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30/12/2016 | FRANCE | N°15PA00200

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 30 décembre 2016, 15PA00200


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1216664 et n° 1316806 du 12 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des sommes de 4 647 euros en matière d'impôt sur le revenu et de 1 366 euros en matière de

contributions sociales, rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.

Procédur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1216664 et n° 1316806 du 12 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des sommes de 4 647 euros en matière d'impôt sur le revenu et de 1 366 euros en matière de contributions sociales, rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2015, et un mémoire en réplique, enregistré le 1er octobre 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1216664 et n° 1316806 du 12 novembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient que :

- il n'a pas son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A du code général des impôts et de l'article 4 de la convention franco-espagnole, dès lors qu'il a son foyer permanent d'habitation en Espagne, que ses principaux revenus sont issus d'une activité professionnelle exercée dans ce pays et qu'il n'est pas établi qu'il a passé plus de 183 jours en France ; la direction effective en France d'une entreprise étrangère est en toute hypothèse sans incidence sur sa résidence fiscale ;

- les manquements délibérés ne sont pas établis.

Par des mémoires en défense enregistrés le 5 juin 2015 et le 8 janvier 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens invoqués par M. B...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention signée le 10 octobre 1995 entre la France et l'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Platillero ;

- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., pour M.B....

1. Considérant que M. B...a fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle, à l'issue duquel le vérificateur, estimant que l'intéressé avait son domicile fiscal en France, lui a adressé une proposition de rectification datée du 24 décembre 2010 ; qu'au terme de la procédure, des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mises à sa charge au titre des années 2007, 2008 et 2009, dans la catégorie des traitements et salaires, des revenus fonciers et des revenus de capitaux mobiliers, assorties d'intérêts de retard, de la majoration pour manquement délibéré en ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers et les traitements et salaires, et des pénalités de 10% pour dépôt tardif des déclarations et inexactitudes ou omissions en ce qui concerne les revenus fonciers ; qu'une amende pour comptes ouverts à l'étranger non déclarés, prévue par le IV de l'article 1736 du code général des impôts, lui a également été infligée au titre de chacune des années précitées ; que M. B...fait appel du jugement du 12 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des sommes de 4 647 euros en matière d'impôt sur le revenu et de 1 366 euros en matière de contributions sociales, a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes tendant à la décharge de ces impositions et pénalités ;

Sur le principe de l'imposition en France :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que durant les années en litige, M. B...disposait d'un bien immobilier constitué de deux appartements, situé au 44, route de Béhobie à Hendaye ; qu'au cours d'une procédure de visite et de saisie, effectuée le 19 mai 2010, ont été saisis sur les lieux des documents personnels, tels que des relevés fiscaux et bancaires, et professionnels, relatifs à la société Reiki Forum International dont le requérant était le gérant ; qu'à la suite de l'exercice de son droit de communication, le service a établi que M. B...était titulaire à cette adresse d'abonnements d'électricité, de gaz et d'eau, l'importance des consommations de ces fluides, mise en évidence à partir des sommes qui figuraient sur les comptes bancaires de l'intéressé, attestant d'une occupation régulière et effective des lieux ; que M. B...disposait également à cette adresse d'une ligne de téléphone fixe, une autre ligne étant utilisée par la société Reiki Forum International avec un abonnement ouvert au nom du requérant ; que son abonnement de téléphonie mobile faisait apparaitre la même adresse ; que le nom de M. B...figurait sur la boite aux lettres de l'immeuble situé à ladite adresse, des envois et des réceptions de courriers s'y effectuant à son nom et à celui de la société ; qu'en outre, M. B...était titulaire de dix comptes bancaires en France ; qu'ainsi qu'il ressort des annexes à la proposition de rectification, l'examen de ces comptes bancaires a permis d'établir que le requérant effectuait le plus grand nombre de ses dépenses de train de vie depuis la France, à partir desdits comptes, l'essentiel des débits enregistrés sur ses comptes espagnols correspondant à des opérations automatiques de prélèvements mensuels ; que, par ailleurs, M. B...déclarait son adresse en France lors de la réservation de voyages, la plupart de ses déplacements routiers et ferroviaires, révélés par des relevés de badge de péages autoroutiers et le droit de communication exercé par le service auprès de la SNCF, étant d'ailleurs réalisés sur le territoire français ;

4. Considérant qu'il résulte également de l'instruction qu'une tierce personne résidait de façon permanente au 44, route de Béhobie ; que M. B...assumait une partie de son train de vie, en prenant en charge son hébergement et ses dépenses d'électricité, de gaz et d'eau ; qu'il a également, au cours de chacune des années en litige, fréquemment voyagé avec cette personne, aucun élément n'étant produit de nature à établir que ces voyages présentaient un caractère professionnel, alors que l'administration fait valoir que les fonctions de l'intéressée dans la société Reiki Forum International ne justifiaient pas de tels déplacements ; qu'en outre, M. B...et cette personne sont propriétaires d'un appartement qu'ils ont acheté en indivision en contractant conjointement un prêt bancaire d'une durée de 20 ans et détiennent un compte bancaire commun, retraçant les produits et charges afférents à cet appartement ; que, compte tenu des éléments de fait ainsi relevés par le service, M. B...ne saurait sérieusement nier la situation de concubinage avec l'intéressée sur le territoire français ; qu'à cet égard, contrairement à ce que soutient le requérant, le service n'a aucunement admis leur absence de vie commune, le dégrèvement, dépourvu de motivation, des impositions supplémentaires procédant de la remise en cause de sa situation de parent isolé, mises à la charge de sa compagne, ne valant pas prise de position de l'administration sur point ; que la circonstance qu'aucun effet personnel n'aurait été saisi au cours de la procédure de visite et de saisie précitée ne saurait établir que M. B...ne vivait pas à l'adresse précédemment mentionnée, dès lors que cette procédure ne permettait en tout état de cause pas de saisir de tels effets personnels ;

