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23/03/2017 | FRANCE | N°16PA00244

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 23 mars 2017, 16PA00244


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des intérêts de retard et des pénalités y afférents.

Par un jugement n° 1431158 du 18 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2016, et des mémoires en répli

que enregistrés le 16 janvier 2017 et le 22 février 2017, M. et MmeC..., représentés par MeD..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des intérêts de retard et des pénalités y afférents.

Par un jugement n° 1431158 du 18 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2016, et des mémoires en réplique enregistrés le 16 janvier 2017 et le 22 février 2017, M. et MmeC..., représentés par MeD..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1431158 du 18 novembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des intérêts de retard et des pénalités y afférents ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme C...soutiennent que :

- le tribunal a omis de statuer sur les moyens tirés de la reconnaissance de ce que les prestations ont été fournis par un opérateur basé à l'étranger et de l'absence d'obligation d'immatriculation et de base fixe en France ;

- ils auraient dû faire l'objet d'une imposition séparée, dès lors qu'ils sont mariés sous le régime de la séparation de biens et que l'époux résidait au Liban pour les besoins de ses activités professionnelles ;

- le domicile fiscal des époux et le lieu d'exercice de l'activité professionnelle devaient être déterminés distinctement ; le cabinet d'architecte est situé au Liban ; l'administration n'établit pas l'existence en France d'une base fixe ou d'une installation professionnelle permanente ; des prestations ponctuelles ont été fournies à une société de droit français à partir du cabinet au Liban ; les autorités fiscales libanaises ont accepté sans redressement les déclarations de revenus qui comportaient les données chiffrées de l'activité ; l'imposition en France des honoraires versés n'est pas liée à l'effectivité de leur taxation au Liban ; le cabinet d'architecte au Liban disposait des moyens matériels et humains nécessaires à l'activité ; l'époux était immatriculé auprès des services fiscaux libanais en tant qu'architecte ; l'administration reconnaît implicitement que les prestations ont été fournies par un opérateur basé à l'étranger ;

- ils sont fondés à opposer l'instruction administrative 5 B-24-77 n° 67 du 24 juillet 1977 et le bulletin officiel des impôts IR-DOMIC-10-20-20-50 n° 40 du 12 septembre 2012 définissant l'installation professionnelle en France ;

- ils n'ont pas été informés de la demande d'assistance administrative internationale auprès des autorités fiscales libanaises et des résultats de cette procédure avant la mise en recouvrement ; le service ne leur a pas communiqué la teneur de la réponse des autorités fiscales libanaises ;

- les opérations de vérification de comptabilité ont commencé avant l'envoi de l'avis de vérification ;

- dès lors que l'activité d'architecte était exercée au Liban, il n'y avait aucune obligation d'immatriculation auprès d'un centre de formalités des entreprises ; le bénéfice non commercial ne pouvait ainsi être évalué d'office ; en l'absence d'obligation de se faire connaître, la taxation d'office ne pouvait être appliquée sans mise en demeure préalable ;

- le droit de reprise était prescrit à la date d'établissement des propositions de rectification ;

- à supposer que les prestations aient été fournies en France, leur imposition relève de l'article 22 de la convention franco-libanaise ; seule la retenue à la source prévue à l'article 182 B du code général des impôts pouvait être appliquée ;

- les pénalités pour activité occultes ne pouvaient être appliquées.

Par des mémoires en défense enregistrés le 18 avril 2016 et le 7 février 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens invoqués par M. et Mme C...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention du 24 juillet 1962 entre la France et le Liban en matière d'impôts sur les revenus et d'impôts sur les successions ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Platillero,

- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour M. et MmeC....

