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13/03/2017 | FRANCE | N°16PA00934

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 13 mars 2017, 16PA00934


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2014 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1509788/6-3 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Co

ur :

Par une requête, enregistrée le 11 mars 2016, M.B..., représenté par Me Reynolds, dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2014 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1509788/6-3 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mars 2016, M.B..., représenté par Me Reynolds, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1509788/6-3 du 17 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 18 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'un vice de procédure pour défaut de saisine de la commission du titre de séjour dès lors qu'il réside en France depuis plus de dix ans ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît, en outre, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 19 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lapouzade a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant malien, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 18 décembre 2014, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'issue de ce délai. M. B...fait appel du jugement du 17 décembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".

3. Il ressort des pièces que la présence en France de M. B...sur le territoire français ne fait désormais l'objet d'une contestation par le préfet de police que pour les années 2004 à 2009. Pour les années 2004, 2006, 2007, 2008 et 2009, M. B...produit pour chacune de ces années, des documents de nature bancaire, médicale, commerciale, et fiscale (déclarations fiscales et avis d'impositions) de nature à faire regarder sa présence habituelle en France comme établie. S'agissant de l'année 2005, les premiers juges ont considéré que les documents produits, un avis d'imposition sur le revenu et une attestation d'abonnement à une carte de transport sur laquelle ne figure aucune adresse, étaient insuffisants pour établir que M. B...résidait habituellement en France au cours de cette année. Toutefois, l'avis d'imposition sur les revenus au titre de l'année 2005 fait apparaître des revenus d'un montant de 8 000 euros au titre de cette année, soit des revenus significatifs qui, compte tenu de la profession exercée par M.B..., ouvrier démolisseur en bâtiments, impliquent sa présence sur le territoire français pour une longue durée au cours de l'année 2005. Ainsi, nonobstant la circonstance que M. B...ne produise pour cette année 2005 qu'un seul document ayant une réelle force probante, ce document doit être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme établissant la présence habituelle de l'intéressé sur le territoire français au titre de cette année.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B...doit être regardé comme établissant sa présence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans. Ainsi, faute pour le préfet de police d'avoir saisi la commission mentionnée à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande d'annulation du refus de titre de séjour. En conséquence, ledit jugement doit être annulé, ainsi que la décision de refus de titre de séjour et, par suite, les décisions portant obligation de quitter le territoire, fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt implique seulement qu'il soit procédé au réexamen de la situation administrative de M.B.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification qui lui sera faite du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 19 février 2016. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Reynolds, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au bénéfice de Me Reynolds.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris en date du 17 décembre 2015, ensemble l'arrêté susvisé du préfet de police en date du 18 décembre 2014, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation administrative de M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification qui lui sera faite du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 500 euros à Me Reynolds, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au préfet de police de Paris et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 27 février 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 mars 2017.

Le président rapporteur,

J. LAPOUZADELe président assesseur,

I. LUBEN

Le greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA00934


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00934
Date de la décision : 13/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jacques LAPOUZADE
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : REYNOLDS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-13;16pa00934 ?
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