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19/05/2017 | FRANCE | N°15PA04523

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 19 mai 2017, 15PA04523


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 6 juin 2014 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1408261 du 1er octobre 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2015, Mme A.

.., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1408261 du 1er o...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 6 juin 2014 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1408261 du 1er octobre 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2015, Mme A..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1408261 du 1er octobre 2015 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 6 juin 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 4 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Heers, président-rapporteur,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public.

1. Considérant que Mme D...A..., ressortissante sénégalaise née le 31 août 1976, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 7° et

L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 6 juin 2014, le préfet du Val-de-Marne a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel l'intéressée pourrait être reconduite d'office à la frontière à l'expiration de ce délai ; que Mme A...demande l'annulation du jugement du 1er octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la décision de refus de titre :

2. Considérant, en premier lieu, que le refus de titre de séjour opposé à Mme A...le 6 juin 2014 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le préfet vise les article 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les articles L. 313-11 7°, L. 313-14 et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet évoque le fait que Mme A...ne peut justifier de sa présence en France depuis 2012, qu'elle s'est mariée en Espagne en 2007 avec un ressortissant gambien avec qui elle a eu trois enfants, qu'elle détient un titre de séjour valable du 26 janvier 2012 au 27 septembre 2017 au titre du regroupement familial, que deux de ses enfants sont scolarisés, qu'elle ne démontre pas être isolée dans son pays, que l'emploi d'insertion sociale d'aide à domicile qu'elle a occupé d'avril à juillet 2013 ne constitue pas un motif exceptionnel au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entée des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée sur le fondement du troisième alinéa de cet article, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que si elle produit des attestations accompagnées des cartes d'identité française de personnes présentées comme étant sa mère, sa tante, son frère, sa soeur et ses nièces, elle ne démontre pas son lien de parenté avec ces personnes dès lors que le livret de famille dont elle produit une copie ne fait pas apparaître qu'elle-même est membre de la famille formée par M. C...B...et Mme F...A... ; que, par ailleurs, Mme A...ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que pour prouver son intégration en France, Mme A...se borne à affirmer qu'elle parle couramment français et à produire des fiches de paie pour les mois de mars à décembre 2013 ainsi que pour l'année 2014 ; qu'ainsi la situation de Mme A...ne répond pas à des considérations humanitaires et ne relève pas d'un motif exceptionnel au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entée des étrangers et du droit d'asile ; que, par ailleurs, il n'est pas contesté que Mme A...disposait d'un titre de séjour valable du 26 janvier 2012 au 27 septembre 2016 en Espagne ; qu'il suit de là que le préfet n'a pas méconnu l'article précité ; qu'en outre aucun élément ne permet d'estimer que sa situation personnelle n'aurait pas fait l'objet de la part de l'administration d'un examen particulier ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que Mme A...produit les cartes d'identité françaises de personnes présentées comme étant sa mère, sa tante, son frère, sa soeur, ses nièces, accompagnées d'attestations faisant état des relations qu'elles entretiennent avec ses enfants ; que sa fille aînée était scolarisée à la date de la décision attaquée ; que, toutefois, elle est séparée du père de ses enfants et ne fait état d'aucune circonstance s'opposant à ce qu'elle reconstitue sa cellule familiale avec ses trois enfants au Sénégal où elle a vécu jusqu'à

l'âge de 30 ans, ou en Espagne où elle était légalement admissible ; que, par suite, la décision de refus du 6 juin 2014 n'a pas porté au droit de Mme A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, cette décision n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de MmeA... ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

7. Considérant que la décision contestée n'a pas pour effet de séparer Mariam, Fatima et Aïcha de leur mère ; que Mme A...est séparée du père des enfants, resté en Espagne à la date de la décision attaquée ; que si les enfants sont scolarisés en France, cette circonstance n'est pas de nature à établir qu'il est de leur intérêt supérieur de rester sur le territoire français ; que, dans ces conditions, eu égard au jeune âge des enfants de l'intéressée et au caractère récent de son séjour en France, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il l'a été dit au point 5, Mme A...n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il en va de même concernant le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la situation personnelle de la requérante ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 5 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mai 2017.

Le président-rapporteur,

M. HEERSL'assesseur le plus ancien,

G. MOSSERLe greffier,

F. DUBUYLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA04523


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04523
Date de la décision : 19/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Mireille HEERS
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : REYNOLDS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-05-19;15pa04523 ?
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