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15/12/2016 | FRANCE | N°15PA03296

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 15 décembre 2016, 15PA03296


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2014 par lequel le maire de la commune de Tumaraa l'a exclu de ses fonctions pendant une durée de deux mois et la condamnation de la commune à lui verser une indemnité de 263 562 francs CFP en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi en raison de l'illégalité de cette sanction disciplinaire.

Par un jugement n° 1400082 du 18 novembre 2014, le Tribunal administratif de la Polynés

ie française a annulé l'arrêté du 6 janvier 2014 du maire de la commune de Tumaraa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2014 par lequel le maire de la commune de Tumaraa l'a exclu de ses fonctions pendant une durée de deux mois et la condamnation de la commune à lui verser une indemnité de 263 562 francs CFP en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi en raison de l'illégalité de cette sanction disciplinaire.

Par un jugement n° 1400082 du 18 novembre 2014, le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du 6 janvier 2014 du maire de la commune de Tumaraa et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une ordonnance du 11 août 2015, enregistrée le 14 août 2015 au greffe de la Cour, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de Paris la requête présentée par la commune de Tumaraa.

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 16 février et 18 mai 2015, puis un mémoire en réplique, enregistré au greffe de la Cour le 8 janvier 2016, la commune de Tumaraa, représentée par la SCP Monod-Colin-Stoclet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement du 18 novembre 2014 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de la Polynésie française tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 6 janvier 2014 ;

3°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation pour avoir retenu l'absence de situation d'abandon de poste sans répondre à l'argumentation par laquelle elle faisait valoir qu'elle avait enjoint à M. B...de revenir à son poste de travail ;

- le Tribunal a dénaturé les pièces du dossier en relevant que la commune requérante ne produisait aucune pièce établissant qu'elle avait rappelé à M. B...son obligation d'entretien du véhicule dont il avait la charge et que la panne du véhicule était due à un défaut d'entretien courant incombant au chauffeur ;

- le Tribunal a commis une erreur de droit et une erreur dans la qualification juridique des faits en jugeant, d'une part, que l'absence non justifiée de M. B...ne pouvait être qualifiée d'abandon de poste et, d'autre part, que l'exclusion de fonction d'une durée de deux mois apparaissait disproportionnée au regard de la faute reprochée ;

- s'étant pourvue en cassation conformément aux mentions portées sur la notification du jugement attaqué, le bien-fondé de ses moyens doit être apprécié dans le cadre de la compétence d'appel de la Cour.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 20 novembre 2015 et le 18 février 2016, M. A... B..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Tumaraa de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que les moyens développés à son appui sont des moyens de cassation ;

- les moyens soulevés par la commune de Tumaraa ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française et notamment son article 73 ;

- l'ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 modifiée portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs ;

- le décret n° 2011-1552 du 15 novembre 2011 portant dispositions applicables aux agents non titulaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Notarianni,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public.

1. Considérant que la commune de Tumaraa relève appel du jugement du 18 novembre 2014 du Tribunal administratif de la Polynésie française en tant qu'il a annulé l'arrêté du 6 janvier 2014 par lequel le maire de la commune de Tumaraa a infligé à M. A...B..., qu'elle avait recruté le 6 avril 2004 pour une durée indéterminée afin d'exercer les fonctions de chauffeur de ses fonctions, une sanction d'exclusion de ses fonctions pendant une durée de deux mois ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les détails de l'argumentation présentée en défense par la commune de Tumaraa, ont suffisamment motivé au point 5 du jugement leur décision d'écarter la qualification d'abandon de poste pour l'absence d'une journée de M.B... ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ; qu'à cette fin, il incombe à l'administration d'établir la matérialité des faits sur lesquels elle s'est fondée pour infliger une sanction disciplinaire et qui font l'objet d'une contestation ;

