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16/02/2017 | FRANCE | N°16PA01245-16PA01836

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 16 février 2017, 16PA01245-16PA01836


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondante, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1500771 en date du 9 février 2016, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge, en droits et en pénalités, des cotisatio

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondante, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1500771 en date du 9 février 2016, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge, en droits et en pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de l'imposition, en tant que revenu d'origine indéterminée, de la somme de 250 000 euros inscrite le 27 juillet 2009 au crédit du compte bancaire dont M. C...est titulaire à la Société générale, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 8 avril 2016, sous le n° 16PA01245, et un mémoire enregistré le 18 janvier 2017, M.C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500771 du 9 février 2016 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009, et des pénalités correspondantes, procédant de la taxation, en tant que revenu d'origine indéterminée, de la somme d'un montant de 250 000 euros, inscrite le 21 septembre 2009 au crédit du compte bancaire dont il est titulaire à la Société générale, que l'administration a regardée comme non justifiée ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu à l'ensemble des moyens qu'il a soulevés ;

- l'incapacité financière de M. E...n'est pas établie ;

- la procédure de taxation d'office est irrégulière dès lors qu'il a fourni au service des explications et des justificatifs précis sur l'origine et la nature du crédit d'un montant de 250 000 euros du 21 septembre 2009 ;

- il a apporté la preuve qui lui incombe de l'origine et de la nature de ce crédit, qui correspond à un prêt que lui a accordé M. E...et qui n'est, dès lors, pas imposable ; dans un jugement du 23 juin 2015, le Tribunal correctionnel, saisi par la direction générale des finances publiques, a jugé que la réalité des prêts consentis par M. E...et Mme D...n'était pas contestée, que des contrats avaient été rédigés, que les prêteurs avaient déclaré les sommes correspondantes dans leur propre patrimoine et que sa situation pouvait expliquer qu'il sollicitât l'aide de ses amis, et l'a relaxé du chef de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt ; les constatations de ce jugement ont été confirmées par un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 14 décembre 2016 ;

- l'application des pénalités pour manquement délibéré n'est pas justifiée dès lors qu'il a considéré qu'il n'avait disposé d'aucun revenu imposable, les sommes versées sur son compte bancaire constituant des avances.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 octobre 2016 et le 26 janvier 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

II. Par un recours, enregistré le 6 juin 2016, sous le n° 16PA01836, et un mémoire enregistré le 21 novembre 2016, le ministre de l'économie et des finances demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 1500771 du 9 février 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de décider que M. C...sera rétabli au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes au titre de l'année 2009, à concurrence des sommes déchargées à tort par les premiers juges.

Il soutient que :

- son recours est recevable ;

- l'administration pouvait recourir à la procédure de taxation d'office dès lors que les réponses apportées par M. C...à la demande de renseignements et de justifications que lui a adressée le service n'étaient pas assorties de justificatifs donnant date certaine au prêt dont il se prévalait et que la cause juridique de l'opération demeurait ainsi injustifiée ;

- le tribunal ne pouvait pas accueillir la demande de M. C...en faisant peser la charge de la preuve sur l'administration dès lors que le crédit en litige avait été taxé d'office à la suite de la mise en oeuvre régulière d'une procédure de justification ;

- M. C...n'a pas apporté la preuve qui lui incombait que la somme de 250 000 euros lui avait été versée en exécution d'un contrat de prêt ;

- à titre subsidiaire, il demande le maintien des impositions en litige dans la catégorie des bénéfices non commerciaux sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts ; le juge peut procéder à cette substitution de base légale, qui ne prive le contribuable d'aucune des garanties attachées à la nouvelle base légale, dès lors que le service a suivi une procédure de redressement contradictoire ;

- s'agissant des autres moyens soulevés par M. C...devant les premiers juges, il se réfère à ses observations devant le tribunal.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 novembre 2016 et le 18 janvier 2017, M. B... C..., représenté par Me Ullmann, conclut au rejet du recours du ministre et, en outre, à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le recours du ministre de l'économie et des finances n'est pas signé ;

- les moyens soulevés par le ministre de l'économie et des finances ne sont pas fondés et que le ministre ne démontre pas que le crédit taxé par le service serait constitutif d'un revenu se rattachant à une activité professionnelle ;

- en vertu de l'instruction référencée BOI-CF-DG-10-20120912, §1, les actes et déclarations déposés par les contribuables bénéficient d'une présomption d'exactitude et de sincérité.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le livre des procédures fiscales et le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Coiffet,

- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,

- et les observations de Me Ullmann, avocat de M.C....

