La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/11/2017 | FRANCE | N°17PA00947

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 06 novembre 2017, 17PA00947


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Printemps a demandé au Tribunal administratif de Paris la restitution de la somme de 232 952 euros représentant une fraction de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie acquittée au titre des années 2013 et 2014 pour son établissement situé 25 Cours de Vincennes à Paris (75020).

Par un jugement n° 1611610/1-3 du 8 février 2017, le Tribunal administratif de Paris a,

d'une part, constaté qu'à concurrence du dégrèvement d'un montant total, en droits,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Printemps a demandé au Tribunal administratif de Paris la restitution de la somme de 232 952 euros représentant une fraction de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie acquittée au titre des années 2013 et 2014 pour son établissement situé 25 Cours de Vincennes à Paris (75020).

Par un jugement n° 1611610/1-3 du 8 février 2017, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, constaté qu'à concurrence du dégrèvement d'un montant total, en droits, de 84 530 euros prononcé le 29 novembre 2016 par le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France, il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la société Printemps tendant à la restitution des impositions acquittées au titre des surfaces données en sous-location à la société Darty, et, d'autre part, fait droit aux conclusions de la société Printemps tendant à la restitution des impositions acquittées au titre des surfaces occupées par les sociétés " concessionnaires ".

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 20 mars 2017, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement n° 1611610/1-3 du 8 février 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rétablir la SAS Printemps au rôle de cotisation foncière des entreprises des années 2013 et 2014 à hauteur du dégrèvement prononcé en exécution du jugement attaqué, en ce qui concerne les sociétés " concessionnaires ".

Il soutient que :

- si la société Printemps met à la disposition des fournisseurs des surfaces de vente, elle garde la totale maîtrise de leur nombre, de la superficie de chacune et les utilise directement pour réaliser des ventes commerciales en son nom ; elle doit être regardée par suite comme ayant la disposition, au sens de l'article 1467 du code général des impôts, de ces emplacements dont la valeur locative doit par voie de conséquence être incluse dans ses bases imposables ;

- la restitution accordée par le Tribunal à la société Printemps a été calculée à partir d'une superficie occupée par les fournisseurs de 3 888 m² alors que cette superficie s'établit en réalité à 2 787 m², selon les éléments produits par la société elle-même devant les premiers juges ;

- s'agissant des autres moyens susceptibles d'être examinés dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, il se réfère en tant que de besoin aux écritures de première instance de l'administration fiscale.

Par des mémoires, enregistrés le 31 juillet 2017 et le 18 septembre 2017, la SAS Printemps, représentée par la société d'avocats Taj, conclut au rejet du recours du ministre des finances et des comptes publics et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le ministre ne conteste pas qu'elle n'utilisait pas matériellement les emplacements à l'origine du litige ;

- ces emplacements n'étaient utilisés que par les concessionnaires et par eux seuls ;

- le critère de l'utilisation matérielle permettant de déterminer clairement le redevable de l'imposition, le ministre ne peut fonder son refus sur le critère du contrôle ;

- en tout état de cause, le critère du contrôle est subsidiaire par rapport aux critères de l'utilisation matérielle et de la finalité d'utilisation ;

- le ministre n'a pas examiné préalablement si le critère de la finalité d'utilisation était rempli ;

- en tout état de cause, ce critère n'était pas rempli dès lors que les emplacements se rattachent directement à l'activité des concessionnaires et qu'elle ne perçoit qu'une commission sur le montant des ventes et n'est donc pas celle qui retire le plus de valeur ajoutée des immobilisations ;

- les décisions invoquées par le ministre pour justifier l'application du critère du contrôle ne sont pas transposables car ils concernent des situations où l'utilisation matérielle du bien était partagée ;

- le fait qu'elle ait la possibilité de modifier les emplacements mis à disposition des concessionnaires n'a pas pour effet d'en retirer la maîtrise à ces derniers ;

- les contrats, conclus pour une durée d'un an et renouvelables par tacite reconduction, sont stables ce qui permet aux concessionnaires de développer leur activité de vente ;

- il ressort de l'ensemble des stipulations du contrat que le concessionnaire réalise matériellement les ventes, à l'aide des surfaces concédées ; elle se borne à enregistrer les opérations de vente ;

- le fait qu'elle assure l'entretien des espaces est sans incidence sur le fait que ce sont les concessionnaires qui utilisent matériellement les espaces ; le critère de l'entretien est secondaire ;

- elle ne maîtrise pas la politique commerciale des concessionnaires, contrairement à ce que soutient le ministre ; au contraire, il résulte des contrats que les fournisseurs lui donnent leurs instructions en ce qui concerne le prix et les conditions de vente ;

- le fait que les campagnes publicitaires et les aménagements des stands soient encadrés par des critères qu'elle a fixés n'implique pas que les concessionnaires n'exploitent pas les surfaces mises à leur disposition ;

- elle a produit devant le Tribunal les plans détaillés de l'établissement permettant d'identifier le nom des concessionnaires, les emplacements précis et les superficies mises à disposition ; elle produit en outre devant la Cour les factures établies par les concessionnaires permettant d'établir qu'ils exerçaient bien une activité au sein du magasin à l'emplacement identifié sur les plans.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dalle,

- les conclusions de M. Platillero, rapporteur public,

- et les observations de Me Gautier, avocat de la société Printemps.