4. Considérant que pour justifier l'application de la sanction d'exclusion temporaire de fonction de deux mois qu'elle a infligée à M.B..., la commune de Tumaraa soutient, d'une part, que l'absence de celui-ci lors de la journée du 29 novembre 2013 constituerait " un abandon de poste " dès lors que la demande de congé qu'il avait présentée pour cette date avait été refusée et que sa présence avait été requise pour préparer un chantier de démolition et, d'autre part, que du fait de manquements professionnels de sa part la drague dont il avait la charge de l'entretien en tant que conducteur mécanicien est tombée en panne le 2 décembre 2013 ;

5. Considérant, d'une part, en ce qui concerne le défaut d'entretien et la panne de la drague, la commune soutient que si M.B..., outre ses fonctions de conducteurs d'engins au sein du service technique de la commune de Tumaraa, exerçait les fonctions de mécanicien et que l'entretien quotidien du véhicule faisait partie de ses fonctions principales ; que, toutefois, elle n'établit pas que M. B...avait la charge de l'entretien mécanique de cet engin dès lors qu'il résulte des pièces du dossier, et particulièrement des termes de l'arrêté n° 09/CT/04 du 1er avril 2004 du maire de la commune de Tumaraa et des termes du contrat de travail à durée indéterminée conclu le 1er avril 2004 entre M. B...et la commune de Tumaraa que M. B...a été embauché en tant seulement que " chauffeur " au département des services techniques et non, comme le soutient la commune, en se prévalant d'une fiche de poste dépourvue de valeur probante, en tant que chauffeur et mécanicien ; que, par ailleurs, si elle fait valoir qu'il ressort de la fiche de poste de M. B...qu'il était en tant que conducteur chargé de l'entretien courant de la drague, la commune ne produit en tout état de cause aucune pièce de nature à établir cet absence d'entretien courant ni le fait que la panne serait la conséquence d'un défaut d'entretien courant ; qu'à cet égard, contrairement à ce qu'elle soutient, le seul fait que l'engin soit tombé en panne ne suffit pas à établir un défaut d'entretien ni un lien de causalité entre un défaut d'entretien et la panne intervenue ; que, par suite, M. B...ne pouvait faire l'objet d'une sanction disciplinaire pour ces faits dont la matérialité n'est pas établie ;

6. Considérant, d'autre part, en ce qui concerne l'absence du 29 novembre 2013, il résulte des pièces du dossier que M. B... avait demandé par téléphone la prolongation de ses congés pour une journée le vendredi 29 novembre 2013 et que cette demande avait fait l'objet d'un avis favorable de la part du chef de service et du chef de département et que le maire a pour sa part simultanément coché les cases " favorable " et " défavorable " tout en portant une mention selon laquelle il lui était demandé d'être présent à son poste pour la préparation d'un chantier ; qu'en dépit de l'ambigüité de l'avis du maire sur cette demande, il résulte de l'instruction que M. B... n'avait pas obtenu le congé sollicité ; que, dès lors, la commune est fondée à soutenir que son absence au cours de la journée du vendredi 29 novembre 2013 était injustifiée ; qu'en revanche, cette absence d'une journée seulement, qui faisait par ailleurs suite à une période de congés pour laquelle M. B...avait formé une demande de prolongation ayant au surplus fait l'objet d'une acceptation expresse par son chef de service et son chef de département avant d'être refusée par le maire de la commune de Tumaraa, ne saurait en tout état de cause être regardée comme un abandon de poste par lequel M. B...aurait rompu les liens qui l'unissaient au service, et cela alors même que le maire de la commune lui avait demandé de revenir à son poste de travail ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Tumaraa établit seulement une absence injustifiée d'une journée de M. B...le 29 novembre 2013 ; que, si cette absence non autorisée constitue une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire, elle n'avait pas une gravité suffisante pour justifier l'application d'une sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions pour une durée de deux mois ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M.B..., que la commune de Tumaraa n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du maire de cette commune du 6 janvier 2014 ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Tumaraa demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Tumaraa une somme de 1 500 euros à verser à M.B... sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Tumaraa est rejetée.

Article 2 : La commune de Tumaraa versera à M. B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tumaraa et à M. A...B....

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNI

Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA03296


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03296
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : GAULTIER-FEUILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-15;15pa03296 ?
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