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30/09/2016 | FRANCE | N°15PA00478

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 30 septembre 2016, 15PA00478


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...E...a demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler la décision du 29 avril 2013 par laquelle le président du Conseil général du

Val-de-Marne lui a retiré son agrément d'assistante maternelle, d'autre part, d'enjoindre au président du Conseil général de lui restituer son agrément dans un délai qui ne saurait excéder 8 jours et le renouveler si nécessaire pour une durée de cinq ans, enfin, de condamner ledit conseil à lui verser la somme de 10 000 euros en réparat

ion de son préjudice moral ainsi qu'une indemnisation de 1 150 euros par mois, du 29 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...E...a demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler la décision du 29 avril 2013 par laquelle le président du Conseil général du

Val-de-Marne lui a retiré son agrément d'assistante maternelle, d'autre part, d'enjoindre au président du Conseil général de lui restituer son agrément dans un délai qui ne saurait excéder 8 jours et le renouveler si nécessaire pour une durée de cinq ans, enfin, de condamner ledit conseil à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ainsi qu'une indemnisation de 1 150 euros par mois, du 29 avril 2013 à la date du jugement à intervenir, augmentée des intérêts au taux légal à compter de cette date en réparation du préjudice financier.

Par un jugement n° 1304790/9 du 12 novembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 février 2015, Mme G...E..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304790/9 du 12 novembre 2014 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision du 29 avril 2013 par laquelle le Président du Conseil départemental du Val-de-Marne lui a retiré son agrément d'assistante maternelle ;

3°) d'enjoindre au président du Conseil départemental du Val-de-Marne de lui restituer son agrément dans un délai qui ne saurait excéder 8 jours et le renouveler si nécessaire pour une durée de cinq ans ;

4°) de condamner le Conseil départemental du Val-de-Marne à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ainsi qu'une indemnisation de 1 150 euros par mois, du 29 avril 2013 à la date de l'arrêt à intervenir, augmentée des intérêts au taux légal à compter de cette date, en réparation du préjudice financier ;

5°) de mettre à la charge du Conseil départemental du Val-de-Marne les entiers dépens de l'instance, lesquels seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- la compétence de l'auteur de la décision litigieuse n'est pas établie faute de preuve de la publication de la délégation de signature ;

- les premiers juges n'ont pas justifié du respect par cette décision de la motivation exigée par l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles ;

- la décision litigieuse ne précise pas en quoi Mme E...ne remplirait plus les critères d'obtention de l'agrément d'assistante maternelle tels qu'énoncés aux articles R. 421-3 et R. 421-5 du code de l'action sociale et des familles et se trouve donc privée de base légale ;

- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que Mme E... conteste vivement les faits reprochés et produit les attestations de parents d'enfants qui lui sont confiés qui témoignent de son professionnalisme ;

- les faits qui lui sont reprochés ne reposent que sur le seul témoignage de Mme C... ;

- la décision litigieuse emporte des conséquences d'une particulière gravité sur la situation personnelle et économique de Mme E..., justifiant l'indemnisation de son préjudice moral et de réputation, à hauteur de 10 000 euros, et de son préjudice financier par une indemnisation de 1 150 euros par mois à compter de la date de la suspension de son agrément.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2016, et des pièces complémentaires enregistrées le 10 août 2016, le département du Val-de-Marne conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme E...le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme E...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2014/056768 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 8 janvier 2015.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Julliard,

- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,

- et les observations orales de MeD..., pour Mme E...et de Me B..., pour le Conseil départemental du Val-de-Marne.

