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01/02/2017 | FRANCE | N°15PA01597

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 01 février 2017, 15PA01597


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des majorations y afférentes.

Par un jugement n° 1211649/2-3 du 12 février 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 13 avril et 25 novembre 2015, M. e

t MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des majorations y afférentes.

Par un jugement n° 1211649/2-3 du 12 février 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 13 avril et 25 novembre 2015, M. et MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 février 2015 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées et, par voie de conséquence, la restitution des sommes indûment versées au Trésor assorties des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils n'ont pas reçu notification de la " rectification définitive portant

redressement " ;

- ils n'ont pas été convoqués devant la commission départementale des impôts ni reçu notification de l'avis de cette dernière ;

- les documents adressés à cet égard à la société ACD n'ont pas été réceptionnés par la gérante de cette société ;

- il s'agit d'une irrégularité de procédure substantielle au sens de l'article L. 80 A CA du livre des procédures fiscales ;

- c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de la moins-value déclarée au titre de la vente d'une licence IV;

- l'indemnité d'éviction versée en 2006 constitue une charge déductible, notamment au sens de la doctrine BIC-IX-22600s, dès lors qu'elle a été exposée pour permettre la location du bien à des conditions plus avantageuses ;

- c'est à tort que l'administration n'a pas tenu compte de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. et Mme B...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 18 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL Agence conseil développement, dont M. B...est actionnaire à 99,98 % et qui a opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur les années 2005 et 2006, à l'issue de laquelle des rectifications de ses résultats lui ont été notifiées selon la procédure contradictoire, à raison notamment d'une moins-value afférente à la vente d'une licence IV et d'une immobilisation comptabilisée en charges ; que M. et Mme B...font appel du jugement du 12 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des majorations y afférentes, en conséquence de ces rectifications ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée " ; qu'aux termes de l'article L. 53 du même livre : " En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration des impôts et la société elle-même (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'en ce qui concerne les sociétés régies par l'article 8 du code général des impôts, la procédure contradictoire de redressement de l'imposition doit être suivie entre la société et l'administration fiscale et non entre cette dernière et chacun des membres de la société ; qu'en revanche, l'administration ne peut légalement mettre de suppléments d'imposition à la charge personnelle des associés sans leur avoir notifié, dans les conditions prévues à l'article L. 57, les corrections apportées aux déclarations qu'ils ont eux-mêmes souscrites, en motivant cette notification au moins par une référence aux rehaussements apportés aux bénéfices sociaux de la société et par l'indication de la quote-part de ces bénéfices à raison de laquelle les intéressés seront imposés ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les propositions de rectification, en date du 14 août 2008, adressées à la SARL Agence conseil développement d'une part, à M. et Mme B...d'autre part, ont été notifiées aux intéressés respectivement le 21 août 2008 et au plus tard le 1er septembre 2008, comme en attestent les avis de réception ainsi que les deux courriers, produits par les requérants, en date du 18 septembre 2008, dans lesquels la SARL Agence conseil développement et eux-mêmes demandent un délai supplémentaire pour répondre aux propositions de rectification qui leur ont été respectivement adressées ; que par ailleurs, il ressort des propositions de rectification du 14 août 2008 que le vérificateur y a porté l'ensemble des indications requises relatives aux conséquences financières du redressement ; que le vérificateur a, en outre, dans la réponse aux observations du contribuable du 27 octobre 2008, notifiée le 31 octobre 2008, indiqué que le montant des droits et pénalités restait inchangé et transmis de nouveau aux intéressés, en annexe à cette réponse, un tableau intitulé " détail de l'imposition " ; que le vérificateur a ainsi respecté les dispositions combinées des articles L. 57 et L. 53 du livre des procédures fiscales, et en tout état de cause les dispositions de l'article L. 48 du même livre ; qu'ainsi le moyen tiré du défaut de notification de la proposition de rectification et des dernières conséquences financières de la rectification ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société Agence conseil développement, à la suite de sa demande de saisine, par courrier du 28 novembre 2008, de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, prévue à l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, a été convoquée devant cette commission par courrier du 7 août 2009, notifié le 14 août ; qu'après que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires eut siégé le 24 septembre 2009 sur le différend opposant la société Agence conseil développement à l'administration fiscale, son avis a été transmis à la société par courrier du 28 octobre 2009, notifié le 5 novembre 2009 ; que si les requérants font valoir que les avis de réception des plis n'ont pas été signés par la gérante de la société, ils n'établissent pas que le signataire de ces avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli ; que la procédure d'imposition ayant été régulièrement menée avec la société Agence conseil développement, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 53 du livre procédure fiscale, le moyen tiré de ce que les requérants n'ont pas été convoqués devant la commission départementale des impôts ni reçu notification de l'avis de cette dernière est en tout état de cause inopérant ;

Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :

6. Considérant, en premier lieu, que l'administration fiscale a remis en cause la réalité d'une charge comptabilisée par la SARL Agence conseil développement à raison d'une moins-value à court terme d'un montant de 55 100 euros relative à la vente d'une licence IV, laquelle aurait été achetée par la SARL Agence conseil développement en janvier 2006 à la STEF Ouferhat pour un montant de 60 000 euros, puis revendue pour un montant de 4 900 euros, le 23 décembre 2006, à la SARL Etoile d'Afrique ; que le contrat du 19 janvier 2006 par lequel la SARL Agence conseil développement aurait acquis la licence IV, qui n'a pas été soumis à la formalité de l'enregistrement, est dépourvu de date certaine et en outre n'a pas été signé par le cessionnaire ; que le document intitulé " cession licence IV ", faisant état d'un rachat par le gérant de la SARL Etoile d'Afrique, d'une licence IV pour des locaux situés 205 avenue Jean Jaurès à Aubervilliers, à la SARL Agence conseil développement, d'ailleurs incohérent en ce qui concerne le prix convenu, n'a pas été soumis à la formalité de l'enregistrement, n'a pas été signé par l'ensemble des parties et n'a pas été réalisé en plusieurs exemplaires originaux ; qu'il doit donc être regardé comme étant dépourvu de toute valeur probante ; qu'à supposer même que les documents produits justifient l'intention de la SARL Etoile d'Afrique d'exploiter une licence IV dans les locaux en cause, tant l'achat que la vente d'une licence IV par la SARL Agence conseil développement au cours de l'année 2006 ne sauraient être regardés comme établis, non plus que le prix auquel ces transactions, à les supposer réelles, ont été réalisées ; que les récépissés de déclarations de mutation de débit de boissons produites au dossier, établies sur la base des déclarations des intéressés, n'ont par elles-mêmes aucun caractère probant et ne sauraient en tout état de cause justifier du prix auxquels les mutations ont été faites ; qu'ainsi, M. et Mme B...ne justifiant pas de la moins-value subie à raison de la vente d'une licence IV, c'est à bon droit que la réintégration correspondante a été opérée dans les résultats de l'exercice 2006 ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que l'indemnité versée au preneur d'un local commercial, en cas de résiliation du bail, doit être regardée comme une charge dont la déduction est admise par les articles 38 et 39 du code général des impôts lorsqu'elle permet au bailleur de relouer l'immeuble pour un loyer plus élevé ou à de meilleures conditions ;

8. Considérant que la SARL Agence conseil développement a comptabilisé en charges une somme de 54 000 euros au titre du versement, à la SARL Fête des fleurs, d'une indemnité de résiliation d'un bail commercial pour un local situé au rez-de-chaussée de l'immeuble sis 205 avenue Jean Jaurès à Aubervilliers ; qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir acquis cet immeuble en décembre 2003, afin de le relouer, la SARL Agence conseil développement a entrepris, dès le début de l'année 2004, de résilier les baux existants ; qu'après l'échec de l'action en justice entreprise au début de l'année 2004 à l'encontre de la SARL Fête des fleurs, cette société a accepté de quitter les lieux en 2006, aux termes d'un protocole transactionnel prévoyant le versement d'une indemnité de 54 000 euros ; que la SARL Pariroc, dont les parts sont détenues à 50 % par la SARL Agence conseil développement et à 50 % par M.B..., a alors installé une agence immobilière dans le local commercial libéré par la SARL Fête des fleurs ; qu'il n'est pas contesté que le versement de l'indemnité à la SARL Fête des fleurs, en permettant la libération de locaux commerciaux au sein de l'immeuble acquis par la SARL Agence conseil développement, a favorisé leur relocation pour un loyer plus élevé ; que les circonstances que cette libération ait été mise en oeuvre en application du projet manifesté par la SARL Agence conseil développement au moment de l'acquisition de l'immeuble, qu'un retard ait été pris en raison du litige l'opposant à la SARL Fête des fleurs, lequel s'est précisément soldé par le paiement de l'indemnité transactionnelle de 54 000 euros, et que le bailleur ait été associé du nouveau locataire, ne sauraient faire obstacle à ce que cette somme soit regardée comme une charge d'exploitation déductible ; que par suite, c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité des résultats imposables de la somme versée à raison de cette indemnité de résiliation ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...sont seulement fondés à obtenir la réduction, en droits et pénalités, de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales mis à leur charge au titre de l'année 2006, en conséquence de la réduction, à hauteur de 54 000 euros, des résultats de la société Agence conseil développement au titre de ladite année ; que pour le surplus, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; qu'en l'absence de litige né et actuel, leurs conclusions tendant à la restitution des sommes versées au Trésor, majorées des intérêts moratoires, sont prématurées et ne peuvent en conséquence qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme B...sont déchargés de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales mis à leur charge au titre de l'année 2006 en conséquence de la réduction, à hauteur de 54 000 euros, des résultats de la société Agence conseil développement au titre de ladite année.

Article 2 : Le jugement n° 1211649/2-3 du 12 février 2015 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme B...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er février 2017.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01597
Date de la décision : 01/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : CASTELLOTTI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-02-01;15pa01597 ?
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