1. Considérant que la société Printemps exploite un grand magasin cours de Vincennes à Paris (75020) ; qu'estimant que des espaces de vente qu'elle donne en sous-location à la société Darty ou qu'elle met à disposition de diverses sociétés dites " concessionnaires " commercialisant leurs produits dans ce magasin devaient être exclus de ses bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement et à la taxe pour frais de chambre de commerce, elle a demandé à l'administration fiscale la restitution d'une fraction de ces impositions, acquittées par elle au titre des années 2013 et 2014 ; que sa réclamation ayant été implicitement rejetée, elle a saisi le Tribunal administratif de Paris ; qu'au cours de l'instance devant le Tribunal, l'administration fiscale a partiellement fait droit à la demande de la société en ce qui concerne les espaces donnés en sous-location à la société Darty et prononcé en conséquence le 29 novembre 2016 un dégrèvement d'un montant total, en droits, de 84 530 euros ; que, par un jugement du 21 septembre 2016, le Tribunal a, d'une part, constaté qu'à hauteur de ce dégrèvement il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société Printemps et, d'autre part, accordé à celle-ci la restitution qu'elle demandait au titre des espaces de vente mis à disposition des sociétés " concessionnaires " ; que le ministre des finances et des comptes publics relève appel de ce jugement, en tant qu'il a prononcé cette restitution ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478 (...) " ; que les biens dont la valeur locative est ainsi intégrée dans l'assiette de la cotisation foncière des entreprises sont ceux placés sous le contrôle du redevable et que celui-ci utilise matériellement pour la réalisation des opérations qu'il effectue ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour l'exploitation de son magasin du cours de Vincennes, la société Printemps a conclu avec diverses sociétés des contrats intitulés " contrat de commission à la vente et de développement commercial ", par lesquels elle met à la disposition de ces sociétés, dénommées " fournisseurs ", des emplacements que celles-ci utilisent pour la vente de leurs produits, en y réalisant les agencements nécessaires et en y affectant leur propre personnel spécialisé ; qu'il résulte cependant des stipulations des contrats que si les ventes des produits sont réalisées avec le concours du personnel spécialisé des fournisseurs, elles le sont par la société Printemps, qui vend les marchandises à sa clientèle, en son nom propre et pour le compte des fournisseurs, moyennant le paiement par ceux-ci d'une commission, couvrant les charges d'exploitation supportées par la société Printemps ; que, par ailleurs, les contrats prévoient que les emplacements peuvent être modifiés ou déplacés à l'initiative de la société Printemps, dans l'intérêt du développement des ventes et pour tenir compte des impératifs de sa politique commerciale et qu'elle a un droit de regard tant sur l'assortiment des marchandises exposées à la vente chez les fournisseurs que sur les installations et décorations des espaces de vente et sur les actions publicitaires que les fournisseurs pourraient décider de lancer ; que la société Printemps organise par conséquent la répartition de ces emplacements de vente et décide des conditions de leur utilisation par les fournisseurs ; que leur exploitation, à laquelle elle participe en tant que commissionnaire à la vente, constitue l'objet même de son activité ; qu'elle doit être regardée, par suite, comme ayant eu le contrôle de ces emplacements et comme les ayant utilisés pour la réalisation de ses opérations ; qu'il suit de là que, même si les contrats ont, en fait, une certaine stabilité, ce qui permet aux fournisseurs de développer leur activité, le Tribunal ne pouvait accorder la restitution demandée, au motif que la société Printemps n'avait pas la disposition des emplacements de vente attribués aux fournisseurs ;

4. Considérant toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SAS Printemps, tant devant le Tribunal administratif que devant elle ;

5. Considérant que la société Printemps n'invoque pas d'autre moyen que celui selon lequel elle n'utilisait pas elle-même les emplacements litigieux et n'en avait donc pas la disposition, au sens de l'article 1467 du code général des impôts ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à demander l'annulation des articles 2 et 3 du jugement du 8 février 2017 du Tribunal administratif de Paris, le rejet des conclusions de la demande présentée par la SAS Printemps devant le Tribunal administratif de Paris, relatives aux impositions correspondant aux emplacements mis à disposition des fournisseurs et le rétablissement de la SAS Printemps au rôle de cotisation foncière des entreprises des années 2013 et 2014 à hauteur du dégrèvement prononcé en exécution du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée par la SAS Printemps devant le Tribunal administratif de Paris ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, en remboursement des frais exposés par la société Printemps ;

DECIDE

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 1611610/1-3 du 8 février 2017 du Tribunal administratif de Paris sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par la SAS Printemps devant le tribunal administratif de Paris, tendant à la restitution de la fraction de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce qu'elle a acquittée au titre des années 2013 et 2014 pour son établissement du cours de Vincennes à Paris, à raison des espaces mis à disposition des fournisseurs, sont rejetées.

Article 3 : La SAS Printemps est rétablie au rôle de cotisation foncière des entreprises des années 2013 et 2014 à hauteur du dégrèvement prononcé en exécution du jugement n° 1611610/1-3 du 8 février 2017 du Tribunal administratif de Paris.

Article 4 : Les conclusions présentées devant la Cour par la SAS Printemps sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Printemps et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1)

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Jardin, président de chambre,

M. Dalle, président assesseur,

Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 novembre 2017.

Le rapporteur, Le président,

D. DALLE C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA00947


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00947
Date de la décision : 06/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Professions et personnes taxables.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: M. PLATILLERO
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS TAJ

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-11-06;17pa00947 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award