1. Considérant que Mme E...relève appel du jugement du 12 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à annuler la décision du 29 avril 2013 par laquelle le président du Conseil général du Val-de-Marne lui a retiré son agrément d'assistante maternelle, d'autre part, à enjoindre au président du Conseil de lui restituer son agrément dans un délai qui ne saurait excéder 8 jours et le renouveler si nécessaire pour une durée de cinq ans, enfin, à condamner ledit Conseil à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ainsi qu'une indemnisation de 1 150 euros par mois, du 29 avril 2013 à la date du jugement à intervenir, augmentée des intérêts au taux légal à compter de cette date en réparation du préjudice financier ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que la décision litigieuse du 29 avril 2013 a été signée par le Docteur Lehericey, directrice adjointe de la protection maternelle et infantile et de la petite enfance, qui a reçu délégation de signature du président du Conseil général du Val-de-Marne, par arrêté n° 2012-283 du 9 juillet 2012 régulièrement publié au Recueil des actes administratifs du département du Val-de-Marne du 20 juillet 2012 ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte de l'acte manque en fait ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. (...). L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. " et qu'aux termes de son article L. 421-6 : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil général peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. En cas d'urgence, le président du conseil départemental peut suspendre l'agrément. Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié. / Toute décision de retrait de l'agrément, de suspension de l'agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-23 du même code : " Lorsque le président du conseil départemental envisage de retirer un agrément, d'y apporter une restriction ou de ne pas le renouveler, il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale mentionnée à l'article R. 421-27 en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. L'assistant maternel ou l'assistant familial concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. La liste des représentants élus des assistants maternels et des assistants familiaux à la commission lui est communiquée dans les mêmes délais. L'intéressé peut se faire assister ou représenter par une personne de son choix. Les représentants élus des assistants maternels et des assistants familiaux à la commission sont informés, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, des dossiers qui y seront examinés et des coordonnées complètes des assistants maternels et des assistants familiaux dont le président du conseil départemental envisage de retirer, restreindre ou ne pas renouveler l'agrément. Sauf opposition de ces personnes, ils ont accès à leur dossier administratif. La commission délibère hors la présence de l'intéressé et de la personne qui l'assiste. " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 421-26 dudit code : " Un manquement grave ou des manquements répétés aux obligations de déclaration et de notification prévues aux articles R. 421-38, R. 421-39, R. 421-40 et R. 421-41 ainsi que des dépassements du nombre d'enfants mentionnés dans l'agrément et ne répondant pas aux conditions prévues par l'article R. 421-17 peuvent justifier, après avertissement, un retrait d'agrément " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du Conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies ; qu'à cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements de nature à compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, de la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux, et de déterminer s'ils sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause, ou risque de l'être ;

5. Considérant que la décision litigieuse du 29 avril 2013 vise les articles L. 421-6 et R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles et indique que le retrait de l'agrément de Mme E... est justifié par " des conditions d'accueil qui ne garantissent pas la sécurité des enfants accueillis : hygiène, produits ménagers et objets susceptibles d'être dangereux à la portée des enfants, encombrement de votre logement, malgré les visites de la puéricultrice de PMI proposant de l'aide à mieux organiser votre espace " et " le non-respect des besoins de chaque enfant : parc devant la télévision, sortie des enfants dans des lieux appropriés ", ainsi que par le fait qu' " une mesure de protection de l'enfance est en cours pour une de vos filles en lien avec votre état de santé et vos difficultés familiales actuelles qui ne permettent pas l'accueil d'enfants en toute sérénité " ; qu'ainsi la décision contestée est justifiée tant en droit qu'en fait et ne comporte, contrairement à ce que soutient l'appelante, aucune formule stéréotypée, mais l'énoncé circonstancié et précis des faits qui lui sont reprochés ; que, par suite, cette décision ne méconnaît pas l'obligation de motivation énoncée à l'article L. 421-6 précité du code de l'action sociale et des familles ;

6. Considérant, d'une part, que la décision litigieuse, trouve son fondement légal dans les dispositions de l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles qui prévoient la possibilité du retrait de l'agrément si les conditions de sa délivrance cessent d'être remplies, lesquelles impliquent des conditions d'accueil garantissant la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis au foyer de l'assistante maternelle, selon les termes de l'article L. 421-3 du même code ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que cette décision a été prise conformément à l'avis unanime de la commission consultative paritaire départementale, au vu des éléments recueillis par les services de la PMI lors des trois dernières visites au domicile de Mme E...mettant en évidence des manquements aux règles de sécurité et d'hygiène, tels que la présence de produits ménagers et objets dangereux accessibles aux enfants, la présence de bouteilles de vin dont une non bouchée au sol, la présence de matelas supplémentaire, oreiller, couverture ou dessus de lit d'adulte dans les lits parapluie, ainsi que des manquements aux besoins d'épanouissement des enfants exposés à la télévision constamment allumée et sortis à l'occasion de déplacements personnels de Mme E...inappropriés à des promenades ; que nonobstant la production par l'intéressée d'attestations de parents, dont l'une est établie par sa propre fille, les faits qu'elle ne conteste pas sérieusement et qui ont été précédés d'avertissements en 2009 et 2011 pour des manquements similaires aux règles d'hygiène et de sécurité, sont suffisamment graves pour justifier la mesure de retrait de l'agrément ; que, par suite, Mme E...n'est pas fondée à soutenir que le président du Conseil départemental du Val-de-Marne aurait commis une erreur d'appréciation en lui prenant la décision contestée ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 avril 2013 par laquelle le Président du Conseil départemental du Val-de-Marne lui a retiré son agrément d'assistante maternelle ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction de restitution de cet agrément et d'indemnisation des préjudices résultant de ce retrait ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que celles tendant au remboursement des dépens de l'instance ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du Département du Val-de-Marne présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du Département du Val-de-Marne présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... E...et au Département du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 30 septembre 2016.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

M. F...

La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 15PA00478


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00478
Date de la décision : 30/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : COHN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-09-30;15pa00478 ?
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