Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société TS Formation a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 30 novembre 2011, et des pénalités y afférentes, ainsi que de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1736 du code général des impôts au titre des années 2009 et 2010.
Par un jugement n° 1407491 du 22 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 novembre 2015, et un mémoire, enregistré le 6 mai 2016, la société TS Formation, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1407491 du 22 septembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 30 novembre 2011, et des pénalités y afférentes, ainsi que de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1736 du code général des impôts au titre des années 2009 et 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le service a considéré que les factures émises par les sociétés SGD Services et RC Trading EU ne correspondaient pas à des prestations effectivement réalisées dès lors que les règlements de ces prestations ont été réalisés au profit de l'émetteur de la facture et non de tiers, que son chiffre d'affaires et son bénéfice ont augmenté entre 2006 et 2011, alors que ses effectifs sont demeurés constants ; l'objet social de la société RC Trading UE n'est pas l'installation d'équipements thermiques et de climatisation, ni le commerce de gros ; tout comme les sociétés TECF et Auris, dont les charges ont été admises par le service, les sociétés SGD Services et RC Trading EU avaient pour objet de contacter les entreprises susceptibles d'avoir des besoins en formation professionnelle et de les mettre en relation avec elle ; il ne peut lui être opposé l'absence de déclaration par la société SGD Services de ses salariés, ni ses manquements à ses obligations déclaratives, dont elle n'est pas responsable et dont il n'est pas justifié par le service ;
- la décharge des intérêts de retard et de la pénalité de 10% doit être prononcée en conséquence de la décharge des suppléments d'impositions contestés ;
- le service ne pouvait lui infliger l'amende au taux de 50% prévu à l'article 1736 du code général des impôts dès lors que les prestataires qui sont intervenus ont effectué des actes de commerce, des prestations entre entreprises, qui n'ont pas à être portés sur la DADS2 ; le Trésor Public n'a subi aucun préjudice dès lors que ces prestataires ont établi des factures et que les règlements ont été comptabilisés dans leurs recettes ; l'administration ne lui a pas demandé de réparer son omission déclarative.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société TS Formation ne sont pas fondés.
Vu le mémoire, enregistré le 10 novembre 2016, présenté par le ministre de l'économie et des finances après la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le livre des procédures fiscales et le code général des impôts ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Coiffet,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
1. Considérant que la société TS Formation, qui exerce une activité de formation continue, a fait l'objet, au cours de l'année 2012, d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2009 et 2010 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 30 novembre 2011, assortis des intérêts de retard correspondants et, en ce qui concerne les suppléments d'impôt sur les sociétés, de la majoration de 10%, prévue au 1 de l'article 1728 du code général des impôts ; qu'il lui a également infligé l'amende au taux de 50% mentionnée à l'article 1736 du même code ; que la société TS Formation fait appel du jugement en date du 22 septembre 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions, pénalités et amende ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) " ; qu'aux termes de l'article 272 de ce code : " (...) 2. La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l'article 283 ne peut faire l'objet d'aucune déduction par celui qui a reçu la facture (...) " ; qu'aux termes de l'article 283 du même code : " (...) 4. Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que, dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;
4. Considérant que le service a remis en cause, sur le fondement des dispositions précitées, le droit à déduction de la société TS Formation de la taxe grevant des factures de prestations de service émises par les sociétés SGD Services et RC Trading EU, que la redevable a présentées comme des " apporteurs d'affaires ", au motif que les sommes facturées ne constituaient pas la contrepartie de services effectivement rendus ; qu'il n'est pas contesté que les sociétés SGD Services et RC Trading EU étaient, durant les périodes d'imposition en litige, régulièrement inscrites au registre du commerce et des sociétés et qu'elles étaient assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée ; que la société TS Formation a remis au service des factures des sociétés SGD Services et RC Trading EU dont la régularité n'est pas critiquée ; qu'il résulte de l'instruction que la société SGD Services, dont l'objet statutaire, qui porte sur l'installation d'équipements thermiques et de climatisation, est sans lien avec l'activité de la société TS Formation, a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 16 juin 2011, après moins de deux ans d'activité ; que son siège était situé à une adresse de domiciliation et qu'elle ne disposait pas des moyens, matériels et humains, nécessaires à la réalisation des prestations facturées ; que la société RC Trading EU, qui a été enregistrée au registre du commerce et des sociétés le 8 mars 2011, a été placée en liquidation judiciaire dès le 25 novembre suivant, et présente ainsi, tout comme la société SGD Services RC, les caractéristiques d'une société éphémère ; que le ministre relève également que la redevable n'a