1. Considérant que M.C..., qui exerce l'activité d'architecte, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle une proposition de rectification lui a été adressée le 12 décembre 2012, relative à ses bénéfices non commerciaux des années 2007 à 2009 ; que les conséquences de ces rectifications en matière d'impôt sur le revenu ont été notifiées à

M. et Mme C... par une proposition de rectification du 13 décembre 2012 ; qu'au terme de la procédure, M. et Mme C...ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2007, 2008 et 2009, assorties des intérêts de retard et des majorations pour activité occulte ; que M. et Mme C...font appel du jugement du 18 novembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

3. Considérant que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments de M. et MmeC..., a répondu aux moyens dont il était saisi, en précisant notamment les motifs sur lesquels il s'est fondé pour juger que les époux étaient soumis à l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus en France, que l'existence d'une activité professionnelle au Liban n'était pas établie et que l'époux était tenu de faire connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ; que M. et Mme C...ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé ;

Sur l'imposition commune des époux :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 dudit code : " (...) 4. Les époux font l'objet d'impositions distinctes : a. Lorsqu'ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit (...) " ;

5. Considérant que, s'il est constant que M. et Mme C...se sont mariés en 2007 sous le régime de la séparation de biens, les requérants n'apportent aucun élément à l'appui de leurs allégations selon lesquelles l'époux aurait effectivement résidé au Liban au cours des années en litige ; qu'en effet, s'ils soutiennent que celui-ci y disposait des moyens matériels et humains pour y exercer une activité professionnelle d'architecte, ils n'ont produit aucun contrat de bail à usage d'habitation ni aucun titre de propriété ou tout autre document attestant d'une résidence effective dans ce pays, qui ne résulte pas de la seule inscription de l'époux auprès du consulat français, de la possession d'un véhicule et de la production de factures de téléphone pour l'essentiel non traduites et au titre desquelles le ministre fait valoir sans être contredit qu'elles ne mentionnent aucune adresse au Liban ; qu'il ne résulte ainsi pas de l'instruction que les époux ne vivaient pas sous le même toit au cours des années 2007 à 2009 ; que, dans ces conditions, à défaut de tout élément matériel de nature à justifier que M. C...vivait effectivement au Liban au cours de ces années, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'ils devaient faire l'objet d'impositions distinctes, en application des dispositions précitées du 4 de l'article 6 du code général des impôts ;

Sur le domicile fiscal :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française " ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, quelle que soit la durée de ces séjours ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années en litige,

M. et Mme C... disposaient d'une habitation au 5 rue de Penthièvre, dans le 8ème arrondissement de Paris, lieu auquel ils ont déposé leur déclaration commune à l'impôt sur le revenu ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne résulte pas de l'instruction qu'ils ne vivaient pas sous le même toit ; qu'étaient compris dans ces déclarations MmeC..., qui était salariée de la société française Sterlin International, dont elle était également gérante, et les enfants mineurs des époux, l'ensemble des membres de la famille résidant dès lors à Paris ; que M. C...était par ailleurs titulaire de deux comptes bancaires en France ; qu'il résulte ainsi de l'instruction que M. C...habitait normalement et avait le centre de ses intérêts familiaux au cours des années 2007 à 2009 en France, les séjours qu'il aurait effectués au Liban en raison des nécessités de sa profession étant sans incidence ; que, dans ces conditions, M. et Mme C...avaient leur foyer en France au sens des dispositions précitées du a) du 1 de l'article 4 B du code général des impôts ; qu'ils y étaient dès lors passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble des revenus du foyer, en application des dispositions précitées de l'article 4 A du même code ; qu'à cet égard, dès lors que M. C...avait son foyer en France, les requérants ne peuvent utilement soutenir qu'il n'aurait pas exercé d'activité professionnelle dans ce pays ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la convention franco-libanaise susvisée :

" 1. Au sens de la présente convention, on entend par " résident d'un Etat contractant " toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue. 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1 ci-dessus, une personne physique est considérée comme résidente de chacun des Etats contractants, cette personne est réputée résidente de celui des deux Etats où se trouve le centre de ses intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel ses relations personnelles et professionnelles sont les plus étroites (...) " ;

