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18/07/2017 | FRANCE | N°15PA04698

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 18 juillet 2017, 15PA04698


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 10 juillet 2014 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a prolongé son placement à l'isolement du 10 juillet 2014 au 10 octobre 2014.

Par un jugement n° 1425043 du 12 juin 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 décembre 2015, M. B..., représenté par la SCP DGK avocats associés, demande à la cour :


1°) d'annuler le jugement n° 1425043 du 12 juin 2015 du tribunal administratif de Paris ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 10 juillet 2014 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a prolongé son placement à l'isolement du 10 juillet 2014 au 10 octobre 2014.

Par un jugement n° 1425043 du 12 juin 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 décembre 2015, M. B..., représenté par la SCP DGK avocats associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1425043 du 12 juin 2015 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 10 juillet 2014 du garde des sceaux, ministre de la justice ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente dès lors qu'elle constitue une mesure de mise à l'isolement initiale et non la prolongation d'une mesure d'isolement ; seul le chef d'établissement, et non le garde des sceaux, était compétent pour prendre cette mesure ;

- la décision attaquée est entachée d'erreurs de fait dès lors qu'elle mentionne qu'il a été placé à l'isolement lors de ses détentions à Joux la Ville et à Moulins, ce qui est inexact ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que les faits qui lui sont reprochés n'étaient pas de nature à justifier une mesure de prolongation de mise à l'isolement.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 juin 2017, le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens du requérant n'est fondé.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 25 septembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Amat,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public.

1. Considérant que M.B..., né en 1982 à Grenoble et incarcéré depuis le 1er avril 2008 en exécution de plusieurs condamnations, a fait l'objet, alors qu'il était écroué à la maison centrale d'Arles, d'une mesure de prolongation de placement à l'isolement pour une durée de trois mois par une décision du 10 juillet 2014 ; que M. B...relève appel du jugement du 12 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 726-1 du code de procédure pénale : " Toute personne détenue, sauf si elle est mineure, peut être placée par l'autorité administrative, pour une durée maximale de trois mois, à l'isolement par mesure de protection ou de sécurité soit à sa demande, soit d'office. Cette mesure ne peut être renouvelée pour la même durée qu'après un débat contradictoire, au cours duquel la personne concernée, qui peut être assistée de son avocat, présente ses observations orales ou écrites. L'isolement ne peut être prolongé au-delà d'un an qu'après avis de l'autorité judiciaire (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-7-68 du même code : " Lorsque la personne détenue est à l'isolement depuis un an à compter de la décision initiale, le ministre de la justice peut prolonger l'isolement pour une durée maximale de trois mois renouvelable. / La décision est prise sur rapport motivé du directeur interrégional saisi par le chef d'établissement selon les modalités de l'article R. 57-7-64 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-7-74 de ce code : " Lorsque la personne détenue a déjà été placée à l'isolement et si cette mesure a fait l'objet d'une interruption inférieure à un an, la durée de l'isolement antérieur s'impute sur la durée de la nouvelle mesure. / Si l'interruption est supérieure à un an, la nouvelle mesure constitue une décision initiale de placement à l'isolement qui relève de la compétence du chef d'établissement " ; que l'article R. 57-7-73 du code de procédure pénale dispose enfin : " Tant pour la décision initiale que pour les décisions ultérieures de prolongation, il est tenu compte de la personnalité de la personne détenue, de sa dangerosité ou de sa vulnérabilité particulière, et de son état de santé (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient que la décision attaquée constitue une mesure de mise à l'isolement initiale et non la prolongation d'une mesure d'isolement et, qu'ainsi, le ministre de la justice était incompétent pour la prononcer ;

4. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la " fiche de liaison - mesure d'isolement " produite par le garde des sceaux, ministre de la justice en première instance que M. B...a fait l'objet d'une mesure initiale d'isolement le 22 avril 2010 ; qu'à la date de la décision attaquée, et compte tenu des périodes au cours desquelles l'isolement de l'intéressé a été interrompu sans qu'aucune de ces différentes interruptions ne dépasse un délai d'un an, la durée totale d'isolement à laquelle il a été soumis entre le 22 avril 2010 et le 10 juillet 2014 s'élevait à un an et huit mois ; que, dans ces conditions, et en application des dispositions combinées des articles R. 57-7-68 et R. 57-7-74 du code de procédure pénale, seul le garde des sceaux, ministre de la justice était, compte tenu de la durée de l'isolement du requérant, compétent pour en prononcer la prolongation ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du garde des sceaux, ministre de la justice ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...soutient que la décision attaquée est entachée d'erreurs de fait ; que, toutefois, contrairement à ce qu'il soutient, cette décision ne mentionne pas qu'il a été placé à l'isolement au sein des établissements pénitentiaires de Moulins et de Joux la Ville mais qu'il a fait l'objet de mainlevées de son isolement dans ces deux établissements ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté ;

6. Considérant, enfin, que la décision attaquée mentionne tout d'abord que M. B... depuis son arrivée à la maison centrale d'Arles le 14 janvier 2014 pose des " difficultés sérieuses de gestion " et que son comportement s'est aggravé au cours du premier semestre 2014 ; que cette décision rappelle ensuite les dégradations de biens, dont l'inondation volontaire de sa cellule, les insultes et menaces à l'encontre du personnel pénitentiaire et des détenus, le tapage, le refus d'obtempérer aux injonctions du personnel et la détention d'armes de confection artisanale, ainsi que des éléments de personnalité et comportement de M.B..., qui demeure instable et sans amélioration depuis son retour le 27 juin 2014 à la maison centrale d'Arles après son séjour au service médico-psychologique régional de Marseille ; que la décision conclut que la prolongation de l'isolement de l'intéressé, qui a eu un effet bénéfique sur son comportement dans les précédents établissements pénitentiaires, constitue " dans l'attente d'une stabilisation du comportement de M. B... permettant une nouvelle tentative de retour en détention ordinaire " le " meilleur moyen de prévenir tout risque d'incident grave en détention et de garantir le bon ordre au sein de l'établissement " ; que, contrairement à ce que soutient M. B...qui ne conteste pas l'exactitude matérielle des faits rapportés par la décision, le garde des sceaux, ministre de la justice a pu sans erreur d'appréciation considérer qu'ils justifiaient la prolongation de sa mise à l'isolement afin de maintenir le bon ordre dans l'établissement ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris les conclusions tendant à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, prenne en charge les frais de procédure sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au garde des sceaux, ministre de la justice

Délibéré après l'audience du 22 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juillet 2017.

Le rapporteur,

N. AMATLa présidente,

S. PELLISSIERLe greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA04698


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04698
Date de la décision : 18/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

37-05-02-01 Juridictions administratives et judiciaires. Exécution des jugements. Exécution des peines. Service public pénitentiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : AARPI THEMIS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-07-18;15pa04698 ?
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