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31/05/2017 | FRANCE | N°17PA00222

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 31 mai 2017, 17PA00222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...E...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 14 avril 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour " salarié ", l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1604609/3 du 15 décembre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mém

oire enregistrés les 18 janvier et 1er février 2017,

MmeE..., représentée par MeA..., demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...E...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 14 avril 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour " salarié ", l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1604609/3 du 15 décembre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 janvier et 1er février 2017,

MmeE..., représentée par MeA..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 2016 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté devant ce tribunal ;

3°) d'annuler la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé

le 28 mai 2016 contre ledit arrêté ;

4°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

5°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail dans le délai de quinze jours, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme E...soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ; il est insuffisamment motivé ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle mentionne à tort qu'elle est arrivée en France le 1er décembre 2006 ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation particulière ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français est illégale car fondée sur une décision de refus de séjour entachée d'illégalité ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre l'arrêté

du 14 avril 2016 du préfet du Val-de-Marne est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit de mémoire.

Par lettre du 4 mai 2017, la Cour a informé les parties, en application de l'article

R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions, nouvelles en appel, dirigées contre la décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 28 mai 2016 contre l'arrêté du 14 avril 2016 du préfet du Val-de-Marne.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jimenez,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant MmeE....

1. Considérant que MmeE..., ressortissante brésilienne née en 1980, a demandé le renouvellement du titre de séjour en qualité de salarié qui lui a été délivré pour la période allant de novembre 2013 à avril 2015 ; que, par un arrêté du 14 avril 2016, le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée ; que par la présente requête, Mme E...relève appel du jugement

n° 1604609/3 du 15 décembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 avril 2016 ;

Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 28 mai 2016 contre l'arrêté du 14 avril 2016 du préfet du Val-de-Marne :

2. Considérant que les conclusions dirigées contre cette décision sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que ce dernier a répondu en son point 2 au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige ; qu'il n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués par la requérante ; que, dans ces conditions, le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les moyens communs aux différentes décisions préfectorales :

4. Considérant que M.C..., directeur de l'immigration et de l'intégration à la préfecture du Val-de-Marne, qui a signé l'arrêté attaqué, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet du Val-de-Marne en date du 5 février 2013, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs spécial le 6 février 2013, notamment à l'effet de signer " les arrêtés portant décision de refus de séjour / les obligations de quitter le territoire mentionnées aux articles L. 511-1 à L. 511-3 du CESEDA " ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté ;

5. Considérant que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé nonobstant la circonstance qu'il mentionne à tort que Mme E...est entrée en France le

1er décembre 2006 alors qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions d'une copie d'un passeport délivré le 19 mai 2006, qu'elle est arrivée sur le sol national le 1er juin 2006 ; que cette erreur matérielle est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

6. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet du Val-de-Marne a procédé à un examen individuel de la situation de Mme E...; qu'il suit de là que le moyen tiré d'un défaut d'examen particulier de la demande doit être écarté ;

En ce qui concerne le refus de renouvellement du titre de séjour portant la mention " salarié " :

7. Considérant que selon les termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail ou une autorisation de travail (...) / La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / (...) / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-5 de ce code : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2 / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-34 du même code : " Le renouvellement d'une des autorisations de travail mentionnées aux articles R. 5221-32 et R. 5221-33 peut être refusé en cas de non-respect des termes de l'autorisation par l'étranger ou en cas de non respect par l'employeur : / (...) / 2° Des conditions d'emploi, de rémunération ou de logement fixées par cette autorisation " ;

8. Considérant qu'il résulte des termes de l'arrêté attaqué que le préfet du Val-de-Marne a refusé de renouveler le titre de séjour portant la mention " salarié " accordé à Mme E...le 3 avril 2014 au motif que la DIRECCTE s'était prononcée défavorablement sur la demande de renouvellement de l'autorisation de travail de l'intéressée compte tenu du non respect des conditions de rémunération fixées par l'autorisation de travail délivrée le 18 février 2014 ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E...a été autorisée à travailler au sein de la société " CEP 20 " en tant que responsable de salle sur la base d'un contrat à durée indéterminée prévoyant une rémunération mensuelle brute, hors avantages en nature, de 1 854 euros pour une durée hebdomadaire de travail de 39 heures ; que la requérante établit qu'elle a perçu un salaire mensuel brut moyen d'environ 1 800 euros en 2015 à la fois en tant qu'employée polyvalente au sein de la société " La pâtisserie des rêves " pour un salaire mensuel brut de 1 600 euros et en tant qu'enseignante de langue et de civilisation brésiliennes à l'école d'ingénieur " AgroParisTech " pour un revenu annuel brut de

2 209,14 euros ; que, toutefois, si l'écart de salaire est très faible, l'intéressée se prévaut, pour parvenir à un salaire de 1 800 euros, de deux emplois non visés par l'autorisation de travail accordée initialement le 18 février 2014, et par suite, n'a pas respecté les termes de ladite autorisation,; que, par ailleurs, la requérante ne peut utilement se prévaloir d'une promesse d'embauche, en date du 27 mai 2016, par laquelle la société " CEP 20 " s'engage à la recruter en tant que serveuse pour un salaire mensuel de 1 940,39 euros, établie postérieurement à l'arrêté en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant que le préfet du Val-de-Marne, saisi d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", s'est également prononcé sur l'application de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de sorte que la requérante peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si MmeE..., qui a au demeurant déclaré être célibataire lors de sa demande de renouvellement de titre de séjour, fait valoir qu'elle vit en concubinage avec M.B..., ressortissant portugais, depuis le 1er février 2010, les éléments versés au dossier, au nombre desquels figurent des attestations de proches ainsi que des billets d'avion indiquant que la requérante et M. B...ont fait ensemble des allers-retours entre la France et le Portugal en août 2012, en juillet 2013, en avril, août et octobre 2014, en mars et août 2015 ainsi qu'en février 2016, ne sauraient toutefois suffire à établir la réalité d'une vie commune depuis 2010 ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des propres déclarations de MmeE..., qu'elle vit avec son compagnon depuis mars 2016 ; qu'ainsi, la communauté de vie entre les intéressés était récente à la date de l'arrêté attaqué ; que la circonstance qu'une soeur, deux nièces et une cousine de la requérante vivent régulièrement en France ne lui confère pas un droit au séjour sur le territoire français ; qu'en outre, Mme E...n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine qu'elle a quitté à l'âge de 26 ans et où résident ses parents, deux soeurs ainsi qu'un frère ; que, par suite, alors même que l'intéressée vit en France depuis le 1er juin 2006 où elle a exercé plusieurs activités salariées, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet du Val-de-Marne n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de la requérante ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant que, dès lors que la décision de refus de titre de séjour n'est pas illégale, la requérante n'est pas fondée à exciper d'une telle illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;

12. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 10. ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine.(...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-de-Marne, en refusant d'accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours à la requérante, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que les conclusions de sa requête d'appel doivent, dès lors, être rejetées, y compris celles à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt est notifié à Mme D...E...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique le 31 mai 2017.

Le rapporteur,

J. JIMENEZLe président

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA00222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00222
Date de la décision : 31/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Julia JIMENEZ
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : BODA

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-05-31;17pa00222 ?
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