 pour en déduire que, l'action en recouvrement s'étant en réalité trouvée suspendue jusqu'à cette dernière date, elle n'était par suite pas prescrite lorsque les actes de poursuite litigieux ont été, le 21 juillet 2014, notifiés à la société Technogram ;

6. Considérant, toutefois, que le bénéfice du sursis de paiement prévu à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales est subordonné à la condition de former une demande expresse en ce sens à l'occasion d'une réclamation présentée dans le délai légal prévu aux articles R*. 196-1 et suivants du même livre ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réclamation présentée par la société Technogram le 29 décembre 2011 et dirigée contre les impositions dont le recouvrement est poursuivi par les actes litigieux émis le 9 juillet 2014, était tardive tant au regard de l'article R*. 196-1 que de l'article R*. 196-3 du livre des procédures fiscales, ainsi d'ailleurs que l'a jugé le Tribunal administratif de Paris par jugement n° 1311305 du 16 juin 2014 confirmé par l'arrêt n° 14PA03506 du 19 novembre 2015 de la Cour de céans, tardiveté au demeurant alors relevée par le service comme il ressort du point 3 de ce jugement ; que, par suite, cette réclamation, qui n'était pas régulière, n'a pu avoir pour effet de suspendre l'exigibilité des impositions en cause ni, par suite, l'action en recouvrement dont disposait alors le comptable public ; que, dès lors, et contrairement à ce que soutient le ministre, le délai de prescription n'a pas recommencé à courir à compter du 17 avril 2014, mais dès le 12 juin 2012, date à laquelle est devenue définitive la décision du 19 mars 2012, notifiée le 12 avril suivant, par laquelle l'administration a rejeté la réclamation présentée le 31 décembre 2009 par la société Technogram ; que le délai de quatre ans prévu à l'article L. 274 du livre des procédures fiscales ayant couru entre le 22 octobre 2006 et le 30 décembre 2008, puis ayant été suspendu une première fois entre le 30 décembre 2008 et le 15 septembre 2009 et une nouvelle fois entre le 31 décembre 2009 et le 12 juin 2012, le délai restant à courir à compter de cette dernière date était inférieur à 18 mois et demi ; que dès lors que les deux actes de poursuite litigieux ont été notifiés le 21 juillet 2014 à la société Technogram, le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement, que l'intéressée ne pouvait utilement invoquer à l'encontre des précédents actes de poursuite, doit être accueilli ; que la société Technogram est dès lors fondée à demander à être déchargée de l'obligation de payer la somme de 134 892,39 euros dont procèdent la mise en demeure et l'avis à tiers détenteur émis le 9 juillet 2014 par le comptable du service des impôts des particuliers de Paris 15ème - Javel ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge de l'obligation de payer la somme de 134 892,39 euros dont procèdent la mise en demeure valant commandement de payer et l'avis à tiers détenteur du 9 juillet 2014 notifiés à la société Tehnogram ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Technogram à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Technogram une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à la société anonyme Technogram.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Heers, président de la chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 novembre 2017.

Le rapporteur,

B. AUVRAYLe président,

M. HEERS

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 15PA04198


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04198
Date de la décision : 15/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-05-01-005 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Action en recouvrement. Prescription.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Brice AUVRAY
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : PLE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-11-15;15pa04198 ?
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