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01/06/2017 | FRANCE | N°16PA00422

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 01 juin 2017, 16PA00422


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 à 2011 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1412095/1-1 du 25 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions en décharge de M. B...à hauteur du dégrèvement d'un montant de 318 786 euros prononcé en cours d'instance p

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 à 2011 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1412095/1-1 du 25 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions en décharge de M. B...à hauteur du dégrèvement d'un montant de 318 786 euros prononcé en cours d'instance par l'administration fiscale, portant sur la totalité des impositions supplémentaires et des pénalités assignées à l'intéressé au titre de l'année 2008, et rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 29 janvier 2016, M.B..., représenté par Me Courtier, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1412095/1-1 du 25 novembre 2015 du Tribunal administratif de Paris, en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses conclusions en décharge ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités restant en litige ;

3°) d'ordonner une mesure d'expertise portant sur le prix des cessions de titres intervenues les 30 mars 2009 et 28 février 2011 ;

4°) de mettre une somme de 4 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué, qui ne répond pas aux moyens tirés de ce que la proposition de rectification du 29 juin 2012 ne précise pas la teneur et l'origine de déclarations imputées à la société Avel Brao en ce qui concerne les vols effectués par M. B...et de ce que le service avait expressément admis que M. D...avait également emprunté l'avion, est insuffisamment motivé ;

- les propositions de rectifications du 29 juin 2012 et du 20 mars 2013, ainsi que les réponses aux observations du contribuable des 20 mars 2013 et 17 juillet 2013, sont insuffisamment motivées ;

- les transactions retenues par le service pour établir la valeur des titres Avel Brao ne sont pas comparables aux deux cessions litigieuses, des 30 mars 2009 et 25 février 2011 ;

- il résulte du rapport de l'expert Fournier du 19 octobre 2013 qu'à la date du 30 mars 2009 les 135 titres Avel Brao cédés valaient 897 000 euros ;

- l'avenant du 5 novembre 2010 par lequel il s'est porté caution à hauteur de 1 937 520 euros, des engagements de la société Avel Brao à l'égard de la société GCE Bail, a procuré un avantage à la société Made In K, en réduisant son exposition financière ;

- s'agissant des dépenses d'exploitation non refacturées par la société, il ne saurait être regardé comme le bénéficiaire de la totalité des distributions dès lors qu'il n'a lui-même effectué qu'un petit nombre des trajets litigieux ;

- la méthode de détermination des recettes omises est sommaire et viciée dans son principe, le vérificateur ayant pris en compte des vols " à vide ", " d'essais " ou destinés à des clients " cibles ", qui ne pouvaient donner lieu à refacturation ;

- s'agissant des dépenses personnelles comptabilisées au compte d'attente, la société Made In K a présenté d'autres factures à l'administration, au stade de la réclamation contentieuse ;

- l'administration ne peut, sans contradiction, d'une part, admettre que les dépenses personnelles ne constituent des distributions imposables entre les mains de M. B...que pour 50 % seulement de leur montant lorsqu'elles sont comptabilisées au compte d'attente, d'autre part, rejeter l'intégralité de ces dépenses lorsqu'elles sont comptabilisées dans un compte de charges ;

- s'agissant de la somme de 150 000 euros créditée le 30 juin 2010 à son compte courant dans les écritures de la société Mad Hotel, il sera démontré que la somme n'a pu lui être effectivement versée ;

- s'agissant des charges étrangères à l'intérêt de la société Made In K, il renvoie aux moyens soulevés devant la Cour par la société Made in K dans l'instance n° 16PA00423 ;

- les pénalités pour manquement délibéré sont infondées ; l'administration n'établit pas qu'il aurait eu l'intention d'éluder l'impôt alors qu'il a déclaré les plus-values de cession des titres Avel Brao et acquitté les impositions correspondantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens du requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dalle,

- les conclusions de M. Blanc, rapporteur public,

- et les observations de Me K'Jan, avocat de M.B....