1. Considérant que M.C..., qui exerce une activité d'intermédiaire en immobilier, a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, à la suite duquel l'administration a procédé, par une proposition de rectification du 30 octobre 2012, à des rehaussements dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, au titre de l'année 2009 et a imposé d'office, en tant que revenus d'origine indéterminée, sur le fondement des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, deux sommes, d'un montant, chacune, de 250 000 euros, portées les 27 juillet et 21 septembre 2009 au crédit du compte bancaire dont l'intéressé était titulaire à la Société générale, et demeurées injustifiées ; que M. C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a, en conséquence de ces rectifications, été assujetti au titre de l'année 2009, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités correspondants ; que, par un jugement du 9 février 2016, le Tribunal administratif a accordé la décharge sollicitée en ce qui concerne les impositions et pénalités procédant de la taxation du crédit enregistré sur le compte de M. C...le 27 juillet 2009 et a rejeté le surplus de sa demande ; que le ministre fait appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé cette décharge ; que M. C...conteste ce même jugement en tant seulement qu'il a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre les impositions qui lui sont réclamées à raison du crédit bancaire inexpliqué daté du 21 septembre 2009 ;

2. Considérant que les requêtes n°s 16PA01245 et 16PA01836, présentées respectivement pour M. C... et par le ministre des finances et des comptes publics, sont relatives aux impositions d'un même contribuable et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

3. Considérant qu'il appartient au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que les sommes concernées, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ; que, dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ;

4. Considérant qu'alors que, dans la déclaration de revenus qu'il avait souscrite le 15 décembre 2011, au titre de l'année 2009, M. C...avait déclaré n'avoir perçu aucun revenu, le service a relevé, lors de l'examen de la situation fiscale personnelle du contribuable, que deux sommes, d'un montant chacune de 250 000 euros, avaient été enregistrées les 27 juillet et 21 septembre 2009 au crédit du compte bancaire ouvert à son nom à la Société générale ; que M. C... soutient que ces deux crédits bancaires correspondent à des prêts que lui ont consentis des tiers, Mme D...et M.E... ; qu'il produit, en ce qui concerne le crédit du 27 juillet 2009, une attestation rédigée par l'intéressée le 6 juillet 2012, par laquelle celle-ci certifie avoir déclaré la somme en litige dans son patrimoine imposable au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune, une attestation de la banque Pictet et Compagnie du 22 juillet 2009 précisant que le chèque, d'un montant de 250 000 euros, a été tiré sur le compte de Mme D... et une copie de ce chèque, un acte sous-seing privé, établi le 23 juillet 2009, détaillant les termes et les conditions du prêt ainsi qu'une attestation de non remboursement de prêt du 30 avril 2012 ; que, pour justifier de la nature de prêt du second crédit du 21 septembre 2009, M. C... a versé au dossier la photocopie d'un chèque de 250 000 euros émis par M.E..., une attestation de prêt du 25 septembre 2009 émanant de ce dernier, une reconnaissance de dettes du 22 septembre 2009, une attestation de non remboursement de prêt, datée du 24 mai 2012, ainsi qu'une copie du procès verbal dressé, le 16 avril 2014, par les services de police dans le cadre de la procédure diligentée à son encontre pour fraude fiscale, à l'issue de l'audition de M.E..., qui a déclaré que M. C...lui avait demandé de lui prêter en urgence une somme de 250 000 euros ; qu'il résulte de l'instruction, et, en particulier, des mentions de l'arrêt en date du 14 décembre 2016, par lequel la Cour d'appel de Paris a condamné M. C...pour s'être frauduleusement soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt par omission de déclaration d'une somme de 200 000 euros constituant une avance sur commission, que M.D..., époux de MmeD..., qui a également été entendu par les services de police, a déclaré que le chèque d'un montant de 250 000 euros constituait un prêt ; que les mentions de ces procès-verbaux ne sont pas contestées par l'administration ; que la Cour d'appel de Paris, a, en outre, par l'arrêt précité, jugé que, compte tenu des attestations fournies par MM. D...et E...et de leurs déclarations conformes devant les officiers de police, le caractère de revenus soumis à imposition des sommes en litige n'était pas suffisamment établi ; que, dans ces conditions, M. C... doit être regardé comme justifiant, par l'ensemble de ces éléments, que les deux crédits taxés par le service, d'un montant de 250 000 euros chacun, ont la nature de prêts consentis par des tiers et qu'ils ne constituent pas un revenu imposable ; que la circonstance alléguée par le ministre, que ces prêts n'ont pas été déclarés auprès de l'administration fiscale, n'est pas susceptible, eu égard au nombre et au caractère concordant des justificatifs produits par M.C..., de remettre en cause l'origine et la nature de ces fonds ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à demander, dans le cadre de l'instance enregistrée sous le n° 16PA01836, le maintien des rehaussements contestés, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts, dès lors qu'il ne démontre pas que les crédits en litige se rattachent à l'activité professionnelle exercée par M. C... ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il besoin d'examiner les autres moyens de la requête de M.C..., que celui-ci est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 à raison de l'imposition, en tant que revenu d'origine indéterminée, d'un crédit bancaire du 21 septembre 2009, d'un montant de 250 000 euros ; qu'il résulte également de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M. C..., que le recours du ministre de l'économie et des finances doit être rejeté ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. C...dans les deux instances ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. C...est déchargé, en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009, procédant de l'imposition, en tant que revenu d'origine indéterminée, de la somme d'un montant de 250 000 euros, inscrite le 21 septembre 2009 au crédit de son compte bancaire.

Article 2 : Le jugement n° 1500771 du 9 février 2016 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le recours du ministre de l'économie et des finances est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera une somme globale de 2 000 euros à M. C...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Ile-de-France (Division du contentieux Ouest).

Délibéré après l'audience du 2 février 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 février 2017.

Le rapporteur,

V. COIFFETLe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 16PA01245, 16PA01836


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01245-16PA01836
Date de la décision : 16/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : DANO

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-02-16;16pa01245.16pa01836 ?
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