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02/05/2017 | FRANCE | N°15PA03676

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 02 mai 2017, 15PA03676


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme totale de 629 984,26 euros en réparation des préjudices résultant de sa contamination par le virus de l'hépatite C causée par des transfusions sanguines.

Par un jugement n° 1402156 du 31 juillet 2015, le Tribunal administratif de Melun a condamné l'ONIAM à verser à Mme C... la somme t

otale de 310 246 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme totale de 629 984,26 euros en réparation des préjudices résultant de sa contamination par le virus de l'hépatite C causée par des transfusions sanguines.

Par un jugement n° 1402156 du 31 juillet 2015, le Tribunal administratif de Melun a condamné l'ONIAM à verser à Mme C... la somme totale de 310 246 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 septembre 2015, l'ONIAM, représenté par MeB..., demande à la Cour de réformer le jugement n° 1402156 du 31 juillet 2015 du Tribunal administratif de Melun en tant que, par ce jugement, celui-ci a mis à sa charge une somme de 158 700 euros en réparation de la perte de droits à retraite subie par Mme C....

Il soutient que :

- le jugement attaqué ne motive pas suffisamment le montant alloué au titre de la perte de droits à retraite en ne précisant pas ses bases de calcul ;

- l'évaluation de ce poste de préjudice est erronée et l'attestation de la caisse de retraite de Mme C... simulant sa retraite en partant de l'hypothèse que celle-ci aurait travaillé jusqu'à l'âge de 70 ans ne peut être prise en compte, dès lors que l'âge légal de départ à la retraite est de 65 ans.

Par des mémoires en défense et en appel incident, enregistrés les 16 novembre 2015 et 24 novembre 2016, appuyés de pièces complémentaires enregistrées au greffe de la Cour les 25 janvier 2017, 6 mars 2017 et 10 avril 2017, Mme C..., représentée par MeA..., conclut :

1°) au rejet de la requête de l'ONIAM ;

2°) à la réformation du jugement n° 1402156 du 31 juillet 2015 du Tribunal administratif de Melun en tant que, par ce jugement, celui-ci a limité à la somme de 158 700 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné l'ONIAM en réparation de la perte de droits à retraite.

3°) à ce que le montant de l'indemnité due au titre de la perte de droits à retraite soit portée à la somme de 206 637,86 euros ;

4°) et à ce que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge de l'ONIAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par l'ONIAM ne sont pas fondés ;

- sa contamination par le virus de l'hépatite C l'a contrainte à réduire puis à renoncer à son activité professionnelle alors qu'elle souhaitait prendre sa retraite à 70 ans ; que le montant de ses cotisations pour sa retraite s'en est ainsi trouvé réduit ;

- le montant actualisé de ses pertes de droits à retraite s'élève à 206 637,86 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique,

- le code de la sécurité sociale,

- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bernard,

- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C...a découvert en 2006 qu'elle était porteuse du virus de l'hépatite C. Estimant que cette contamination était imputable aux transfusions sanguines réalisées au Centre hospitalier intercommunal de Créteil les 5 et 6 juillet 1985, elle a sollicité son indemnisation par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM). Par la présente requête, l'ONIAM demande la réformation du jugement du 31 juillet 2015 du Tribunal administratif de Melun en tant que, par ce jugement, celui-ci a mis à sa charge une somme de 158 700 euros en réparation de la perte de droits à retraite subie par Mme C.... Par la voie de l'appel incident, Mme C... demande que cette indemnité soit portée à la somme de 206 637,86 euros.

Sur la responsabilité :

2. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'ailleurs non contestés par les parties, de juger que l'ONIAM doit assurer la réparation des préjudices résultant de la contamination de Mme C... sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 1142-22 du code de la santé publique en application des règles de preuve posées par l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 susvisée.

Sur l'évaluation de la perte de droits à retraite :

3. L'âge auquel l'intéressé aurait pris sa retraite est, en principe, celui auquel il aurait pu prétendre à une pension à taux plein, sauf si l'instruction fait ressortir qu'il l'aurait prise à un âge différent.

4. Il résulte de l'instruction que Mme C..., née le 7 juin 1948, exerçait la profession d'infirmière libérale. Elle pouvait donc bénéficier d'une pension de retraite à taux plein à l'âge de 65 ans à compter du 1er juillet 2013. Mme C...a d'ailleurs pris sa retraite à cette date. Elle fait valoir qu'en l'absence de contamination par le virus de l'hépatite C, elle aurait pris sa retraite à 70 ans, dès lors qu'elle a eu sa dernière fille à l'âge de 43 ans et qu'elle doit subvenir aux besoins de celle-ci jusqu'à la fin de ses études supérieures. Toutefois, elle ne précise pas le coût des études de sa fille, qui se destine à la profession d'avocate. Il ressort par ailleurs des avis d'impôt sur le revenu de Mme C... qu'en 2013, sa fille a perçu une pension alimentaire de 12 000 euros par an ainsi qu'un salaire de 10 800 euros par an. Ces revenus ont légèrement augmenté les années suivantes. Dans ces conditions, Mme C... ne justifie pas de la nécessité où elle se serait trouvée de retarder la date de son départ à la retraite pour subvenir aux besoins de sa plus jeune fille. Il ne résulte donc pas de l'instruction que Mme C... aurait pris sa retraite à l'âge de 70 ans.

5. Par suite, le montant de la perte éventuelle de droits à retraite de Mme C... correspond à la différence entre le montant de la pension qu'elle perçoit effectivement depuis le 1er juillet 2013 et le montant qu'elle aurait perçu à compter de cette même date si elle n'avait pas réduit son activité en raison de sa contamination par le virus de l'hépatite C. L'organisme gestionnaire de la retraite de Mme C..., la Carpimko, a effectué une évaluation du montant de sa pension en partant de l'hypothèse que Mme C... aurait réalisé des bénéfices non commerciaux de 71 325 euros par an entre le 1er janvier 2007 et le 30 juin 2013, somme correspondant aux bénéfices les plus élevés de sa carrière. Or, il ressort de cette attestation, produite pour la première fois en appel, que Mme C... aurait eu une pension de retraite d'un montant identique à celui qu'elle perçoit effectivement. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que Mme C... a subi une perte de droits à retraite en conséquence de sa contamination par le virus de l'hépatite C.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen soulevé par l'ONIAM tiré de ce que le jugement attaqué n'aurait pas suffisamment motivé le calcul de la somme en litige, que l'ONIAM est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun l'a condamné à verser une somme de 158 700 euros au titre d'une perte de droits à retraite subie par Mme C.... Par suite, il y a lieu de ramener à 151 546 euros le montant de l'indemnité due par l'ONIAM à Mme C... à raison de sa contamination par le virus de l'hépatite C et de réformer en ce sens le jugement attaqué. En revanche, les conclusions d'appel incident présentées par Mme C... doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ONIAM, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 310 246 euros que l'ONIAM a été condamné à verser à Mme C... par le jugement n° 1402156 du 31 juillet 2015 du Tribunal administratif de Melun est ramenée à 151 546 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions présentées en appel par Mme C...sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) et à Mme D...C....

Délibéré après l'audience du 18 avril 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2017.

Le rapporteur,

A. BERNARDLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA03676


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03676
Date de la décision : 02/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Absence ou existence du préjudice - Absence.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Évaluation du préjudice - Préjudice matériel - Perte de revenus - Perte de revenus subie par la victime d'un accident.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Aurélie BERNARD
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : PAPIN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-05-02;15pa03676 ?
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