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24/05/2017 | FRANCE | N°16PA02820

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 24 mai 2017, 16PA02820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2016 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné et enfin a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1611011/8 du 18 juillet 2016, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa

demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enreg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2016 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné et enfin a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1611011/8 du 18 juillet 2016, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 août 2016 et

23 avril 2017, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1611011/8 du 18 juillet 2016 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2016 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet de police, en se considérant en situation de compétence liée, a méconnu l'étendue de sa compétence ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa vie privée et familiale ;

En ce qui concerne la décision lui refusant un délai de départ volontaire :

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier ;

- elle n'a pas respecté la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet de police, en se considérant en situation de compétence liée, a méconnu l'étendue de sa compétence ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle n'a pas respecté la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision de placement en centre de rétention administrative :

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 janvier 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens du requérant n'est fondé.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 9 décembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Amat a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A..., ressortissant guinéen né le 19 septembre 1992, est entré en France le 6 février 2012 selon ses déclarations ; qu'à la suite d'un contrôle d'identité, le préfet de police a, par un arrêté du 15 juillet 2016, obligé M. A... à quitter le territoire français sans délai, fixé le pays de destination et ordonné son placement en rétention administrative ; que M. A... relève appel du jugement du 18 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions litigieuses :

2. Considérant que par arrêté n° 2016-00100 du 17 février 2016, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 26 février 2016, le préfet de police a donné délégation à MmeD..., attachée d'administration de l'État, pour signer notamment les obligations de quitter le territoire français sans délai fixant le pays de destination et les arrêtés de placement en rétention administrative ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire des quatre décisions litigieuses doit être écarté ;

Sur les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté mentionne qu'il est fondé sur l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que M. A... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français en respectant l'article L. 211-1 du même code ; que l'arrêté mentionne ainsi les motifs de droit et de fait pour lesquels a été prise la décision d'obliger M. A... à quitter le territoire français ; que la décision litigieuse est suffisamment motivée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, en refusant de faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, le préfet de police se serait cru en situation de compétence liée ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que si M. A... soutient qu'il devrait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il ne peut ainsi faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire, il ne verse aux débats aucun élément au soutien de l'allégation selon laquelle il suivrait à la date de la décision attaquée un traitement en France pour l'hépatite B dont il est affecté ni qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

6. Considérant, en dernier lieu, que M. A..., qui soutient résider en France depuis 2012, ne justifie pas disposer de liens familiaux ou privés sur le territoire français ni y exercer d'activité professionnelle ; qu'en revanche, il est marié à une compatriote résidant dans leur pays d'origine et se borne à alléguer que son état de santé nécessite une prise en charge médicale ; que, dans ces conditions, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

Sur les moyens dirigés contre la décision portant refus d'un délai de départ volontaire :

7. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée vise les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle fait état du risque que le requérant se soustraie à la mesure prise à son encontre dès lors qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes à défaut d'avoir déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée doit donc être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que le préfet de police a procédé à un examen particulier de la situation de M. A... avant de refuser de lui octroyer un délai de départ volontaire ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions portant éloignement du territoire français, ainsi que les décisions qui les accompagnent, telle la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées, ou les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, qui s'y sont substitués à compter du 1er janvier 2016, ne sauraient être utilement invoqués à l'encontre de la décision attaquée portant refus d'un délai de départ volontaire ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, en refusant d'octroyer un délai de départ volontaire à M. A..., le préfet de police se serait cru en situation de compétence liée ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

11. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...). Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente (...) " ;

12. Considérant que si M. A... soutient que la décision litigieuse est fondée sur les dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public, il ressort des termes mêmes de cette décision qu'elle est fondée sur les dispositions du 3° du même article ; que si M. A... allègue qu'il dispose d'un logement stable chez son oncle, présentant ainsi des garanties de représentation suffisantes, il ne l'établit pas ; qu'en revanche, il ressort des pièces du dossier que M. A... a déclaré lors de son interpellation et de son placement en centre de rétention administrative être sans domicile fixe ou être hébergé par des amis, sans produire d'adresse précise ; qu'ainsi il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait commis une erreur d'appréciation en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;

Sur les moyens dirigés contre la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions portant éloignement du territoire français, ainsi que les décisions qui les accompagnent, telle la décision fixant le pays de destination ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées, ou les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration qui s'y sont substitués à compter du 1er janvier 2016, ne sauraient être utilement invoqués à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi ;

14. Considérant, en second lieu, que si M. A... soutient que la décision litigieuse méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'apporte pas de précisions suffisantes permettant d'apprécier le bien-fondé d'un tel moyen ; que ce dernier doit, par suite, être écarté ;

Sur les moyens dirigés contre la décision de placement en centre de rétention administrative :

15. Considérant, en premier lieu, que la décision litigieuse vise l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que M. A... ne peut être assigné à résidence sur le fondement de l'article L. 561-2 du même code, dès lors qu'il ne présente pas de garanties de représentation effective puisqu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente ; qu'ainsi, cette décision, prise au terme d'un examen de la situation de M. A... et d'une recherche de solution alternative à son placement en rétention administrative, comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est, dès lors, suffisamment motivée ;

16. Considérant, en second lieu, que si M. A... soutient que la décision litigieuse méconnait les dispositions de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'apporte pas de précisions suffisantes permettant d'apprécier le bien-fondé d'un tel moyen ; que ce dernier doit, par suite, être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'ainsi sa requête d'appel, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 27 avril 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 mai 2017.

Le rapporteur,

N. AMATLa présidente,

S. PELLISSIERLe greffier,

A. LOUNIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02820


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02820
Date de la décision : 24/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : OUEDRAOGO

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-05-24;16pa02820 ?
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