1. Considérant que M. B...a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2008 à 2010 et d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2011 ; qu'à l'issue de ces contrôles des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mis à sa charge, qu'il a contestés devant le Tribunal administratif de Paris ; que, par un jugement du 25 novembre 2015, le Tribunal a constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions en décharge de M. B...à hauteur du dégrèvement d'un montant de 318 786 euros prononcé en cours d'instance par l'administration fiscale, portant sur la totalité des impositions supplémentaires et pénalités assignées à l'intéressé au titre de l'année 2008, et rejeté le surplus de la demande ; que M. B... relève appel de ce jugement et demande la décharge des impositions et pénalités restant en litige ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments présentés par le requérant à l'appui de ses moyens, ont statué sur les moyens qui leur étaient soumis et tirés des erreurs commises par le service dans la fixation à 50 euros du prix de cession des titres de la société Avel Brao, de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification du 29 juin 2012 en ce qui concerne l'appréhension par M. B...des distributions correspondant aux dépenses d'exploitation de l'aéronef de la société Avel Brao, non refacturées par celle-ci à ses clients, de ce que M.B..., qui n'avait effectué lui-même qu'une partie des trajets non refacturés, ne pouvait être regardé comme le bénéficiaire de la totalité de ces distributions, enfin, du caractère infondé des majorations pour manquement délibéré ; que le jugement est par suite suffisamment motivé, alors même qu'il ne répond pas aux arguments tirés de ce que la proposition de rectification du 29 juin 2012 ne précise pas la teneur et l'origine de déclarations imputées à la société Avel Brao en ce qui concerne les vols effectués par M. B...et de ce que le service avait expressément admis que M. D...avait également emprunté l'avion ;

3. Considérant, par ailleurs, que si M. B...soutient que le Tribunal a commis de multiples erreurs de droit et de fait, ces critiques, qui se rapportent au bien-fondé du jugement attaqué, sont sans incidence sur sa régularité ; qu'il appartient seulement au juge d'appel, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, de faire une correcte application de la loi, en substituant, le cas échéant, son appréciation à celle retenue par les premiers juges ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée " ;

5. Considérant que la proposition de rectification du 29 juin 2012, afférente aux années 2009 et 2010, comportait la désignation des impôts concernés, l'identification des revenus redressés, ainsi que les motifs de droit et de fait sur lesquels étaient fondés les rehaussements, notamment ceux relatifs à la cession des titres Avel Brao et aux minorations de recettes constatées au sein de cette société ; que s'agissant en particulier de ce redressement, la proposition de rectification précisait les modalités de calcul des revenus réputés distribués à raison des minorations de recettes en indiquant le nombre total d'heures de vol non facturées, le forfait retenu pour la facturation ainsi que les éléments retenus par le service pour établir l'appréhension effective des revenus par M. B...en sa qualité de maître de l'affaire ; que, dans ces conditions et même si elle ne précise pas les modalités de détermination du nombre d'heures de vol non facturées et du forfait horaire retenu pour la facturation, ni la teneur et l'origine de déclarations imputées à la société Avel Brao en ce qui concerne les vols effectués par M.B..., la proposition de rectification litigieuse, qui mettait à même M. B...de présenter utilement ses observations sur les redressements notifiés, satisfait aux exigences de motivation prévues par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; qu'il en va de même des réponses aux observations du contribuable adressées à M.B..., au titre des années 2009 à 2011, les 20 mars et 17 juillet 2013, qui détaillaient, pour chaque rectification concernée, les motifs de son maintien ou de son abandon partiel et répondaient aux principales observations présentées par le contribuable ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés (...) " ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a) Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par des personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) " ;

En ce qui concerne les cessions de titres Avel Brao à la société Made In K :

7. Considérant qu'en cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c) du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du co-contractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B...a, les 30 mars 2009 et 28 février 2011, cédé à la société Made In K, dont il était le gérant et associé unique, respectivement 135 parts de la société Avel Brao au prix de 1 200 015 euros et 14 parts de la même société au prix de 679 994 euros ; que le service, estimant que la valeur unitaire de cession de ces titres ne pouvait excéder 50 euros et constatant en outre que la société Made In K avait réglé le prix d'achat en abandonnant, à hauteur de la somme de 1 200 000 euros, la créance qu'elle détenait à l'encontre de M.B..., dont le compte courant dans ses écritures était débiteur pour un montant de 1 275 488 euros, a estimé que ce dernier s'était vu consentir par celle-là une libéralité en lui achetant les titres en cause à un prix excessif ; que le service a, par suite, réintégré au revenu imposable de M.B..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et en application du c) de l'article 111 du code général des impôts, la différence entre le prix convenu et la valeur vénale des parts cédées, soit 1 193 250 euros en 2009 et 679 300 euros en 2011 ;

9. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que c'est au prix unitaire de 50 euros qu'ont été cédés 300 autres titres Avel Brao, lors de quatre transactions intervenues les 9 juin 2008, 18 juillet 2008, 27 juillet 2010 et 29 mars 2011 ; qu'il suit de là que c'est à un prix unitaire, respectivement 178 fois et 971 fois supérieur à celui des quatre transactions précitées, que la société Made In K a acquis, les 30 mars 2009 et 25 février 2011, les titres Avel Brao ; qu'au surplus, le service, procédant à une valorisation de la société Avel Brao aux 31 mars 2009 et 25 février 2011, a conclu, après prise en compte dans l'actif net du crédit-bail afférent à l'acquisition de l'aéronef, à une valeur nulle à ces deux dates ;

10. Considérant que le requérant soutient que les quatre transactions retenues par le service ne sont pas comparables aux deux cessions litigieuses, en date des 30 mars 2009 et 25 février 2011, dès lors que, contrairement aux trois autres associés ayant cédé leurs parts, il a effectué des apports importants à la société Avel Brao et qu'en vertu d'un " pacte entre actionnaires ", il était convenu que les associés qui n'avaient pas ou peu investi dans la société ne récupéreraient en cas de vente anticipée de leurs parts que leurs " investissements personnels " et que la valeur de leurs parts " serait considérée comme nulle " ; que, cependant, M. B...ne précise pas en quoi un tel pacte, à supposer même son existence établie, pouvait avoir une incidence quelconque sur la valorisation de la société Avel Brao et corrélativement sur la valeur vénale des titres cédés, aux dates des cessions litigieuses ; que la circonstance que M. B...a consenti à la société Avel Brao des apports plus importants que les autres associés n'affecte pas l'actif net de la société et ne peut donc avoir d'incidence sur la valeur des titres Avel Brao ; qu'elle n'autorisait donc pas l'intéressé à céder ses titres à un prix supérieur à celui demandé par les autres associés ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que les quatre transactions retenues par le service ont été effectuées à des dates proches des transactions litigieuses et qu'elles ont porté à chaque fois sur 75 parts, représentant 25 % du capital, donc un nombre de titres comparable à celui des cessions réalisées en 2009 et 2011 par M.B..., qui représentaient respectivement 45 % et 4,66 % du capital de la société ; que si trois des quatre cessions sont intervenues entre associés, une cession a été effectuée au profit d'un tiers ; que, dans ces conditions et dès lors que les quatre transactions constituaient des termes de comparaison pertinents, l'administration pouvait retenir le prix de 50 euros qu'elles prévoyaient ;

11. Considérant, par ailleurs, s'agissant de la cession intervenue le 30 mars 2009, que le requérant se prévaut d'un rapport d'expert, en date du 19 octobre 2012, lequel valorise les 135 titres Avel Brao cédés à un montant de 897 000 euros sur la base d'un " business plan " communiqué par la société ; que, toutefois, ce rapport qui repose entièrement sur des éléments prévisionnels fournis par la société Avel Brao, qui se sont avérés être surestimés en ce qui concerne les chiffres d'affaires et sous-estimés en ce qui concerne les charges, n'est pas de nature à remettre en cause l'évaluation réalisée par le service, à partir des éléments comparatifs évoqués au point précédent et de deux méthodes d'évaluation, fondées sur les comptes de la société Avel Brao, arrêtés au 31 décembre 2008 ;

