La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/07/2017 | FRANCE | N°15PA01643

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 03 juillet 2017, 15PA01643


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Système et Formation a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 décembre 2013 par laquelle le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, a décidé que la société Système et Formation devra verser au Trésor public la somme de 35 640 euros pour avoir engagé, durant l'année 2011, des dépenses dont la réalité et le lien avec son activité de formation professionnelle continue n'étaient pas établis.

Par un jugement n° 1402530/3-3 du 17 fé

vrier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Système et Formation a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 décembre 2013 par laquelle le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, a décidé que la société Système et Formation devra verser au Trésor public la somme de 35 640 euros pour avoir engagé, durant l'année 2011, des dépenses dont la réalité et le lien avec son activité de formation professionnelle continue n'étaient pas établis.

Par un jugement n° 1402530/3-3 du 17 février 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 21 avril 2015 et le 4 août 2015, MmeB..., ès qualité de liquidatrice amiable de la société dissoute Système et Formation, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402530/3-3 du 17 février 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 18 décembre 2013 par laquelle le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, a décidé que la société Système et Formation devra verser au Trésor public la somme de 35 640 euros pour avoir engagé, durant l'année 2011, des dépenses dont la réalité et le lien avec son activité de formation professionnelle continue n'étaient pas établis ;

3°) à titre subsidiaire, de retenir le caractère non intentionnel des omissions et de limiter le versement à une somme n'excédant pas 4 000 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- s'agissant du contrôle de la réalisation des prestations de formation professionnelle continue, elle a présenté des feuilles d'émargement conformes et donc probantes, ces feuilles contenant le nom de l'entreprise et celui de la formation dispensée et sa durée, tout comme le nom de chaque stagiaire participant à la formation ainsi que leurs émargements ; ainsi, ces prestations ont été effectivement réalisées et sont en lien avec l'activité de formation professionnelle continue ;

- s'agissant du contrôle des dépenses de formation professionnelle continue, les dépenses rejetées ont été réalisées par la société Del Carpio Système, comme cela ressort des attestations et factures versées au dossier ; la différence entre les dates de réalisation des actions de formation avec celles figurant sur les prises en charge s'explique par des demandes tardives de modification des formations ;

- la facture du 2 mai 2011 a été comptabilisée à deux reprises par l'administration, de sorte que la somme de 1 505 euros doit être déduite du montant global de la somme mise à sa charge.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2015, les ministres des affaires sociales et de la santé, du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports concluent au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 1 000 euros soit mis à la charge de la société Système et Formation sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par la société Système et Formation ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Luben,

- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 18 décembre 2013, le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, a décidé que la société Système et Formation devra verser au Trésor public la somme de 35 640 euros pour avoir engagé, durant l'année 2011, des dépenses dont la réalité et le lien avec son activité de formation professionnelle continue n'étaient pas établis. Par le jugement attaqué du 17 février 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Système et Formation tendant à l'annulation de cette décision.

En ce qui concerne la réalité des prestations de formation professionnelle continue :

2. Aux termes de l'article L. 6362-5 du code du travail : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 : 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités. A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10 " ; aux termes de l'article L. 6362-6 du même code : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 présentent tous documents et pièces établissant la réalité de ces actions. A défaut, celles-ci sont réputées ne pas avoir été exécutées et donnent lieu à remboursement au cocontractant des sommes perçues conformément à l'article L. 6354-1 " ; aux termes de l'article R. 6332-26 du même code : " Les employeurs ou les prestataires de formation adressent aux organismes collecteurs qui en font la demande une copie des feuilles d'émargement à partir desquelles sont établies les attestations de présence. Ces feuilles d'émargement font partie des documents que les organismes collecteurs sont tenus de produire aux agents chargés du contrôle prévu aux articles L. 6362-5 à L. 6362-7 ". Il résulte des dispositions précitées que les organismes de formation sont tenus de présenter aux agents de contrôle les documents et pièces établissant l'origine des fonds reçus et la réalité des dépenses exposées ainsi que la conformité de leur utilisation aux dispositions législatives et réglementaires régissant leur activité, ainsi que tous documents et pièces relatifs à l'exécution des conventions qu'ils ont conclues pour des activités de formation professionnelle, les dépenses correspondantes étant, à défaut, regardées comme non réalisées.

3. La société Système et Formation reprend en appel le moyen, qu'elle avait invoqué dans des termes exactement identiques en première instance, tiré de ce que les feuilles d'émargement produites, mentionnant le nom de l'entreprise, celui de la formation dispensée et sa durée et le nom de chaque stagiaire participant à la formation, étaient conformes et donc probantes, établissant le caractère effectif des prestations réalisées, en lien avec l'activité de formation professionnelle continue. Il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption du motif retenu par le Tribunal administratif de Paris.

