Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société SAP Développement et M. B...A...ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision en date du 12 août 2014 par laquelle le préfet de la région
Ile-de-France, préfet de Paris, a confirmé sa décision en date du 21 mars 2014 leur faisant obligation de verser au Trésor public, solidairement avec son dirigeant, la somme totale de 277 899 euros.
Par un jugement n° 1422502/3-3 du 27 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2015, la société SAP Développement et M. B... A..., ès qualité de président du conseil d'administration de la société SAP Développement, représentés par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1422502/3-3 du 27 octobre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) à titre principal, d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision en date du 12 août 2014 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a confirmé sa décision en date du 21 mars 2014 leur faisant obligation de verser au Trésor public, solidairement, la somme totale de 277 899 euros ;
3°) à titre subsidiaire, de réformer la décision en date du 12 août 2014 du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, et de ramener à de plus justes proportions le montant de la sanction qui leur a été infligée ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société SAP Développement et à M. A..., pris ensemble, de la somme de 7 320,40 euros, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société SAP Développement et à M. A..., pris ensemble, de la somme de 3 600 euros, au titre des frais irrépétibles exposés en appel, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité en ce qu'il n'a pas été signé, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- c'est à tort que le jugement attaqué a écarté le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision litigieuse du 12 août 2014 ; en effet, cette décision ne précise pas en quoi seraient remplies les conditions posées par l'article L. 6362-7-2 du code du travail relative à la solidarité du dirigeant ;
- c'est à tort que le jugement attaqué a écarté le moyen tiré du vice de procédure qui entachait la procédure contradictoire ;
- c'est à tort que le jugement attaqué a écarté le moyen tiré de ce que la décision attaquée avait méconnu la portée des pièces justificatives produites à l'administration par la société requérante ;
- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit en ce qu'il n'a pas tiré les conséquences du silence gardé par le défendeur sur la requête et qu'il a fait reposer sur les requérants la charge d'une preuve impossible à administrer ;
- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit en ce qu'il a considéré que la solidarité du dirigeant de la société Pro Enfance avait été retenue à bon droit par la décision attaquée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2016, les ministres des affaires sociales et de la santé, du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports concluent au rejet de la requête.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par la société SAP Développement et M. A...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail,
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Luben,
- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur la régularité du jugement attaqué :
1. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".
2. Il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué qu'elle est revêtue des trois signatures requises par les dispositions réglementaires précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions manque en fait.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, d'une part, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la décision attaquée, qui a fait application des seules dispositions, qu'elle cite au demeurant, de l'article L. 6362-7 du code du travail, serait insuffisamment motivée en ce qu'elle ne préciserait pas de quelle manière les conditions posées par l'article L. 6362-7-2 du code du travail serait remplies en l'espèce, la décision contestée n'ayant pas fait application de cet article. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée vise ou cite les textes applicables et comporte les éléments de fait qui en constituent le fondement, tant en ce qui concerne les motifs de rejet des dépenses que l'obligation faite au dirigeant de la société SAP Développement de verser solidairement la somme de 277 899 euros mise à sa charge, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision litigieuse ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 6362-10 du code du travail : " Les décisions de rejet de dépenses et de versement mentionnées au présent livre prises par l'autorité administrative ne peuvent intervenir, après la notification des résultats du contrôle, que si une procédure contradictoire a été respectée ".
5. Il ressort des motifs de la décision attaquée " que la société FTD International a été nommée administrateur de la société Yoopala Services le 03/04/2012 avec pour représentant M. A... B...; que, dans son courrier de recours, la société Pro Enfance déclare que l'information selon laquelle M. A...est représentant de la société FTD International n'a pas fait l'objet d'un débat contradictoire ; que cependant cette information n'est qu'accessoire et ne constitue pas un motif sur lequel se fonde la décision du 21 mars 2014 ; " ; ainsi, la société ayant établi les factures litigieuses (société FTD International) a été nommée administrateur de l'unique client (la société Yoopala Services) de la société requérante (Pro-Enfance, devenue SAP Développement par une décision de son assemblée générale du 14 février 2014) et ces fonctions ont été confiées au dirigeant de cette dernière société, ce qui n'est pas contesté. Comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, la mention que la société FTD International avait été nommée administrateur de la société Yoopala Services le 3 avril 2012 avec pour représentant M. B... A... ne constituait qu'un élément de contexte et n'était pas elle-même à l'origine du rejet des dépenses en cause, lequel est exclusivement fondé sur l'absence de justification suffisante de ces dépenses. Dès lors, la circonstance que cet élément n'a pas fait l'objet d'un débat contradictoire en cours de contrôle n'est pas de nature à vicier la procédure préalable à l'intervention de la décision attaquée.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 6362-5 du code du travail : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 : 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités./ A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10 ".
7. D'une part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le jugement attaqué n'a pas remis en cause la correspondance entre les factures rejetées par l'administration (soit trois factures émises par la société FTD International concernant le développement d'une plateforme logicielle de formation e-learning pour baby-sitters pour une somme de 73 500 euros et douze factures mensuelles émises en 2011 par la société FTD International concernant des prestations de mise à disposition de trois personnes pour effectuer le suivi des formations pour la société Yoopala Services, unique client de la société requérante, et les honoraires du responsable chargé du développement de l'activité de formation de la société Yoopala Services, pour une somme de 204 399 euros) et les preuves versées au dossier, mais a estimé au fond que ces pièces, produites en première instance, ne permettaient pas d'établir l'existence et la valeur de la contrepartie retirée de ces dépenses par la société SAP Développement.
