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29/09/2016 | FRANCE | N°15PA00196

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 29 septembre 2016, 15PA00196


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 11 juillet 2013 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de l'autoriser à changer de nom en substituant à son nom celui de " E... ", ensemble la décision du 10 décembre 2013 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1402201 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés

les 15 janvier 2015 et 8 septembre 2016, M. B..., représenté par Me Soulier Dugenie, demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 11 juillet 2013 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de l'autoriser à changer de nom en substituant à son nom celui de " E... ", ensemble la décision du 10 décembre 2013 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1402201 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 janvier 2015 et 8 septembre 2016, M. B..., représenté par Me Soulier Dugenie, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402201 du 13 novembre 2014 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions des 11 juillet et 10 décembre 2013 ;

3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de procéder au changement de nom demandé dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte alors même que le garde des sceaux n'avait pas produit de mémoire en défense ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée ;

- il justifie l'usage constant et ininterrompu du nom de sa mère depuis les années 1970 ;

- l'administration n'a pas tenu compte de la circonstance que plusieurs documents administratifs lui ont été délivrés au nom de E...;

- il justifie d'un motif affectif car ses enfants âgés de 18 et 21 ans se sont construits sous le nom deE....

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 94-52 du 20 janvier 1994 relatif à la procédure de changement de nom ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Amat,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- et les observations de Me Soulier Dugenie, avocat de M.B....

1. Considérant que M.B..., né le 13 avril 1949, a sollicité du garde des sceaux ministre de la justice l'autorisation de changer de nom et de substituer à son nom patronymique celui de sa mère, " E... " ; que par décision du 11 juillet 2013, confirmée 10 décembre 2013, le garde des sceaux a refusé de faire droit à cette demande ; que M. B...relève appel du jugement du 13 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que contrairement à ce que soutient M.B..., il entrait dans l'office des premiers juges, en dépit de l'absence d'observations en défense du garde des sceaux, d'examiner au regard des dispositions du décret susvisé du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement et des décisions de nomination régulièrement publiées au Journal officiel de la République française le bien-fondé du moyen, qu'il avait soulevé en première instance, tiré de l'incompétence du signataire des décisions litigieuses ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. Considérant que, par arrêté du 12 août 2009, publié au Journal officiel de la République française du 14 août 2009, M. D...A...a été nommé sous-directeur du droit civil à la direction des affaires civiles et du sceau ; qu'il a été renouvelé dans cet emploi par arrêté du 30 juillet 2012 publié au Journal officiel de la République française le 1er août 2012 ; qu'il occupait encore ce poste à la date des décisions en litige ; qu'ainsi et en vertu des dispositions de l'article 1er du décret susvisé du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement, qui dispose notamment que les sous-directeurs peuvent signer, au nom du ministre et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité, M. A...avait compétence pour signer, au nom du garde des sceaux, ministre de la justice, la décision contestée du 11 juillet 2013 portant refus de changement de nom et la décision du 10 décembre 2013 rejetant le recours gracieux ;

En ce qui concerne la légalité interne :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. Le changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré. Le changement de nom est autorisé par décret " ;

5. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient qu'il utilise le nom " E... " depuis les années 1970 ; qu'il produit notamment, des factures, des attestations, une fiche familiale d'état civil établie en 1995, des correspondances isolées de 1997 et 1998 se rapportant au demeurant au même objet, un passeport qui lui a été délivré au nom de " E... " en 2002, des passeports délivrés en 2008 à ses enfants Sacha et Gary, nés respectivement en septembre 1992 et décembre 1995, un extrait d'acte de naissance délivré le 23 juin 2003 concernant son fils Sacha, un certificat relatif à la scolarité de son fils Sacha établi le 24 juin 2013, la carte nationale d'identité et un certificat de scolarité de son fils Gary daté du 30 septembre 2015, une carte électorale avec laquelle il a pu voter en 2012 ; que ces documents, compte tenu de leurs dates et de leur caractère épars ne sont pas de nature à établir qu'il utiliserait de manière continue et ininterrompue le nom " E... " depuis les années 1970 et à justifier d'un intérêt légitime à changer de nom au sens des dispositions de l'article 61 du code civil ; qu'en outre, la circonstance que l'administration ait émis, sans d'ailleurs que le requérant n'explique les conditions dans lesquelles il a obtenu ces documents, une fiche familiale d'état civil et un passeport au nom de " E... " alors que l'intéressé était âgé respectivement de 46 ans et 53 ans ne saurait être regardée comme l'ayant conforté dans l'usage du nom de sa mère ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par l'article 61 du code civil pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi ;

7. Considérant que M. B...fait valoir que ses deux enfants nés en 1992 et 1995 portent le nom " E... " et qu'il souhaite porter le nom de sa mère pour des motifs personnels liés à la séparation de ses parents ; que, toutefois, le requérant indique lui-même qu'il n'a fait usage du nom de jeune fille de sa mère qu'après l'âge de vingt ans ; que, par ailleurs, la seule production du passeport de ses enfants, de l'extrait d'acte de naissance et du certificat de scolarité de son fils Sacha, de la carte nationale d'identité de son fils Gary ne permet pas d'établir que ceux-ci se seraient construits en portant le nom " E... " et qu'ainsi le changement de nom sollicité serait nécessaire au maintien de l'unité familiale alors que le requérant n'a sollicité le changement de nom en 2012 qu'à l'âge de 63 ans, ses fils étant âgés de 18 et 21 ans à la date de la décision attaquée ; que, par suite, ces circonstances ne peuvent constituer en l'espèce des circonstances exceptionnelles permettant de reconnaître un intérêt légitime au changement de son nom au sens des dispositions de l'article 61 du code civil ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées

DÉCIDE

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2016.

Le rapporteur,

N. AMATLa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00196


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00196
Date de la décision : 29/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-01-03 Droits civils et individuels. État des personnes. Changement de nom patronymique.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : SOULIER DUGENIE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-09-29;15pa00196 ?
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