En ce qui concerne le contrôle des dépenses de formation professionnelle :

4. Aux termes de l'article L. 6361-3 du code du travail : " le contrôle administratif et financier des dépenses et activités de formation porte sur l'ensemble des moyens financiers, techniques et pédagogiques, à l'exclusion des qualités pédagogiques, mis en oeuvre pour la formation professionnelle continue " ; aux termes de l'article L. 6362-5 et L. 6362-7 du même code : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 : / 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; / 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités. / A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10. " ; aux termes de l'article L. 6362-7 du même code : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 versent au Trésor public, solidairement avec leurs dirigeants de fait ou de droit, une somme égale au montant des dépenses ayant fait l'objet d'une décision de rejet en application de l'article L. 6362-10. ".

5. D'une part, la décision attaquée du 18 décembre 2013 est motivée par la circonstance que si la société Système et Formation, en 2011, a acheté des formations (espagnol, informatique, anglais, Adobe Illustrator) pour une somme totale de 35 640 euros à la société Del Carpio, spécialisée en soutien scolaire, ces achats ne peuvent toutefois être clairement rattachés à son activité de formation professionnelle. Il ressort des pièces produites, explicitées par les mémoires de la société requérante, que la société Système et Formation, une fois ses formations acceptées par l'entreprise concernée et bénéficiant de l'accord de l'organisme paritaire collecteur agréé, préremplissait des attestations de présence (sous la forme de feuilles d'émargement, portant au demeurant des signatures dont l'aspect excessivement identique est de nature à créer un doute sur leur authenticité) correspondant aux horaires initialement prévus de ces formations. Toutefois, dès lors que ces horaires initialement prévus étaient parfois modifiés eu égard aux impératifs tant des sociétés concernés que de ceux des salariés bénéficiant de ces formations, la société Système et Formation faisait ultérieurement émarger, au moment où les formations étaient effectivement dispensées, les personnes formées sur une feuille d'émargement à l'en-tête de la société Del Carpio Système, de sorte que les attestations de présence (feuilles d'émargement) initiales et les feuilles d'émargement réelles ne correspondent pas. Par suite, quand bien même la société Système et Formation, pour établir le caractère effectif de chacune des formations contestées, a produit de nombreux documents (et notamment une attestation du bénéficiaire de la formation, indiquant les dates de cette formation, une attestation de la société employeur, l'accord de l'organisme paritaire collecteur agréé, et la convention de prestation de formation conclue entre les sociétés Système et Formation et Del Carpio Système pour la formation concernée), la pratique ainsi instituée d'un double système par définition non concordant d'attestations de présence, cumulée au surplus avec quelques incohérences, même mineures, entre les documents produits, ne pouvait faire regarder les formations en cause comme ayant été effectivement dispensées, ni ne permettait de rattacher les dépenses ainsi exposées à l'activité de formation professionnelle de la société Système et Formation, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges. Enfin, eu égard au mécanisme qui vient d'être exposé, la société Système et Formation n'est pas fondée à soutenir que les omissions constatées auraient présenté un caractère non intentionnel.

6. D'autre part, si la société Système et formation fait valoir que la facture du 2 mai 2011 relative à 35 heures de formation en informatique a été prise en compte à deux reprises pour un montant de 1 505 euros puis de 1 715 euros, elle ne conteste pas en appel le motif par lequel le jugement attaqué a, à juste titre, écarté ce moyen, à savoir qu'il ressort des pièces du dossier que la société requérante a émis une facture le 4 février 2011 relative à 35 heures de formation en informatique pour un montant de 1 505 euros, qu'elle a également émis une facture le 2 mai 2011 pour un montant de 1 715 euros et correspondant à 35 heures de formation sur le logiciel Adobe Illustrator et qu'enfin elle a émis une facture le 2 juin 2011 de 1 505 euros correspondant à 35 heures de formation en informatique, et que si le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, a par erreur daté du 2 mai 2011 la facture du 4 février 2011, il n'a cependant pas pris en compte la même facture à deux reprises. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Système et Formation n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 17 février 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2013 par laquelle le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, a décidé que la société Système et Formation devra verser au Trésor public la somme de 35 640 euros pour avoir engagé, durant l'année 2011, des dépenses dont la réalité et le lien avec son activité de formation professionnelle continue n'étaient pas établis. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Les ministres se bornent à demander à ce que soit mis à la charge de la société Système et Formation le paiement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens. Toutefois, faute pour les ministres de faire état précisément des frais exposés pour défendre à l'instance, ces conclusions doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Système et Formation est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par les ministres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à MmeB..., ès qualité de liquidatrice amiable de la société dissoute Système et Formation et à la ministre du travail.

Copie en sera adressée au préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 juillet 2017.

Le rapporteur,

I. LUBENLe président,

J. LAPOUZADELe greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA01643


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01643
Date de la décision : 03/07/2017
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-09 Travail et emploi. Formation professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : KUMABA MBUTA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-07-03;15pa01643 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award