8. D'autre part, ni les pièces versées au dossier en première instance, constituées par des documents relatifs à la plateforme interactive de formation à distance des baby-sitters (les contenus par des impressions d'écrans et les éléments de programmation informatique) et des tableaux indiquant l'heure de connexion et le nom des baby-sitters ayant bénéficié de la formation à distance par le biais de cette plateforme du 3 janvier 2011 au 30 décembre 2012, ni les pièces produites en appel, constituées par le contrat de prestation de service conclu entre la société Yoopala S.A. et la société FTD International le 1er mai 2010 et l'avenant à ce contrat du 1er juillet 2011, qui indiquent en termes généraux l'objet de la prestation de service en cause (" Yoopala Services a une problématique de recrutement de personnel qualifié dans la petite enfance. Afin de répondre à cette problématique, Yoopala souhaite développer une activité de formation au métier de baby-sitter ou de garde d'enfant à domicile. Pour ce faire, elle désire mettre en place une plate-forme logicielle sur Internet permettant d'effectuer des formations en e-learning ou en présentiel avec des outils interactifs. Toutefois, elle ne dispose pas en son sein des compétences techniques suffisantes pour atteindre cet objectif. C'est pourquoi Yoopala a souhaité bénéficier de l'expertise de FTD en la matière ") et le coût horaire dû au titre de la mise à disposition du personnel pour le suivi des formations des salariés et au titre des honoraires du responsable en charge du développement de l'activité de formation, ne permettent pas d'établir la valeur réelle de la contrepartie retirée de ces dépenses par la société SAP Développement, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges.
9. En quatrième lieu, d'une part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, aucune mise en demeure n'a été adressée par les premiers juges à l'administration défenderesse, de sorte qu'ils ne peuvent se prévaloir d'un acquiescement aux faits au sens de l'article R. 612-6 du code de justice administrative. D'autre part, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 6362-5 du code du travail que la charge de la preuve de la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue comme de la justification du rattachement et du bien-fondé de ces dépenses à ces activités incombe aux organismes prestataires d'actions de formation professionnelle continue. La société requérante, qui était tenue, aux termes de l'article L. 6362-5 du code du travail, " à l'égard des agents de contrôle (...) de présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ", ne saurait se prévaloir de sa propre négligence, en ce qu'elle n'a pas produit à l'administration, lors du contrôle puis de la procédure contradictoire préalable à l'édiction de la décision attaquée, alors même que ces pièces lui avaient été demandées, comme il ressort des motifs de la décision du 21 mars 2014, le contrat de prestation de service conclu entre la société Yoopala S.A. et la société FTD International le 1er mai 2010 et l'avenant à ce contrat du 1er juillet 2011, qui n'ont au demeurant été produits qu'en appel, pour soutenir que le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France ne pouvait prendre la décision litigieuse sans avoir au préalable examiné ces pièces.
10. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 6362-7 du code du travail : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 versent au Trésor public, solidairement avec leurs dirigeants de fait ou de droit, une somme égale au montant des dépenses ayant fait l'objet d'une décision de rejet en application de l'article L. 6362-10 " ; aux termes de l'article L. 6362-7-2 du même code : " Tout employeur ou prestataire de formation qui établit ou utilise intentionnellement des documents de nature à éluder l'une de ses obligations en matière de formation professionnelle ou à obtenir indûment le versement d'une aide, le paiement ou la prise en charge de tout ou partie du prix des prestations de formation professionnelle est tenu, par décision de l'autorité administrative, solidairement avec ses dirigeants de fait ou de droit, de verser au Trésor public une somme égale aux montants imputés à tort sur l'obligation en matière de formation ou indûment reçus. ".
11. D'une part, les dispositions précitées de l'article L. 6362-7 du code du travail prévoient que les organismes prestataires d'actions de formation, tels que la société requérante, sont tenus solidairement avec leurs dirigeants de fait ou de droit à verser au Trésor public la somme correspondant aux dépenses n'ayant pas été acceptées. Il ressort des pièces du dossier que M. A...est le gérant de la société requérante ; dès lors, en déclarant ce dernier codébiteur des sommes mises à la charge de la société SAP Développement, l'autorité administrative n'a entaché sa décision d'aucune erreur de droit, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges. D'autre part, les requérants ne peuvent utilement soutenir que les conditions prévues pour que les dispositions précitées de l'article L. 6362-7-2 du code du travail puissent être appliquées n'étaient pas réunies en l'espèce dès lors que la décision litigieuse n'a pas fait application de ces dispositions, mais de celles de l'article L. 6362-7 du code du travail.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la société SAP Développement et M. A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 27 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
Sur l'application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative :
13. Aux termes des dispositions de l'article précité : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". En l'espèce, la requête de la société SAP Développement et de M. A...présente un caractère abusif. Il y a lieu de condamner la société SAP Développement et M. A...à payer une amende de 3 000 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société SAP Développement et de M. A...est rejetée.
Article 2 : La société SAP Développement et M. A...sont condamnés à payer une amende de 3 000 euros.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société SAP Développement, à M. B...A...et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et au directeur départemental des finances publiques de Paris.
Copie en sera adressée au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, à la ministre des affaires sociales et de la santé et à la ministre de la famille, de l'enfance et des droits des femmes.
Délibéré après l'audience du 13 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Bernard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 février 2017.
Le rapporteur,
I. LUBENLe président,
J. LAPOUZADELe greffier,
Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04696