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01/06/2017 | FRANCE | N°16PA01726

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 01 juin 2017, 16PA01726


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Nouméa a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté du 25 mars 2015 par lequel la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a réintégré Mme C...dans son cadre d'origine à compter du 1er avril 2015 et l'a placée en position d'activité pour servir sous l'autorité du maire de la commune de Nouméa.

Par un jugement n° 1500265 du 25 février 2016, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant

la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mai 2016, et un mémoire en réplique, enregistré ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Nouméa a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté du 25 mars 2015 par lequel la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a réintégré Mme C...dans son cadre d'origine à compter du 1er avril 2015 et l'a placée en position d'activité pour servir sous l'autorité du maire de la commune de Nouméa.

Par un jugement n° 1500265 du 25 février 2016, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mai 2016, et un mémoire en réplique, enregistré le 2 janvier 2017, la commune de Nouméa, représentée par la SELARL Jean-Jacques Deswarte, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500265 du 25 février 2016 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 mars 2015 de la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;

3°) d'enjoindre soit à la Nouvelle-Calédonie, soit à la province Sud de réintégrer MmeC... ;

4°) de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête d'appel est recevable, le maire ayant reçu délégation du conseil municipal pour intenter les actions en justice au nom de la commune par une délibération du conseil municipal du 14 avril 2014 ;

- le mémoire en défense de la Nouvelle-Calédonie est irrecevable faute d'avoir été présenté par un avocat, comme l'exige l'article R. 811-7 du code de justice administrative, et faute d'habilitation du président du gouvernement à défendre au nom de la Nouvelle-Calédonie et de délégation de signature consentie à sa signataire et régulièrement publiée ;

- la présidente du gouvernement démissionnaire de la Nouvelle-Calédonie n'était pas compétente pour signer l'arrêté en litige, qui ne relève pas de l'expédition des affaires courantes ;

- Mme C...n'étant plus affectée sous l'autorité de son maire depuis le 1er septembre 2009, cet arrêté ne pouvait intervenir que sur sa proposition ou avec son accord, lesquels font défaut ;

- l'arrêté du 7 octobre 2009 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie retirant l'arrêté du 1er septembre 2009 ayant placé Mme C...en position d'activité pour servir sous l'autorité du président de l'assemblée de la province Sud est entaché d'inexistence, eu égard à la gravité des illégalités dont il est entaché ;

- l'arrêté du 1er septembre 2009 ne pouvait être retiré dès lors qu'il était légal, que Mme C...n'en avait pas demandé le retrait, que cette mesure n'était pas plus favorable pour elle et qu'elle portait atteinte aux droits de la commune ;

- l'arrêté du 7 octobre 2009, celui du 27 décembre 2010 mettant fin au premier détachement de l'intéressée et la plaçant à nouveau en position de détachement et celui en litige forment une opération complexe, ce qui permet de contester par voie d'exception les deux premiers actes même après l'expiration du délai de recours à leur encontre ;

- l'arrêté du 7 octobre 2009 ne peut légalement avoir eu pour conséquence de replacer Mme C...en position d'activité sous l'autorité du maire, sans accord de la commune ;

- l'arrêté en litige n'a pu placer de manière unilatérale Mme C...sous l'autorité du maire sans méconnaître l'article 72 de la Constitution qui interdit la tutelle d'une collectivité territoriale sur une autre ;

- l'article 70 de l'arrêté du 22 août 1953 ne peut être interprété comme imposant à une commune de réintégrer après détachement un fonctionnaire de la Nouvelle-Calédonie qui n'a pas été intégré dans la fonction publique communale et qui ne peut être réintégré à l'issue d'un détachement que dans son cadre d'origine, conformément à l'article 81 du même arrêté ;

- ayant constaté que Mme C...était fonctionnaire de la Nouvelle-Calédonie, les premiers juges ne pouvaient sans contradiction de motifs décider qu'elle devait être réintégrée dans les services de la commune de Nouméa.

Par deux mémoires en défense, le premier enregistré le 28 octobre 2016 et régularisé le 18 janvier 2017, le second enregistré le 21 février 2017, la Nouvelle-Calédonie, représentée par la SELARL Milliard Million, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Nouméa sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle est irrecevable faute pour le maire d'avoir été habilité par le conseil municipal à agir en justice au nom de la commune ;

- aucun des moyens soulevés par la commune requérante n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2016, MmeC..., représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 300 000 F CFP soit mise à la charge de la commune de Nouméa sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par la commune requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

- l'arrêté n° 1065 du 22 août 1953 portant statut général des fonctionnaires des cadres territoriaux ;

- la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 portant droits et obligations des fonctionnaires territoriaux ;

- la délibération n° 486 du 10 août 1994 portant création du statut général des fonctionnaires des communes de Nouvelle-Calédonie ;

- la délibération n° 230 du 13 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'administration générale de la Nouvelle-Calédonie ;

- la délibération n° 231 du 13 décembre 2006 portant statut particulier des cadres d'emplois des personnels de la filière administrative des communes de la Nouvelle-Calédonie et de leurs établissements publics ;

- le code des communes de la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jardin,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public.