9. Considérant qu'à supposer même que M. C...ait été regardé par les autorités fiscales libanaises comme assujetti à l'impôt en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue au sens des stipulations précitées du 1 de l'article 2 de la convention franco-libanaise, ses relations personnelles les plus étroites étaient situées en France au cours des années en litige, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7 ;

10. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte de l'instruction que l'administration a constaté que M. C...a facturé au cours des années en litige des prestations d'architecture d'intérieur et de décoration d'hôtels particuliers à la société Sterlin International, dont le siège est en France et dont il était l'associé majoritaire ; que ces factures, si elles mentionnaient une adresse au Liban et ont fait l'objet d'un paiement en direction de ce pays, concernaient des chantiers essentiellement situés en France, à l'exception d'un chantier situé au Royaume-Uni ; qu'en outre, il résulte de la réponse des autorités fiscales libanaises du 11 décembre 2013 à une demande d'assistance administrative internationale que M. C...n'a pas déclaré de revenus dans ses déclarations des années 2007 à 2009, ce qui n'est pas contradictoire avec les attestations du 24 mars 2012 et du 19 novembre 2013 établies par les mêmes autorités, qui se bornent à mentionner l'absence de rectifications ; que si M. et Mme C...ont produit des documents supposés correspondre à des déclarations mentionnant des revenus déposées au Liban, ils n'apportent pas la preuve que ces documents constituent des déclarations effectivement déposées, en l'absence de tout élément attestant de leur réception par les autorités libanaises ;

11. Considérant que si M. et Mme C...ont produit, à l'appui de leurs allégations selon lesquelles l'activité d'architecte de l'époux aurait été exercée depuis le Liban, le contrat de bail d'un bureau à Beyrouth, ainsi que d'un emplacement de stationnement, et les justificatifs de paiement de taxes locales, ce bail a été signé par un tiers représentant M. C...et aucune autre adresse personnelle nécessaire à un séjour au Liban, ou même tout autre justificatif de présence de l'intéressé dans ce pays au cours des années en litige, n'a été produit ; que les documents présentés comme des factures de téléphone et d'abonnement à Internet, qui ne sont toutefois pas traduits à l'exception d'un entre eux et dont l'objet n'est dès lors pas avéré, de même que divers autres documents, pour l'essentiel non traduits, ne permettent pas d'établir un lien avec une activité d'architecte exercée au Liban ; que, par ailleurs, la liste des salariés produite par les requérants n'est pas cohérente avec la déclaration annuelle de sécurité sociale libanaise produite au titre de la seule année 2008, aussi bien en ce qui concerne l'identification des salariés invoqués que les dates de leur activité ; qu'enfin, les quelques plans de chantier produits ne permettent pas de déterminer le lieu auquel ces plans ont été conçus et supervisés par M.C..., qui se borne à soutenir sans apporter aucun élément à l'appui de ses allégations que le suivi des chantiers en France aurait été assuré par une société tierce ; que, dans ces conditions, en se bornant à soutenir, sur le fondement des éléments précédemment décrits, que M. C...disposait de moyens matériels et humains nécessaires à une activité d'architecte au Liban, susceptibles de caractériser une base fixe et une installation professionnelle permanente, les requérants n'apportent aucun élément matériel de nature à attester de l'exercice effectif d'une telle activité dans ce pays ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, alors que le ministre apporte des éléments concordants de nature à établir que M. C...a effectivement exercé son activité d'architecte en France au cours des années en litige, les requérants n'apportent aucun élément de nature à justifier de l'accomplissement effectif d'actes liés à cette activité au Liban, que seul M. C... est susceptible d'apporter, l'immatriculation de l'intéressé dans ce pays en tant qu'architecte en 2007 n'attestant pas d'un travail effectif ; que, dans ces conditions, il résulte de l'instruction que M. C...a exercé son activité professionnelle d'architecte en France en 2007, 2008 et 2009 ;