12. Considérant, enfin, s'agissant de la cession des 14 autres titres Avel Brao le 28 février 2011, que M. B...soutient que, par un avenant du 5 novembre 2010 au contrat de crédit-bail mobilier passé entre les sociétés GCE Bail et Avel Brao pour l'acquisition par celle-ci d'un aéronef, il s'est porté caution à hauteur de 1 937 520 euros, des engagements de la société Avel Brao à l'égard de la société GCE Bail et que cet avenant a eu pour effet de procurer un avantage à la société Made In K, associée à hauteur de 50 % de la société Avel Brao, en réduisant son exposition financière ; que, cependant, cet élément n'est pas suffisant pour établir qu'il en serait résulté, pour la société Avel Brao, un accroissement de son actif net à la date du 28 février 2011 ; qu'à cet égard, le ministre soutient, sans être contredit, que M. B...ne justifie pas avoir exécuté une ordonnance de référé du tribunal de commerce de Paris du 31 mai 2013 le condamnant à payer à la société Natixis Lease, venant aux droits de la société GCE Bail, solidairement avec la société Avel Brao une somme de 2 222 575 euros, à hauteur de son engagement de 1 937 520 euros ;

13. Considérant, dans ces conditions, que le service doit être regardé comme établissant l'existence d'un écart significatif entre, d'une part, le prix des titres Avel Brao convenu par M.B..., cédant, et la société Made In K, cessionnaire, lors des deux cessions litigieuses et, d'autre part, la valeur vénale de ces mêmes titres ;

14. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que le produit des deux cessions de titres en cause est intervenu en compensation de créances que la société Made In K détenait sur M.B..., par ailleurs son gérant et associé unique, à concurrence du solde débiteur du compte courant de ce dernier ouvert dans les livres de ladite société ; que, ce faisant, l'administration établit, du fait des conditions des deux cessions litigieuses et de la communauté d'intérêts avérée entre les parties, l'intention pour la société Made In K, d'octroyer, et, pour M.B..., de recevoir, une libéralité ; que c'est dès lors à bon droit que le service a requalifié l'avantage octroyé à M. B...à raison de l'écart de prix susévoqué comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices à son profit au sens des dispositions précitées de l'article 111, c du code général des impôts ;

En ce qui concerne les minorations de recettes constatées au sein de la société Avel Brao en 2009 et 2010 :

15. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Avel Brao a conclu avec la société Masterjet deux conventions pour l'exploitation de l'avion pris par elle en crédit-bail auprès de la société GCE Bail ; que la société Masterjet exploite l'avion avec son personnel, en transportant soit ses propres clients, soit ceux de la société Avel Brao ; que lorsqu'elle transporte ses propres clients, elle verse à la société Avel Brao une somme de 2 000 euros par heure de vol ; que lorsqu'elle transporte les clients de la société Avel Brao, elle facture à la société Avel Brao les dépenses d'exploitation, notamment de personnel, qu'elle a exposées ; que la société Avel Brao refacture alors ces dépenses à ses clients ;

16. Considérant que la vérification de comptabilité de la société Avel Brao a mis en évidence que la société s'était privée de recettes en 2009 et 2010, en omettant de refacturer les coûts d'exploitation de l'avion à diverses personnes ayant emprunté l'avion ; que le service, constatant ainsi des minorations de recettes pour des montants de 317 699 euros en 2009 et 90 712 euros en 2010, a regardé ces sommes comme des revenus distribués, imposables entre les mains de M. B...sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

17. Considérant que l'administration a déterminé le montant de recettes omises en répertoriant, à partir du carnet de vol de l'avion, le nombre d'heures de vol non refacturées et en multipliant ce chiffre par le forfait horaire de 2 300 euros hors taxes ordinairement pratiqué par la société Avel Brao ; que le requérant soutient que cette méthode est sommaire et viciée dès lors que le vérificateur aurait pris en compte des vols " à vide ", " d'essais " ou destinés à des clients " cibles ", qui, selon lui, ne pouvaient donner lieu à refacturation ; que, cependant et dès lors que l'objet de la société Avel Brao se limite au transport aérien, il n'explicite pas en quoi ces vols étaient insusceptibles d'être refacturés aux clients de cette société ;