5. Considérant que l'ensemble des éléments de fait mentionnés aux points 3 et 4 n'est pas sérieusement contesté par M.B... ; que ce dernier se borne, d'une part, à soutenir qu'il était propriétaire d'un bien immobilier en Espagne et que son bien en France aurait constitué une simple résidence secondaire, et, d'autre part, à se prévaloir du caractère de ville frontalière de la commune d'Hendaye pour justifier de ses déplacements et de la détention de comptes bancaires en France ; que M. B...n'apporte ainsi aucun élément probant à l'appui de ses allégations selon lesquelles il aurait son foyer en Espagne, la circonstance que sa fille majeure y réside ne constituant pas, en l'absence de circonstances particulières, un indice permettant d'établir que le centre de sa vie personnelle se situe dans ce pays ; que, dans ces conditions, M. B...avait son foyer en France, au sens des dispositions précitées du a) du 1 de l'article 4 B du code général des impôts, durant les années d'imposition en litige ; que M. B...ne peut dès lors utilement soutenir que l'administration n'établit pas que son lieu de séjour principal était situé dans ce pays ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la convention entre la France et l'Espagne signée le 10 octobre 1995 susvisée : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue (...) 2. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne physique est un résident des deux Etats contractants, sa situation est réglée de la manière suivante : a) Cette personne est considérée comme un résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...disposait d'un foyer d'habitation permanent en France au sens des stipulations précitées du 2 de l'article 4 de la convention franco-espagnole ; que, si M. B...justifie qu'il était propriétaire d'un bien immobilier à Irun en Espagne et de l'existence de factures d'assurances, de téléphone et de taxe d'enlèvement des ordures ménagères au titre de ce bien, dont l'administration fait d'ailleurs valoir qu'elles étaient payées par la société Reiki Forum International, il ne conteste pas que ledit bien était mis gratuitement à la disposition de cette société ; que le constat d'huissier produit par le requérant ne permet pas d'attester que le bien dont il se prévaut était utilisé à titre d'habitation pendant les années en litige ; qu'il ne résulte ainsi pas de l'instruction que M. B...aurait disposé personnellement et effectivement du bien dont il est propriétaire en Espagne en tant qu'occupant permanent et y aurait eu un foyer d'habitation permanent ; que, dans ces conditions, M. B...n'avait au titre des années en litige un foyer d'habitation permanent qu'en France au sens des stipulations précitées du a) du 2 de l'article 4 de la convention fiscale franco-espagnole, convention qui ne fait dès lors pas obstacle à ce que l'intéressé soit soumis à l'impôt en France à raison de l'ensemble de ses revenus ;

Sur les pénalités :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...) la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration " ;

9. Considérant que, pour justifier l'application des majorations pour manquement délibéré aux rectifications notifiées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et des traitements et salaires, l'administration fait valoir, outre la présence du foyer de M. B...en France, qu'il ne pouvait ignorer compte tenu de ce qui précède, que l'intéressé, qui était maître de l'affaire de la société Reiki Forum International, dont il détenait tout pouvoir pour gérer les comptes bancaires ouverts en France et en Espagne, ne pouvait ignorer qu'il développait en France une activité de vente de produits et d'organisation de stages liés au reiki ; qu'en se bornant à soutenir que cette société n'était pas dirigée en France du fait de la présence de salariés en Espagne et du simple stockage de produits en France, M. B...ne conteste pas qu'il était le maître de l'affaire et que l'activité professionnelle qu'il exerçait en tant que personne physique l'était matériellement en France ; qu'ainsi, l'administration établit que M.B..., qui ne saurait se borner à invoquer la complexité des règles de territorialité de l'impôt et à se prévaloir du dépôt de déclarations de revenus en Espagne, ne pouvait ignorer qu'il avait sa résidence fiscale en France et, par suite, justifie du bien-fondé de l'application des majorations pour manquement délibéré prévues par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

12. Considérant que les dispositions précitées de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais qu'il a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur national des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Coiffet, président,

- M. Platillero, premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 décembre 2016.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLe président,

V. COIFFET

Le greffier,

S. JUSTINELa République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA00200


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00200
Date de la décision : 30/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-01-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Personnes et opérations taxables. Territorialité.


Composition du Tribunal
Président : Mme COIFFET
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : SELARL LD AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-30;15pa00200 ?
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