Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société B2B Communication a demandé au Tribunal administratif de Paris :
1°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 ;
2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009.
Par un jugement n° 1423469/2-3 du 29 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 août 2015 et 9 janvier 2016, la société B2B Communication, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 29 juin 2015 ;
2°) de prononcer la décharge demandée.
Elle soutient que :
- elle ne peut être regardée comme un intermédiaire opaque ;
- le service a implicitement estimé qu'il était en présence d'un abus de droit ;
- les pénalités infligées sont disproportionnées ;
- le profit sur le Trésor n'est pas motivé ;
- les avances sans intérêt consenties aux sociétés G3B et MBC résultent d'une décision de justice.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par la société B2B Communication ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 23 novembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au
8 décembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.
1. Considérant que la société B2B Communication relève appel du jugement du
29 juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 ;
Sur la procédure d'imposition :
2. Considérant en premier lieu que la société B2B Communication soutient que le service a implicitement mis en oeuvre la procédure de l'abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales sans la faire bénéficier des garanties attachées à cette procédure ; que toutefois le litige, qui porte principalement sur l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée, n'a pas conduit l'administration fiscale à écarter des actes ou autres pièces au motif qu'ils auraient été conclus de manière fictive ou dans le seul but d'éluder l'impôt, mais à restituer aux opérations en litige leur véritable nature juridique en les regardant, compte tenu du fonctionnement de l'entreprise, comme des opérations réalisées par un intermédiaire opaque et non par un intermédiaire transparent ainsi que l'avait retenu la société requérante ; que, dès lors, ce moyen doit être écarté ;
3. Considérant en deuxième lieu que, contrairement à ce qui est soutenu, le service, qui a, dans les propositions de rectification en date des 20 décembre 2010 et 29 juillet 2011, fait référence aux dispositions de l'article 38-1 du code général des impôts, indiqué qu'en s'abstenant de verser au Trésor Public une partie de la taxe sur la valeur ajoutée due, la société avait réalisé un profit sur le Trésor égal au montant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, et rappelé plus généralement qu'un contribuable réalisant des opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et tenant une comptabilité hors taxes bénéficie au détriment du Trésor, du fait du non-paiement de la taxe légalement exigible, d'un profit qui doit être réintégré dans ses résultats imposables, a suffisamment motivé la rectification afférente au profit sur le Trésor ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne la qualité d'intermédiaire opaque retenue par l'administration :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des
impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. [...] V. L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une livraison de bien ou une prestation de services, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien, ou reçu et fourni les services considérés."; qu'aux termes de l'article 266 du même
code : " 1. La base d'imposition est constituée : a) Pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; b. Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : Opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 et au III de l'article 256 bis [...] " ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société B2B Communication émet des factures à son nom propre qu'elle adresse aux annonceurs souhaitant diffuser des messages publicitaires dans les revues éditées par les sociétés ELTA et G3B pour le compte desquelles la société requérante exerce une activité d'intermédiaire ; qu'elle ne produit aucun contrat avec les sociétés ELTA et G3B permettant de regarder l'intéressée comme agissant sur mandat de ces dernières sociétés ; qu'il n'est pas contesté que les clients de la société B2B Communication s'acquittent d'une somme, assortie de la taxe sur la valeur ajoutée, comprenant, outre le prix de l'insertion publicitaire, le montant de la commission revenant à la société requérante ; que, dans ces conditions, et alors même que les factures font apparaitre le nom de la publication, la société requérante, qui doit être regardée comme ayant acquis elle-même auprès des sociétés ELTA et G3B les services vendus aux annonceurs, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le service a estimé qu'elle devait être regardée comme un intermédiaire opaque agissant en son nom propre et qu'elle était ainsi redevable de la taxe sur la valeur ajoutée sur la totalité du prix de vente conformément au b) du 1 de l'article 266 du code général des impôts ;
En ce qui concerne les comptes courants débiteurs :
6. Considérant que les avances sans intérêts accordées par une entreprise au profit de tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que des avances sans intérêts constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que l'entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ; que la société requérante soutient que les avances en compte courant sans intérêts qu'elle a octroyées aux sociétés G3B et MBC résultent d'une obligation, en vertu d'un jugement du tribunal de commerce les plaçant " sous patrimoine commun " ; qu'elle ne produit en tout état de cause aucun élément et notamment pas le jugement susmentionné permettant à la Cour d'apprécier le bien-fondé et la portée de son moyen ; qu'au surplus, si les dispositions de l'article L. 621-2 du code de commerce permettent d'étendre la procédure de sauvegarde " sous patrimoine commun " à d'autres personnes, en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale en cause, en prenant en compte, pour la protection des créanciers, l'anormalité délibérée des relations existant entre personnes morales pourtant distinctes, cette mise " sous patrimoine commun " ne saurait être utilement invoquée par un contribuable à l'encontre d'un rehaussement destiné précisément à tirer les conséquences fiscales des actes anormaux de gestion constatés dans le cadre de ces relations ; qu'une telle circonstance est par suite sans incidence sur l'obligation qui incombe à l'intéressée, qui a consenti un avantage anormal à une société juridiquement distincte à l'égard de l'administration fiscale, de justifier l'intérêt retiré par elle de l'avantage consenti ; qu'en l'absence de perception d'intérêts et à défaut de démontrer l'existence d'une contrepartie pour elle, ou à tout le moins d'une obligation légale dont elle pourrait se prévaloir, c'est à bon droit que le service a réintégré au résultat imposable de l'année 2007 le montant des intérêts auquel la société aurait pu prétendre;
Sur les pénalités :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré [...] " ;
8. Considérant que la société B2B communication ne conteste aucun des motifs retenus tant par le service que par les premiers juges pour justifier de l'application de la pénalité de 40% en litige ; qu'elle se borne à se prévaloir de ce que le montage adopté dans l'ensemble du " groupe informel " constitué par les sociétés B2B Communication, ELTA et G3B n'a causé aucun préjudice pour le Trésor ; qu'une telle argumentation ne saurait remettre en cause le bien-fondé de ladite pénalité, ni comme il est soutenu, conférer à ladite pénalité un caractère disproportionné ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société B2B Communication n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société B2B Communication est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société B2B Communication et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2017, à laquelle siégeaient :
Mme Brotons, président de chambre,
Mme Appèche, président assesseur,
M. Magnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 1er février 2017.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA03475