13. Considérant, à cet égard, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la seule circonstance que l'administration n'a pas remis en cause les modalités de liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée opérée par la société Sterlin International au titre des prestations en litige, ne saurait valoir reconnaissance par l'administration que ces prestations auraient été réalisées depuis le Liban ; que, par ailleurs, M. et Mme C...ne sont en tout état de cause pas fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction administrative référencée 5 B-24-77 n° 67 du 24 juillet 1977 et du bulletin officiel des impôts IR-DOMIC-10-20-20-50 n° 40 du 12 septembre 2012, dès lors que ces interprétations administratives de la loi fiscale sont relatives à la retenue à la source applicable aux sommes allouées à des bénéficiaires qui n'ont pas d'installation professionnelle en France à partir de laquelle ils exercent leur activité, alors qu'en l'espèce, l'exercice d'une activité professionnelle au Liban ne résulte pas de l'instruction ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre des intérêts vitaux de M. C..., c'est-à-dire le lieu avec lequel ses relations personnelles et professionnelles étaient les plus étroites, était situé en France au titre des années en litige ; qu'ainsi, les stipulations précitées de la convention franco-libanaise ne font pas obstacle à ce que M. et Mme C...soient passibles de l'impôt sur le revenu en France à raison de l'ensemble des revenus du foyer ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

15. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification (...) " ;

16. Considérant qu'une vérification de comptabilité consiste à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par un contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont le service prend alors connaissance et dont il peut remettre en cause l'exactitude ; qu'il résulte en l'espèce de l'instruction que, si le service vérificateur a eu connaissance des factures et des paiements concernant M. C...à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Sterlin International, il s'est alors borné à constater l'existence de ces documents, sans effectuer d'actes relevant d'une vérification de la comptabilité de M.C..., et a d'ailleurs procédé à un droit de communication auprès de cette société après l'envoi d'un avis de vérification à l'intéressé ; que la seule circonstance que le service a eu connaissance des factures émises par M. C...au cours de la vérification de comptabilité de la société Sterlin International ne constituait pas le début de la vérification de comptabilité de l'activité d'architecte de l'intéressé ; que le moyen tiré de ce que les opérations de vérification de la comptabilité de M. C... ont débuté avant l'envoi de l'avis de vérification du 29 novembre 2011 doit ainsi être écarté ;

17. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : (...) 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° " ; qu'aux termes de l'article L. 68 du même livre, dans sa rédaction alors en vigueur : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : (...) 3° Si le contribuable ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce (...) " ;

18. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il résulte de l'instruction que M. C... a exercé son activité professionnelle d'architecte en France au cours des années en litige et non au Liban ; que, dans ces conditions, il était tenu de se faire connaître d'un centre de formalités des entreprises et de déclarer ses bénéfices non commerciaux en France, les circonstances que l'activité a été déclarée au Liban, et non auprès d'un centre de formalités des entreprises tel que prévu par l'annexe II au code général des impôts, et qu'ont été déposées dans ce pays des déclarations de revenus, étant sans incidence sur les obligations de l'intéressé en France ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que les bénéfices non commerciaux de M. C...ne pouvaient être régulièrement évalués d'office, sans mise en demeure préalable de régulariser sa situation, doit être écarté ;

19. Considérant, à cet égard, que M. et Mme C...ne sont, en tout état de cause, pas fondés à se prévaloir d'une note publiée sur le site Internet " Servicepublic.fr " qui définit les obligations d'immatriculation des entreprises étrangères sans établissement en France, dès lors que l'activité d'architecte de M. C...a été exercée en France ;

20. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, d'informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition, afin de permettre à l'intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ;

21. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réponse des autorités fiscales libanaises du 11 décembre 2013 a été envoyée par les services diplomatiques libanais le 18 décembre 2013 et reçue par le consulat général de France à Beyrouth le 2 janvier 2014, puis adressée le 3 janvier 2014 par ce service diplomatique au service vérificateur, qui l'a reçue le 20 janvier 2014 ; qu'en se bornant à constater que certains de ces courriers mentionnent les coordonnées du service vérificateur, M. et Mme C...n'apportent aucun élément de preuve à l'appui de leurs allégations selon lesquelles la réponse des autorités fiscales libanaises aurait été également transmise à ce service sans transiter par les services diplomatiques avant la mise en recouvrement, le 31 décembre 2013 ; que, dans ces conditions, la réponse des autorités fiscales libanaises du 11 décembre 2013 ayant été reçue postérieurement à la mise en recouvrement, M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que cette réponse aurait fondé les impositions et, par suite, que le service aurait dû les en informer pour leur permettre d'en demander la communication avant la mise en recouvrement ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L.76 B du livre des procédures fiscales doit, dès lors, être écarté ;

22. Considérant, par ailleurs, que si M. et Mme C...soutiennent que la demande d'assistance administrative auprès des autorités fiscales libanaises n'a pas été portée à leur connaissance avant la mise en recouvrement, il ne résulte pas des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales que le service devrait informer les contribuables de la mise en oeuvre d'une procédure d'échange de renseignements ;

Sur le bien-fondé des impositions :

23. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite (...) " ;

24. Considérant que, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. C...aurait dû faire connaître son activité d'architecte exercée en France auprès d'un centre de formalités des entreprises et souscrire les déclarations de bénéfices non commerciaux afférentes à cette activité ; que cette activité est ainsi réputée occulte, au sens des dispositions précitées de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que le droit de reprise de l'administration était prescrit à la date des propositions de rectification ;

25. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 182 B du code général des impôts : " I. Donnent lieu à l'application d'une retenue à la source lorsqu'ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, qui n'ont pas dans ce pays d'installation professionnelle permanente : a. Les sommes versées en rémunération d'une activité déployée en France dans l'exercice de l'une des professions mentionnées à l'article 92 (...) " ; qu'aux termes de l'article 22 de la convention franco-libanaise susvisée : " 1. Les revenus des professions libérales ou d'autres activités indépendantes de caractère analogue sont imposables dans l'Etat ou s'exerce l'activité personnelle génératrice de ces revenus, sous réserve de l'application éventuelle des dispositions du paragraphe 3 de l'article 26 ci-après. 2. Sont considérées comme professions libérales, au sens du présent article, notamment l'activité scientifique, artistique, littéraire, enseignante ou pédagogique ainsi que celle des médecins, avocats, architectes ou ingénieurs " ;

26. Considérant que, dès lors qu'il résulte de l'instruction que l'activité professionnelle d'architecte de M.C..., résident français, a été effectivement exercée en France au cours des années en litige, M. et Mme C...ne sont en tout état de cause pas fondés à soutenir que seule une retenue à la source pouvait être appliquée, en application des dispositions précitées de l'article 182 B du code général des impôts et des stipulations de l'article 22 de la convention franco-libanaise ;

Sur les pénalités :

27. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration (...) entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte (...) " ;

28. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts que, dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, l'administration doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle si le contribuable n'est pas lui même en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ces obligations déclaratives ; que, compte tenu de ce qui précède, et dès lors que M. et Mme C...n'allèguent pas qu'ils auraient commis une erreur justifiant que M. C...ne se soit pas acquitté de ses obligations déclaratives, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle d'architecte, justifiant l'application de la majoration de 80 % en cas de découverte d'une activité occulte ;

29. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

30. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

31. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme C...demandent au titre des frais qu'ils ont exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Ile-de-France (Division juridique Ouest).

Délibéré après l'audience du 9 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 mars 2017.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLe président,

S.-L. FORMERY Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA00244


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00244
Date de la décision : 23/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Lieu d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : GARITEY

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-23;16pa00244 ?
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