Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler, d'une part, l'arrêté en date du 4 septembre 2015 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé son pays de destination et, d'autre part, l'arrêté en date du 7 septembre 2015 par lequel le même préfet a ordonné son placement en rétention administrative.
Par un jugement n° 1507154 du 10 septembre 2015, la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 novembre 2015 et 15 décembre 2016, M. A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner la communication des pièces sur la base desquelles le préfet des Hauts-de-Seine a pris son arrêté du 4 septembre 2015 en application du troisième alinéa du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
2°) d'annuler le jugement n° 1507154 du 10 septembre 2015 de la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de réexaminer sa situation administrative dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son avocat, Me B..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le Tribunal a méconnu le troisième alinéa du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne faisant pas droit à sa demande de communication de l'entier dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et refusant de lui accorder un délai de départ volontaire sont entachées d'un vice de procédure, dès lors qu'elles ont été prises en violation de son droit à être préalablement entendu, principe général du droit de l'Union européenne rappelé aux articles 5 et 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, et à présenter des observations écrites ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et refusant de lui accorder un délai de départ volontaire sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation et ont été prises en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il vit en France depuis plus de quinze ans, où il est domicilié... ; il conteste être marié et père d'un enfant à l'étranger ;
- les décisions refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, fixant son pays de destination et le plaçant en rétention administrative doivent être annulées par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2016, le préfet des Hauts-de-Seine, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 décembre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc, signé le 9 octobre 1987, en matière de séjour et d'emploi,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Mme Bernard a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 10 septembre 2015 par lequel la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 4 septembre 2015 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant son pays de destination et, d'autre part, de l'arrêté du même préfet du 7 septembre 2015 ordonnant son placement en rétention administrative.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes du troisième alinéa du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable : " L'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin (...) la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. ".
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance, d'une part, que le préfet des Hauts-de-Seine a communiqué au Tribunal le 9 septembre 2015 la totalité des pièces sur la base desquelles il avait pris les arrêtés contestés et, d'autre part, que ces pièces ont été communiquées à l'avocat de M. A... préalablement à la tenue de l'audience le lendemain. Par suite, le moyen soulevé par M. A..., tiré de ce que la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun n'aurait pas fait droit à sa demande de communication desdites pièces, doit être écarté comme manquant en fait.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
4. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
5. M. A... fait valoir qu'il est entré en France en 1997, muni d'un visa touristique. Il n'établit toutefois ni l'ancienneté ni le caractère habituel de son séjour en se bornant à produire des courriers d'admission à l'aide médicale d'Etat à compter de 2002 (à l'exception, d'ailleurs, des années 2004 et 2012) et des attestations non circonstanciées de personnes de connaissance. M. A... fait également valoir qu'il a désormais en France toutes ses attaches privées et familiales, dont deux soeurs titulaires de cartes de résident, ainsi que sa compagne de nationalité française. M. A..., qui déclare résider chez l'une de ses soeurs, ne soutient toutefois pas vivre en concubinage avec la personne qu'il présente comme sa compagne et n'établit pas l'ancienneté de leur relation. Enfin, M. A... ne soutient pas ne plus avoir d'attaches personnelles et familiales au Maroc, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 24 ans. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les décisions contenues dans l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 4 septembre 2015 ont porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises.
6. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 ci-dessus, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les décisions contenues dans l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 4 septembre 2015 seraient entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle.
7. En troisième lieu, les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont issues de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Un arrêté portant obligation de quitter le territoire français pris sur le fondement du I de l'article L. 511-1 entre ainsi dans le champ d'application du droit de l'Union. Il appartient en conséquence au préfet d'en appliquer les principes généraux, qui incluent le droit de toute personne à être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre.
8. Le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Toutefois, ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt C-383/13 du 10 septembre 2013, selon le droit de l'Union, une violation des droits de la défense, en particulier du droit d'être entendu, n'entraîne l'annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l'absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent. Pour qu'une telle illégalité soit constatée, il incombe ainsi au juge national de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, les irrégularités procédurales ont effectivement privé celui qui les invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
9. M. A... fait valoir, sans être sérieusement contredit, qu'il n'a pas été mis à même de présenter ses observations préalablement à l'adoption, par le préfet des Hauts-de-Seine, de l'arrêté contesté du 4 septembre 2015. M. A... ne précise toutefois pas les arguments qu'il a été empêché de faire valoir. A supposer qu'il s'agisse des arguments développés devant la Cour et le Tribunal, il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 ci-dessus que M. A...ne peut être regardé comme ayant été privé de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
10. En dernier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. A... à l'appui de ses conclusions dirigées contre les décisions refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, fixant son pays de destination et le plaçant en rétention administrative ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées par son avocat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 29 mai 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Luben, président,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,
- Mme Bernard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 juillet 2017.
Le rapporteur,
A. BERNARDLe président,
I. LUBEN
Le greffier,
Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04071