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30/12/2016 | FRANCE | N°16PA00852

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 30 décembre 2016, 16PA00852


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 25 août 2015 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de sa destination.

Par un jugement n° 1515743/3-2 du 27 janvier 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 25 août 2015 et a enjoint au préfet de délivrer à Mme A...une carte de séjour portant la mention " vie

privée et familiale " dans un délai de trois mois.

Procédure devant la Cour :

Par une r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 25 août 2015 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de sa destination.

Par un jugement n° 1515743/3-2 du 27 janvier 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 25 août 2015 et a enjoint au préfet de délivrer à Mme A...une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2016, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1515743/3-2 du 27 janvier 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la requête présentée par Mme A...devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- Mme A...ne justifie pas de l'effectivité d'une résidence continue en France depuis 2004 ;

- elle ne peut se prévaloir d'attaches familiales suffisantes ni d'une insertion particulière en France ni être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 juin 2016, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la Cour de rejeter la requête du préfet de police et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Pena.

1. Considérant que Mme A..., ressortissante marocaine née le 20 janvier 1968, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 25 août 2015, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ; que le préfet de police relève appel du jugement du 27 janvier 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé l'annulation dudit arrêté au motif qu'il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a enjoint audit préfet de délivrer à l'intéressée une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier qu'à la date de la décision attaquée, Mme A...vivait en simple concubinage avec un ressortissant français depuis une durée de deux années et huit mois ; qu'aucun enfant n'était alors né de cette union ; que cette situation familiale est insuffisante pour attester de la teneur des liens développés sur le territoire national par l'intéressée qui n'établit ni son insertion particulière au sein de la société française, ni être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine dans lequel elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans et où demeuraient, à la date de la décision litigieuse, sa plus jeune fille ainsi que l'une de ses soeurs ; que, dans ces conditions, le préfet de police n'a porté aucune atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée à une vie personnelle et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que c'est par suite à tort que le tribunal a annulé l'arrêté préfectoral du 25 août 2015 comme méconnaissant les stipulations précitées ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A...devant le tribunal administratif ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ;

6. Considérant que pour la période allant de 2005 à 2015, année de la décision attaquée, Mme A...verse un certain nombre de pièces ayant une valeur probante certaine ; qu'elle produit notamment à ce titre des ordonnances et résultats d'analyses médicales nombreux et réguliers, des factures EDF, des relevés bancaires attestant de la réalisation d'opérations sur le territoire français, des demandes renouvelées pour l'aide médicale d'Etat et pour la carte solidarité transport, des avis d'imposition sur le revenu, des courriers adressés par la préfecture ainsi que des factures à son nom et à celui de son concubin ; que l'ensemble de ces éléments sont de nature à attester de sa présence continue en France depuis plus de dix années ; qu'en conséquence, le préfet de police était tenu, en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de saisir pour avis la commission du titre de séjour avant de prendre la décision litigieuse ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à demander l'annulation du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire pris à son encontre ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu, en vertu de l'article

L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de MmeA..., après avoir saisi la commission du titre de séjour, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 27 janvier 2016 du Tribunal administratif de Paris, ensemble l'arrêté du préfet de police du 25 août 2015, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de saisir la commission du titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de délivrer à Mme A...une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- Mme Julliard, premier conseiller,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 décembre 2016.

Le rapporteur,

E. PENALe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 16PA00852


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00852
Date de la décision : 30/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Eléonore PENA
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : LE BRUSQ

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-30;16pa00852 ?
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