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16/02/2017 | FRANCE | N°15PA01828

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 16 février 2017, 15PA01828


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'une part, de condamner l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à l'indemniser de son préjudice subi à raison de l'extraction des dents n°11 et 21, d'autre part, de surseoir à statuer sur sa demande d'indemnisation dans l'attente du rapport d'expertise sollicité, enfin, de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°14025

04/6-3 du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'une part, de condamner l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à l'indemniser de son préjudice subi à raison de l'extraction des dents n°11 et 21, d'autre part, de surseoir à statuer sur sa demande d'indemnisation dans l'attente du rapport d'expertise sollicité, enfin, de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1402504/6-3 du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mai 2015, M. C... B..., représenté par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1402504/6-3 du 19 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris, ensemble les décisions des 12 décembre 2013 et 30 janvier 2014 par lesquelles l'AP-HP a rejeté ses demandes préalables ;

2°) d'ordonner une nouvelle expertise judiciaire ;

3°) de condamner l'AP-HP à lui verser la somme de 23 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HP le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a considéré qu'il avait bénéficié d'une information suffisante et donné son consentement à l'extraction de dents n°11 et 21 ;

- l'extraction des incisives qui étaient saines, n'était pas nécessaire ;

- l'expertise du docteur Guillaume étant lacunaire, contradictoire et erronée, la Cour devra en ordonner une nouvelle ;

- il souffre d'un déficit fonctionnel permanent, d'un préjudice esthétique et d'un préjudice moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2016, l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête, et à titre subsidiaire à ce que le montant des demandes de M. B...soit ramené à de plus justes proportions, et à la condamnation de ce dernier au versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- comme l'a constaté l'expert, il ne peut être sérieusement soutenu que le requérant n'aurait pas été informé de la nécessité d'extraire ses incisives ;

- si ce dernier ne voulait pas de cette extraction expressément prévue par le plan de traitement, rien ne l'empêchait de mettre fin à celui-ci ;

- les dents 11 et 21 étaient de médiocre qualité rétentive du fait d'une alvéolyse osseuse affectant notamment l'arcade supérieure ;

- les réflexes nauséeux dont se plaint le requérant ne sont pas directement liés à la prothèse amovible ;

- la responsabilité de l'AP-HP n'est donc pas engagée ;

- les erreurs de dates relevées par le requérant dans le rapport d'expertise n'affectent pas le raisonnement médico-légal de l'expert ;

- une nouvelle expertise est dépourvue d'utilité.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Julliard,

- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,

- et les observations de M.B..., et de MeE..., pour l'AP-HP.

1. Considérant que M. C... B...a subi l'extraction des dents n°11 et 21 dans le service dentaire du groupe hospitalier de la Pitié-Salpêtrière le 30 septembre 2011 ; qu'il relève appel du jugement du 19 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à condamner l'AP-HP à l'indemniser des préjudices subis à raison de ces extractions qu'il soutient ne pas avoir demandées ;

Sur la responsabilité de l'AP-HP :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1111-4 du même code : " Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé. / (...) Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. " ;

3. Considérant que, sauf cas d'urgence ou d'impossibilité, et alors même qu'une telle opération est indispensable, une intervention chirurgicale ne peut être pratiquée sans que le consentement du patient ait été recueilli, après qu'il ait été informé de la nature et des modalités de l'intervention, ainsi que de ses conséquences éventuelles et des risques qu'elle comporte ; qu'il appartient à l'établissement hospitalier d'établir l'existence de ce consentement éclairé ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'AP-HP ne rapporte pas la preuve, par la production d'un plan de traitement manuscrit et non signé par le patient, de ce que M. B... aurait consenti à l'extraction des dents n°11 et 21, nonobstant la circonstance relevée par l'expert que de nombreux rendez-vous préopératoires ont été organisés et que, comme le fait valoir l'AP-HP en défense, M. B... a poursuivi les soins au sein du même centre hospitalier ; qu'alors qu'aucune urgence ne justifiait l'extraction immédiate des dents n° 11 et 21, la réalisation d'une intervention à laquelle le patient n'avait pas consenti oblige l'établissement responsable à réparer tant le préjudice moral subi de ce fait par l'intéressé que, le cas échéant, toute autre conséquence dommageable de l'intervention ;

5. Considérant qu'il en résulte, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur les préjudices :

6. Considérant qu'eu égard à l'état de détérioration des dents n° 11 et 21 du fait de l'altération parodontale affectant l'arcade supérieure qui rendait leur extraction inévitable à très court terme, M. B... ne saurait demander ni l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent résultant des réflexes nauséeux dont il se plaint et dont le rapport d'expertise indique qu'ils ne sont pas précisément liés au port d'une prothèse laquelle aurait, en tout état de cause, été nécessaire même en l'absence d'extraction des dents 11 et 21, ni du préjudice esthétique résultant de cette extraction qui n'est pas directement imputable à la faute du centre hospitalier qui se limite au défaut de consentement éclairé du patient qui a reçu, par ailleurs des soins justifiés et adaptés aux données actuelles de la science ; qu'enfin, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral causé à l'intéressé par la faute susmentionnée du centre hospitalier de la Pitié-Salpêtrière en l'évaluant à la somme de 2 500 euros ;

Sur les dépens :

7. Considérant que les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 500 euros par ordonnance du 18 décembre 2014 du Président du Tribunal administratif de la Paris, sont mis à la charge définitive de l'AP-HP ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que M. B..., qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, verse à l'AP-HP une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 1 500 euros à verser à M. B... sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1402504/6-3 du 19 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'AP-HP est condamnée à verser à M. B... une somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice moral.

Article 3 : L'AP-HP versera à M. B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 500 euros, sont mis à la charge définitive de l'AP-HP.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête M. B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine et à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris.

Délibéré après l'audience du 2 février 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- Mme Julliard, première conseillère,

- MmeA..., première conseillère,

Lu en audience publique, le 16 février 2017.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 15PA01828


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01828
Date de la décision : 16/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : HOURMANT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-02-16;15pa01828 ?
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