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23/03/2017 | FRANCE | N°16PA00666

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 23 mars 2017, 16PA00666


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Favorite a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer d'une part, la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2009 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, ainsi que des intérêts de retard correspondants et d'autre part, le report en arrière du déficit constaté à la clôture de l'exercice 2011 sur le bénéfice

de l'exercice clos en 2009.

Par un jugement n° 1404875 du 15 décembre 2015, le Tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Favorite a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer d'une part, la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2009 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, ainsi que des intérêts de retard correspondants et d'autre part, le report en arrière du déficit constaté à la clôture de l'exercice 2011 sur le bénéfice de l'exercice clos en 2009.

Par un jugement n° 1404875 du 15 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire, enregistrée le 15 février 2016, et un mémoire ampliatif enregistré le 14 mars 2016, la société Favorite, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404875 du 15 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer d'une part, la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et en 2011 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités y afférents et d'autre part, le report en arrière du déficit constaté à la clôture de l'exercice 2011 sur le bénéfice de l'exercice clos en 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure irrégulière et n'est pas suffisamment motivé ; il ne vise pas l'ensemble des règles de droit applicables au litige et ne répond pas à tous ses moyens ;

- les années 2006 et 2007 ont fait l'objet de vérifications de comptabilité successives en méconnaissance des dispositions de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales ;

- en ce qui concerne l'imposition forfaitaire annuelle, elle a fait l'objet d'une double voire d'une triple imposition ;

- l'abandon de créance d'un montant de 186 644 euros auquel elle a procédé au bénéfice de son client, la SA JDH Textiles, ne procède pas d'une gestion anormale ;

- la provision pour dépréciation qu'elle a constatée à hauteur de la somme de 113 114 euros, a été régulièrement constituée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2016, le ministre des finances et des comptes public conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions de la société Favorite relative à l'imposition forfaitaire annuelle de l'année 2008 sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par la société ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les impositions assignées à la société Favorite n'ont été majorées d'aucune pénalité et que les résultats réalisés par la société au titre de son exercice clos en 2011 n'ont donné lieu à l'établissement d'aucune imposition. Par suite, les conclusions de la société tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés auxquelles elle aurait été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011 et des pénalités se rapportant aux impositions mises à sa charge au titre des exercices clos en 2009 et 2011, et de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009, sont sans objet et doivent être rejetées comme irrecevables.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le livre des procédures fiscales et le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Coiffet,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

1. Considérant que la société Favorite, qui exerçait l'activité de location d'un ensemble immobilier à usage d'entrepôts et de bureaux, a fait l'objet de trois vérifications de comptabilité successives, dont la dernière a porté sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2009, étendue jusqu'au 30 juin 2010 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à l'issue de ce contrôle, le service a assujetti la société à des cotisations d'impôt sur les sociétés et des droits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de son exercice clos en 2009 et de la période correspondante, assortis d'intérêts de retard ; qu'elle fait appel du jugement en date du 15 décembre 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant d'une part, à la décharge de ces impositions et intérêts de retard et d'autre part, au report en arrière du déficit qu'elle avait constaté à la clôture de l'exercice 2011 sur le bénéfice de l'exercice clos en 2009 ; qu'elle conteste également devant la Cour la cotisation d'impôt sur les sociétés qui lui aurait été assignée au titre de l'exercice clos en 2011 ainsi que les pénalités se rapportant aux impositions de cet exercice et de l'exercice clos en 2009 ;

Sur la recevabilité des conclusions de la requête :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les impositions assignées à la société Favorite n'ont été majorées d'aucune pénalité et que les résultats réalisés par la société au titre de son exercice clos en 2011, n'ont donné lieu à l'établissement d'aucune imposition ; que, par suite, les conclusions de la requérante tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle aurait été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011 et des pénalités se rapportant aux impositions mises à sa charge au titre des exercices 2009 et 2011, et de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009, sont sans objet et doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

4. Considérant d'une part, que si la société fait valoir que le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure irrégulière, ses allégations ne sont pas assorties des précisions nécessaires permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé ; que d'autre part, il ressort des mentions mêmes de ce jugement, qui vise le code général des impôts et le livre des procédures fiscales, que les premiers juges ont répondu de façon précise à l'ensemble des moyens soulevés devant eux par la société Favorite et qu'ils ont suffisamment motivé leur jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales : " Lorsque la vérification de comptabilité ou l'examen de comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou d'une taxe ou d'un groupe d'impôts ou de taxes, est achevé, l'administration ne peut procéder à une vérification de comptabilité ou à un examen de comptabilité de ces mêmes écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période. Toutefois, il est fait exception à cette règle : 1° Lorsque la vérification ou l'examen de comptabilité a été limité à des opérations déterminées ; 2° Dans les cas prévus à l'article L. 176 en matière de taxes sur le chiffre d'affaires (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'exercice clos en 2009 au titre duquel l'administration a notifié à la société Favorite les rehaussements en litige, n'a fait l'objet que d'une seule vérification de comptabilité ; que la circonstance alléguée que les exercices clos en 2006 et 2007 auraient été vérifiés à deux reprises est sans incidence sur la régularité de la procédure d'établissement de la cotisation d'impôt sur les sociétés et des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société au titre de l'exercice clos en 2009 ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

7. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;

8. Considérant qu'aux termes de la proposition de rectification du 29 juillet 2011, adressée à la société Favorite, le vérificateur a réintégré au résultat de la société de l'exercice clos en 2009 une somme de 186 644,35 euros correspondant au montant de l'abandon de créance que celle-ci avait accordé à la société JDH Textiles, qui détient 45% de son capital, au motif qu'elle ne justifiait pas d'un intérêt propre à consentir un tel avantage, qui ne procédait, dès lors, pas d'une gestion commerciale normale ; que, pour contester cette réintégration, la requérante soutient que l'abandon de créance en litige avait pour objet de concourir à la sauvegarde de la société JDH Textiles, qui connaissait des difficultés financières, et de préserver, par voie de conséquence, ses propres intérêts en limitant le montant de ses pertes ; qu'elle explique qu'elle détenait une créance sur la société JDH Textiles d'un montant de 561 560 euros et était, en même temps, redevable à cette dernière d'une somme de 338 333,69 euros et, qu'en cas de liquidation judiciaire de son associée, elle aurait dû acquitter sa dette sans toutefois pouvoir obtenir le règlement de sa créance ; qu'elle se prévaut, à l'appui de ses allégations, de la convention, intitulée convention " de compensation et de règlement financier ", qui a été signée le 2 janvier 2009 aux termes de laquelle les associées de la société Favorite ont décidé d'une part, d'opérer une compensation entre la dette et la créance de chacune des sociétés en cause, et d'autre part, que la société Favorite renoncerait au surplus de sa créance ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction et, en particulier, des stipulations de la convention précitée, que l'avantage argué par la requérante procède davantage de la compensation prévue par la convention que de l'abandon de sa créance ; que cette convention, qui a été conclue dans le but de régler, au moins partiellement, les difficultés financières de la société JDH Textiles, qui avait demandé, compte tenu d'un risque réel de placement en liquidation judiciaire, l'annulation de sa dette, impose à la société Favorite d'assurer à son associée son soutien financier sans toutefois prévoir une seule contrepartie pour l'intéressée aux avantages ainsi concédés ; que le ministre relève également, sans être contredit, qu'au 31 décembre 2008, la SA JDH Textiles présentait une situation financière nette positive d'un montant de 8 755 442 euros alors que la situation financière de la SCI Favorite était négative à hauteur de 248 063 euros ; que, par ailleurs, il n'est pas contesté que durant l'exercice en litige, la société JDH Textiles n'entretenait pas de relations commerciales avec la société Favorite, qui auraient pu justifier l'abandon de créance remis en cause par le service ; que la requérante ne justifiant ainsi de l'existence d'aucune contrepartie, c'est à bon droit que le service a considéré que cet abandon de créance revêtait le caractère d'un acte anormal de gestion et qu'il a réintégré le montant de la créance abandonnée au résultat de l'exercice clos en 2009 ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 38 du code général des impôts, le bénéfice imposable est le bénéfice net et qu'en vertu du 1 de l'article 39 du même code, le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges ; qu'il appartient au contribuable de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

10. Considérant que la société requérante a comptabilisé, au titre de l'exercice clos en 2009, une provision pour dépréciation d'un montant de 125 682,04 euros correspondant à la totalité des avances consenties à son associée, la JDH Textiles, motivée par l'ouverture, le 4 mai 2009, d'une procédure de redressement judicaire à l'encontre de cette société ; qu'elle justifie le montant de cette provision par la nature de l'activité de cette société, son volume d'affaires, le montant de son passif et les possibilités qui existaient pour elle de redresser sa situation financière ; que, toutefois, la société Favorite n'établit pas qu'elle aurait, compte tenu de la situation financière de son associée, perdu toute chance de récupérer ne fusse qu'une fraction des sommes qu'elle lui avait avancées ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que les aides consenties à la société Casthex, qui détient également 45% du capital de la requérante, et qui a également fait l'objet d'un placement en redressement judicaire durant l'exercice 2009, ont été provisionnées à hauteur de 10% et non de 100% ; que la requérante ne justifiant ainsi pas du montant de la provision qu'elle a inscrite en comptabilité, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le service a réintégré à ses résultats de l'exercice clos en 2009, 90% du montant de cette provision, soit la somme de 113 114 euros ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 220 quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa du 1 de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'exercice précédent (...) " ;

12. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la société Favorite n'est pas fondée à demander l'imputation du déficit qu'elle a constaté au titre de l'exercice clos en 2011 sur les bénéfices qu'elle a réalisés au cours de l'exercice 2009, qui n'est pas celui qui précède directement l'exercice clos en 2011 ;

13. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que, si la société Favorite fait valoir qu'elle a été, à tort, assujettie à deux reprises, au titre de l'année 2008, à l'imposition forfaitaire annuelle, prévue par l'article 223 septies du code général des impôts, cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé des impositions en litige, qui se rapportent à l'exercice clos en 2009 ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'économie et des finances, que la société Favorite n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Favorite est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Favorite et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur général des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (Pôle fiscal parisien 1).

Délibéré après l'audience du 9 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- M. Platillero, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 23 mars 2017.

Le rapporteur,

V. COIFFETLe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA00666


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00666
Date de la décision : 23/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : RICARD

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-23;16pa00666 ?
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