pas été en mesure de produire des éléments susceptibles de justifier de l'existence d'échanges commerciaux avec ces deux sociétés ; que, si la requérante fait valoir que les factures en litige mentionnent des rendez-vous pour le compte de la société TS Formation avec de potentiels clients, que le paiement des prestations a été effectué au profit des sociétés SGD Services et RC Trading EU, et non de tiers, et qu'elle a produit les copies de ces règlements, ces éléments sont insuffisants pour établir que la société TS Formation a effectivement bénéficié des prestations mentionnées sur les factures remises en cause par le service ; que la requérante ne démontre pas, qu'alors qu'elle emploie sept commerciaux pour démarcher les entreprises susceptibles d'avoir des besoins en formation, l'augmentation, entre 2006 et 2011, de son chiffre d'affaires et de son bénéfice résulterait, même pour partie, de l'intervention des sociétés SGD Services et RC Trading EU ; que, dans ces conditions, l'administration établit que la société TS Formation ne pouvait bénéficier d'aucun droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les factures des sociétés SGD Services et RC Trading EU dès lors qu'elles ne correspondaient à aucune opération réelle ;
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable
à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du CGI que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que c'est à bon droit que l'administration a refusé la déduction du résultat de la société TS Formation de l'exercice clos en 2010 des charges correspondant aux dépenses " d'apporteur d'affaires " facturées par la société SGD Services, au motif que ces dépenses n'étaient pas suffisamment justifiées ;
Sur les pénalités et amendes :
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; (...) " ;
8. Considérant que les suppléments d'impôt sur les sociétés contestés ont été majorés de la pénalité de 10 % prévue à l'article 1728 du code général des impôts ; que la société requérante se borne à en solliciter la décharge par voie de conséquence de sa demande portant sur le principal de l'impôt ; que, toutefois, il résulte des points 4 et 6 que sa demande doit être rejetée ; qu'au surplus, il n'est pas contesté que la société n'a pas déposé ses déclarations de résultats dans les délais qui lui étaient impartis ; que, par suite, c'est à bon droit que le service lui a appliqué la pénalité en litige ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1736 du code général des impôts : " I. - 1. Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % des sommes non déclarées le fait de ne pas se conformer aux obligations prévues à l'article 240 et au 1 de l'article 242 ter et à l'article 242 ter B. L'amende n'est pas applicable, en cas de première infraction commise au cours de l'année civile en cours et des trois années précédentes, lorsque les intéressés ont réparé leur omission, soit spontanément, soit à la première demande de l'administration, avant la fin de l'année au cours de laquelle la déclaration devait être souscrite (...) " ; que l'article 240 du même code dispose : " 1. Les personnes physiques qui, à l'occasion de l'exercice de leur profession versent à des tiers des commissions, courtages, ristournes commerciales ou autres, vacations, honoraires occasionnels ou non, gratifications et autres rémunérations, doivent déclarer ces sommes dans les conditions prévues aux articles 87,87 A et 89 (...) 2. Les dispositions des 1 et 1 bis sont applicables à toutes les personnes morales ou organismes, quel que soit leur objet ou leur activité, (...) " ;
10. Considérant que la société TS Formation a versé, dans le cadre de son activité de formation, des rémunérations à des prestataires indépendants ainsi que des honoraires au cabinet AM Conseil, qu'elle n'a pas déclarés dans les conditions prévues par les dispositions précitées du 1 de l'article 240 du code général des impôts ; que ces sommes, qui ont été allouées en contrepartie d'actions de formation assurées pour le compte de la société TS Formation, ne peuvent être regardées, ainsi que le soutient la requérante, comme des actes de commerce, n'entrant pas dans le champ de l'obligation de déclaration, mais revêtent le caractère d'honoraires au sens et pour l'application des dispositions de l'article 240 ; qu'il résulte de l'instruction que la société n'a pas régularisé sa situation dans le délai fixé par les dispositions précitées ; que, si elle reproche au service de ne pas l'avoir invitée à effectuer la déclaration qui lui incombait, la privant ainsi de la possibilité de ne pas encourir l'amende en litige, ni les dispositions précitées, ni aucune autre disposition du code général des impôts ou du livre des procédures fiscales n'imposent à l'administration de mettre le contribuable à même de réparer son omission déclarative en cas de première infraction ; qu'est, par ailleurs, sans incidence sur le bien-fondé de l'amende fiscale mise à la charge de la société TS Formation, la circonstance que les prestataires ont comptabilisé les sommes versées dans leurs recettes ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du I de l'article 1736 du code général des impôts doit être écarté ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société TS Formation n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société TS Formation est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société TS Formation et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Ile-de-France (Division du contentieux Ouest).
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Coiffet, président assesseur,
- M. Platillero, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 24 novembre 2016.
Le rapporteur,
V. COIFFETLe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 15PA04176