Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté en date du 4 novembre 2016 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, l'a interdit de retour sur le territoire français et l'a placé en rétention administrative.
Par un jugement n° 1609125/12 du 9 novembre 2016, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a pris acte du désistement des conclusions de la requête de M. B... dirigées contre la décision de placement en rétention administrative et rejeté le surplus de sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 8 décembre 2016, M. B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1609125/12 en date du 9 novembre 2016 en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions du 4 novembre 2016 du préfet des Hauts-de-Seine l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, lui interdisant un retour sur le territoire français ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle a été signée par une autorité incompétente ;
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
- elle a été signée par une autorité incompétente ;
- elle n'est pas motivée ;
- les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont contraires aux objectifs de la directive " retour " ;
- elle est entachée d'une erreur de droit ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- elle a été signée par une autorité incompétente ;
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit ainsi que d'une erreur d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2017, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.
Il indique s'en remettre à ses écritures de première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ;
- la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France ;
- le code de justice administrative.
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Julliard a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. B..., ressortissant marocain né le 21 mars 1992, relève appel du jugement du 9 novembre 2016 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du
4 novembre 2016 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant son pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte commun aux trois décisions contestées ;
2. Considérant que Mme E...F..., bénéficiait d'une délégation de signature du préfet des Hauts de Seine, par un arrêté MCI n°2016-53 en date du 5 septembre 2016 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture des Hauts de Seine du
6 septembre 2016 ; qu'ainsi le moyen tiré du défaut de délégation régulière du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision litigieuse vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le règlement (CE) n°1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006, le règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen eu Conseil du 9 mars 2016 ainsi que les articles L. 511-1 I 1°, L. 511-1 II 3°, L. 511-1 III, L. 511-4-1, L. 515-1 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle fait application, et mentionne les faits qui en constituent le fondement ; que cette décision répond aux exigences de motivation posées par le code des relations entre le public et l'administration ; qu'ainsi le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écarté ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
5. Considérant que M. B...soutient à la fois être en France depuis 2012 et être entré irrégulièrement en France le 21 janvier 2016 ; que, par ailleurs, s'il fait valoir qu'il est très entouré de ses oncles, tantes et grands parents en France, il est constant que M. B...est célibataire et sans charge de famille en France ; que s'il a déclaré lors de son audition par les services de police être sans domicile fixe mais aussi être hébergé par sa grand-mère, il fait valoir dans sa requête être hébergé par sa tante et produit une attestation d'hébergement de cette dernière ; que s'il a déclaré occuper des " jobs " quinze jours par mois lors de son audition par les services de police, il fait valoir dans sa requête être en France pour travailler avec son oncle ; que s'il produit à l'appui de ces allégations contradictoires une attestation d'embauche de son oncle en date du 4 novembre 2016 ainsi qu'une demande d'autorisation de travail adressée à la DIRECCTE par son oncle en novembre 2012, il ne produit aucun bulletin de salaire ni aucun contrat de travail ; qu'enfin, il n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
En ce qui concerne la décision de refus d'octroi de délai de départ volontaire :
6. Considérant qu'aux termes des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; 2° Si l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était ou manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;(...) " ;
7. Considérant que, pour refuser à M. B...le bénéfice d'un délai de départ volontaire, le préfet des Hauts-de-Seine, après avoir visé les textes applicables, a fondé sa décision sur le fait qu'il existait un risque que l'intéressé se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet aux motifs que M. B...n'établissait pas être entré régulièrement sur le territoire français et n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; que, dès lors, l'intéressé se trouvait dans le cas prévu au a) du 3° de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant, d'une part, de regarder comme établi, sauf circonstance particulière, le risque qu'il se soustraie à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français et, d'autre part, de lui refuser le bénéfice d'un délai de départ volontaire ; qu'ainsi la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ;
8. Considérant que M.B..., qui n'établit pas être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, se trouvait dans le cas prévu au a) du 3° de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant, de regarder comme établi le risque qu'il se soustraie à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français ; que c'est par suite sans méconnaître ces dispositions que le préfet a pu lui refuser le bénéfice d'un délai de départ volontaire ;
9. Considérant qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B...;
10. Considérant que si un justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive lorsque l'Etat n'a pas pris dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires, M. B...ne peut se prévaloir de la méconnaissance des articles 7 et 8 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, laquelle a été transposée dans le droit national par la loi du 16 juin 2011 susvisée relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, antérieurement à l'édiction de la décision litigieuse ;
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue des dispositions de l'article 27 de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France et applicable aux décisions d'interdiction de retour sur le territoire français prises à compter du 1er novembre 2016 : " (...) / III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti / (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III (...) [est décidée] par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français / (...) " ;
12. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère ;
13. Considérant qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger ; qu'elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet ; qu'elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace ; qu'en revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément ;
14. Considérant que l'arrêté en litige vise l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il énonce également les raisons pour lesquelles le préfet des Hauts-de-Seine a considéré que M. B...entrait dans le champ de ces dispositions et pouvait ainsi être destinataire d'une décision d'interdiction de retour en France en relevant qu'il a déclaré être entré récemment en France, qu'il n'a pas sollicité de titre de séjour, qu'il est célibataire, que ses liens personnels et familiaux ne sont pas anciens, intenses et stables dans la mesure où il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 24 ans ; que le préfet des Hauts-de-Seine, qui a ainsi rappelé les dispositions applicables à la situation de M. B...et exposé de façon précise les circonstances de fait qu'il a retenues pour prononcer sa décision d'interdiction de retour, a suffisamment motivé cette décision au regard des exigences du III de l'article
L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
15. Considérant que le préfet des Hauts-de-Seine a interdit le retour de M. B...sur le sol français pendant une durée d'un an eu égard à l'irrégularité du séjour en France de l'intéressé, au fait que M. B...ne se prévaut d'aucune circonstance humanitaire pouvant justifier que ne soit pas prononcé à son encontre une interdiction de retour et à l'absence liens personnels et familiaux anciens, intenses et stables dans la mesure où il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 24 ans ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que le requérant n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement à laquelle il se serait soustrait et que sa présence ne menace pas l'ordre public, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas commis d'erreur de droit, ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé, en prononçant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.D... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- Mme Julliard, première conseillère,
- MmeA..., première conseillère,
Lu en audience publique, le 29 juin 2017.
La rapporteure,
M. JULLIARDLe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 10PA03855
2
N° 16PA03676