1. Considérant que MmeC..., attachée territoriale du cadre de l'administration générale de la Nouvelle-Calédonie, a été nommée en position d'activité au sein des services de la commune de Nouméa à compter du 22 septembre 2008 ; que, de 2009 à 2014, elle a été placée en position de détachement pour servir sous l'autorité du président de la province Sud, puis du directeur de l'" Ecole de la deuxième chance " ; qu'à la suite de sa demande de réintégration, la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie l'a réintégrée dans son cadre d'origine par un arrêté du 25 mars 2015 et l'a placée en position d'activité pour servir sous l'autorité du maire de Nouméa ; que la commune de Nouméa a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie l'annulation de cet acte ; qu'elle relève appel du jugement par lequel cette juridiction a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la commune de Nouméa tendant à ce que les écritures du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie soient écartées des débats :

2. Considérant que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a régularisé son mémoire en défense enregistré le 28 octobre 2016 en le faisant signer par l'avocat qui le représente ; que, par ailleurs, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, par une délibération du 20 septembre 2016, a habilité son président à défendre dans le cadre de l'instance d'appel ouverte par la commune de Nouméa ; que les conclusions de la commune de Nouméa tendant à ce que la Cour écarte des débats les écritures du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie doivent par suite être rejetées ;

Sur la recevabilité de la requête de la commune de Nouméa :

3. Considérant que le conseil municipal de la commune de Nouméa, par une délibération du 14 avril 2014, a donné délégation au maire pour agir en justice pendant la durée de son mandat " pour tout type d'action " (...) " pour tous les degrés de l'instance " ; que la fin de non-recevoir opposée par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et tirée de ce que le maire n'aurait pas été habilité à agir en justice au nom de la commune ne peut dès lors qu'être écartée ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Considérant que l'article 70 de l'arrêté du 22 août 1953, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose : " L'activité est la position du fonctionnaire qui, régulièrement titulaire d'un grade exerce effectivement les fonctions de l'un des emplois qui y correspond./ Les fonctionnaires en activité ont vocation à être affectés pour servir sous l'autorité de l'Etat et sous celle des Exécutifs du Territoire, des Provinces et des Communes ainsi que dans leurs établissements publics./ Ces fonctionnaires continuent à bénéficier de toutes les dispositions régissant leur statut particulier (...) " ; qu'aux termes de l'article 81 du même arrêté : " A l'expiration du détachement de longue durée, et sous réserve des dispositions de l'article suivant, le fonctionnaire détaché est obligatoirement réintégré à la première vacance dans son cadre d'origine et réaffecté à un emploi correspondant à son grade dans ce cadre. Il a priorité pour être affecté au poste qu'il occupait avant son détachement (...) " ;

5. Considérant que les emplois permanents des communes de la Nouvelle-Calédonie doivent normalement être occupés par des fonctionnaires régis par la délibération du 10 août 1994, appartenant à des cadres d'emplois régis par des statuts particuliers et nommés par le maire ; que, pour l'application de l'article 81 de l'arrêté du 22 août 1953, un emploi permanent d'une commune de la Nouvelle-Calédonie ne peut être regardé comme un emploi correspondant au grade détenu par un agent appartenant à un corps de fonctionnaires régi par l'arrêté du 22 août 1953 alors même que cet agent, avant son détachement de longue durée, a servi provisoirement sous l'autorité du maire d'une commune de la Nouvelle-Calédonie, avec l'accord de ce dernier, en application des dispositions précitées de l'article 70 de l'arrêté du 22 août 1953 ; qu'il s'ensuit que la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne pouvait légalement placer Mme C...en position d'activité pour servir sous l'autorité du maire de Nouméa par voie d'acte unilatéral pris sans l'accord du maire ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 que la commune de Nouméa, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué et d'examiner les autres moyens de sa requête, est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2015 de la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie réintègre Mme C...à la première vacance dans son cadre d'origine ; qu'il y a par suite lieu de lui faire injonction de prendre cette mesure ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nouméa, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et Mme C...demandent au titre des frais exposés par eux ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre la somme de 1 500 euros à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au titre de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1500265 du 25 février 2016 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ainsi que l'arrêté du 25 mars 2015 de la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie son annulés.

Article 2 : Il est enjoint au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de réintégrer Mme C...à la première vacance dans son cadre d'origine.

Article 3 : Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie versera la somme de 1 500 euros à la commune de Nouméa sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Nouméa est rejeté.

Article 5 : Les conclusions du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et de Mme C...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Nouméa, au président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie et à Mme A...C....

Délibéré après l'audience du 11 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er juin 2017.

L'assesseur le plus ancien,

D. DALLELe président-rapporteur

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01726


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01726
Date de la décision : 01/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-005 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Position d'activité.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Claude JARDIN
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : SELARL JEAN-JACQUES DESWARTE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-06-01;16pa01726 ?
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