18. Considérant que M. B...soutient que dès lors qu'il n'a effectué lui-même qu'un très petit nombre des trajets litigieux, les autres trajets ayant été effectués soit par des bénéficiaires identifiés, soit par des bénéficiaires non identifiés, il ne saurait être regardé comme ayant appréhendé l'intégralité des sommes non refacturées ; que, cependant, il résulte de l'instruction qu'il était le gérant et l'associé majoritaire de la société Avel Brao ; qu'il est constant qu'il assurait la gestion quotidienne de la société et signait les documents destinés aux tiers ; qu'il avait par suite la qualité de maître de l'affaire et doit être regardé comme ayant appréhendé les sommes réintégrées par l'administration dans les résultats de la société Avel Brao, correspondant aux recettes dont elle s'est privée, à l'exception toutefois de celles correspondant à des trajets pour lesquels un bénéficiaire a pu être identifié ; qu'il ressort des pièces du dossier que le seul autre bénéficiaire identifié des vols est M.D..., associé de la société Avel Brao entre 2008 et 2011, qui a effectué 5,25 heures de vol en 2009 ; qu'il y a lieu en conséquence de réduire la base des impositions assignées à M. B...au titre de l'année 2009 d'une somme de 12 075 euros ;

En ce qui concerne les dépenses inscrites en compte d'attente dans les écritures de la société Made In K :

19. Considérant que la vérification de comptabilité de la société Made In K a révélé que celle-ci avait, au titre des exercices clos en 2009 et 2010, comptabilisé diverses dépenses de restaurant, d'hôtel, de night club et de transport aérien, pour des montants respectivement de 88 094 euros et 137 537 euros, au débit d'un compte d'attente ; que le service, constatant que lesdites dépenses avaient été réglées par M.B..., gérant et associé unique de la société Made In K, avec les cartes bancaires de cette société, a considéré qu'elles avaient été engagées au seul bénéfice de l'intéressé et constituaient, par suite, des revenus distribués entre ses mains ; que, dans la réponse aux observations du contribuable, pour tenir compte de ce que, eu égard à la nature de son activité, la société Made In K exposait nécessairement des dépenses de représentation, l'administration a limité les redressements notifiés à ce titre à M. B...à 50 % des dépenses comptabilisées au compte d'attente mais seulement pour celles pour lesquelles des factures avaient été produites ;

20. Considérant que le requérant conteste ces rectifications en faisant valoir qu'au stade de la réclamation contentieuse, la société Made In K a, pour ces dépenses, présenté d'autres factures à l'administration ; que le ministre de l'économie et des finances soutient toutefois sans être contredit et sans qu'aucune des pièces permette de mettre en cause cette affirmation, que les factures jointes par la société Made In K à sa réclamation étaient les mêmes que celles présentées en réponse à la proposition de rectification du 29 juin 2012 ; que ce moyen doit dès lors être écarté ; que, par ailleurs, le requérant renvoie, pour ce redressement, au moyen que la société Made In K a soulevé dans sa requête d'appel enregistrée sous le numéro 16PA00423, tiré de la contradiction qu'il y a, pour le service, d'une part, à admettre que les dépenses personnelles ne constituent des distributions imposables entre les mains de M. B...que pour 50 % seulement de leur montant lorsqu'elles sont comptabilisées au compte d'attente, d'autre part, à rejeter l'intégralité de ces dépenses lorsqu'elles sont comptabilisées dans un compte de charges ; que, cependant, la position favorable prise par le service pour les dépenses du compte d'attente concerne l'associé Le Fur et non la société Made In K ; qu'à supposer même qu'elle soit révélatrice d'une contradiction, M. B...ne saurait s'en plaindre, dès lors qu'elle lui est favorable ;

En ce qui concerne la somme inscrite au compte courant d'associé de M. B...ouvert dans les livres de la société Mad Hotel :

21. Considérant que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus et sont alors imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

22. Considérant que le service a imposé une somme de 150 000 euros créditée le 30 juin 2010 au compte courant d'associé de M. B...dans les écritures de la société Mad Hotel, non déclarée par l'intéressé au titre de l'année 2010 ; que M. B...ne critique pas utilement ce redressement en se bornant à soutenir qu'il " sera démontré " que la somme n'a pu lui être effectivement versée ;

En ce qui concerne les charges non justifiées dans l'intérêt de la société Made In K :

23. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société Made In K au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, l'administration a rejeté la déduction des résultats de la société de certains frais de mission, réception et cadeaux, pour des montants respectivement de 73 784 euros, 173 131 euros et 108 600 euros, au motif que ces charges n'avaient pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise ; que le service a estimé que les sommes en cause présentaient le caractère de revenus distribués au sens du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, au nom de M.B..., gérant et associé unique de la société ; que celui-ci s'est vu en conséquence assigner des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de chacune des années concernées ; que, pour contester ces impositions supplémentaires, M. B...renvoie aux moyens soulevés devant la Cour par la société Made In K dans l'instance n° 16PA00423, l'opposant à l'administration fiscale et joint une copie de la requête déposée par cette société ;

S'agissant des frais de déplacement et de séjour :

24. Considérant, en premier lieu, que la société Made In K SAS a comptabilisé en charge, au titre de l'exercice clos en 2009, la somme de 43 959,34 euros hors taxes correspondant à une facture émise par la société Oc Travel le 16 septembre 2008 à raison de " frais de déplacement et de séjour " en Thaïlande ; que la société Made In K soutient dans l'instance 16PA00423 que ce voyage était destiné à préparer des séances de photos de mode à Phuket en Thaïlande ; que, cependant, si la société a versé au dossier quelques pièces qui tendent à établir que cette séance de photos a bien eu lieu en décembre 2008, en revanche, aucune des pièces produites ne concerne le voyage de préparation, hormis la facture elle-même, laquelle toutefois se borne à mentionner le nom d'un hôtel en Thaïlande et celui de M. B...; que cette facture n'est donc pas suffisante pour établir que la charge a été engagée dans l'intérêt de l'entreprise ; que la circonstance que la dépense a été partiellement réglée par M. B...est sans incidence sur le caractère non déductible de la charge dès lors qu'il est constant que la société Made In K l'a déduite entièrement, pour la détermination de son résultat imposable de l'exercice clos en 2009 ;

25. Considérant, en deuxième lieu, que le service a remis en cause la déduction, pour un montant total de 21 101 euros hors taxes au titre de l'exercice clos en 2009, de prestations hôtelières à Deauville, comptabilisées sous les libellés " Mme C...", " Karen C..." ou " Le Fur " ; que la société Made in K soutient que ces dépenses étaient utiles à son activité dès lors qu'elle cherchait à s'adjoindre les services de Mme C...pour bénéficier de son expérience dans le domaine de la mode et que certains de ses clients et des chefs d'entreprise du secteur de la mode et du luxe résident à Deauville ; que, cependant, ces seules explications générales sont insuffisantes pour établir l'intérêt des dépenses en cause pour l'entreprise, quand bien même un contrat de collaboration a été signé quelques mois plus tard entre la société Made In K et Mme A...C...;

26. Considérant que l'administration n'a pris aucune position formelle à l'égard de la société Made In K, relativement aux dépenses d'hôtel exposées à Deauville, en précisant, dans le paragraphe de la réponse aux observations du contribuable du 20 mars 2013 consacré aux revenus distribués perçus par le dirigeant et unique associé de la société, que celui-ci ne serait imposé, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, qu'à hauteur de 50 % seulement des dépenses personnelles comptabilisées au compte d'attente, pour lesquelles des factures avaient été produites ;

27. Considérant, en troisième lieu, que l'administration a refusé la déduction, au titre de l'exercice clos en 2011, pour un montant total de 123 150 euros hors taxes, de frais de transport aérien ; que si la société Made In K soutient que le vol du 3 juillet 2010, facturé 12 500 euros hors taxes, concernait le propriétaire d'un hôtel à Saint Tropez susceptible de devenir l'un de ses clients, elle n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence de ces futurs liens commerciaux éventuels ; que, s'agissant des autres vols litigieux, qui auraient été destinés à deux photographes chargés de réaliser des photos pour le compte d'une société cliente, l'administration fait observer qu'aucun élément ne permet de confirmer que ces vols ont été effectués par ces deux photographes et les pièces que produit la société Made In K, à savoir trois contrats passés entre elle et l'agent desdits photographes, ne constitue pas cette preuve ; que, par ailleurs, en ce qui concerne le vol Londres-Moscou effectué le 23 mars 2011 par MmeF..., il est constant que la facture n'a pas été produite ;

