Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et MmeH..., agissant en leur nom et en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineursD..., E..., ainsi que leurs enfants majeurs Antoine et Nicolas ont demandé au Tribunal administratif de Paris la condamnation de la ville de Paris à leur verser d'une part, une somme totale de 400 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux de l'inertie de la mairie de Paris à faire cesser les nuisances sonores qu'ils ont subies, entre le 6 septembre 2012 et le 17 juin 2014, du fait de la présence au sein de leur copropriété de la " Lennen Bilingual School " et d'autre part, une somme de 100 euros par jour et par personne composant la famille tant que l'inertie de la mairie de Paris perdurerait après le 17 juin 2014.
Par un jugement n° 1421378/3-3 du 5 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 juin 2015, M. et Mme H...agissant en leur nom et en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineursD..., E..., ainsi que leurs enfants majeurs Antoine et Nicolas, représentés par MeA..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1421378/3-3 du 5 mai 2015 ;
2°) de condamner la ville de Paris à leur verser d'une part, une somme totale de 400 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux de l'inertie de la mairie de Paris à faire cesser les nuisances sonores qu'ils ont subies, entre le 6 septembre 2012 et le 17 juin 2014, du fait de la présence au sein de leur copropriété de la " Lennen Bilingual School " et d'autre part, une somme de 100 euros par jour et par personne composant la famille tant que l'inertie de la mairie de Paris perdurerait après le 17 juin 2014 ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Paris le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que le maire, en s'abstenant de prendre toutes mesures de nature à mettre un terme définitif aux nuisances subies, a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la ville de Paris alors qu'il n'est pas contesté que les bruits relevés aux entrées et sorties de l'école dépassent largement les seuils fixés aux articles R. 1334-31 et suivants du code de la santé publique.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 septembre 2016, la ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et à la condamnation des consorts H...à lui verser 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2016 :
- le rapport de Mme d'Argenlieu, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me Falala, avocat de la ville de Paris.
1. Considérant que M. et Mme H...habitent avec leurs quatre enfants une maison de ville, dite immeuble D, au sein de la copropriété sise 176 rue de Grenelle divisée en cinq immeubles ; que l'immeuble E abrite depuis septembre 2010 les locaux d'une école privée anglo-saxonne, " Lennen Bilingual School " ; que cette école étant source de bruits provenant des allées et venues des parents et enfants aux heures d'entrée et de sortie, les consorts H...ont saisi le maire de Paris de plusieurs demandes tendant à ce que celui-ci mette un terme à ces nuisances de voisinage ; que, par une lettre recommandée du 17 juin 2014, ils ont en dernier lieu sollicité du maire le versement d'une somme de 400 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux de l'inertie de la ville à faire cesser les nuisances sonores qu'ils auraient subies, entre le 6 septembre 2012 et le 17 juin 2014, du fait de la présence au sein de leur copropriété de cette école et d'autre part, une somme de 100 euros par jour et par personne composant la famille tant que l'inertie de la mairie de Paris perdurerait après le 17 juin 2014 ; que, par une lettre du 26 août 2014, le maire de Paris a refusé de faire droit à cette demande ; que les consorts H...font appel du jugement du 5 mai 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la ville de Paris à les indemniser des préjudices résultant de la carence fautive du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police pour faire cesser ces nuisances sonores ;
Sur les conclusions indemnitaires :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment (...) / 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que (...) les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique (...) " ; que l'article L. 2512-13 de ce code dispose que : " (...) dans les conditions définies par le présent code et le code de la santé publique, le maire de Paris est chargé de la police municipale en matière de salubrité sur la voie publique, des bruits de voisinage (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 1334-31 du code de la santé publique : " Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme, dans un lieu public ou privé, qu'une personne en soit elle-même à l'origine ou que ce soit par l'intermédiaire d'une personne, d'une chose dont elle a la garde ou d'un animal placé sous sa responsabilité " ; qu'aux termes de l'article R. 1334-32 du même code : " Lorsque le bruit mentionné à l'article R. 1334-31 a pour origine une activité professionnelle autre que l'une de celles mentionnées à l'article R. 1334-36 ou une activité sportive, culturelle ou de loisir, organisée de façon habituelle ou soumise à autorisation, et dont les conditions d'exercice relatives au bruit n'ont pas été fixées par les autorités compétentes, l'atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme est caractérisée si l'émergence globale de ce bruit perçu par autrui, telle que définie à l'article R. 1334-33, est supérieure aux valeurs limites fixées au même article (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 1334-33 du code précité : " L'émergence globale dans un lieu donné est définie par la différence entre le niveau de bruit ambiant, comportant le bruit particulier en cause, et le niveau du bruit résiduel constitué par l'ensemble des bruits habituels, extérieurs et intérieurs, correspondant à l'occupation normale des locaux et au fonctionnement habituel des équipements, en l'absence du bruit particulier en cause. / Les valeurs limites de l'émergence sont de 5 décibels A en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB (A) en période nocturne (de 22 heures à 7 heures), valeurs auxquelles s'ajoute un terme correctif en dB (A), fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier : (...) 4° Trois pour une durée supérieure à 20 minutes et inférieure ou égale à 2 heures " ;
3. Considérant qu'il appartient au maire, en vertu des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales et du code de la santé publique, de prendre les mesures appropriées pour empêcher ou faire cesser, sur le territoire de sa commune, les bruits excessifs de nature à troubler le repos des habitants ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas des différents relevés acoustiques produits aux débats, que les nuisances sonores auxquelles sont exposés les consortsH..., lesquelles sont limitées dans le temps, du lundi au vendredi, à deux périodes d'environ 30 minutes, correspondant le matin à l'arrivée des élèves et le soir à leur sortie, porteraient une atteinte excessive par leur fréquence, leur durée ou leur intensité, à la tranquillité publique, alors même que l'émergence sonore en résultant excède ponctuellement les limites définies par les dispositions précitées de l'article R. 1334-33 du code de la santé publique ; qu'ainsi, le maire de Paris qui, de surcroit, après avoir adressé à la SCI propriétaire des locaux abritant l'école et à l'école elle-même des mises en demeure de faire cesser les troubles, a fait dresser, les 18 octobre 2013 et 20 janvier 2014 deux procès verbaux d'infraction transmis au parquet et qui ont abouti, le 23 septembre 2014, à une décision de classement sans suite pour " infraction insuffisamment caractérisée ", n'a pas fait preuve d'une carence fautive dans l'exercice de ses pouvoirs de police générale de nature à engager la responsabilité de la ville de Paris ; que, par suite, les consortsH..., dont au demeurant il ne résulte pas de l'instruction qu'ils se seraient portés partie civile dans le cadre de l'action pénale, ni même qu'ils auraient saisi les tribunaux judiciaires d'une action en trouble anormal de voisinage à l'égard de la " Lennen Bilingual School ", ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la ville de Paris qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les consorts H...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge des consorts H...une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la ville de Paris et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête des époux H...agissant en leur nom et en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineursD..., E..., ainsi que de leurs enfants majeurs Antoine et Nicolas, est rejetée.
Article 2 : Les consorts H...verseront une somme de 1 500 euros à la ville de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... H..., Mme G... I...-H..., M. C... H..., M. F...H...et à la ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 20 septembre 2016 à laquelle siégeaient :
- Mme Hamon, président,
- M. Dellevedove, premier conseiller,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 octobre 2016.
Le rapporteur,
L. d'ARGENLIEULe président assesseur,
En application de l'article R. 222-26 du code
de justice administrative,
P. HAMON
Le greffier,
S. GASPARLa République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA02480