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30/11/2016 | FRANCE | N°15PA02103

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 30 novembre 2016, 15PA02103


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain (ADMP) a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 août 2014 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a refusé de lui reconnaître le droit d'émettre des reçus fiscaux destinés à permettre à ses membres de bénéficier de la réduction d'impôt sur le revenu prévue au b) de l'article 200-1 du code général des impôts.

Par un

jugement n° 1421638/1-1 du 25 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain (ADMP) a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 août 2014 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a refusé de lui reconnaître le droit d'émettre des reçus fiscaux destinés à permettre à ses membres de bénéficier de la réduction d'impôt sur le revenu prévue au b) de l'article 200-1 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1421638/1-1 du 25 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 mai 2015 sous le n° 15PA02103 et le 27 mai 2015 sous le n° 15PA02110 ainsi que par un mémoire enregistré le 23 octobre 2015, l'ADMP, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 25 mars 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 4 août 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de

l'article L.761-1 du code de justice administrative

Elle soutient que :

- il convient de tenir compte de la modification des statuts intervenue le 31 juillet 2012 ;

- il convient également de tenir compte de la position prise par la Cour européenne des droits de l'homme dans sa décision du 23 septembre 1998 ;

- les publications de l'AMDP ont un objectif d'intérêt général dans le contexte de la recherche historique ;

- l'administration fiscale ne saurait exercer une censure sur ces publications ;

- elles ne sont pas destinées à un public restreint ;

- la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir et méconnait le principe d'égalité.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par l'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., substituant MeB..., représentant l'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain.

1. Considérant que l'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain (ADMP) fait appel du jugement n° 1421638/1-1 du 25 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 août 2014 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 CB du livre des procédures fiscales, a refusé de lui reconnaître le droit d'émettre des reçus fiscaux destinés à permettre à ses membres de bénéficier de la réduction d'impôt sur le revenu prévue au b) de l'article 200-1 du code général des impôts ;

2. Considérant que les requêtes de l'ADMP, enregistrées sous les numéros 15PA02103 et 15PA02110, sont relatives à un même jugement et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 200 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " 1. Ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % de leur montant les sommes prises dans la limite de 20 % du revenu imposable qui correspondent à des dons et versements, y compris l'abandon exprès de revenus ou produits, effectués par les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B, au profit : [...] / b. D'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, notamment à travers les souscriptions ouvertes pour financer l'achat d'objets ou d'oeuvres d'art destinés à rejoindre les collections d'un musée de France accessibles au public, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises [...] " ; qu'aux termes de l'article 238 bis du même code : " 1. Ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 60 % de leur montant, les versements, pris dans la limite de 5 % du chiffre d'affaires, effectués par les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés au profit : / a. d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises [...] " ;

4. Considérant, en premier lieu, que si, ainsi qu'il ressort des termes de ses statuts, tels que modifiés le 31 juillet 2012, l'ADMP entend " poursuivre, par la recherche et la publication de tous documents, l'étude objective de la vie et de l'oeuvre du Maréchal Pétain (...) (et de) participe(r) ainsi à la recherche et à l'établissement de la vérité sur l'histoire contemporaine dans le souci de contribuer à l'intérêt général de la nation ", ce document indique aussi qu'elle se donne pour but " d'exercer toutes activités en vue de défendre (la) mémoire (du Maréchal) et de remettre en honneur les valeurs intellectuelles, morales et spirituelles qu'il a rappelées " ; que cette association, qui a précisé dans son mémoire introductif devant les premiers juges vouloir présenter " les aspects positifs de l'action politique du Maréchal Pétain ", conserve pour mission fondamentale, telle que précisée dans la Charte de l'ADMP, " la défense de la mémoire de Philippe Pétain, c'est-à-dire promouvoir, à défaut d'obtenir la révision de son procès, reconnue comme légale, mais cependant maintes fois rejetée par les gouvernements successifs, toute action tendant à sa réhabilitation dans l'esprit des Français, en luttant pour le rétablissement de la vérité historique systématiquement déformée et en mettant en lumière les idées, les paroles et les actes du Maréchal à travers le rôle qu'il a véritablement joué dans notre Histoire et poursuivre les actions visant à la translation de la dépouille du Maréchal à Douaumont " ; que, dans ces conditions, la requérante ne saurait être regardée comme un organisme d'intérêt général ayant un caractère éducatif ou culturel ou concourant à la diffusion de la culture et des connaissances scientifiques françaises, éligible comme tel aux dispositifs cités au point 3, alors même que, comme elle le fait valoir, d'une part, elle gère un musée, installé dans la maison natale de Philippe Pétain, au sein duquel est située une bibliothèque contenant les discours et ouvrages écrits par ou sur lui, et, d'autre part, elle a publié, en mai 2014, sous le titre " Pétain, La guerre mondiale 1914-1918 " un manuscrit de notes du Maréchal Pétain, activités accessoires à la mission qu'elle s'est assignée ; que notamment, en l'absence de tout élément permettant de constater que la modification des statuts, à laquelle l'AMDP a procédé le 31 juillet 2012 et consistant à faire référence, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à la participation de cette association " à la recherche et à l'établissement de la vérité sur l'histoire contemporaine dans le souci de contribuer à l'intérêt général de la nation ", aurait modifié significativement ses activités effectives, ladite modification ne saurait suffire à remettre en cause les constatations qui précèdent ; que, par suite, et alors même que l'association requérante ne se bornerait pas à défendre les intérêts de ses membres, et que la Cour européenne des droits de l'homme a, dans sa décision du 23 septembre 1998, jugé qu'en raison notamment de ce qu'une publication de l'AMDP participait " des efforts que tout pays est appelé à fournir pour débattre sereinement de sa propre histoire ", la condamnation pénale à laquelle avait donné lieu ladite publication violait le droit à la liberté d'expression protégé par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'administration a pu à bon droit, par une décision qui n'a, ni pour objet, ni pour effet, d'exercer une censure a priori sur les publications de l'ADMP, refuser de lui reconnaître le droit d'émettre des reçus permettant à ses membres de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'ADMP ne saurait arguer d'une méconnaissance du principe d'égalité devant l'impôt en se référant au sort fiscal différent réservé à des fondations ou associations consacrées à d'autres personnages historiques, dès lors qu'elle ne remplit pas les conditions légales lui ouvrant droit au bénéfice du dispositif demandé ;

6. Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de l'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 30 novembre 2016.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

2

Nos 15PA02103, 15PA02110


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02103
Date de la décision : 30/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SCP JACQUES TREMOLET DE VILLERS, THIERRY SCHMITZ, ET GUILLAUME LE MAIGNAN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-11-30;15pa02103 ?
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