S'agissant des cadeaux et gratifications :

28. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment (...) 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : (...) e. Les cadeaux de toute nature, à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité ; (...) Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise (...) " ; qu'il résulte des dispositions citées ci-dessus du 5 de l'article 39 du code général des impôts que les dépenses de cadeaux sont en principe déductibles ; qu'il en va cependant autrement si l'entreprise ne justifie pas de l'intérêt direct que présente, pour son activité présente ou future, l'entretien de bonnes relations avec les bénéficiaires des cadeaux ou si l'administration établit que le montant d'une dépense est excessif au regard de l'intérêt que le bénéficiaire du cadeau présente pour l'entreprise ;

29. Considérant que l'administration a refusé la déduction, au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, pour des montants respectivement de 8 524 euros, 111 500 euros et 15 750 euros, de dépenses enregistrées dans un compte " cadeaux à la clientèle " ; que ces cadeaux auraient été destinés à remercier des personnalités ayant participé à des défilés de mode organisés par la société Made In K ; que, cependant, si la société produit diverses pièces, notamment des factures, faisant état de défilés, ou mentionnant le nom de personnalités, aucune de ces pièces ne permet d'identifier les bénéficiaires des cadeaux ;

30. Considérant, par ailleurs, que la société Made In K ne peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative de base référencée 4 C 457 n° 3 et 4 du 30 octobre 1997, qui ne contient aucune règle de dévolution de la charge de la preuve différente de celle résultant de la loi fiscale ;

Sur les majorations pour manquement délibéré :

31. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

32. Considérant que l'administration justifie l'application de la majoration prévue en cas de manquement délibéré aux suppléments d'impôt mis à la charge de M. B...au titre des années 2009 à 2011 restant en litige, par le fait qu'en sa qualité de dirigeant et d'associé unique de la société Made In K, d'une part, de gérant majoritaire de la société Avel Brao d'autre part, M. B...ne pouvait ignorer ni le caractère indûment majoré à son profit du prix des titres Avel Brao, ni les minorations de recettes intervenues au sein de ladite société, ni les imputations de dépenses non engagées dans l'intérêt de la société Made In K, ni les obligations fiscales afférentes à ses comptes courants d'associé ouverts dans les livres des sociétés Made In K et Mad Hotel ; qu'elle justifie également l'application de cette majoration par le fait que l'intéressé a fait l'objet de rectifications similaires, lors de deux contrôles antérieurs, portant sur les années 2003 et 2004 et 2005, 2006 et 2007 ; que, ce faisant, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve des manquements délibérés de l'intéressé ; que la circonstance qu'il ait déclaré les plus-values afférentes aux cessions des titres Avel Brao et acquitté les impositions correspondantes est à cet égard sans incidence, dès lors que d'autres rectifications lui ont été notifiées et que, même après requalification en revenus de capitaux mobiliers des plus-values qu'il a initialement déclarées, les impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 2009, 2010 et 2011 pour l'ensemble des redressements s'élèvent respectivement, en droits, à 719 228 euros, 340 512 euros et 481 391 euros ;

33. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une mesure d'expertise que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris n'a pas réduit, à concurrence d'une somme de 12 075 euros, la base des impositions mises à sa charge au titre de l'année 2009, au titre des distributions effectuées par la société Avel Brao ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

34. Considérant que l'Etat n'étant pas la partie principalement perdante dans la présente instance, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales assignée à M. B...au titre de l'année 2009 est réduite d'une somme de 12 075 euros.

Article 2 : Il est accordé à M. B...une décharge en droits et pénalités correspondant à la réduction de base définie à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement n° 1412095/1-1 du 25 novembre 2015 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2017 à laquelle siégeaient :

M. Jardin, président de chambre,

M. Dalle, président assesseur,

Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er juin 2017.

Le rapporteur, Le président,

D. DALLE C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA00422


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00422
Date de la décision : 01/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : Cabinet Z

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-06-01;16pa00422 ?
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